What does a child in the forest? ✖ Legogil

Quelques jours plus tôt..
Elle marqua un temps d'arrêt en mettant le pied sur la terre ferme, autant pour admirer la vue que pour apprécier le fait de toucher enfin terre après tout ce temps passé sur le lac. Le vieil homme dû mal interpréter cet arrêt.

- J'peux pas t'déposer plus loin p'tite, j'ai du boulot !

Elle se contenta de lui jeter un regard par dessus son épaule avant de reporter son attention sur l'immensité de verdure qui lui faisait face. Elle leva la tête pour tenter de jauger la hauteur des arbres mais ne put que constater à quel point ils étaient haut, leur cime s'enfonçant dans la nuit noire. Retrouvant l'usage de la parole, elle remercia le vieil homme et fit un pas en avant. Un voyage de milliers de kilomètres commence toujours par un pas, en l’occurrence ce pas espérait-elle. Le pêcheur ne put cependant s'empêcher de s'enquérir de sa sécurité, inquiétude à laquelle elle répondit d'un haussement d'épaule. Elle saisit les bretelles de son sac et se dirigea tout droit vers les arbres.

Tournant la tête vers une petit chaine de montagne qu'elle apercevait, elle tenta de se remémorer ce qu'elle savait. Au delà de ces montagnes se trouvait la forêt de Mirkwood. Elle obliqua en direction de ces montagnes et suivit l'un des cours d'eau qui alimentaient le lac.
La voute céleste était limpide, dépourvue de nuages. Une nuit idéale pour commencer un voyage, bien qu'un peu fraiche. Parfait se dit-elle tandis qu'elle pressait le pas sous le coup d'un regain de vitalité.


Ce qu'elle n'avait pas mesuré, c'était le temps qu'elle mettrait à couvrir les distances qui, à l’œil nu, semblait moindre. Elle avait conservé un rythme rapide les deux premiers jours, faisant de courtes pauses et dormant très peu tant elle était excitée par son voyage. Rien de particulier n'avait eu lieu mais le simple fait de se trouver livrée à elle-même lui suffisait amplement. Le troisième jour, fatiguée, elle avait fini par prendre une vrai pause en trouvant un chemin pavé. S'écartant un peu du chemin, elle avait établi un campement dans un coin tranquille près de l'eau. Elle avait tiré sa couverture de son sac et étendu à même le sol avant de s'allonger dessus pour s'enfoncer dans un puissant sommeil.

Elle n'avait pas préparé de feu ne serait-ce que pour se protéger des prédateurs, inconsciente du danger qu'elle avait pris mais avait eu la chance de se réveiller fraiche et dispose sans que son sommeil ne soit troublé. Cependant, elle fut surprise de trouver ses vêtements et sa couverture trempée à cause de la différence de température entre son corps et l'air. C'est ce moment qu'elle choisit pour enfiler les vêtements chauds de son cousin, étendant ses vêtements humides sur des branches basses pour qu'ils sèchent. Elle entreprit d'allumer un feu pour se réchauffer et les aider à sécher. Le temps se rafraichissait considérablement et la température ne cessait de baisser durant la nuit, aussi décida-t-elle de marcher la nuit pour dormir le jour. Elle n'y verrait pas grand chose mais elle aurait l'avantage de dormir un peu plus au chaud.
S'ennuyant pendant que ses vêtements séchaient doucement, elle contempla son reflet dans l'eau en fronçant les sourcils. Ses cheveux formaient une masse compacte et hirsute qui lui donnait un air sauvage. Tournant sa tête à gauche puis à droite pour observer son visage, il lui vient soudainement l'envie de dompter sa chevelure. Elle fouilla son sac à la recherche du couteau. Elle prit alors ses cheveux dans une main et les sectionna d'un coup. Elle jeta ses cheveux dans le feu et retourna voir son reflet pour en admirer l'effet. Maintenant coupés court juste au dessous de ses oreilles, elle ressemblait à un garçon plus qu'autre chose. Elle sourit à son reflet et égalisa sa nouvelle coupe en chantonnant, ravie.

C'est ainsi vêtue, avec une coupe la faisant ressembler à un garçon qu'elle reprit son chemin, ses propres vêtements fourrés avec sa couverture dans le sac qu'elle portait.


Temps présent..
Alors qu'elle suivait un chemin pavé de la main de l'homme, elle avait fini par arriver devant une forêt où les arbres semblaient si haut que même en levant la tête elle n'en voyait pas la cime. Elle avait contourné la chaine de montagne et s'apprêtait à s'enfoncer dans la forêt, lui semblait-il, de Mirkwood. Mais elle ne put s'empêcher de se tordre le cou pour voir jusqu'où les arbres montaient, s'imaginant monter dans l'un d'eux pour contempler le paysage de là-haut.
La différence se fit tout de suite sentir une fois qu'elle se trouva sous le couvert des arbres. L'air sylvestre était chargé de l'odeur d'humus et lui laissait un goût sur la langue. Le pas léger, elle poursuivit tranquillement son chemin comme si elle ne faisait qu'une simple promenade dans les bois, mais dû resserrer les pans de sa cape pour se protéger du froid qui régnait en l'absence de soleil direct.
Le chemin avait été mieux indiqué jusque là. Alors que les pavés étaient clairement visible à l'entrée de la forêt, ils étaient maintenant recouverts de mousse et de branchages et la contraignait à regarder où elle mettait les pieds pour ne pas se prendre les pieds dedans. Pour la énième fois, elle marcha sur un bois mort dont le craquement sinistre résonna dans la forêt. Elle s'arrêta en bougonnant, détestant briser le silence presque sacré des lieux quand tout à coup un mouvement attira son attention sur sa gauche. Elle se tourna vers son origine et se figea, cessant pour le coup de respirer.

Elle écarquilla les yeux en le regardant, clignant plusieurs fois des paupières comme pour se réveiller. Elle entreprit de se pincer le bras mais n'en tira qu'un gémissement de douleur. Elle ne rêvait pas et avait pourtant du mal à se réveiller. Toute sa courte vie elle avait rêvé de voir quelque chose d'extraordinaire et son rêve venait de se matérialiser devant elle. Elle cligna des yeux une dernière fois avant de reprendre son souffle sans toutefois esquisser le moindre mouvement. Elle aurait pu être dans une position précaire qu'elle n'aurait pas bouger plus tant elle était subjuguée par la beauté de l'elfe qui lui faisait face. Son cœur manqua alors un battement, son souffle s'étranglant dans sa gorge, elle ne put se retenir d'essuyer ses mains soudainement devenues moites. La tournure que prenait les choses n'étaient pas bonne, mais alors pas bonne du tout, mais il ne lui vint pas à l'esprit qu'elle pourrait être en danger.

