Aoife [fiche validée]

NOM&PRÉNOM ▬ Aoife SURNOM ▬ Point de surnom officiel pour la demoiselle, bien qu'elle se soit déjà entendue qualifier de tout un tas de quolibets peu flatteurs en rapport avec son statut de fille illégitime. Ca fini en général en échange d'insultes toutes très imaginatives. ÂGE ▬ 30 ans PATRIE, RACE ▬ Humaine, originaire du Gondor LIEU DE NAISSANCE ▬ Pelargir RANG SOCIAL ▬ Aisé, grâce à la culpabilité de son père qu'elle exploite sans le moindre remord. Elle a grandi dans un milieu très populaire mais son travail lui a permis de s'offrir une vie plus confortable sans tomber dans l'excès. PROFESSION ▬ Elle conduit les caravanes marchandes de son père, spécialisé principalement dans le commerce d'étoffes SITUATION AMOUREUSE ▬ Célibataire. Si sa mère espère secrètement qu'elle finira par se trouver quelqu'un, la jeune femme n'est pas encore tombé sur celui qui sera suffisamment patient ou assez fou pour supporter son tempérament changeant. Les bonnes mœurs voudraient que se soit déjà le cas mais elle a bien d'autres préoccupations.

VOTRE PHYSIONOMIE ▬ Sa mère lui disait autrefois qu'elle lui ressemblait tellement que ça en paraissait incroyable. Aoife s'est toujours demandé si elle lui devait ses traits pâles et son visage tout en rondeurs. Si ses vêtements de voyage cachent plutôt bien une silhouette qui a toujours été très féminine, elle sait depuis longtemps qu'elle ne sera jamais particulièrement svelte, ni ne regardera le monde de haut. Une silhouette passe-partout  qu'elle utilise à son avantage lorsqu'il s'agit de se fondre dans la foule. Personne n'aura remarqué la jeune femme se faufilant entre les passants, cachée derrière des boucles désordonnées et jetant des regard furtifs de ses yeux bruns. Lorsque vous vous rendez compte de sa présence il est déjà trop tard, elle a disparu. Sa taille commune est un avantage face à des assaillants qui sont souvent bien plus grands qu'elle, elle donc a appris à développer une  agilité et une rapidité destinées à compenser son petit gabarit. Même si elle aimerait que se soit différent, elle sait très bien que le regard des hommes à tendance à dériver plus au sud lorsqu'ils conversent avec elle mais la jeune femme rechigne à se servir de ça à son avantage, considérant qu'elle n'a pas besoin de ces stratagèmes vieux comme le monde pour s'en sortir. Elle est de toute façon bien souvent trop couverte pour cela, fuyant la morsure cruelle d'un soleil qui ne fera jamais de cadeau à son teint désespérément trop clair. Ce petite désagrément s'est atténué avec les années au grand air mais l'astre du jour n'en couvre pas moins sa peau de dizaines de tâches de rousseurs à l'approche de l'été.
VOTRE STYLE VESTIMENTAIRE ▬ Tout ce qui lui permet de voyager confortablement.  Aoife a donc dû laisser les robes au placard pour porter des pantalons. Petit caméléon, si elle a toujours eut une préférence pour les couleurs claires, elle s'en remet à présent à son sens pratique, ne crachant cependant pas sur l'usage du corset et des décolletés lorsqu'elle se met martel en tête. Orgueil oblige, sur les routes comme à la ville, elle s'astreint à toujours avoir l'air impeccable. Mais la petite fille qu'elle a été n'est jamais bien loin et lorsque ses pas la reconduisent à la ville de son enfance, la brune cède parfois à l'appel des belles tenues aux voilages délicats. Mais chut, tout ça c'est pour la parade et rien d'autre. Et si elle chipe de temps en temps un carré d'étoffe tombé du convoi pour égayer sa tenue, qu'est ce que ça peut bien vous faire?
VOS PARTICULARITÉS ▬ Rien de particulier à ce sujet, si ce n'est la collection habituelle de cicatrices et d'égratignures héritées d'une enfance turbulente. Une ancienne fracture au poignet lui occasionne de temps en temps quelques douleurs, par chance il ne s'agit pas de sa main dominante.
