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Chasseur chassé. [Flashback][Fili][Terminé]
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 Chasseur chassé. [Flashback][Fili][Terminé]

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MessageSujet: Chasseur chassé. [Flashback][Fili][Terminé]   Chasseur chassé. [Flashback][Fili][Terminé] EmptyMer 28 Mai 2014 - 14:31


Chasseur Chassé


L
e groupe se dirigea vers les contreforts des falaises et s'y abrita. Je toussais, repoussais ma capuche et secouais la tête pour dégager la neige qui s'y infiltrais vicieusement. Les flocons glacés tournoyaient autour de nous depuis plusieurs heures, quasiment invisible dans la tempête qui s'amenait. Je me tournais vers mes compagnons, et eus un grognement devant leurs mines dépitées.

« La bande d'orc n'est plus loin. Nous ne pouvons pas la laisser saccager les terres alentours. »

Je fis quelques pas pour sortir de l'abri donné par la formation rocheuse et tentais d'y voir quelque chose dans le brouillard qui se levait tel une nappe blanche et radieuse. Le soleil était voilé, et ma vision était des plus difficile. Par où étaient-ils partis ? Nous chassions un groupe d'orcs, une bonne dizaine d'individus, et cela faisait plusieurs kilomètres que nous n'avions vu leurs traces. Les avions-nous perdus ? Non, cela ne se pouvait. Je m'accroupis, faisant siffler le cuir qui me couvrait. Tous, nous portions fourrures et tuniques pour nous tenir chaud en cette saison froide ; la neige crissait sous nos pieds, dangereuse de par le fait qu'elle pouvait tromper. Qui n'avait jamais transpercé une fine couche de glace en la croyant plus dure ? Depuis le départ, nous étions sur nos gardes, non seulement à cause des ennemis que l'on chassait, mais à cause du temps. Hélas, à présent que nous nous étions bien éloignés des Montagnes Bleues, la tempête se levait. Le vent sifflait, et je remis rapidement la capuche bordée de fourrure ; mon nez et mes joues étaient rouges, asséchés par les brises glaciales. Mon regard aussi pâle que la glace qui nous entourait observa la terre à la recherche de traces, mais rien. Je grommelais tout bas, me relevais et me tournais vers Fili.

« Ils n'ont pas pu disparaître ; ils doivent avoir un campement ou un abri : la tempête se lève. »

Mon regard se tourna vers les plaines et les montagnes plus loin. La neige recouvrait tout de sa chape blanche et polaire. Je frissonnais un instant, et repris ma lance dans mes mains. Nous étions six, deux archers, un épéiste, un garde qui maniait la hache, Fili et moi-même. Cette mission aurait été des plus simples si le temps n'avait pas fait des siennes ; je pestais à voix haute un juron de sous les fagots. Mes comparses eurent un sourire ; ils étaient à présent habitués à mon caractère borné et quelque peu familier. Je clignais des yeux, aveuglée par les flocons que chassait le vent, et pestais une nouvelle fois.

« Si nous avançons encore, la tempête risque de nous forcer à prendre un abri quelque part et qu- »
« Les voilà ! »

L'un des archers n'eut pas le temps de lever son arme qu'une lance ornée de plumes lui transperça le ventre. J'écarquillais les yeux ; l'odeur âcre du sang monta à mes narines et je fis volte-face : debout sur les hauteurs, ils semblaient faire fi du vent qui hurlait comme un monstre sanguinaire. Je frémis de nouveau, lance positionnée devant moi. Le second archer avait brandit courageusement son arme, mais la flèche qu'il décocha n'atteignit par sa cible, et dans un rire gras, le groupe d'orcs nous tomba dessus.

Le chef était monté sur un warg, et la bête rugit à l'appel du festin que nous devions composer. Une ligne d'archers, quatre ou cinq peut-être, resta en haut et se mit à nous cribler de traits. Je gémis quand l'une des flèches heurta mon épaule ; j'avais heureusement mis mes épaulières et mis à part la douleur du choc, je n'eus pas de mal. Mais Fili, à mon côté, reçut une flèche à l'épaule. Un cri se bloqua dans ma gorge ; ils nous entouraient, l'un de nos archers était à terre et Fili était blessé ! Prise d'une fureur rouge qui voila mon regard j'en mis deux à terre et fichais leurs têtes difformes du fer de ma lance. J'eus un rugissement, mais deux autres étaient déjà sur moi.

« Fili ! » criais-je ; ce n'était pas un appel à l'aide mais une supplique hurlée aux vents qui nous entouraient.

Ma voix était vibrante d'émotions ; était-il mort ? Si il l'était, jamais je ne me le pardonnerais ! Je me débattis entre les bras du groupe qui nous avait fait prisonnier, et le chef s'approcha de nous, un sourire amusé sur son visage couturé de cicatrices. Ils étaient plus nombreux que prévu : malgré la bonne douzaine d'orcs à terre, il en restait bien une bonne autre dizaine. L'archer touché gisait, cadavre encore chaud, et j'eus un hoquet de colère. Ce n'était pas sensé se passer ainsi ! Fili ! Fili ! Mes pensées se tournaient sans cesse vers mon ami dont l'épaule avait été traversée.

Nous pouvions encore les vaincre. Nous le pouvions encore. Mais sans Fili, cela m'importait peu, je pouvais tout aussi bien mourir. Je me sentais coupable ; c'était moi qui avait insisté pour qu'on prenne part à cette expédition de chasse. Lui qui voulait voir le monde, il était servi ! Je grognais encore : il n'était pas mort ! Il n'en avait pas le droit, il ne pouvait pas mourir aussi bêtement, il était un Durin que diable ! Et le combat repris quand je mis un coup de boule à l'orc qui s'approchait de moi. La tempête sifflait plus fort, glace venimeuse qui transperçait tout comme des bouts de miroirs. Mon bras était en sang ; quand avais-je été blessée ? J'ignorais ça, j'ignorais tout, et je cherchais à me rapprocher du blond qui se battait toujours malgré son épaule.