- Putain.. fut tout ce qu'elle trouva à dire et c'était certes mieux que de continuer à le fixer bêtement la bouche ouverte.

Elle n'avait jamais vu d'elfe de sa vie mais à un tout autre niveau, elle n'avait jamais vu quelqu'un d'aussi.. grand, élancé, équilibré, d'aussi.. beau tout simplement. A peine l'injure sortie de sa bouche, elle se mordilla la lèvre inférieure avec embarras. Que ce soit face à un elfe ou une quelconque autre personne, ses parents ne l'avaient pas éduqué de la sorte et elle n'avait aucunement envie de leur faire honte, surtout dans ce genre de situation.
Son cerveau ne fonctionnait plus qu'au ralenti et elle ne pouvait détourner le regard du premier elfe qu'elle voyait de ses propres yeux. Elle sourit intérieurement, aux anges, et lutta pour ne pas rougir quand elle croisa son regard bleu perçant. Ils se contemplèrent ainsi un moment sans rien dire, ses pensées tournant toujours sur le même rythme. Un elfe, un elfe, un elfe.. Fut tout ce qu'elle parvint à penser pendant ce temps et s'il en avait été autrement, elle se serait giflée pour tant de niaiserie.

Je ne m'attendais pas à croiser la route d'un enfant. Qui es-tu ? Que fais-tu là ? Es-tu perdu ?

La voix de l'elfe brisa soudainement le silence qui s'était installé, résonnant brutalement à ses oreilles qui lui donnèrent l'impression de se déboucher sous la pression atmosphérique. Elle cligna des yeux, sortant de sa torpeur pour le regarder sous un nouveau jour. Elle inclina la tête, s'intéressant à son accoutrement. Bien qu'il ne soit pas en position offensive, ce déluge de question l’agressa quelque peu et elle laissa tomber son bras le long de sa cuisse. Ayant enfin reprit ses esprits, elle se reprocha mentalement sa stupidité, se promettant de ne plus se faire avoir.
La jeune fille dressa la tête et carra les épaules en se tenant droite, levant le nez pour lui répondre d'un ton sec.

Vous vivez depuis tellement longtemps q'vous n'êtes même pas capable de d'viner l'âge d'un humain ? Un sourire étira ses lèvres, ne montant pas jusqu'à ses yeux. Chui plus un enfant et c'que j'fais ici ne r'garde que moi.

Elle n'était pas des plus aimable mais elle avait appris que l'attaque était bien souvent la meilleure des défenses, surtout quand sa taille et sa corpulence ne permettaient aucun corps à corps dignes de ce nom.
Sa première erreur avait été de se laisser surprendre dans cette forêt, sa seconde d'être restée subjugué par l'elfe. Elle ne comptait pas aller jusqu'à trois, aussi glissa-t-elle sa main dans sa botte pour récupérer sa dague, masquant son geste avec sa cape. Elle ne comptait pas l'attaquer, et ne s'imaginait pas pouvoir résister face à lui, mais elle ne se laisserait jamais faire et préférait être parée à toute situation. Elle passa son bras derrière son dos et fit un pas en arrière, tournant brièvement la tête pour voir ce qui se trouvait derrière elle.

J'm'excuse d'avoir empiété sur vot' domaine, je n'faisais que passer.

Elle recula d'un autre pas avant de faire brusquement volte face et de presser le pas dans la direction opposé à l'homme. Elle risqua un bref coup d’œil pour voir s'il la suivait et se prit les pieds dans une racine qui la fit tomber de tout son long. Son menton percuta violemment le sol alors qu'elle ne put ralentir sa chute avec ses mains prisent dans sa cape.
Voyant des étoiles parsemer son champ de vision et un goût de sang envahir sa bouche, elle tenta de se redresser en se tenant le menton. Un bref passage en revue de son corps lui permit de déterminer qu'elle n'avait rien de casser. Elle posa la main au sol pour se relever doucement et la retira pleine de terre, la main poisseuse de sang.

Debout, elle tituba, cherchant l'origine du sang sur sa main, tout son corps la faisant souffrir. Finalement, une douleur sourde se réveilla dans son menton qu'elle tata avec précaution pour retirer sa deuxième main couverte de sang. Elle déglutit avec difficulté, se retournant pour fixer l'elfe avec lequel elle avait tout compte fait, mit très peu de distance avec sa chute. Se sentant idiote, elle lui sourit et ne put que grimacer quand la peau tira sur sa plaie fraîchement ouverte, vidant tout le sang de son visage.
 

Elle serra les dents et s'interdit toute forme de faiblesse. Inspirant et expirant à tour de rôle, elle parvint à faire refluer la douleur et la nausée qui montait par la même occasion, jusqu'à ce que la première ne soit plus qu'une sourde palpitation. Elle se sentait bête, maladroite, ridicule mais elle ne pouvait pour l'instant rien faire d'autre que rester là où elle était. Maudite forêt, pensa-t-elle furtivement, mais cette pensée ne resta pas plus d'une fraction de seconde tant elle ne le pensait pas vraiment. Tandis que l'elfe approchait, elle tata, plus doucement cette fois, la blessure qu'elle venait de se faire, espérant que ce n'était pas très profond. Elle sentait les contours commencer à se boursoufler sous ses doigts et déglutit péniblement en inspirant un bon coup. Ce n'était certes pas terrible comme sensation mais il lui sembla que ce n'était qu'une petite entaille qui saignait beaucoup.

Quand on veut fuir quelqu'un, il vaut mieux regarder devant soi. Ça évite des petits incidents de ce genre.

Elle se contenta de lui lancer un regard noir et ravala toute remarque désobligeante de sa part. Au fond, il n'avait pas tord. L'elfe s'approcha plus près d'elle et elle retint un mouvement de recul instinctif, réprimant par la même une grimace de douleur. Elle avait horreur de se montrer en spectacle mais maintenant que le mal était fait, elle était déterminée à conserver un semblant de dignité face à cet être bien supérieur à elle. Sans le quitter des yeux, elle essuya ses mains sur son pantalon, le tachant de sang par la même occasion et rabattit sa cape sur ses épaules en se rhabillant prestement. Il lui sembla oublier quelque chose quand elle repensa à la dague qu'elle avait en main avant de tomber. Son regard oscilla entre le sol et l'elfe et, ne voyant pas l'arme d'où elle était, reporta son attention sur l'homme qui lui tendait une petite boite tirée d'une sacoche.
Elle examina la petite boite avec curiosité, sans comprendre de quoi il s'agissait. Pathlanniel avait-il dit. Elle ne savait pas s'il s'agissait du nom de la boîte ou de son contenu mais elle ne put s’empêcher de remarquer la douceur de ce mot. Sa voix avait eu un timbre différent en prononçant ce mot et elle leva les yeux pour croiser son regard.