VOTRE CARACTÈRE ▬ Tout feu tout flamme, Aoife est affublée d'un caractère aussi flamboyant que l'élément en question. La brune a très tôt fait preuve d'un tempérament indépendant et débrouillard. Organisée et méthodique, il n'y a pas de place pour l'improvisation dans son travail et elle fera toujours passer sa mission avant le reste. L'oeil aiguisé et l'esprit vif, elle cultive l'art de se sortir in extremis des situations les plus improbables. Situations souvent causées par une langue trop bien pendue et des proportions à la raillerie plus qu'imprudentes. On aurait pu croire que les années assagiraient la jeune femme mais il n'en ai rien et même si elle s'est calmée avec le temps, Aoife n'en reste pas moins une tête brûlée qui prend trop de risques.
Têtue jusqu'à en devenir bornée, il peut s'avérer souvent usant d'être en désaccord avec elle, tant elle a du mal à reconnaître ses erreurs. Orgueilleuse, la brune a horreur d'admettre ses faiblesses et se réfugiera bien souvent derrière un silence farouche pour protéger sa fierté égratignée. Loin d'être de l'arrogance, cet orgueil est né d'un profond désir de faire ses preuves. Aoife cherche désespérément la reconnaissance de ses paires et se montre particulièrement exigeante, en premier lieu envers elle même.
Une carapace destinée à se protéger mais la petite fille rêveuse qui se promenait sur le port de Pelargir en rêvant d'aventure et d'ailleurs n'est jamais bien loin. Même si elle tente de se convaincre du contraire, il y aura toujours en elle quelque chose de l'enfant qu'elle a été. Aoife n'est pas une princesse mais dans un coin de sa tête, elle aspire à quelque chose de mieux sans pour autant oser faire ce qu'il faut pour l'obtenir. Manque de confiance en elle ou pessimisme ? C'est difficile à dire.
Affreusement réservée, elle n'aime pas beaucoup parler d'elle et cache ce qui la dérange sous ce tempérament volatile et explosif. Une façon d'empêcher qu'on ne s'intéresse de trop prêt à ses faiblesses. Aoife rêve en secret mais elle fait semblant de ne pas s'en rendre compte. Peu adepte des grandes démonstrations d'affection ni des longs discours contemplatifs, elle n'en est pas moins loyale et dévouée envers les siens. Une loyauté qu'elle exprime par les actes et non par la parole.
Elle reste néanmoins une compagne de voyage amusante lorsqu'elle y met du sien et chevaucher avec elle peut se révéler une aventure stimulante. Mieux vaut cependant la retenir de chercher les ennuis au premier venu si vous tenez à votre tranquillité, la forte tête n'est jamais très loin.
CE QUE VOUS AIMEZ ▬ Elle aime voir le jour se lever par delà les collines et se sentir privilégiée de pouvoir le contempler après une longue chevauchée à travers le Gondor. Lorsqu'elle était plus jeune, Aoife adorait se faufiler sur le port et épier les navires marchands qui accostaient. Les yeux pleins d'étoiles, elle observait ces étrangers venus de si loin, tentant de déchiffrer leurs accents. Elle espère qu'un jour elle pourra également prendre la mer. Pour voir ce que ça fait. Éprise d'ailleurs et de lointain, la brune a une passion pour ces vieilles histoires ressorties du fond des âges. Son éducation ne lui a pas permis de devenir une grande lectrice mais elle a appris la plupart des récits qu'elle connaît grâce aux conteurs qui auront bien voulu la divertir lorsqu'elle était enfant.
VOUS AIMEZ FAIRE LA FÊTE, BOIRE, MANGER ▬ Aoife apprécie les soirées de veilles passées au coin du feu avec les hommes de sa troupe. Elle ne se sentira jamais à l'aise au sein de la bonne société du Gondor mais partager un repas au son de la musique et des rires avec ses compagnons de voyage, c'est quelque chose qui lui réchauffe le cœur.
