[Sauron] - Nutrisco et extinguo ft Smaug

Laketown se mourrait doucement comme un feu étouffé par ses propres cendres. Les pillages qui œuvraient sur les côtes  apportaient des conséquences directes et désastreuses aux pauvres hères qui survivaient sur les rives du lac d’Esgaroth. S’ils imaginaient quel endroit avait été le trou misérable dans lequel ils essayaient de retrouver un peu d’espoir avait autrefois  été bercé par une ville puissante. Un battement de cils depuis ce temps-là et une éternité de misères pour ces humains. En vérité, l’ombre n’éprouvait aucune compassion concernant leur sort, elle louvoya entre les ruelles désertées par les âmes encore vaillantes. Ils étaient si faibles, si aisément manipulable dans un tel état de détresse, cela en était presque intéressant. Mais il ne se permit nul autre détour, il avait une tâche à accomplir.
L’ombre s’infiltra dans les minces interstices, les plus petits fissures, saturant la pierre de sa présence pour mieux s’y frayer un passage. Il s’y glissa comme on entre dans un endroit dont on est déjà maître, aussi souple qu’une volute de fumée et aussi silencieux qu’un songe. Il était en réalité un cauchemar pour la Terre du Milieu plus qu’un doux rêve selon les dires de chacun. Qu’ils étaient naïfs de croire qu’il n’était qu’un cauchemar, bientôt il reviendrait, il se vengerait de ceux qui avaient cru bon pouvoir l’enfermer, ils ploieraient l’échine sous son regard ardent et briserait leur volonté, exactement comme il avait brisé ses chaines. Il se savait encore faible pour user de tout son pouvoir à des fins diplomatiques, d’autres batailles viendrait, il le sentait. La Lorien que surveillaient ses orcs se mourrait petit à petit comme un fruit qui se rétracte dans sa coque. Il avait pris possession de Mirkwood avec aisance. Les araignées n’avaient pas été difficiles à convaincre. Lentement, mais sûrement, il plaçait ses pions et les humains faisaient le reste. Si habilement manipulables, de simples rumeurs convoyées par le vent et leurs vices innées les menaient sur des pentes dangereuses pour eux-mêmes. Les pillages qui avaient lieux et les batailles menées éloignaient la vigilance du Rohan, pour peu qu’ils l’aient souhaité, les dundlendings auraient pu réclamer vengeance à l’encontre des seigneurs des chevaux.
Et l’œil s’ouvrit sur le dragon qui sommeillait sous les montagnes de pièces d’or et de richesses étincelantes. Le chatoiement des flammes se reflétât sur le minéral en milliers de grains de lumière éparse.
Il était là, il était au cœur de cette montagne qu’il espérait devenir bientôt sienne, pour un temps, avant que ce qu’il espérait ardemment s’accomplisse et qu’il puisse revenir enfin, puissant et terrible, auréolé de la gloire de Morgoth et de l’aura sombre donné par le pouvoir pur qu’il avait autrefois possédé.

« Je vous salue, dernier des Grands Dragons » énonça la voix profonde aux accents suaves de Morgoth qui avait charmé tant d’âmes auparavant. Il n’était plus habitué à converser avec des êtres d’une certaine intelligence, les orcs, les gobelins et les Uruks Haïs ne comprenaient que la droiture et la sévérité, mais il était là un cœur qu’il se devait de gagner, par la ruse et de doucereuses paroles s’il voulait arriver à ses fins.
Elle se répercuta contre les parois, les tréfonds du royaume nain en écho. Il s’exprimait dans une langue inconnue des hommes, des nains et des elfes, il s’exprimait avec la langue sombre du Mordor qui était la sienne et il savait que le reptile serait apte à l’entendre, à la comprendre. Mais déjà il sentait que sa venue ici ne perdurerait pas, ils devaient se hâter de conclure un accord, sa puissante magie ne passerait point inaperçu et il ne pourrait la tenir longtemps. Le reptile s’éveillera de son sommeil attentif il le savait, car il en était toujours ainsi lorsque deux forces puissantes se rencontraient. Il était invisible et pourtant il était présent dans chaque particule de matières autour du dragon, il pouvait lui caresser l’échine s’il le souhaitait tout comme appuyer sur cette blessure jamais refermée, là où manquait une écaille dans son armure. Il aurait pu, mais ce n’était pas ainsi qu’on traitait ses futures alliés, pas encore.