Dans votre langue, c'est un baume de soin. Je ne dis pas que ça va te guérir et que tes plaies vont disparaître comme par enchantement. Mais ça te fera du bien.

Sans le quitter des yeux elle hocha de la tête avant de se rappeler qu'elle avait une bouche elle aussi. Pathlanniel répéta-t-elle dans sa tête, n'osant pas le prononcer à haute voix. Ce mot avait une telle attraction sur elle qu'elle ne pensa même pas à répliquer à l'évocation de la plaie. Elle n'avait que faire d'une cicatrice, cela prouverait juste qu'elle avait vécu, une pensée bien éloignée des jeunes filles de son âge.

A toi de faire ton choix et voir si tu acceptes mon aide.

Elle sortit de sa petite rêverie et tendit la main vers la boite avec hésitation. Est-ce qu'elle devait l'accepter ? En avait-elle seulement besoin ? Était-ce un piège ? Elle entreprit de se mordiller la lèvre inférieure comme elle le faisait chaque fois qu'elle se sentait tiraillée et jura de son oublie quand son menton lui rappela son existence. Après ce court moment d'hésitation, elle fini par prendre la petite boite en prenant garde à ne pas le toucher. Surprise, elle soupesa la boite, la trouvant plus légère qu'elle ne lui paraissait. Elle l'ouvrit doucement, faisant attention à ne pas la faire tomber et renifla son contenu. Réalisant son attitude quelque peu étrange, elle détourna le regard et essaya de trouver les ingrédients du baume sans succès. Il était doux et très légèrement camphré sur le fond et sa texture semblait onctueuse à l’œil nu. Elle s'apprêta à y mettre le doigt et se ravisa, tendant la petite boite à l'elfe.

Je ne peux pas voir mon menton, commença-t-elle doucement en baissant les yeux. Est-ce que vous pourriez m'aider ? Lui demanda-t-elle en contrôlant sa voix pour ne pas avoir l'air d'implorer son aide. S'il-vous-plait, ajouta-t-elle finalement.

Elle lui adressa un semblant de sourire, peu sûre d'avoir fait le bon choix en requérant son aide. Elle ne pourrait malheureusement pas voir ce qu'elle ferait et elle était incapable de dire si la plaie était propre ou si de la terre s'y était infiltrée sur le coup de la chute. Sa peau commençait quant à elle, à lui tirailler alors que le sang séchait à l'air libre.

Je suis désolée marmonna-t-elle, regrettant tout à coup son attitude quelques minutes plus tôt.

Elle baissa la tête vers ses mains et aperçut tout à coup la dague du coin de l’œil. Elle fronça les sourcils et espéra que l'elfe ne la remarquerait pas, au cas où.

Elle se mit à énumérer mentalement ses bonnes résolutions. Ils n'étaient pas partis sur le bon pied et avec son attitude, cela ne risquait pas d''aller en s'arrangeant, du moins.. si elle ne changeait pas. Dans un premier temps, elle lui demanderait son nom. Parce que se présenter était la base même des bonnes manières et les prémisses d'une entente cordiale. Ensuite, elle tâcherait de se montrer plus souriante, du moins plus franche dans ses sourires, bien que cela puisse être douloureux au moment présent. Enfin, elle récupèrerait sa dague et arrêterait de la perdre. La petite dague lui venait de ses parents et même si elle était plus de l'ordre d'une aiguille à coudre pour les porteurs d'épées, elle pourrait toujours se révéler utile.

En se retrouvant nez à nez avec l'elfe, elle ne put se retenir de rougir d'embarras. Elle loucha sur son nez pour ne pas le regarder dans les yeux et fini par se résigner à les baisser vers son menton qu'elle avança vers lui pour l'aider à mieux voir la plaie. Alors qu'il plongeait deux doigts dans le baume, il la mit en garde contre les effets involontaires, aussi ferma-t-elle les yeux quand il approcha ses doigts de son menton, serrant les dents pour ne pas laisser échapper un gémissement. Ses yeux la brulaient et une boule se formait dans sa gorge alors qu'elle réprimait des larmes de douleurs. Picoter un peu. Il plaisantait ?! Elle ne savait pas trop dire s'il s'était moqué d'elle ou si leur relation avec la douleur était différente. Toujours est-il qu'elle ne dit rien et se retint de pleurer.

Grande, elle était grande. Au début, il avait s'agit d'une réplique d'enfant tapant du pied quand on lui refuse quelque chose mais ça avait fini par devenir réalité. Le jour où ses parents étaient morts. Le jour où elle était rentrée chez elle, alertée par la fumée qui s'élevait, pour trouver les restes de ses parents, calcinés. Le jour où elle avait décidé de ne plus pleurer. Elle avait toujours cru être grande mais elle avait vite découvert ce que c'était, que d'être grande. Maintenant, si elle continuait de réagir par automatisme, elle était plus proche de la réalité, même s'il aurait été préférable qu'elle pense à des choses plus légères.

Tandis qu'il lui appliquait doucement le baume sur le menton, elle était à des lieux de ces préoccupations, toute concentrée sur ses doigts, sur la brulure qui envahissait son menton, essayant d'oublier qu'il lui soufflait sur le visage. C'est le moment qu'il choisit pour s'enquérir de son prénom. Elle hocha la tête en silence, manquant se retrouver avec du baume sur le nez pour le coup et reprit sa position. Elle leva les yeux au ciel pour changer, observant la voute des arbres qui les surplombaient. Les branches s'entremêlaient et se croisaient de manière si serrée que le ciel était invisible et que la lumière perçait difficilement. Elle était étonné de voir sans voir. Tout était sombre autour d'elle mais d'une certaine façon, bien visible.