AVEZ VOUS DES PASSIONS DANS LA VIE ▬ Découvrir le monde, son passé, écouter des vieilles histoires. Aoife a une passion pour l'ailleurs et les contes. On en fera jamais une grande voix mais il lui arrive de se joindre aux chants partagés par sa troupe, le soir au coin du feu. Elle n'a pas reçu d'éducation suffisante pour comprendre toutes les chansons de son répertoire mais elle est avide d'apprendre.
AVEZ-VOUS UN BUT DANS LA VIE ▬ Être reconnue par son père. Elle le niera jusqu'au bout mais la brune espère encore secrètement qu'il la reconnaîtra comme sa fille légitime.
CE QUE VOUS DÉTESTEZ ▬ La bonne société et la noblesse Gondorienne. Aoife ne s'est jamais sentie à l'aise parmi ces gens là et leurs messes basses lui hérisse le poil. Réservée lorsqu'il s'agit de sujets personnels, elle a horreur de devoir se livrer. Au-delà de ça la jeune femme est une mauvaise nageuse et elle n'aime pas beaucoup ça. A sa grande honte, elle en sait juste assez pour ne pas se noyer mais pas suffisamment pour être parfaitement à l'aise. Aoife n'est pas vraiment délicate et se révèle assez mauvaise dans les travaux de précision. Sa pauvre mère aura bien tenté de lui enseigner l'art du tissage dans son enfance mais ce fut peine perdue.
PROFITEUR OU DÉBROUILLARD ▬ Elle aurait tendance à vous dire que savoir identifier de qui on peut tirer profit est un signe de débrouillardise. Des années passées sur les routes à mener les caravanes de son père ont appris à Aoife à se sortir seule des situations hasardeuses. Indépendante et solitaire, elle aura toujours tendance à vouloir se débrouiller par elle-même ou tout du moins en faisant appel à ses proches. Bien qu'elle ne reculera pas devant un petit mensonge ou deux s'il s'agit de sauver sa peau.
SUR QUI POUVEZ VOUS COMPTER EN CAS DE PROBLÈME ▬ Les hommes de sa troupe, éclaireurs, gardes. Valen, son second qu'elle ne voyait à l'époque que comme un espion envoyé par son père pour surveiller ses faits et gestes. Le temps aidant, ils ont appris à se connaître et ont toute confiance l'un dans l'autre.
COMMENT RÉAGISSEZ-VOUS FACE AU DANGER ▬ Chacun pour soi bien évidemment! Aoife n'est pas particulièrement adepte des notions d'honneur et de courage. Elle a appris à survivre à n'importe quel prix et ne reculera pas devant une bassesse ou deux pour sauver sa peau et ceux qu'elle considère comme les siens. L'héroïsme et les belles envolées lyriques c'est bon pour  ceux qui n'ont pas le couteau sous la gorge.
UN SECRET QUE VOUS GARDEZ ▬ Point de squelette enterré au fond du jardin ni de faute inavouable. Des secrets Aoife en a des tas mais c'est surtout dû à sa nature particulièrement réservée. Au fond les secrets de la jeune femme ne sont jamais que des vérités qu'elle refuse de reconnaître.
QU'EST-CE QUI VOUS FAIT HONTE ▬ Elle aura beau s'en défendre et dire qu'il n'en est rien, elle n'est au fond qu'une petite fille qui cherche encore l'approbation de son père. Ce fantôme démissionnaire qui avait trop honte d'elle pour la reconnaître officiellement, elle a juré cent fois qu'elle le rayerait de sa vie et pourtant, des années plus tard, elle est encore là. Officiellement elle vous répondra vertement qu'elle compte lui soutirer la moindre pièce d'argent pour lui faire payer sa lâcheté. Officieusement c'est une autre histoire.
QUEL TYPE D'ARME AVEZ-VOUS ▬ Aoife est loin d'être une guerrière chevronnée mais son manque d'expérience dans les arts de la guerre elle le compense par un entraînement acharné et une agilité certaine. Sans être une armurerie ambulante, elle garde sur elle un sabre, son arme fétiche qui la suit depuis l'adolescence, l'un des rares présents de son père. Si vous cherchez bien vous pourrez dénicher une ou deux lames supplémentaires sur elle.
QUELLE EST VOTRE PEUR ▬ Etre rejetée. Elle a passé tellement de temps à vouloir se faire accepter par la figure paternelle que la jeune femme en a développé un rejet instinctif de l'abandon maquillé sous une assurance de façade et des attitudes bravaches. Mais parfois les fissures restent encore trop apparentes.