Dernière édition par Ilhy le Lun 2 Juin 2014 - 21:08, édité 2 fois
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MessageSujet: Re: Chasseur chassé. [Flashback][Fili][Terminé]   Chasseur chassé. [Flashback][Fili][Terminé] EmptyJeu 29 Mai 2014 - 1:16

Compagnons de sang et d'armes.

Ce n'était même plus de la neige, c'était du blizzard ! Malgré notre abri rocheux, le froid mordait mes joues et ma pilosité le combattait à peine. Ce n'était plus une chasse, juste une course d'endurance à celui qui survivrait et qui ne tomberait pas dans une congère. C'était ça, le plus traître. La neige recouvrant un trou, et où le froid était tel que ça avait fini par former de la glace. Nous devions à la fois traquer des orcs et faire attention où nous mettions nos pieds, ce qui était doublement fatiguant.

Les montagnes bleues étaient assez loin derrière nous désormais et cela me rendait un peu nerveux. Déjà le couvert de la roche me manquait et cette plaine de neige m'angoissait. Le pire était que nous n'arrivions même plus à remonter la piste qui menait au groupe qui sévissait dans les terres environnantes. Je ne savais pas si c'était une excellente idée que d'avoir accepté de suivre cette mission... On allait montrer notre courage, Ilhy et moi, c'était certain, mais d'un côté... S'il nous arrivait quelque chose ? Quelque chose de grave. J'étais l'héritier de Dùrin et si je mourrais...

J'écoutai avec un petit sourire la jeune naine qui faisait part de ses impressions en me sentant fier. Fier de la compter parmi mes amis et d'être son compagnon d'armes. Mais elle n'eut pas le temps de finir sa phrase que notre archer posté en sentinelle poussa un hurlement terminé dans un horrible gargouillis écoeurant. Je fixai un instant son sang s'écouler et tâcher la neige immaculée à ses pieds puis me repris. Ce n'était pas le moment de me laisser bêtement distraire et perdre pied !

Dans un cri couvert par celui du warg et des orcs, je me jetai vers eux, les épées au clair et en tua un rapidement. Ca, c'était fait. Le problème ne venait pas de ceux que je combattais mais bel et bien des archers restés en retrait. Je n'arrivais pas à les voir donc eux non plus, je suppose, mais ils tiraient au hasard en espérant nous atteindre. Plutôt futé comme technique. J'entends des "poc" et des "pof", bruits de flèches tapant contre la roche ou s'écrasant dans la neige et soudain, un hurlement déchira l'air. Mon hurlement. Une flèche venait de se ficher dans mon épaule. Je tombai à la renverse dans le coup, surpris et souffrant l'espace d'un instant mais je me focalisai sur le combat.

La douleur était bien présente mais je devais continuer, me relever... Je ne pouvais pas mourir maintenant. Je cassai la flèche pour ne pas qu'elle me gêne trop et grognai de douleur. En voulant relever mes bras pour frapper un orc qui arrivait, je grimaçai et haletai pour finir par me contenter d'une seule arme. Heureusement mon bras droit pouvait se mouvoir encore "tranquillement". Je fauchai mon ennemi qui arrivait en couinant et jetai un regard alentours, m'inquiétant de l'état d'Ilhy. Avec le brouillard, je ne vis rien d'autre que des formes qui se tapaient dessus mais un cri dans la purée de poids fixa mon regard sur une silhouette immobile. Elle était là...

Je tentai de me rapprocher d'elle et voulus lui répondre, lui montrer où j'étais mais un orc plus coriace me sauta presque littéralement dessus. Malgré mon épaule ensanglantée et plus que sensible, je combattis avec rage, bien déterminé à ne pas mourir si tôt et si pathétiquement. Oh que non, j'étais le Lion de Dùrin et je leur montrerais à ces orcs, que le cuir des nains était coriace à tanner ! Je réduisis mon adversaire d'une tête, d'un coup peu net mais qui avait fait son affaire et le laissai gésir ici, répandant son sang pas vraiment rouge, pas vraiment noir, sur la neige.

« ILHY ! »

Je rejoignis le groupe, me rendant compte que je m'étais éloigné et que ça aurait pu m'être fatal. La silhouette de ma compagne d'armes se détacha dans le brouillard, à mesure que je me rapprochai et vit le chef des orcs se gausser de nous. Le second archer se battait maintenant au corps à corps à nos côtés et tout le monde était encore debout, à peu près. Seul l'archer pris par surprise au début gisait là, dans la neige. Je me postai à côté de la jeune naine et soufflai un instant très court. Déjà un orc vint tenter de me tuer et je l'esquivai de justesse, lui envoyant mon bras blessé dans le ventre. La douleur se répercuta jusque dans l'épaule et je grimaçai mais tins bon. Je lui plantai mon épée après avoir récolté une entaille au bras droit et soufflai discrètement à Ilhy.

« Ca c'est du sacré pays ma foi ! »

Si je me référai aux sons et à mon "comptage", il ne restait plus que le chef à tuer. Le chef, et son warg, ce qui ne serait pas une mince affaire. En étant le plus discret possible, je me rapprochai de l'archer encore vivant, alors que l'orc nous tournait autour tel un rapace cherchant sa proie et lui murmurai ce que j'avais en tête.