Elle haussa les épaules tandis qu'il relançait le sujet sur sa présence en ces bois, ne réagissant pas devant son insinuation sur son sexe, qu'elle n'avait pas réalisé. Ce qu'elle voulait, c'est qu'il termine de lui appliquer le baume. Après, elle aviserait. Une fois fait, elle le remercia et récupéra sa dague qui lui trottait dans la tête, l'air de rien. Elle avait peur de la perdre et ne pouvait s'occuper que d'une chose à la fois pour bien faire les choses. Elle se redressa totalement et, la tête bien haute,se présenta. J'm'appelle Bregil, Bregil Orchadbury du Rohan.

Elle ne relança pas la question mais attendait quand même qu'il se présente à son tour. C'était dans les formes, un elfe se devait de connaitre les formes, c'était du moins ce qu'elle pensait. Levant à nouveau la tête pour évaluer la hauteur des arbres, elle siffla d'admiration et lui dit. La forêt est vraiment grande..? C'était autant une question qu'une affirmation. Elle était tout simplement impressionnée. J'voyage tout'seule, ajouta-t-elle, donc j'comptais pas êt'accompagnée mais j'ai rien cont'la compagnie.. D'une certaine façon, elle avait répondu à ses suppositions sur le fait qu'elle était une fille. Elle n'avait pas fait attention à l'emploi du féminin et ne réalisa pas son erreur sur le moment. C'était une résolution qui datait depuis trop peu de temps pour qu'elle l'applique automatiquement. Vous vivez ici ? Lui demanda-t-elle en désignant la forêt en ouvrant les bras.

Sa question était un peu vague parce que dans un sens elle savait que les elfes résidaient dans la forêt mais elle avait du mal à l'imaginer concrètement. Elle ne savait trop s'ils dormaient dans les arbres ou dans des maisons et si tous vivaient dans des forêts. En fait, elle voulait en apprendre plus sur les elfes mais était en même temps tiraillée par le besoin d'aller toujours plus loin. La vie était tellement courte.

L'envie de toucher son menton la démangeait. Elle la démangeait vraiment et elle devait concentrer tout ses efforts pour s'empêcher de lever la main et le toucher. La petite fille se demandait à quoi elle pouvait bien ressembler maintenant mais elle ne doutait pas qu'elle pouvait avoir l'air ridicule. Elle s'était déjà bien ridiculisée en tombant à la renverse comme elle l'avait fait et son menton ne faisait que lui rappeler qu'elle n'était au fond, qu'une enfant. Elle continuait de sentir son cœur battre dans son menton, ce qui ne s'arrêterait pas de si tôt, sauf si elle se décidait de cesser d'y penser mais la douleur refluait sensiblement. Elle rassembla ses petites affaires, sentant comme un creux dans son ventre et jeta son sac sur l'épaule.

Legolas. En son sens son nom était étrange. Enfin... ce devait être un truc d'elfe se dit-elle. Et puis.. elle s'appelait Bregil alors peut-être que Legolas était courant chez les elfes. Elle ne savait trop à quoi s'attendre avec les gens de son espèce. Tout ce à quoi elle s'était imaginé avec les contes et les histoires qu'elle avait entendu depuis toute petite, tout s'était envolé, évaporé à la seconde où elle l'avait rencontré. Elle avait beau fermer les yeux, elle n'arrivait plus à se représenter les elfes dans sa vision enfantines, tout ce qui lui restait était cet elfe qui lui faisait face. Il était vraiment grand, pâle et fin. Elle aurait presque pu le confondre avec une femme tant ses traits étaient délicats mais en même temps elle ne pouvait pas se méprendre sur son genre. Il avait de long cheveux blonds, plus long qu'aucune fille n'aurait pu le rêver, plus long que ses cheveux ne pourrait l'être si elle les laissait repousser un jour. Et puis surtout, il avait ces oreilles au bout pointues. Pendant l'espace d'un battement de cœur, elle ne put détacher ses yeux de la forme étrange de ses oreilles, se demandant si cela influençait la manière dont il entendait les choses.

Elle hocha la tête, légèrement gênée par son manque d'expérience et lui avoua d'une petite voix. C'est la première fois qu'j'en vois un en vrai. Mais j'ai beaucoup entendu parler d'vous ! ajouta-t-elle en haussant le ton, pour qu'il ne croit pas qu'elle qu'elle était totalement ignorante à son sujet. Elle voulu ajouter quelques petites choses qu'elle savait au sujet des elfes avant de renoncer de peur de peut-être le vexer. Surtout que beaucoup parlaient de leur attitude supérieure, de leur caractère quelque peu... bref.
Voyant qu'il ne rechignait pas à répondre à ses interrogations, elle sauta sur l'occasion pour en apprendre plus. Vous dormez dans les arbres ? Elle fouilla la forêt des yeux comme pour chercher d'autres elfes, se demandant s'ils avaient le don de se rendre invisible. Vous sortez de la forêt des fois ? Elle se rapprocha de lui, levant son visage plein de curiosité pour le regarder. Vous vivez vraiment très longtemps ? Est-c'que c'est vrai qu'vous parlez aux arbres et au vent ? Pourquoi vous avez les oreilles pointues ? Vous avez quel âge ? Est-c'que vous êtes déjà allé de l'aut' côté des montagnes ?

Elle s'arrêta brusquement de parler et devint toute rouge, bredouillant des excuses quant à son attitude. Elle avait été tellement emportée et avait tellement manqué de contact humain qu'elle n'arrivait plus à contenir sa curiosité. Elle se mit à mâchonner sa lèvre inférieure avant d'arrêter en sentant son menton lui tirailler. La petite fille réalisa alors qu'elle ne sentait plus son menton, ou du moins, que ce dernier ne la faisait plus souffrir. Merci pour ... le baume. Elle avait oublié le nom du baume en question mais elle était reconnaissante pour ce qu'il avait fait pour elle. Elle gratta le sol du bout de sa botte et jeta un coup d’œil vers la direction qu'elle avait emprunté, sentant qu'elle s'était déjà trop imposée. Je... Elle allait prendre congé quand son ventre se manifesta, poussant un grognement pitoyable qui eut pour effet de la faire blanchir d'un coup, horrifiée. Elle appuya dessus de toute ses forces en priant pour qu'il n'ait rien entendu, maudissant intérieurement son estomac et sa fâcheuse tendance à se manifester sans son accord. Elle toussa, feignant de ne rien avoir entendu et poursuivit donc. J'crois que j'devrais continuer mon ch'min. C'par là la sortie, non ? Elle hésita entre la droite et la gauche et finit par pointer dans une direction, peu sûre que c'était bien celle-là.