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VOUS ET LA TERRE DU MILIEU ▬ Aoife a la terrible impression de ne pas reconnaître le monde dans lequel elle vit. Elle garde de vieux souvenirs d'adolescence, de soirées passées à la belle étoile, allongée dans l'herbe à observer la course du ciel au dessus de sa tête. Ses soirées à présent, elle les passe au coin du feu, le regard inquisiteur et la main crispée sur la garde de son sabre. On raconte des choses. Une ombre a étendu ses griffes sur la Terre du milieu et maintenant que tout le monde s'en aperçoit, il est bien trop tard. Que peut-elle face à ça? Elle espère, retrouver ses souvenirs d'enfance, elle souhaite tous les jours que l'ombre finisse par reculer. Mais combien de fois a-t-elle entendu les rumeurs de voyageurs attaqués et laissés pour mort? Combien de pillages? Alors Aoife monte la garde. Du fond de ses nuits d'insomnie, elle veille. Le moindre chuintement du vent dans l'herbe, la moindre ombre furtive dans la nuit, le moindre murmure, tout est prétexte à une menace silencieuse prête à se jeter sur elle à la moindre erreur.

Elle savait que les temps n'étaient pas sûrs, elle avait entendu les rumeurs venues du nord. Mais elle s'était bercée d'illusions pour ne pas voir que les jours sombres approchaient. Pelargir à feu et à sang. La ville de son enfance pillée, ses souvenirs envolés. Elle ne s'est pas posé de question. En route pour l'ouest, Aoife avait fait demi tour sur le champ. Tout son passé partait en cendres. Et sa mère était restée là bas.  Aoife se rappelle la longue chevauchée, avancer, encore et toujours, ne pas penser, ne pas réfléchir, pousser toujours plus vite, toujours plus loin. Pourquoi au juste? Contempler sa ville en plein chaos et ses habitants en fuite? Elle a échoué et la vision de Pelargir saccagée ne s'efface toujours pas. Ces jours de ténèbres sont autant de souvenir gravés dans sa mémoire et si elle s'en est sortie indemne, elle a l'impression qu'une part d'elle-même est partie en fumée en même temps que les décors de son enfance. C'est un peu comme si la Terre du milieu s'enfonçait toujours plus dans l'ombre et eux avec.

« Tu devrais aller te reposer »
« Plus tard, je prends le premier quart. »

Elle n'avait même pas levé le regard de sa carte, ses doigts effleurant le parchemin comme s'ils devaient machinalement lui montrer la route à suivre. A cette heure avancée de la soirée, seules les ombres s'entrelaçaient, dessinant des formes étranges qui brouillaient la vue. On ne distinguait plus grand chose à la lueur fragile du feu de camp et Aoife replia la carte sans plus un regard pour elle. Ces vastes plaines elle les avait parcourues tant de fois qu'elle aurait pu se guider de mémoire mais subsistait toujours comme une petite appréhension qui n'avait fait que grandir ces derniers temps. Le besoin de se rassurer, de vérifier qu'elle avait véritablement choisi la meilleure route, le chemin le plus sûr. Juste au cas où, pour se persuader qu'elle parviendrait à amener la caravane à bon port et sans dommages. Le convoi sombrait doucement dans le calme du sommeil et la silhouette imposante des tentes et des chariots se découpait sur le ciel d'encre. Le camp était presque déserté, exception faite des quelques courageux qui monteraient la garde ce soir. Pour la sécurité de leurs compagnons, ils allaient veiller.

