Bieeeeeere

Arrivé depuis quelques jours dans les montagnes bleues, entre les réunions officielles et autres paperasses usantes à la longue, le seigneur des monts de fer avait une subite envie de lâcher prise. Rien de tel qu'une taverne bien pleine où l'alcool coule à flots et où la musique assourdissante résonne dans les tunnels de la montagne. Dàin entra, salua ses comparses et donna quelques tapes dans les épaules de ceux qui commençaient à lui faire des courbettes. Non, il n'était clairement pas là comme un seigneur mais comme tout nain qui souhaite se détendre un peu. Il vit Dwalin au loin attablé et s'empressa de le rejoindre après avoir attrapé à son tour une chope de bière.  

"Bien le bonsoir cousin!! Je viens te tenir compagnie!!"

Dwalin revenait d'une sortie des Montagnes avec la garde d'Ered Luin, et avait décidé d'en profiter pour aller faire un tour à la taverne avec les sales trognes qui l'accompagnaient une fois revenu. Ceci, avant d'aller rejoindre sa douce et de prétendre être rentré directement... ce qui avait de grandes chances de ne pas passer, mais il avait l'habitude. Et le trou dans sa tunique lui voudrait déjà un beau coup de gueule (si ce n'est un beau coup dans la gueule), alors un peu plus un peu moins.... il venait d'être abandonné par la majorité de ses comparses quand une voix bien connue lui fit relever la tête et llaccarda un sourire sur ses lèvres.

Cousin ! Tu n'as pas d'importants traités à aller signer ? Ou le thé de Dis atil fini par te donner la nausée ?

Dàin prit place aux côtés de son cousin, accueillant sa remarque avec un rire étouffé et entama sa bière avec gourmandise. Puis il déposa la chope sur la table en bois avant de lui répondre

"Les traités et Dís sont de charmantes compagnie mais j'ai eu envie de voir autre chose, cette taverne est vraiment très accueillante!"

Les chants résonnèrent gaiement Dàin balaya la salle du regard avant de reposer son attention sur son cousin, un petit éclair joueur au fond du regard.

" et toi alors ? Tu préfères la compagnie d'une brune à ta charmante épouse ?"

Demain vida sa choppe d'un trait, comme si son esprit de compétition avait soudainement été réveillé par l'arrivée de son cousin et qu'il désirait montrer quil avait une descente égale si ce n'est supérieure à la sienne. La remarque de Dain fit étirer son sourire et il lui répliqua, tout en dents :

Il n'y a qu'une magnifique blonde dans mon coeur.... Mais je sais que je la retrouverais en pleine forme après cette brune mousseuse... contrairement à toi, qui ne reverra Melgiel que dans plusieurs semaines !

Et paf. Moi je rejoins le lit de la femme ce soir, au moins. (Enfin, si elle veut bien, certes). Et hop, le nain lève le bras pour une nouvelle tournée.

Dàin haussa les sourcils à la remarque de son cousin, s'étant attendu à ce qu'il lui envoie une pique puisque entre eux cela avait toujours été ainsi. Non pas qu'ils se détestaient, c'était des petites chamailleries entre rivaux comme il arrivait souvent.

"Freris est enceinte, ne te fais pas d'illusions tu dormiras sur le divan cette nuit. Mais je penserais à toi depuis mon lit douillet.

Connaissant sa femme, Dàin pouvait tout à fait avoir raison, il n'y avait qu'à regarder l'heure et puisqu'il faisait venir une seconde tournée, Dàin descendit sa chope aussitôt.

Dain avait visé juste, la grossesse de Freris la rendait quelque peu imprévisible, même s'il était tout à fait facile de prévoir la réaction qu'aurait la Belle au retour de son époux. Mais c'était ainsi qu'il l'aimait, sa douce. Avec ses yeux capables de le foudroyer, ses mots tranchants et ses petites mains qui étaient capables de le frapper, sans la moindre peur de représailles. Avec ses murmures amoureux, ses caresses et ses cajolleries.