Chaque réponse donnée menait à un nouvelle question à tel point que cela aurait pu être un jeu qu'ils auraient joué éternellement. Mais si lui l'avait, ce n'était pas son cas et elle l'avait d'abord laissé répondre à toutes celles qu'elle avait posé. En fait, elle en avait posé tellement et en l'espace de si peu de temps qu'elle aurait été bien en peine de les formuler à nouveaux tant son cerveau fonctionnait à vive allure sous l'afflux de nouvelles informations. Les elfes vivaient dans une très vieille cité. C'est ce qu'elle avait retenu dans le "construite il y a de cela fort longtemps", que c'était un endroit très ancien, sans doute fondu dans la forêt qui avait dû s'étoffer autour au fil du temps, mais aussi un endroit vieux, sombre, presque en ruine. Pourtant elle n'imaginait pas les elfes abandonner leur forteresse à la désolation mais c'est ce que le temps lui évoquait.. la désolation, la ruine, la destruction, la mort. Surtout la mort mais elle préférait garder cette pensée éloignée de son esprit pour l'heure, elle avait d'autres préoccupations et ce n'était pas de son âge de penser à ce genre de chose, on ne devrait pas donner d'âge à ce genre de préoccupation.
En écoutant l'elfe, elle avait surtout l'impression que ça n'allait pas. Elle ne savait pas trop si cela venait de son expression faciale, du ton de sa voix ou juste des mots qu'il employait.. Elle avait l'impression de voir son chien quand ils le gardaient attachés à la porte de la ferme quand celle-ci existait encore. Elle ne savait pas ce qui était arrivé au chien, il avait sans doute fuit lors de l'incendie et devait errer quelque part s'il n'était pas tout simplement mort de faim et de froid. De nouveau, elle du chasser ces pensées néfastes de son esprit. Cela faisait longtemps qu'elle n'avait pas eu à le faire, qu'elle n'avait pas eu à se forcer à penser de manière positive parce qu'elle avait enfin commencé à retrouver son soi-antérieur. Mais ce n'était pas pour ça qu'elle était là.
Elle n'arrivait pas à mettre le doigt sur ce qui n'allait pas, elle commençait même à douter que quelque chose aille mal chez son interlocuteur. Peut-être était-ce juste un truc d'elfe ce côté.. las. Sans doute en lien avec leur longévité. Nom de Dieu, elle ne savait pas ce qu'un millénaire représentait alors trois. C'était pour elle totalement inconcevable de vivre aussi longtemps. Elle avait déjà du mal à dépasser les quelques dizaines quand elle comptait alors les quelques centaines, c'était totalement hors de propos. Pendant une seconde, elle regretta de ne pas avoir mieux écouté ce que l'institutrice avait à lui enseigner quand elle prenait le temps d'aller à l'école. Legolas avait donc trois millénaires et il disait que les plus vieux d'entre eux pouvaient atteindre les huit millénaires.. Elle en avait la tête qui tournait sous l'afflux d'informations. Est-ce que tous les elfes avaient l'air aussi jeune tout en étant aussi vieux ? Vieux à l'échelle humaine s'entend. Elle le fixa d'une drôle de manière tandis qu'il parlait. Elle n'avait même pas remarqué qu'il n'avait pas répondu à toute ses questions, pas même à celle sur les oreilles qui pourtant l'avait intriguée plus tôt.

Tout dépend où tu désires aller. En fait, elle le savait sans le savoir. Elle voyageait sans but précis bien que celui qu'elle s'était fixé jusque là était celui de traverser la forêt pour passer de l'autre côté des montagnes. Il y avait une ville de l'autre côté de ces montagnes et elle comptait s'y arrêter rapidement pour trouver de quoi manger. Mais quoi qu'elle fasse et où qu'elle soit, elle trouverait toujours un moyen de se débrouiller. Le système D, c'était son truc. Encore fallait-il pour cela qu'elle retrouve son chemin. Droite ou gauche, elle ne savait plus d'où elle venait mais elle allait dans le sens opposer à celui d'où elle venait, en gros elle comptait poursuivre sa route vers la sortie de la forêt. J'traverse la forêt pour aller d'l'aut' côté de la montagne. J'vais dans cette ville là, qu'est-ce d'l'aut' côté. Elle se trouvait bien en peine de lui fournir le nom de la ville en question, il lui était totalement sorti de l'esprit mais elle venait de Laketown et ne comptait pas y retourner donc il ne devait pas rester trente-six milles possibilités, non ?
Apparemment, la manifestation de son estomac n'avait pas été assez discrète. Ou peut-être que le fait d'appuyer dessus avait indiqué que son estomac était vide. Ou encore cela répondait-il à sa question quant à l’ouïe des elfes mais ce dernier lui tendit un petit paquet enfermé dans une feuille qu'il appelait Lembas. C'était marrant comme mot ça encore. La jeune fille se demanda s'ils en avaient d'autres de mots sonnant aussi exotiquement à ses oreilles. Elle prit le pain des elfes en le remerciant poliment, tournant et retournant le petit paquet dans ses mains en essayant de ne pas trop se montrer curieuse sans vraiment y arriver. Elle réussit cependant à ne pas se faire honte en le reniflant sous ses yeux ou en mordant dedans avec la feuille autour. Elle le soupesa un peu et le déballa précautionneusement pour ne pas faire bêtement tomber le contenu par terre. Elle était un peu sceptique à l'idée qu'une simple bouchée puisse calmer son estomac mais elle décida de le croire et mordit dedans. Elle leva vers lui un regard surpris, bien en peine de décrire ce qu'elle avait dans la bouche mais elle adorait. Pas spécialement pour le goût mais pour la nouveauté, la découverte et le sentiment qu'elles procuraient. Elle le remercia à nouveau et hésita avant de ranger le reste dans sa poche. Elle doutait qu'il ait pu vouloir récupérer ce qu'il restait, voir qu'il accepte de manger après elle car même s'il se montrait gentil et prévenant envers elle, il restait un être distant. Elle le gratifia d'un immense sourire, le premier depuis qu'elle l'avait rencontré et lui demanda tout joyeusement en tirant sur les bretelles de son sac. Alors ? C'est où la sortie ?

Ce n'est pas qu'elle n'aimait pas la forêt mais elle ne lui disait rien qui vaille, comme une sensation un peu glauque, un frisson qui vous parcours l'échine. Elle n'avait pas besoin de lever la tête pour voir les immenses toiles d'araignées décorant les branches et une chose était sûre, elle n'avait pas envie de rencontrer leur propriétaire même si une toile visible veut dire que la locataire l'a abandonnée.