Valen lui dédia un regard inquisiteur, clairement pas convaincu par sa fausse assurance. Mais Aoife dédaigna la suspicion de son second, se redressant dans une attitude de défi. L'homme baissa le regard. Après des années sur les routes il en avait vu d'autres et la brune ne faisait pas exception. Même si elle croyait parfois avoir le dessus sur son aîné Aoife ne se faisait pas d'illusions, il s'était tût pour ne pas engendrer de désaccord. Ça avait toujours été comme ça entre eux, Valen se taisait mais il n'en pensait pas moins et ses regards appuyés valaient milles discours. Elle était loin l'époque où l'adolescente farouche avait fait la connaissance de l'éclaireur, la tête pleine de certitudes et cette idée fixe chevillée au corps. Prendre sa place.

Comment en était-elle arrivée là? Aoife se souvenait de son enfance dans les quartiers populaires de Pelargir, de sa mère aussi. Une femme discrète mais affectueuse qui avait fait de son mieux pour l'élever seule, ne comptant pas les heures et rentrant après de longues journées, toujours plus épuisée. Lorsqu'elle se concentrait vraiment, Aoife pouvait presque sentir ses bras qui l'avaient entourée enfant pour une étreinte fugace et l'odeur fantôme du savon qui la suivait partout où elle allait. Le parfum entêtant de la lessive, qui lui collait à la peau et ses mains de blanchisseuse, abîmée par les longues heures passées à manipuler le savon. Il n'y avait toujours eut qu'elles deux. Elle n'avait jamais compris pourquoi à l'époque, ne s'était pas vraiment posé la question. Petite fille, elle avait passé plus de temps à courir les rues, toujours à la recherche d'une énième bêtise à commettre et rentrant à la maison les genoux couronnés d'égratignures. Et lorsqu'elle s'échappait pour fureter dans les rues, livrée à elle-même, ses pas la conduisaient toujours immanquablement au port. La petite fille avait passé de longs après-midi à observer le va et vient des bateaux, assise sur le ponton, ses  pieds battant dans le vide. Où allaient-ils? Quelles étaient leurs histoires ? Et comment c'était là d'où ils venaient ? Milles scénario en tête, elle avait parcouru les allées, jetant des regards curieux aux marins qui déchargeaient les cargaisons. Souvent, elle se faisait arrêter par l'un d'entre eux, parfois agacé, parfois amusé de revoir sa petite tête brune venir fureter sur les quais. Ça n'était pas un endroit pour une petite fille de son âge mais elle rentrait toujours le soir, les yeux pleins d'étoiles et des récits en tête, comptés d'une voix bourrue par un marin qui avait eut le malheur de se laisser attendrir par ses supplications.