« Adur, reprends ton arc et essaye de viser le warg. Sa tête, si tu peux, ou ses jambes. Si la bête tombe, l'orc suivra et on n'aura aucun mal à lui tomber dessus. »

Nous n'étions que des nains et à côté du warg, nous faisions pâle figure. Un orc n'était jamais très grand et s'il l'était, c'était d'une ou deux tête, rien d'insurmontable. Je comptais sur Adur pour réussir son coup, au moins pour affaiblir la bestiole, qu'on puisse la faucher. Ilhy était la mieux lotie du groupe avec sa lance, elle pouvait attaquer à une distance raisonnable, moi par contre... Mon épée était assez courte et j'avais l'épaule gauche en compote.

L'archer envoya une flèche qui rata sa cible tout d'abord, il avait du mal calculer la trajectoire avec le vent glacial qui soufflait mais la seconde et la troisième atteignirent le warg, je ne savais trop où, mais il était touché, je l'entendis à son couinement. Un "pof" étouffé nous indiqua que le chef avait du se laisser tomber à terre et le garde et moi lui fondîmes sur lui. En quelques coups bien placés, il n'eut pas le temps de beaucoup réagir que son dernier souffle quittait son corps. Seul le garde avait eu la jambe écorchée dans notre dernière petite bagarre.

Je soufflai enfin, pantelant, et grimaçai alors que la flèche plantée dans mon épaule envoya finalement de vraies décharges à mon cerveau. Un coup d'oeil sous ma tunique en tissu, cachée sous toutes mes couches de vêtements et de peau, me permit de voir le sang qui coulait de la vilaine blessure. Je cherchai enfin du regard Ilhy, pour m'enquérir de sa situation. À première vue, elle ne semblait pas gravement blessée, sauf à un bras, où le tissu était déchiré. Je frissonnai un instant en pensant que nous aurions pu être à la place des orcs étendus par terre ou de notre archer... Je m'approchai de la naine, l'air soucieux.

« Ca va aller pour... »

Je ne pus finir ma phrase qu'à nouveau la douleur me fit serrer les dents.

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MessageSujet: Re: Chasseur chassé. [Flashback][Fili][Terminé]   Chasseur chassé. [Flashback][Fili][Terminé] EmptyJeu 29 Mai 2014 - 2:20


Chasseur Chassé


L
e combat avait commencé et c'était un véritable chaos. Fili avait disparu de ma vue, et alors que l'écho de mon cri se répercutait et que j'enfonçais ma lance dans le torse d'un orc, sa voix grave me répondit un peu plus loin. Il était vivant ! Je me battis avec plus de frénésie encore, malgré le vent tourbillonnant et glacé qui nous sautait dessus comme une entité vivante et meurtrière. Je sentais mes doigts gourds se serrer sur la hampe de bois, et mon nez reniflait sans cesse, mes yeux clignant pour chasser les flocons qui se nichait sur mes rétines. La neige craquait autour de nous, sanguinolente d'un sang pâteux, noirâtre, rouge sombre à l'oeur écoeurante.

Fili se retrouva près de moi, m'apparaissant comme par magie. Il jaillit du vent coulis et blanc, me faisant presque sursauter. Sa présence soudaine et familière fit naître un sourire féroce et sauvage sur mes traits ; je ne répondis pas à ses paroles et me contentais d'observer autour de nous. Combien en avions-nous tué ? Cela faisait plusieurs minutes que personne n'avait été attaqué et j'en vins à croire qu'il ne restait plus que le chef cavalier. Sa monture monstrueuse grognait, presque invisible sur son éperon rocheux dans le blizzard.

La suite fut rapide, trop pour que mon esprit embrumé de froid et de sang n'y fasse attention. Une flèche, deux, trois, puis Fili et Adur terrassèrent le dernier ennemi. Je restai interdite, immobile, entourée des autres nains tout aussi hagards que moi. Certes, nous avions gagné, mais à quel prix ? Mon regard pâle, un instant fier, se posa sur la dépouille de notre ancien compagnon et un écoeurement monta en moi, nausée quasiment palpable, malaise pulsant au rythme de ma douleur. J'avais été blessée, mais j'étais trop sous le choc pour réaliser vraiment que j'avais mal. Je relevais le visage, les traits tirés, et grimaçais en voyant approcher Fili. Je fis un bond en avant et passais un bras sous le sien, ma main contre son dos pour l'aider à se tenir droit ; la hampe de la flèche avait été cassée mais un tiers du trait était encore dans la chair. Je voyais le bout dépasser, mince tube de bois à l'extrémité éclatée. Il devait souffrir le martyr.

« Non, ça ne va pas ! » le grondais-je ouvertement, me fichant qu'on puisse m'entendre. Ce ne devait même pas être le cas, au vu du vent qui sifflait à nos oreilles. J'étais inquiète, et mon regard s'était allumé de lueurs anxieuses.

Allait-il réussir à tenir pour un retour ? Je me tournais vers nos amis, qui s'étaient approchés du cadavre de notre compagnon. J'allais leur demander de m'aider à porter l'héritier de Durin, quand un craquement me fit chavirer. Je vacillais, Fili à mes côtés, puis, comme dans un rêve, je m'enfonçais jusqu'aux genoux, et enfin le sol céda sous notre poids. La neige, la terre, nous roulâmes, moi et Fili, sans que je puisse nous arrêter. J'avalais glace et morceaux de sol gelé, je toussais, suffoquais un instant. Ma tête tournait au moins autant que le monde autour de nous, mais je m'accrochais presque désespérément à mon ami. Si je le perdais, nous mourrons. Je fermais les yeux, et laissais mon monde m'engloutir comme un abysse éternel.

