Isolde [Fiche validée]

« Hors de notre vue, vous me faites honte Isolde, refuser ainsi sa main, l'affront devra être lavé. »

Sa tête reposait lourdement sur son épaule alors que l'équidé continuait d'avancer dans la plaine. Elle avait quitté le Lossarnach depuis quelques jours, pris le cheval de son père à son insu, partant avant que l'aube ne se lève. Ils avaient choisis le bannissement, pour ne pas jeter l'opprobre et le déshonneur sur sa famille outre mesure. Elle aurait du épouser cet homme, de l'âge de son père qui disposait de lopins de terres fertiles, qui n'avaient même pas mandé de dote, sortant de plusieurs années de veuvages, il avait trouvé la fille d'Humpfrey à son goût, aussi belle que les edelweiss qui éclosent près des Montagnes Blanches, bourgeon à peine sorti de l'enfance dans ce vallon fleuris.
Elle aurait ainsi pu passer des hivers doux, des étés chauds et secs en compagnie d'un homme qui aurait pu prendre soin d'elle, mais elle n'avait pu, elle n'aurait pu jamais l'aimer comme elle l'aurait dû.  Elle n'était pas issue de ces mariages d'amour et de joie, elle avait été élevé de façon à être une jeune fille gracieuse, frêle et belle, afin que le coût d'une union future soit réduit, ses parents n'étaient pas les habitants les plus aisés de cette régions, ils disposaient de quelques champs, de bétails et l'unique façon pour elle de sortir. Elle avait le teint pâle contrairement aux autres habitants  de cette région proche de la Cité, qui avaient le teint un peu plus hâlé, sa mère avait toujours veillé à ce qu'elle soit de cette petite poupée fragiles que l'on avait envie d'embrasser et de chérir. Sa mère, Idris, avait vu ses  parents être à moitié ruiné par ce mariage avec Humpfrey, elle avait depuis lors vécu dans un certain confort avec son mari et ne souhaitait pas le voir disparaître à cause de cette enfant unique de sexe féminin. Elle aimait Isolde, profondément, mais souhaitait le mieux pour elle, quitte à ce que tout cela aille à l'encontre de vœux de sa fille.
Son refus d'épouser l'homme promis lui attira donc les foudres de son père, de sa mère et de ce dernier. La répudiation avant mariage fut inévitable. Ses parents, meurtris, honteux et surpris parce ce refus catégorique de cette enfant qu'ils jugèrent avoir trop gâté, impolie et insolente, se décidèrent à la chasser, il valait bien la bannir des terres parentales que de devoir souffrir de cet affront. Idris, encore jeune, venait d'ailleurs de retomber enceinte, l'enfant avait des chances de survivre dans ce climat doux, alors la question fût réglée bien vite. Elle partirait le lendemain, Idris et Humpfrey cacheraient ainsi leur désarroi. Isolde pleura, longuement, elle ne voulait causer de tort à sa famille, mais elle ne pouvait se donner à un homme qui l'avait connu enfant, qui avait été un ami de son père. Elle imaginait, naïvement sans doute, qu'elle pourrait vivre une véritable histoire d'amour comme celles contées au coin du feu.

Emmitouflé dans ses vêtements de voyages et un châle elle s'était endormie, la fatigue d'un trajet encore bien long, vers Minas Thirith tout d'abord, puis elle aviserait.  
Il lui faudrait probablement cinq jours de voyage avant de rejoindre la capitale du Gondor. Son cheval, le vieux Belefast servait d'habitude pour les cours trajets et étaient désormais habitué à dormir dans l'étable. Il avançait donc lentement, peinait lorsque le chemin devenait trop ardu, mais Isolde avait une patience infinie, elle avait la vie devant elle désormais et elle pouvait bien retarder son parcours.  Le cheval à la robe sombre  finit par s'arrêter, ce qui réveilla la jeune fille blonde, elle  descendit de sa monture, les cuisses et le fessier moulu par des chevauchée dont elle n'avait pas l'habitude. Elle défit ses quelques affaires, improvisa une couche contre un arbre, y attacha Belefast, qui exténué, se plia sur ses genoux avant de se coucher près d'elle. La nuit fut remuante, comme les précédentes, elle n'était pas encore habituée aux racines qui vous meurtrissaient le dos, à la dureté du sol. Son lit lui manquait, sa maison, elle pleurait plusieurs sur le dos de ce vieux cheval, elle pleurait son enfance révolue, elle pleurait ses parents et sa conduite, elle aurait pu retourner auprès d'eux et s'excuser si elle n'avait pas eu cette fierté insolente qui lui piquait la conscience.
Elle se réveilla le lendemain, le soleil était déjà haut dans le ciel, Belefast broutait non loin des jeunes pousse d'herbe tendre, elle s'étira et épousseta ses vêtements, elle aurait aimé pouvoir se débarbouiller mais il n'y avait pas de rivière proches. Elle mangea une partie des provisions qu'elle avait emporté, du pain au miel, bu un peu mais avait rationné sa gourde au cas ou.