Les années d'insouciance avaient passé bien vite. Elle aurait juré avoir fermé les yeux et les avoir rouvert pour se retrouver trop vite grandie mais pourtant pas encore suffisamment pour être une adulte. Elle avait commencé à poser des questions. Où était-il ? Où était son père ? Sa fougue d'adolescente l'avait laissé aveugle au trouble de sa mère et trop déterminée à savoir, elle lui avait probablement fait beaucoup de mal sans s'en rendre compte. Et pourquoi au final ? Une histoire banale comme on en trouvait des dizaines d'autres partout en Terre du milieu. Qui  parlait d'une femme de chambre jeune et naïve et d'un maître de maison à la moralité douteuse. Un maître de maison immoral et marié. Dans un sens, Aoife se demande si elle n'aurait pas mieux fait de rester dans l'ignorance. Trop de questions laissées sans réponse, trop d'incompréhension et de la rage aussi. De sentir qu'elle n'avait pas suffit, qu'on ne lui avait même pas laissé la chance de prouver qu'elle pouvait être une fille dont on serait fier. Alors elle s'était tue, n'avait pas ressorti à sa mère toutes les paroles blessantes et cruelles qui lui étaient monté aux lèvres. Toute sa colère elle la réserva pour un autre.
Elle avait fini par retrouver sa trace, la tête pleine d'illusions à demi avouées. Qu'avait-elle cru au juste ? Que tout rentrerait dans l'ordre ? Au lieu de quoi, ce riche marchand l'avait reçue comme une étrangère, peut-être même un peu embarrassé par ses vicissitudes de jeunesse. Il était un autre homme maintenant. Et il n'était pas possible de changer le passé. Qu'aurait-elle voulu qu'il fasse? Aoife avait cédé à la désillusion, elle qui ne s'attendait pourtant à rien. Furieuse et blessée, elle avait laissé éclater sa colère, sa rancœur de petite fille ressortant au grand jour. Puis elle était partie pour mieux revenir. Les mois avaient passé et elle l'avait épié, sans trop savoir pourquoi. Une idée germait dans sa tête, une ambition tenace. Cet homme importait des étoffes qu'il vendait à prix d'or partout à travers le Gondor. Ses caravanes partaient de Pelargir, chargées de marchandises qu'ils livraient auprès de riches clients. Sa chance de connaître l'ailleurs elle la tenait. Il lui devait au moins ça. L'occasion de voir le monde, de devenir quelqu'un et surtout d'offrir à sa mère le repos qu'elle avait largement mérité.

Voilà comment une jeune fille de seize ans se retrouva parachutée dans les pattes d'un quadragénaire qui se serait bien passé de sa présence envahissante. Son père, trop ravi de se débarrasser d'elle aussi facilement avait permis qu'elle accompagne l'une de ses caravanes. Espérant sans doute qu'elle se lasse assez rapidement, effrayée par les conditions de vie difficiles. Ça et la menace d'un nouveau scandale si l'affaire venait à trop se propager. C'était sans compter son obstination et son endurance. Valen avait vu son arrivée d'un mauvais œil et le second de son père ne lui avait pas fait de cadeau, la cantonnant aux tâches ingrates.

La suite n'était qu'une histoire pas vraiment intéressante. Sachant parfaitement qu'elle n'était pas la bienvenue mais décidée à faire ses preuves, l'adolescente avait refusé de s'avouer vaincue. A coup de maladresses, de questions naïves et d'interrogations, elle était parvenu à apprivoiser l'éclaireur. Ça lui avait pris longtemps, des années de voyages où elle accumula les erreurs et les bêtises, découvrant que la vie sur les routes n'avait rien de simple. Valen avait fini par la prendre sous son aile, lui enseignant ce qu'il savait. C'est lui qui après un regard jetée à sa silhouette frêle, tendant fièrement le sabre offert par son père, avait décidé de lui apprendre à se battre.  Impétueuse, la brune paya de trop nombreuses fois le prix de sa fougue. Les blessures furent nombreuses et les erreurs encore plus. Emportée et impulsive, il n'y a que l'expérience qui parvint à forger à petit pas la femme qu'elle était devenue. Si elle était à présent capable de voyager seule, son mentor n'était jamais bien loin, couvant sa protégée d'un regard discret.