Quand je rouvris les yeux, nous étions dans une espèce de grotte. Je me relevais, percluse de douleur, et fis quelques pas : la cavité où nous étions communiquais en deux endroits vers l'extérieur. Le plafond de glace avait été crevé - il était à présent quasiment comblé de décombres et de neige. Un tunnel menait également à l'extérieur, je voyais les lueurs de la tempête qui faisais rage. Depuis combien de temps nous trouvions nous dans cet abri glacial ? Je me retournais vers la coulée de neige, et remarquais que Fili avait réussi à s'adosser à un mur. Je m'approchais de lui et remarquais sa tunique raidie de glace sanguinolente. Il allait falloir réchauffer cet abri le temps que le blizzard passe ; nous n'avions de toute façon pas le choix avec son épaule dans cet état là. Je retirais une moufle et posais ma main tiède contre sa joue. Il avait froid, et je réprimais mon angoisse qui flamboyait en moi.

« Fili ? Fili, écoute-moi. Tu m'entends ? Fili ?»

Je tapotais sa joue, puis le laissais revenir à lui. Je m'assis en tailleur près de lui en grimaçant ; mon bras gauche avait été entaillé et de la terre s'y était installée ; le sang avait coagulé par-dessus et je sentais la blessure sale pulser, brûlante. Mais ce n'était pas le moment d'y penser. J'ouvris d'un geste rapide mon manteau bordé de fourrure et sortis de sous ma tunique une petite bourse de cuir qui me servait de sac. Je pris mon outre d'eau et en versais un peu dans ma main ; je passais délicatement un peu du liquide sur les lèvres de mon ami afin qu'il puisse boire le filet humide.

« Fili, nous sommes dans une grotte. Nous avons traversé le plafond de glace d'une espèce de caverne ; nous ne pouvons pas en sortir à cause de la tempête, d'accord ? Le plus important, pour le moment, c'est de trouver de quoi nettoyer ta blessure. Montre-moi ça. »

J'essayais de prendre un ton impérieux, mais ma voix coassante était trop irrégulière : j'étais paniquée à l'idée de voir l'étendue des dégâts causés par la flèche. Tout en l'aidant à écarter les pans de sa tunique, je songeais à ce que j'allais devoir faire : un feu, sûrement ; mais le fallait-il vraiment ? Si il y avait encore des orcs dans le coin ... Néanmoins, mourir de froid n'était pas une solution non plus. Un petit feu fait avec parcimonie nous permettrait de nous tenir chaud sans faire trop de fumée. Faire manger Fili, nettoyer et panser sa blessure. J'allais devoir faire bouillir de l'eau ...

Mes doigts trouvèrent le morceau de flèche dur ; le trait avait transpercé de part en part son épaule, et c'était sûrement le mieux qui était. Si le bout de fer était resté coincé dans la chair, cela aurait été une autre pair de manche. J'inspirais, la peur au ventre en imaginant ce que j'allais devoir faire. Les bords de sa blessure étaient gonflés et gorgés de sang, brûlants et palpitants. Mes doigts touchaient sa peau, et ce contact m'électrisait autant qu'il m'effrayait. Je ne pensais pas à ce que je faisais, au caractère presque interdit de mes gestes. Il était un prince, et je n'étais qu'une garde, même plus noble. Et pourtant, je me retrouvais près de lui, à tripoter son épaule, son torse visible. Pourtant, malgré qu'il fut séduisant, je n'éprouvais pas exactement de désir. J'avais conscience de ce que je faisais, mais je repoussais toutes mes émotions sauf une : l'envie pressante et insistante de le faire survivre. Peu importait ce que je devais faire pour cela. Mes doigts parcoururent un instant son torse, pour déceler si il n'avait rien de cassé, au cas où la flèche aurait eu des répercussions, mais non. Mes doigts palpaient sa peau tiède, alors que le vent et le froid y formaient la chair de poule ; mes bras firent écho et je perçus un frisson qui naquis en moi, fourbe et insidieux comme du poison. Je n'avais pas le temps pour cela ; pas le temps de m'appesantir sur ce que ce contact me faisait ressentir.

« Mon ami, je vais tirer pour sortir la flèche. Mais tout d'abord, faire un feu et bouillir de l'eau ... Tu vas bien ? Comment est la douleur ? Ne me mens pas, ni ne négliges rien. »

J'étais penchée sur lui, et je refusais de trembler. En cet instant, j'étais totalement coupable. J'étais celle qui avait insisté pour venir sur cette mission. Les nains de notre groupe avaient-ils tentés, au péril de leurs vies, de braver la tempête pour nous retrouver ? J'espérais que non, et je le craignais en même temps. Je le délaissais un moment pour aller chercher des morceaux de branchages morts ayant dévalés avec nous la caverne, et les installais près de nous. Je fis rapidement du feu en frottant deux silex l'un contre l'autre, et une légère flamme monta enfin.

De toute façon, j'allais devoir sortir. J'allais avoir besoin d'herbes médicinales, ne serait-ce que pour arrêter le saignement et stopper une possible infection. J'avais envie de me pelotonner contre Fili et de le laisser me protéger ; en cet instant, je me sentais infiniment misérable et faible. Mais il était mon ami, et il était blessé par ma faute. Je reccueillis un peu de neige dans mon manteau et le suspendis au-dessus du feu pour que la neige fonde. Puis, je m'accroupis près du blond. Il était l'héritier de Durin et mon devoir était de le sauver, avant même de penser à ma propre vie.

Pour être honnête, même si il n'avait pas été Prince sous la Montagne, j'aurais fait de même. Ces mois passés en sa compagnie, à apprendre à le connaître et à l'apprécier, en avaient fait un ami cher et précieux. Ma main caressa de nouveau sa joue, presque tendrement. Je m'accrochais à son regard, y cherchant le contact, l'espoir que je ne faisais pas tout cela pour rien.