Elle le regardait comme s'il était idiot. C'était une expression qu'elle arborait souvent et ce depuis des années mais elle ne le faisait pas exprès, elle ne s'en rendait d'ailleurs pas vraiment compte mais il était difficile de ne pas se rendre compte qu'on était l'objet de cette expression sur son visage. Ce n'était pas qu'elle le pensait idiot mais plutôt qu'elle considérait sa question comme totalement incongrue. Des choses de l'autre côté des montagnes, il y en avait à la pelle qu'elle voulait voir. Si vieux et il ne connaissait que Imladris, cité dont elle n'avait d'ailleurs, jamais entendu parlé. Elle n'arrivait pas à le croire et à cet instant, elle se demandait d'ailleurs s'il ne se moquait pas d'elle. Mais elle ne le lui aurait pas demandé directement, à la place, elle préféra ignorer sa question que de le regarder bouche-bée comme s'il lui demandait si le soleil se levait toujours du même côté.
Elle n'avait pas d'itinéraire précis, elle nota d'ailleurs cette cité dans un coin de sa tête, même si elle doutait de s'en souvenir. Il lui aurait fallu l'écrire sur un bout de papier mais d'une, elle ne possédait pas de quoi écrire et de deux, elle ne savait pas vraiment écrire, du moins ce n'était pas l'une de ses activités favorites qui étaient plus proches des escapades que des études acharnées. Elle avait été à l'école, mais elle rêvassait trop pour apprendre grand chose et pratiquait trop peu pour ne pas être laissée pour compte, se disant qu'elle aurait toujours le temps d'apprendre plus tard, quand elle serait plus vieille. En lecture, elle ne se débrouillait pas trop mal, juste assez pour pouvoir lire un mot sur une carte et c'est ce qu'elle avait fait avant de partir. Elle n'avait pas de but précis, elle voulait juste voyager. Mais elle avait retenu un nom, celui d'une ville de l'autre côté de la montagne, celui de Rivendell. Voilà où elle voulait aller. Elle avait entendu quelques petites choses sur cette ville et c'était sans doute la raison pour laquelle elle était si surprise qu'il n'ait en tête qu'une cité Elfe. Mais peut-être les hommes l'intéressaient-ils moins que ceux de son peuple. Toujours est-il qu'à partir de cette ville, le monde s'offrait à elle. Par le monde elle pensait à l'ouest de la Terre du Milieu et toutes les étranges contrées qu'elle renfermait. C'était différent du sud et de l'est d'où elle venait et elle avait entendu beaucoup d'histoire. Ce n'était pas son but premier mais elle trouverait peut-être des personnes plus petites qu'elle là-bas, pour autant que sa petite taille la complexait. Mais une chose était sûre, durant ce voyage elle allait rencontrer bon nombre de gens.

Elle qui l'avait jusque là regardé avec diverses expressions plaquées sur le visage depuis la première fois que son regard s'était posé sur lui, voilà qu'elle en arborait une toute autre et bien moins charmante. Cette dernière oscillait entre le choc, l'incompréhension et la colère qui était traduite par son petite froncement de sourcil qui formait des plis au dessus de son nez. Ce pouvait être drôle à regarder mais ce n'était peut-être pas drôle d'en être l'objet.
Monsieur ne savait pas s'il devait lui indiquer le chemin de la sortie. Voulait-il qu'elle reste ici à jamais ? Elle plissa le nez quand il énonça les raisons qui le poussait à lui dire ça. Les araignées.. elle les avait repérées. Non pas qu'elle en avait vu une, non.. elle serait sans doute morte de peur en tombant nez à nez avec un monstre pareil déjà qu'elles étaient effrayantes en taille réduite. Mais pour les orcs, elle n'avait aucune idée de la tête qu'ils pouvaient arborer, leur apparence étant totalement fondée sur son imagination et les histoires qu'elle avait entendu sur eux. Elle n'avait pas vraiment envie de faire leur connaissance mais une part d'elle était curieuse de voir leur immonde face et les créatures qu'ils montaient et tout cela de loin, de très loin. Peut-être perchée sur un arbre tandis qu'ils chutaient dans un précipice.
Mais pour en revenir à la question de la traversée, elle se moquait bien d'en croiser, du moins tentait-elle de s'en persuader, se disant qu'elle aviserait, qu'elle courrait, ou encore qu'elle serait assez petite pour se faufiler dans un trou et leur échapper ainsi. D'un autre côté, elle voulait traverser cette forêt, ce n'était qu'une étape dans son grand voyage et elle ne voulait pas s'attarder trop longtemps. Contrairement à d'autre elle n'avait pas vraiment l'éternité devant elle. Elle réfléchit donc une minute à sa proposition avant de hocher la tête en souriant. J'vais à Riv'dell dit-elle maintenant que le nom de la ville lui était revenue en mémoire. J'serait pas cont' un peu d'compagnie.. si ça peut vous rassurer Elle s'humecta les lèvres en ajustant son sac sur ses épaules et en grimaçant, ajouta. J'promet d'faire 'tention aux orcs et aux araignées Elle savait se faire discrète et courrait plutôt vite, même si cela ne ferait sans doute pas le poids face à ce genre de créatures. Elle ne pensait pas souvent à la mort, elle y pensait tout le temps. Plus à la mort des autres qu'à la sienne mais pour elle, elle n'avait pas grand chose à regretter en quittant ce monde et peu de personnes la regretteraient.. sauf peut-être.. Elle préféra ne pas y penser et leva sa tête vers l'elfe pour le regarder avant de lancer. On y va ?! J'voudrais pas m'enraciner Et elle attendit qu'il lui montre la direction à suivre avant de s'élancer le pas léger.

Elle avait parcourut maintes forêts dans sa vie. Non. En fait, qu'une seule qui puisse être qualifiée de forêt et en comparaison de celle-ci, l'appellation de bois lui aurait sans doute mieux convenu. Non loin de sa ferme natale mais à quelques heures de marche tout de même, se trouvait une forêt qu'elle connaissait bien pour y avoir passé beaucoup de temps plus jeune. Elle n'avait pas eu le temps d'en explorer son entièreté vu son nombre d'hectare mais elle connaissait chaque arbre, chaque souche, chaque caillou de la partie qu'elle avait parcourut et y régnait en maître.. ou plutôt en reine. La forêt était son endroit préféré pour s'évader car sous la pénombre des arbres, seule dans la sylve, elle pouvait s'imaginer être qui elle voulait sans qu'on ne vienne la déranger. Elle s'était souvent imaginé y vivant seule, survivant grâce à son sens de l'adaptation et avait tout aussi souvent songé quitter sa famille pour y vivre définitivement mais chaque fois, chaque soir elle rentrait bien sagement retrouver ses parents qui depuis longtemps ne lui demandaient plus de comptes quant à ses escapades.