Je ne suis pas encore assez vieux pour avoir besoin d'un lit douillet, moi... Le canapé est une place de choix, surtout quand on est réveillé par des baisers d'excuses.

Ou peut être etait-ce juste le sang bleu dans des veines qui le rendait mou et lui donnait des exigences de confort ? Haha. Dwalin était un guerrier dans la force de l'âge, lui ! Et ouais.

Ça continuait assez fort dans les répliques, Dwalin avait encore bien des cartes à poser. Dàin savait qu'il ne serait pas du genre à se laisser intimider par les mots jusqu'à ce que ceux là ne suffisent plus et qu'ils en arrivent aux poings. Déjà avec cette remarque, Dàin fronça légèrement les sourcils, Puis éclata de rire.

"tu as raison mon petit, le canapé compensera ton manque de maturité !"

Il descendit sa deuxième chope d'un trait et fit venir une troisième tournée.

Dwalin continuait de vider les choppes en rythme avec son cousin, bien qu'il eut pour sa part plusieurs tournées d'avance. La réplique de Dain concernant sa maturité lui arracha un rire tonitruant, qui se répercuta dans la taverne et fit se tourner plusieurs têtes dans leur direction. Pour le coup, il reversa même un peu de mousse sur la table, quil récupera du bout de son doigt avant de le lécher. Leurs piques n'étaient voulus que comme des bravades de vieux amis contents de se revoir et aimant un peu trop la bagarre et la compétition virile pour leurs propres biens et chacun d'eux le savait.

Tu t'entendrais bien avec ma mère !

Et ce n'était pas voulu comme un compliment non plus ! Dain connaissait le Dragon, celle qui fait frémir tous les hommes sur son passage et dont on se demandait comment elle avait fait pour séduire un nain aussi gentil que feu son mari. Elle menait la vie dure à ses deux gamins pourtant déjà bien adultes et Dwalin le lui rendait bien depuis toujours en faisant sa mauvaise tête.

Dàin manqua de s'étouffer à la réplique de son cousin lorsqu'il lui dit qu'il pourrait bien s'entendre avec sa mère. Alors que non, réellement, il l'avait toujours fui. Étant petit il avait déjà eu droit plusieurs fois à ses sermons et ses colères. Pour rien au monde il chercherait à bien s'entendre avec elle, quelle naine effrayante !! Quoi qu'il en soit Dàin trouva la un moyen de faire quelques liaisons

"Au moins moi je comprends les femmes."

Entre sa femme et sa mère, Dwalin était loin de détenir le savoir sans failles.

La réponse de Dain te fait pouffer de rire dans ta bière, à tel point que tu recraches un peu du doux liquide en manquant de retrouver dedans. Lui ? Comprendre les femmes ? C'était là une bien drole d'idée ! Dwalin s'essuie la bouche d'un revers de manche et répond.

Tu les comprends si bien qu'il t'a fallu batailler longtemps avant d'obtenir le moindre sourire de ton épouse ! Haha ! Mais voyons cousin, je ne pense pas qu'un seul nain ne soit capable de comprendre réellement parfaitement ces créatures....

Tu lui rapelles sa cuisante humiliation, sans gêne, avant de temporiser de toi même face à l'évidence : les naines sont parfois tout simplement indechiffrables... c'est ainsi ! Le mieux était encore de l'accepter le plus tôt possible, ce que tu avais fait. Et, avec le temps, tu étais capable de mieux prévoir les réactions des deux femmes de ta vie.

Oui Dàin avait dû batailler pour obtenir les faveurs de Melgiel, celle ci lui avait longtemps fait tourner la tête avant d'accepter des avances. Le fait est que leur amour en était que plus solide puisqu'elle lui avait appris à ne pas sous estimer les autres et à prendre son temps avant de se lancer dans quelque chose. A ce moment là il tenait de son père, bourru et impulsif, Melgiel l'avait considérablement assagi. Dàin bu quelques gorgées de sa bière avant d'approuver les dires de son cousin d'un signe de tête.