« Fili ? Fee ? Surveilles le feu, tu veux bien ? Je sors un instant chercher des herbes. Je t'en prie, ne t'endors pas, je n'en ai pas pour longtemps, d'accord ? Fee, ça va aller, je te le promets. Fili ... »

Le dernier mot, son prénom, n'avait été qu'un murmure, alors que mes doigts se recourbaient contre sa peau. J'aurais voulu lui donner ma force, prendre sa blessure. J'aurais voulu être à sa place, et prendre sa douleur. Il ne méritait pas ça. Je me redressais soudain et sortis à la recherches d'herbes, cassant la croûte de neige avec une hargne que j'éprouvais uniquement pour moi-même. J'avais mis sa vie en danger, et pourquoi ?

Rien ne valait qu'il meure.

Rien.





Dernière édition par Ilhy le Lun 2 Juin 2014 - 21:08, édité 1 fois
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MessageSujet: Re: Chasseur chassé. [Flashback][Fili][Terminé]   Chasseur chassé. [Flashback][Fili][Terminé] EmptyJeu 29 Mai 2014 - 16:59

Compagnons de sang et d'armes.

J'eus un peu honte quand Ilhy vint me soutenir en passant son bras sous le mien mais c'était quand même réconfortant et je ne me sentais pas vraiment dans mon assiette. Je ne compris juste pas vraiment pourquoi elle semblait si en colère contre moi. Je lui avais seulement demandé si ça allait ! En étant coupé par ma propre douleur, certes, mais... Je m'inquiétais pour elle, était-ce si mal ? Je savais bien qu'elle n'aimait pas être couvée comme une femme "précieuse" mais je m'étais enquis de son état comme je l'aurais fait pour Adur ou même Kili.

Je haussai les épaules et au même moment, un bruit étrange vint frapper mes oreilles. Un horrible craquement, sous nos pieds. Les entrailles de la terre se déchiraient et bientôt, nous tourneboulâmes avec Ilhy, dans une ronde de terre, de neige, de sang et de corps entremêlés. J'avais imaginé un rapprochement physique plus doux que ça... Enfin, ce n'était pas le moment de penser à cela. La flèche dans mon épaule me faisait atrocement souffrir quand elle touchait n'importe quel obstacle - autant dire à chaque seconde qui passait. J'ignore encore si ce fut la descente ou l'intensité de la douleur mais je perdis conscience à un moment donné.

Je me réveillai, un temps indéfini plus tard, et m'approchai d'un mur rocheux pour m'y adosser. J'aurais voulu traîner Ilhy avec moi mais j'avais à peine la force de me mouvoir à la manière des limaces dans les salades de Kali parfois. Je tremblais de froid et mon corps était tout endolori. J'espérais qu'on nous retrouverait rapidement. Ma plaie palpitait sous ma tunique, j'avais l'impression que mille petits coeurs s'étaient installés dans les replis de sang et à chaque pulsation, je croyais devenir fou de douleur. Mais non... Au moins, ça me tenait éveillé. À peu près...

À un moment, mes yeux à demi-fermés et mon air totalement hagard, j'entendis du bruit. Un raclement doux contre le sol. Ma tête dodelinait dangereusement sur mes épaules, c'est tout ce dont je me rendais compte. Alors la voix d'Ilhy s'éleva près de moi, la chaleur de sa main contre ma joue. Je crois qu'elle m'appelait. Je ne fus capable de lui répondre que par un grognement vague, faible. Je sentis de l'eau sur mes lèvres, vaguement tiède et essayait d'en aspirer quelques gouttes. Je n'avais plus aucune force en moi et je me sentais inutile...

Ilhy m'expliqua que nous étions tombés dans une caverne par un plafond de glace et qu'on ne pouvait sortir à cause de la tempête. D'un côté, nous étions mieux lotis que nos camarades restés à la surface, dans le blizzard. Sauf qu'eux, ils n'étaient pas vraiment blessés. Malgré mon esprit qui vagabondait, je ne pus m'empêcher de m'inquiéter. Et s'ils se faisaient prendre en embuscade ? S'ils tentaient de nous retrouver et tombaient dans une crevasse ?

Un frisson parcourut tout mon corps quand la naine ouvrit mon manteau et toutes les couches de vêtements en-dessous. Le froid mordait ma peau aussi sûrement que la flèche l'avait traversée. Quand ses doigts touchèrent ma blessure et les alentours trop sensibles, je grimaçai et grognai, impuissant. J'aurais voulu repousser ce contact qui m'était étrange, il me faisait souffrir le martyr, envoyant des décharges à mon cerveau et faisant palpiter encore plus la boursouflure mais elle faisait ça pour m'aider, me maintenir en vie, je le savais...

Quand Ilhy m'annonça qu'elle allait retirer la flèche, j'esquissai un mouvement de recul mais finalement, ça ne servait pas à grand chose. Elle n'avait pas d'autre choix, je devais être courageux et me tenir tranquille. Elle me demanda comment j'allais et un sourire se dessina sur mon visage fatigué. Mince, pâle, mais un sourire quand même. Ma voix fut pâteuse et faible quand j'ouvris la bouche mais assez distincte pour être entendue.

« J'ai envie d'une bonne bière et d'un lit bien chaud... Et j'ai mal. J'ai l'impression qu'on m'a insérer des tas de coeurs dans la plaie... Je suis pas trop gravement touché hein ? Je me sens faible, j'ai froid, et j'ai envie de dormir aussi. J'espère que je vais pas perdre mes tripes, sinon bonjour le Lion pathétique que je ferais. »

Je n'avais pas pu m'empêcher de faire un peu d'humour, pour la rassurer sur mon état, pour lui montrer que j'étais encore assez vif d'esprit. Je toussai un peu et m'arrêtai vivement à cause de la souffrance que cela me causait. D'après ce que je ressentais, rien de "grave" n'avait été touché, surtout pas mon cœur, mais c'était douloureux de me mouvoir quand même. Je levai mon bras valide et lui tapotai affectueusement l'épaule en souriant mollement. C'était mieux que rien non ?