Son voyage n'avait en tout cas, plus rien d'une simple balade en forêt.. voir même d'une simple escapade tout court. Non seulement parce que la forêt qu'elle parcourait était plus grande que tout ce qu'elle avait vu jusque là, plus grande qu'une ville, plus grande qu'un comté, mais parce qu'en plus d'être habitée par des elfes, elle était d'après son compagnon de route, bien plus dangereuse qu'elle en avait l'air. La jeune fille se demandait comment cette forêt, dont le qualificatif de forêt était un euphémisme, pouvait être plus dangereuse qu'elle en avait l'air. Le vieux pêcheur l'avait déjà mise en garde contre son hostilité, lui intimant de ne pas quitter le chemin pavé pour ne pas se perdre. Il avait dit que peu de personnes sortaient de la forêt, bien moins qu'il n'en entrait. Mais la petite n'avait prêté qu'une oreille distraite à ses élucubrations, d'autant plus qu'il peinait à dessoûler de la veille.
Il en avait fallu peu pour surveille ses alentours car les arbres qui l'entouraient n'étaient pas très accueillant. Si la plupart s'étendaient droit vers le ciel, le masquant ainsi à sa vue, certains semblaient se tordre de douleur, jetant leurs énormes branches en tout sens. Tout cela était accentué par le peu de luminosité qui parvenait à traverser les branchages épais au dessus de sa petite tête. Mais c'était sans compter sur les immenses toiles d'araignées s'étendant comme des voiles et pendant, déchirées, des branches. Il ne fallait pas avoir beaucoup d'imagination pour se demander quel insecte pouvait produire une toile de cette taille. Reste que le fait que quelqu'un, un elfe de surcroît, l'accompagne un bout de chemin, la rassurait un tantinet.

Mais de cela, elle n'en avait pas conscience. Ou du moins, était-elle douée pour se voiler la face et faire l'impasse sur ce genre de sentiment qu'elle reléguait alors dans un coin sombre de son esprit jusqu'à ce qu'ils resurgissent à nouveau dès qu'ils en trouvaient l'occasion. Elle était brave, elle était courageuse, elle était téméraire, elle n'avait pas froid aux yeux. Voilà ce qu'elle était. Mais voilà ce qu'elle était dans la sécurité d'un village et non perdue au milieu du danger.
En cet instant, elle affichait toujours la même expression. Celle qui disait : il se moque de moi ou il est sérieux. Mais tout ce qu'elle dit fut de l'ordre de C'était pour rire Elle avait beau scruter son visage de temps à autre pour essayer de deviner ce qu'il pensait, elle n'arrivait pas à le saisir et avait fini par abandonner en mettant sa rigidité physionomique pour une caractéristique elfique. A vrai dire, plus elle passait de temps avec lui -même si le temps était un concept qui différait d'un être à un autre et que ce n'était que peu de temps en réalité- plus elle se demandait s'il était capable de plaisanter, ou s'il avait le don de masquer ses plaisanteries.
Des orcs.. elle était certes curieuse d'en rencontrer mais leur évocation sur le chemin de Rivendell fit naître un sentiment mêlant excitation et appréhension, serrant son petit cœur. Elle n'était pas totalement dénuée de sens et savait qu'ils étaient dangereux. Jamais elle n'aurait été se jeter directement entre leurs mains juste par curiosité. Il n'y avait que les plus fous pour tomber dans la gueule du loup juste pour savoir ce qu'il y a dedans.

Si elle avait été seule, elle n'aurait sans doute pas retrouvé son chemin et se serait perdue à jamais dans la forêt pour finir comme repas digestif. Mais si elle avait été seule, elle n'aurait pas perdu son chemin, désorientée comme elle l'avait été par l'apparition subite de l'elfe. Avançant bon train, elle préféra oublier les allusions aux orcs et araignées de Legolas et se retourna pour voir s'il la suivait. Silencieux et discret comme il était, elle eut plusieurs fois un doute et se sentait un peu comme une vache portant une cloche autour du cou. Aussi, elle ralentit sensiblement le pas, se concentrant au maximum pour faire le moins de bruit possible mais malgré tout ses efforts, rien n'y faisait. Entre ses chaussures raclant le sol, son bardas tapant contre le bas de son dos, sa respiration lourde et le sang qui battait à ses oreilles, elle avait l'impression qu'on pouvait l'entendre à des kilomètres à la ronde. Inconsciemment, elle craignait d'attirer sur eux des araignées mais avec un peu de chance elle n'en verrait même pas les pattes.
Elle se tourna une nouvelle fois vers l'elfe et lui demanda en chuchotant doucement. Comment vous fait' pour pô fair' d'bruit ? Elle se demandait s'il avait reçu un entrainement secret ou si c'était juste une des nombreuses qualités des elfes. Elle plongea alors dans une réflexion, tentant d'énumérer les possibles différences qui les séparaient en dehors de leurs oreilles et de leur longévité.

La petite fille était de nature curieuse, c'était sans doute ce qui caractérisait le mieux son caractère d'ailleurs. Depuis toute petite, elle ne pouvait s'empêcher de fourer son nez dans tout et n'importe quoi, à partir du moment où cela éveillait son intérêt, et il en fallait peu. Elle n'était pas beaucoup plus vieille aujourd'hui alors on ne pouvait pas dire qu'elle avait changé de ce côté là, on aurait même pu dire qu'au contraire, au lieu de s'assagir avec le temps, c'était de pire en pire et que les moindres détails éveillaient sa curiosité.  Par ailleurs, il se trouvait que ces même menus détails pouvaient attiser cette curiosité et la rendre dévorante. Au moins ne s'ennuyait-elle jamais car elle trouvait facilement de quoi lui occuper l'esprit.