Elle chevaucha encore, le soleil pointait vers son zénith,  la plaine en jachère s'étendait devant elle à perte de vue et au loin s'élevait les tours de la Cité Blanche. Isolde sourit, elle allait bientôt arriver à Minas Thirith, lors que son cheval tenta la traversé d'un maigre fossé, des pierres éboulées lui enserrent les sabots. La jeune fille blonde se jeta de sa monture pour l'aider, la cheville de son cheval s'écorcha sur les roches de cet ancien lit de rivière de fonte de neiges aux saillis piquantes. Il hennit, elle tenta de le calmer, de le mener près des derniers arbres. Soudain un feulement retentis entre les bosquets éparses.

Un lynx famélique surgit d'entre les troncs, il transpirait la faim, il avait sentis le peu de sang éparpillé sur les pierres par Belefast  qui s'emballa,boitillant,  jetant sur le côté Isolde dans sa cours, mais le félin ne prêta même pas attention à la jeune fille. Ils disparurent dans les fourrés et la jeune fille ne put qu'entendre le vieux cheval hennir au loin. Les larmes lui montèrent aux yeux, dans une folie candide, mêlée au chagrin de la perte de ce compagnon elle s'élança à leur suite, elle retrouva l'un de ses baluchon pendouillant à un branchage, elle marcha encore quelques temps  avant de retomber sur des touffes de poils couvertes de sang. Elle les suivit, incertaine du fait que ce soit une bonne idée. Des rapaces tournoyaient déjà, ses joues devinrent humides sous le torrent de larmes, le vieux cheval de son père avait périt, il avait été son seul ami ces derniers jours, elle lui avait raconté durant ses nombreux détours afin de ne croiser personne, ce qu'elle ferait plus tard. Elle se précipita, jetant ses affaires au sol, attrapant une branche maigre. Elle éructa à l'encontre du félin qui découpait déjà des morceau dans la chaire chaude de Belefast. Il feula de colère, Isolde recula. Elle disparu à l'orée des arbres, le Lynx la suivit de regard et elle attendit qu'il termine son repas, des hauts le cœurs la soulevant. Lorsque le félin disparu, elle chassa les buses qui déjà commençaient à picorer le corps de Belefast. Elle fouilla parmi ses sacs, à la recherche du briquet qu'elle avait emmené. Elle alla chercher des branches, des morceaux de bois secs et de la mousse desséchée. Elle créa un monticule, détournant le regard et plissant le nez lorsqu'elle approchait de l'équidé. Elle lui offrait une sépulture et lorsque  le bûcher improvisé fut suffisamment grand elle y mit le feu.

Elle se détourna, après qu'il ne reste plus que des cendres et des os, l'odeur âcre de la chaire brûlée lui emplissait les narines, le visage couvert de suie et de terre. Alors elle repris sa route à pied, elle gâcha un peu d'eau pour se nettoyer le visage, sécha ses larmes de ses yeux rougis. Ses pieds se couvrirent d'ampoule, ses cheveux défaient lui giflèrent le visage au grès du vent et après une nuit seule, à cauchemarder, elle passa les portes de la Cité Blanche.

Les frusques boueuse, son peu de possession dans un maigre baluchon. La bourse de cuir emplie de pièce prise à ses parents, cachée dans ce même sac. Elle savait que si elle s'en servait maintenant, elle ne pourrait même pas acheter l'oreille d'un cheval, même boiteux. Elle ne resterait pas en Gondor.  Ses yeux s'emplirent de nouveau de larmes lorsqu'elle passa la porte et les gardes.
Alors elle travaillerait, elle trouverait sûrement du labeur ici, qu'il soit bon ou mauvais, mais pour lequel la dignité qu'elle possédait encore et ses principes ne seraient pas ternis. Il existait des maisons de passes, elle le savaient, mais elle préférait tanner le cuir en plein soleil, servir des boissons à des hommes déjà avinés plutôt que de perdre son honneur.  Elle avait déjà refusé de servir de simple moyen de troc, à l'encontre des coutumes de sa région, elle ne servirait pas d'objet.
Elle s'assit sur un muret réarrangeant sa tenue, séchant ses larmes encore une fois, lorsqu'une vielle femme au visage ridée, tenant par la main un jeune garçon apparu dans son champs de vision. Elle lui releva le visage, lui sourit et lui murmura des mots rassurant avant de la conduire chez elle.