Par mes yeux entrouverts, je vis qu'elle rassemblait du bois et préparait un feu. La chaleur qui s'en éleva m'atteignit rapidement et même si c'était léger, cela me réchauffa un peu, le coeur comme le corps. Je souris un peu et me laissai faire au contact de la main d'Ilhy contre ma joue. En temps normal, je lui aurais fait remarqué de manière bourrue, comme l'habitude le voulait entre nous mais là, je profitai de ce contact rassurant et plein de vie. Je couvais sa main de la mienne et la tapotai, comme j'avais fait avec son épaule.

« - Fili ? Fee ? Surveilles le feu, tu veux bien ?
- C'est la seule chose que je puisse faire... »

Je me sentais vraiment pathétique et inutile dans cet état, mais j'étais encore en vie au moins. Pour l'instant. Et pour combien de temps encore ? Ilhy m'annonça qu'elle allait chercher quelque chose. Je ne compris pas vraiment la suite et me contentai de hocher la tête bêtement. Je la rassurai comme je peux, avec mon état d'éclopé. Ses doigts crispés contre ma peau me serrèrent le coeur. Si j'avais été plus prudent aussi, peut-être que ça ne serait pas arrivé. J'arrivai encore à prononcer quelques mots malhabiles, pâteux.

« Sois prudente surtout. »

Et je restai là, dans l'attente. Ilhy avait fait un petit tas de brindilles à côté du feu, pour que nous puissions l'entretenir. Pour l'instant, il crépitait joyeusement, me dispensant sa chaleur agréable. Si elle pouvait trouver de plus gros morceaux de bois... Nous ne tiendrions pas très longtemps avec notre maigre réserve de brindilles. À un moment, j'en remis un peu en me traînant à côté du feu et retournai à ma place, dos au mur de roche. Le feu m'hypnotisait, me prenait dans sa danse langoureuse. Je ne devais pas m'endormir et pourtant, c'était tellement tentant. Une pulsation de douleur me fit grogner et mon attention fut attirée vers la sortie de la caverne, dont la lumière blanche irritante fut atténuée un instant. La silhouette de la naine.


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MessageSujet: Re: Chasseur chassé. [Flashback][Fili][Terminé]   Chasseur chassé. [Flashback][Fili][Terminé] EmptyJeu 29 Mai 2014 - 17:23


Chasseur Chassé


F
ili était vivant, et comble de la situation, il essayait de faire de l'humour ! Je ne fis même pas l'effort de rire, trop angoissée. Mon coeur était étreint de la peur véritable de le perdre. Sa vie était trop précieuse pour être perdue aussi bêtement ; ses espèces de tapotements rudes me rassuraient quelque peu, mais néanmoins ses traits tirés signifiaient combien il souffrait. Je pense que je me levais rapidement pour éviter de fondre en larmes devant lui. Je hochais la tête à sa recommandation, et une fois dehors, laissais libre cours à ma colère et à ma tristesse. Un noeuf d'émotions convergeait dans ma poitrine et explosa en silence dans le vent brutal et cinglant. Je cassais la croûte neigeuse, devant quasiment me mettre à quatre pattes pour voir ce que je venais de libérer de la gangue de glace. Je trouvais un peu de pas-de-loup, et près d'une rivière gelée, des tiges de salsepareille. J'en pris autant que possible, et en profitais pour débiter quelques bûches que je traînais jusqu'à l'entrée de la grotte.

Le feu ronflait à présent, et j'allais vérifier l'eau contenue dans mon vêtement ; l'eau était tiédasse, j'allais devoir attendre encore un peu avant d'y jeter les herbes pour en faire un emplâtre chaud. Je retirais encore une couche de vêtement pour rester en chemise - j'avais froid, mais Fili devait être plus glacé encore. Je roulais en boule un morceau de fourrure arrachée à mon manteau et lui en fis un coussin.

« Tu sers encore à quelque chose, au moins, tu as réussi à tenir le feu allumé » fis-je en sorte de compliment.

Je n'osais pas toucher sa plaie de nouveau ; je ne désirais nullement lui faire du mal. Je voyais la blessure pulser, et je devinais à quel point cela devait être horriblement humiliant pour lui d'être ainsi incapable de bouger. Avec précaution, en essayant de lui mettre ma veste sur lui pour le tenir au chaud, je bougeais lentement son épaule pour la retirer de sa manche ; j'allais avoir besoin de place et d'amplitude pour retirer la flèche. Ses cheveux longs et sa barbe étaient poisseux de sang - le sien. Cette remarque qui se figea dans ma tête comme une goutte d'eau gelée me fit frissonner.

« Tu es brûlant. On va te retirer ça ; ça ne sera pas une partie de plaisir. Tu vas me faire le plaisir d'avaler une décoction de pas-de-loup, d'accord ? C'est mauvais, oui, mais ça fera baisser la fièvre et te permettra de résister à la douleur.»

Du moins c'est ce que j'espérais. N'ayant pas de matériel sur moi, je fus obligée de mâchonner moi-même les plantes pour en extraite le jus. Le goût en était amer, au point de me donner des hauts le coeur, mais mélangé à ma salive, j'obtins rapidement une espèce de pâte horriblement dégoutante. Je levais son visage vers moi, et remarquais qu'il semblait trop hagard. Allait-il réussir à avaler ça ? Je tentais en enduisant mes doigts de la pâte verte, mais il refusa, en grognant ; son front et ses joues étaient passées de la froideur glaciale à la brûlure ardente de la fièvre. J'inspirais, en me disant que, de toute façon je n'étais plus à ça près ; je repoussais toutes mes pensées, toute horreur à l'idée de ce que j'allais faire, et posais mes lèvres sur les siennes. J'entrouvris nos lèvres et lui fis absorber la pâte, en essayant de ne pas penser à l'acte plutôt dégoûtant et assez mal vu que je faisais. Non, je ne l'avais pas embrassé ; je lui avais donné de quoi aller mieux ! Il n'y avait rien de physique ni de sexuel dans tout ça ; c'aurait été idiot de penser ça. Et pourtant, alors que je m'éloignais pour jeter les plantes dans l'eau frémissante, mon coeur tambourinait dans ma poitrine comme si j'avais commis l'irréparable.