Tout avait dégénéré il y a si peu de temps que la jeune femme peine encore à croire que les années d'insouciance sont désormais révolues. Ils auraient du savoir, les rumeurs s'étaient pourtant multipliées. Mais chacun avait soigneusement ignoré la menace, choisissant de croire qu'ils en viendraient toujours à bout et que la situation ne pouvait pas être si grave.
Le coursier était arrivé un soir, terrifié et mort de fatigue alors qu'ils étaient en route pour l'ouest. Des bateaux pirates remontant l'Anduin. On avait rapporté la présence de ces navires à de nombreuses reprises ces derniers mois mais ils avaient préféré croire que la menace n'était pas si présente. Triste erreur de leur part. Le temps que la nouvelle lui parvienne, les raids se multipliaient déjà.

L'incompréhension s'était emparée d'elle. Et après ça la terreur. Sa mère restée à Pelargir,, la ville de son enfance et ses terres en péril. Une violente dispute avait éclatée alors que Valen tentait de la retenir. Qu'espérait-elle au juste? Croyait-elle pouvoir réussir là où les soldats avaient échoué? Ne comprenait-elle pas qu'elle arrivait trop tard? Aoife n'avait rien voulu entendre, envahie par l'inquiétude. Elle avait fait demi tour, lançant sa monture à travers les plaines du Gondor, aveugle et sourde à la prudence. Ça n'avait jamais été une bonne idée de voyager seule en ce terres, ça l'était encore plus à présent. Et à la vue des fumées montant dans le ciel de l'aube, la brûlure cruelle des larmes s'était fait sentir. Elle avait croisé de nombreux réfugiés sur les routes, lui conseillant de rebrousser chemin, qu'il n'y aurait rien à trouver là bas que la mort et la destruction. La ville était saccagée, portant encore les stigmates du pillage et des incendies qui avaient éclaté ça et là. Incrédule, Aoife n'était pas parvenue à aller plus loin que les faubourgs. Trop difficile de voir ses souvenirs d'enfance réduits en cendre.

Et l'attente après ça, l'inquiétude et l'angoisse de laisser son regard errer sur la foule des réfugiés à la recherche de sa mère. Sa silhouette frêle lorsqu'elle se jette dans ses bras, le bruit de ses sanglots étouffés. Elle devrait se considérer chanceuse, d'autres n'auront pas eut le bonheur de retrouver leurs proches sains et saufs. Mais elles avaient tout perdu dans la catastrophe et elle pleurait sur la petite fille qui ne pourrait plus jamais se promener sur le port sans sentir un profond pincement au cœur. Pour son père elle n'eut qu'une oreille distraite. Il était loin disait-on, choisissant de fuir pour une ville plus paisible et plus propice à faire refleurir ses affaires, malmenées par l'attaque.

Il avait fallu reprendre la route après ça. Parce qu'elle se sentait incapable de faire autre chose, que l'immobilisme la terrifiait plus que tout. Il y avait de moins en moins de travail à présent. Les routes étaient beaucoup trop dangereuses et les gens n'avaient pas le cœur à dépenser de l'argent sur des étoffes précieuses. Mais s'arrêter c'était laisser aux souvenirs la possibilité de resurgir. Ces images de désolation étaient imprégnées dans un coin de sa mémoire. L'odeur de la mort et du sang. Aoife s'était jetée dans le travail, refusant de s'arrêter une seconde et de regarder en arrière. Aller de l'avant, ne pas permettre que cela recommence et mettre sa mère à l'abri du danger, loin de ce fleuve maudit qui signa leur perte à tous. La ville se relèverait de ses cendres, c'était certain, mais Aoife ne resta pas pour admirer le spectacle.

Ça faisait des mois et elle avait encore l'impression que c'était arrivé hier. Face à l'ombre qui grandissait en Terre du milieu, Aoife se sentait impuissante. Des murmures étaient venus d'au delà du Gondor. Le noir ennemi était partout et la jeune femme avait le sentiment que ce mal qu'ils essayaient de combattre désespérément était déjà parmi eux.

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Et voilà, je t'ai tout dit à présent. J'espère que tu t'amuseras bien parmi nous, Aoife... En espérant que tu survives en Terre du Milieu !