Son intérêt actuel s'était porté sur les elfes, et l'on aurait pu facilement dire que la raison de cet intérêt provenait du fait, qu'elle se trouvait en compagnie d'un elfe, justement. Pourquoi chercher plus loin et s'interroger sur la reproduction des wargs quand on a un spécimen mâle de race elfique sous la main ? Mais son intérêt à elle ne s'étendait pas jusqu'à l'intérêt scientifique de la chose, enfin presque. Elle fut d'ailleurs troublée qu'on lui parle de gêne. Qu'est-ce que c'était un gêne ? Elle n'en savait fichtrement rien mais si cela déterminait quelque chose comme la capacité de se déplacer en silence, elle avait perdu à la loterie. Elle plongea de nouveau dans une profonde réflexion tout  en veillant à lever les pieds pour ne pas marcher sur quelque chose qui produirait un son sec. Mais c'était peine perdue. Pour chaque brindille qu'elle parvenait à eviter, elle en écrasait au moins dix autres,  serrant les dents à chaque fois. Pourquoi s'acharner contre sa propre nature ? Elle ne pouvait pas marcher sans faire de bruit, elle en était juste incapable. Elle devait bien avoir des bons côtés à être humaine, non ? C'était à ce raisonnement qu'elle était parvenue avec le temps, ce à quoi elle réfléchissait.

Elle fut tirée de sa réflexion alors qu'ils bifurquaient sur le chemin. Elle leva la tête pour voir de quoi il parlait et aperçu la rivière. Celle-ci était si sombre qu'on aurait pu la comparer à un long ruban d'étoffe noir, ce qui n'avait rien de bien engageant. Elle eut du mal à croire qu'autrefois, la forêt regorgeait de vie comme il le disait, mais elle ne voyait pas de raison de ne pas le croire. C'était juste difficile d'imaginer un lieu si sombre dans ses beaux jours. Elle devait être magnifique alors, songea-t-elle. Mais il était difficile de douter de la véracité de ses propos au son de sa voix. Un ton mélancolique qui se mariait bien à l'atmosphère du lieu. Brièvement,  elle fut prise d'un frisson et haucha rapidement la tête. Jamais elle ne tenterait de boire de cette eau, si tentée elle revenait en ces bois. Elle était plutôt d'avis de faire le tour s'il y avait une prochaine fois. Toujours est-il qu'elle pressa le pas sans accorder un regard de plus à la rivière.  Se faisant, sans regarder l'elfe, elle lui demanda. Pourquoi est-ce qu'vous n'partez pô ? Pour elle qui n'avait pas eu trop de mal à partir, c'était la question qui s'imposait.

Pour la petite fille qu'elle était, la question était simple et la réponse l'était plus encore. Ce n'était cependant pas le cas pour tout le monde car, si elle n'avait pas d'attache, une personne aussi âgée qu'un elfe ne pouvait être que profondément ancré dans ce paysage, qu'il soit lugubre ou non. Ce n'était cependant pas son jeune âge qui l'avait poussée à poser une telle question, ni plus que celle-ci lui avait semblé évidente mais plutôt ce qu'elle-même ressentait, ce qu'elle-même avait vécu mais elle était trop jeune pour tirer une réflexion plus poussée de son expériences et se mettre à sa place, trop jeune pour voir plus loin que la simplicité. Un lieu comme était la forêt pour Legolas, elle n'en avait plus mais elle avait surtout enfouis ce sentiment qui tentait de resurgir, celui d'appartenir à un endroit. Être chez soi. Elle voyageait depuis peu et pourtant elle avait presque oublié ce que c'était, elle sentait qu'elle n'avait pas d'endroit comme ça. Il y avait pourtant bien un endroit où elle pouvait retourner mais ce n'était pas chez elle et elle ne s'y sentait pas la bienvenue.. pas plus qu'elle ne s'y sentait chez elle. Elle venait de là, de la maison de son oncle et sa tante qui l'avaient gracieusement accueillis après le tragique accident, et elle n'avait eu aucun mal à le quitter.
Les paroles de l'elfe firent resurgir bien plus qu'un simple sentiment, des souvenirs. Les souvenirs d'un endroit où elle se sentait chez elle, des souvenirs heureux accompagnés de chaleur et d'une bonne odeur, des souvenirs qu'elle gardait sous clé dans un coin de son cœur. Elle ne voulait pas qu'ils remontent, sans quoi les larmes auraient commencés à couler et son cœur à saigner. C'était douloureux, trop douloureux pour elle et elle referma son cœur, du moins en apparence car le mal était fait. Ce besoin d'avoir un endroit où elle se sentirait chez elle, elle se voilait la face en se disant qu'elle n'en avait pas besoin mais du haut de ses douze ans, la nécessité de posséder un endroit où retourner, où on est en sécurité, était aussi forte voir plus que chez quelqu'un de plus âgé. La différence résidait dans son tempérament de cochon ou plutôt de mule.

Elle ne s'en était pas rendue compte, non pas que cela soit visible de toute manière, mais elle n'était apparemment pas en compagnie de n'importe quel elfe. C'est la conclusion qu'elle tira le plus simplement du monde quand elle apprit que le roi comptait sur lui et de cette petite information, son esprit s'emballa mais elle ne parvint jamais à la conclusion qu'il pouvait être prince, pas plus qu'elle ne posa les questions qu'elle avait en tête. Pourtant, elle n'était pas du genre à mettre un frein à sa curiosité mais sans doute était-elle encore secouée par le tour qu'avaient pris ses pensées plus tôt. Quand elle le regarda, ce fut d'un œil nouveau et elle avait presque l'impression qu'il avait grandit entre temps mais ce n'était bien sûr qu'un tour joué par son imagination débordante. La curiosité était finalement sur le point de prendre le dessus, quand ils s'arrêtèrent sous un arbre. À vrai dire deux arbres il n'y avait que ça, mais ce qui la sortie de ses pensées, fut la voix de l'elfe lui annonçant que leurs chemins se séparaient.
Le temps était passé à une vitesse inimaginable, à croire que cheminer avec un elfe changeait le cours du temps. Voyaient-ils le temps défiler à cette vitesse ? Comme un battement de cœur ? Elle n'eut pas le loisir de lui poser la question car une autre urgeait d'être posée. Elle leva son visage vers lui et après avoir tripoté sa lèvre supérieure pendant quelque secondes, demanda rapidement, comme pour se débarrasser de la question. C'ment on va à Edoras ? Elle avait eu un changement de cœur mais ce n'était peut-être pas un mal que de retourner sur les traces du passé. Un moyen de renouer avec lui et peut-être de colmater plus sainement des blessures. Elle avait en tête de retrouver la ferme de son enfance, bien qu'elle n'ait pas quitté cette enfance, étant encore une enfant. Cette dernière se trouvait loin de la ville, tout au nord mais en venant du nord, ce serait sans doute plus court. Son aventure ne faisant que commencer, elle prenait des allures de pèlerinages vers le passé.