L'eau fit exsuder les principes actifs de la plante, et avec horreur, je m'approchais de nouveau de Fili en songeant que j'étais une véritable tortionnaire. Je badigeonnais avec soin les pourtours gonflés de la plaie, puis agrippais avec fermeté le bout de fer de la flèche. Mon autre main vint saisir l'épaule non blessée de Fili ; ma respiration était hachurée. J'allais devoir faire vite.

« Courage mon ami ; tu es le Lion de Durin. Serre les dents. »

Et d'un geste vif et rapide, je tirais sur la hampe. Elle glissa dans un jet de sang, qui m'aspergea les mains ; elle ne laissa aucune esquilles de bois, mais le flot pourpre se mit à couler et je mis rapidement de la chiffe déchirée de mon manteau sur la plaie, après l'avoir nettoyée et badigeonnée de nouveau d'emplâtre. Ca aspirerait l'infection et arrêterait le flot de sang. Je bandais son épaule le plus délicatement possible, puis m'assis en tailleur devant lui, épuisée ; mes mains étaient couvertes de son sang, et mon coeur se soulevait à l'idée de ce que je venais de faire.

« Fili ? Fili, tu m'entends ? Fee, réponds moi, s'il te plaît ... Je vais te faire boire et manger un peu ; l'emplâtre va agir, il va falloir attendre d'ici là ... Fee ...»

Je tamponnais son visage avec de la glace dans mes moufles ; le contact frais semblait siffler sur sa peau. Par la barbe de mes ancêtres ! Je retins un hoquet, et détournais le regard ; dans l'état où il était, il ne pouvait me voir pleurer. Une larme roula sur ma joue, y creusant un sillon dans la crasse noire. J'avais mal, moi aussi, mais ma plus grande douleur était mentale ; mon ami était en face de moi et je ne pouvais rien faire d'autre pour lui. Je devrais aviser quand la fièvre serait tomber ; je sortis la viande séchée et mon outre, en attendant qu'il aille mieux. Je m'interdisais de fuir, d'avoir peur ; mon regard bleu était posé sur lui, protecteur, amical, tendre. Je me retins de caresser ses traits ; ce n'était pas le moment, et qui sait les émotions que cela aurait pu faire naître de nouveau ?

La flèche cassée était au sol, trait ennemi, fauteuse de trouble. Je la pris et la jetais au feu, en même temps que d'autres bûches ; il se mit à flamber et répandit une douce chaleur agréable ; la neige fondit un peu et répandit un ruisseau glacée où je remplis ma gourde, puis j'allais me coller à la paroi rocheuse et à Fili, épaule contre épaule - celle non blessée. Je cherchais son contact pour me rassurer ; pour un peu et j'aurais collé ma main contre son torse pour y chercher les battements de son coeur. Je me contentais de fermer les yeux et de tendre l'oreille ; son souffle était là, présent, et mon propre coeur se mit à battre à son rythme, écho et miroir.

Faites qu'il ne meurt pas, je vous en supplie, par tous les dieux.





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MessageSujet: Re: Chasseur chassé. [Flashback][Fili][Terminé]   Chasseur chassé. [Flashback][Fili][Terminé] EmptyJeu 29 Mai 2014 - 22:18

Compagnons de sang et d'armes.

J'ignorais combien de temps Ilhy était restée absente de la grotte, peut-être quelques minutes, peut-être des heures car mon esprit vagabond ne me permettait pas de juger comme il fallait du temps qui passait, mais cela me parut infiniment long. Quand je l'entendis revenir dans notre abri provisoire, je lâchai un soupir douloureux et luttai encore un peu contre le sommeil. Si je m'endormais, il n'y aurait peut-être plus d'espoir de me sauver, alors mon instinct de survie me dictait de rester éveillé. Quand je la vis se mettre en chemise, je me dis au fond de moi-même qu'elle était complètement folle de faire ça et ne pus m'empêcher de grogner légèrement. Elle prendrait ça comme une réponse à son compliment peut-être et cela pouvait effectivement en faire office.

Quand Ilhy tenta de me retirer mon manteau, j'essayai de l'aider du mieux que je pouvais, grimaçant à chaque mouvement que faisait le tissu de ma tunique contre ma blessure. Je ne devais pas être très beau à voir, avec le sang coagulé dans ma barbe et sur ma peau, et j'étais très certainement pâle et soudain, j'eus honte d'apparaître comme ça devant elle, si faible, si impuissant... Je la vis grimacer de dégoût quand elle mâcha deux ou trois plantes. Elle comptait vraiment me faire avaler ce truc ? Apparemment oui...

La naine tenta de m'enduire les lèvres de son onguent mais le peu qui filtra par mes lèvres closes me dégoûta et je détournai la tête en grognant comme un gamin capricieux. J'articulai quelques mots, espérant qu'ils aient assez de sens.