" tu as raison.... Mais c'est comme cela qu'on les aime"

Melgiel est une naine à la poigne de fer mais sans doute moins sévère que Freris, ou alors c'était simplement parce que Dàin lui cédait tout le temps et lui était souvent complètement soumis.

"Comment se porte Freris ? La grossesse se passe bien ?"

La bière continuait de couler à flot et les piques s'étaient transformés en un consensus concernant les naines, amours de leurs vies. Tous deux savaient ce que la femme de lautre représentait, tous deux comprenaient l'intensité de leurs sentiments malgré les difficultés ou les épreuves sur le chemin. Dwalin sourit affectueusement en pensant au ventre de sa femme, qui semblait s'arrondir de jour en jour et la rendre à la fois plus désirable et plus insupportable. Il aimait chérir chaque moment avec elle, autant qu'il aimait la fuir pour retrouver ses vieilles habitudes autour d'une pinte, comme en ce moment.

Elle se porte à merveille. Il semblerait que nous attendions une petite fille...

Une lueur de fierté passa sur son visage, éclaira ses yeux déjà brillants des effets de l'alcool qui coulait dans ses veines. Dwalin avait tellement hâte d'être papa. Il rêvait de pouvoir tenir ce petit être fragile dans ses bras, avec la douceur qu'il ne réservait que pour ceux proches à son coeur, ceux qui étaient moins solides que ses compagnons et qui méritaient mieux que des manières de rustre.

Dàn etira un sourire doux, content de voir que son cousin était heureux et épanoui avec sa femme. Lui aussi espérait avoir bientôt un enfant avec Melgiel, un garçon ou une fille, il serait tout aussi heureux et comptait bien lui en parler aussitôt rentré dans les monts de fer.

"C'est bien, je vous souhaite le meilleur à tous les deux!"

C'est à ce moment là que Dàin remarqua que la taverne était devenue bien silencieuse et de manière tout à fait anormale. En se retournant pour voir ce qui avait imposé ce silence, il vit dans l'embrasure Freris, visiblement très énervée. Dàin secoua Dwalin pour attirer son attention, elle cherchait son mari du regard.

"Dwalin !! Y'a ta femme...."

Y'a ta femme. Mer de. Le regard plein d'amour, de fierté et de rêves de Dwalin se métamorphosa pour laisser place à une tout autre expression, et cet idiot eut presque le réflexe d'essayer de se cacher derrière son cousin... dont la chevelure ne pouvait pourtant qu'attirer les regards. Et, bien entendu, il ne fallait pas plus de deux secondes entre son bref moment de panique interne et linstant où la main de sa Douce se posa sur son épaule, avec une force impressionnante pour une si petite (mais si ronde) créature.

Si mon cher époux voulait bien se donner la peine de rentrer à la maison...

Le ton de sa voix laissait entendre un bouillonnement certain sous ses mots polis et un sourire crispé passa sur le visage du concerné, qui se hata de s'excuser.

Bien entendu. Mon cher cousin m'a invité et je n'ai pas pu lui faire l'offense de refuser...

Parce que c'est quand même un Roi et un membre de la famille. Hein oui ma chérie ? Non, apparemment, non. Pas d'après l'expression sur son visage et les doigts qui s'enfoncaient un peu plus encore dans son épaule. Dwalin voila un regard vers Dain, entre  excuses et demande d'aide, mais se leva prestement pour éviter d'aggraver sa situation.

Vous réglerez la note dans ce cas, cher cousin.

Roi ou pas, ça n'imppressionnait pas le moins du monde la femme, qui tira son mari hors de la taverne sans même avoir eu besoin de hausser le ton (elle devait être fatiguée et cela donna des remords à son époux), laissant Dain avec une facture qu'il n'aurait guère dû régler.