« Sale... Ce truc... Veux pas ! »

Certes, ce n'était pas excellemment construit comme phrase, mais son regard me dit qu'elle avait compris. Je faisais un caprice, mais cette décoction était absolument horrible. Je fermai les yeux, comme si ça allait m'éviter la sentence et cette horreur. À la place de ses doigts qui auraient forcé le passage de mes lèvres obstinément closes, je sentis autre chose. J'ouvris soudainement les yeux et vis Ilhy en très gros plan, ses lèvres posées sur les miennes. Dans la surprise, mes lèvres se décollèrent et elle put me faire avaler son liquide affreusement amer. Ce geste, venant de sa part, était plutôt étrange. Je ne pensais pas qu'elle eut pu oser ça mais... Cette sensation me laissa songeur un instant, jusqu'à ce que ses doigts ne viennent effleurer ma blessure et mon visage se tordit de douleur. Les plantes fraîches sur mon torse me soulagèrent un petit peu, mais ce n'était que le calme avant la tempête.

Je me laissai faire quand Ilhy m'agrippa par mon épaule intacte et sa phrase me laissa sans voix. Pire qu'avant à vrai dire, parce que je savais ce qu'elle voulait dire. Je sentis une pression au niveau de ma blessure, elle appuyait légèrement sur la flèche et soudain, ce fut comme un éclair qui me traversa de part en part. Je voulais être brave mais quand elle retira la flèche cassée, je ne pus retenir un grognement retentissant. Et la douleur me laissa vidé. Je fermai les yeux et me laissai faire, ignorant où était le haut, où était le bas. Ce que je savais, c'était que je n'avais plus cette flèche en moi mais la plaie pulsait encore comme si un coeur s'y était incrusté et la chaleur envahissait les alentours de la blessure.

J'étais salement sonné et j'entendis la voix d'Ilhy de très loin, comme si elle était à des mètres de moi et que sa voix m'arrivait portée par le vent seulement. Je tombai dans l'inconscience petit à petit mais le toucher froid de la glace sur mon visage vint me réveiller. J'ouvris les yeux brutalement puis les refermai. Non, je voulais me reposer. Juste un petit peu... J'avais chaud et pourtant je frissonnai follement, sans pouvoir m'arrêter. Juste dormir...

Je sentis Ilhy venir s'asseoir à côté de moi et faiblement, comme au ralenti, je tirai son manteau de mes épaules pour lui signifier de le remettre. J'étais beau comme prince, incapable d'ordonner quoique ce soit sans trembler comme une feuille morte en automne. Je réussis tant bien que mal à faire tomber son manteau sur son épaule et j'ignorai ce qu'il devint par la suite mais je sentis la chaleur de la naine à mon côté. Ma respiration sifflante se calma petit à petit, alors que la douleur s'en allait un peu. Je la sentais toujours pulser dans mon épaule, le sang coagulait sur le bandage, mais la sensation horrible de tout à l'heure, quand elle m'avait retiré la flèche, s'était tue. D'une voix faible et fêlée, je tentai à nouveau de m'exprimer. Ce ne fut qu'un souffle ténu et j'espérai qu'Ilhy m'avait entendu.

« Dormir... Promets... Plus de dangers... »

Encore une fois, je n'étais pas brillant pour communiquer et j'inspirai pour donner plus de voix et de cohérence à mes paroles, tant pis pour la douleur.

« Promets-moi de... Plus te mettre en danger, pas comme ça. J'étais... Inquiet. »

Je me doutais que mon inquiétude ne lui plairait absolument pas, elle qui était si fière, mais je devais sortir ça de ma tête et de mon coeur. Je m'étais inquiété, dans ce blizzard. S'il lui était arrivé quelque chose ? Je fermai complètement les yeux et vit les flammes de notre feu danser en fond, à travers mes paupières. La chaleur que cela répandait ne m'empêchait pas de frissonner mais j'étais un peu mieux que tout à l'heure. Un petit peu mieux seulement, mais ça me suffisait pour l'instant. Je m'abandonnai aux affres du sommeil en laissant ma tête retomber mollement à côté de son oreille, sur son épaule.

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MessageSujet: Re: Chasseur chassé. [Flashback][Fili][Terminé]   Chasseur chassé. [Flashback][Fili][Terminé] EmptyVen 30 Mai 2014 - 0:16


Chasseur Chassé


J
e ne voulais pas penser à ce que je venais de faire. Et pourtant, mon cerveau y retournait à chaque instant, chaque seconde, chaque battement de coeur. J'avais posé mes lèvres sur les siennes, j'avais goûté le sang étalé sur sa bouche ; certes, il n'y avait eu aucune attente, aucune intention charnelle ni désirable, mais je ne comprenais pas en quoi cela me troublait autant. Le nain blond était mon ami, et ce que j'avais fait, c'était lui sauver la vie. Les faits auraient dû s'arrêter là ; pourquoi mon coeur s'emportait-il aussi facilement ? Je refusais d'y songer, mais encore et encore, ça me revenait en tête, au point que je me concentrais sur autre chose : sa respiration. Le grognement de douleur qu'il avait eu, avant de tomber dans les vapes, m'avait ébranlée jusqu'aux os ; pour me rassurer, je me concentrais sur son souffle. A peu près régulier, je calquais le mien sur le sien ; je ne dormis pas, n'attendant qu'une chose, qu'il se réveille.

Il avait été conscient jusqu'à l'extraction de la flèche, qui grésillait à présent dans les flammes ; j'espérais qu'il ne se souviendrait de rien. Je passais mes mains fraîches sur sa peau, et fût rassurée de sentir la fièvre baisser légèrement. Sa peau avait repris la tiédeur correspondant plus à un être vaguement malade qu'à un nain agonisant. J'aurais voulu faire plus : nettoyer sa chevelure, son cou, son épaule ... Je passais ma langue sur mes lèvres et ressentis le goût âcre du sang ; le mien, celui du blond ? Il y avait quelque chose d'intime et de profond, plus encore que l'idée de simplement l'embrasser ...

Non ! Je ne l'avais pas embrassé ! Je devais arrêter avec ça ! J'étais pire qu'une femme, là ! Je concentrais mon regard sur le feu, et me blottis contre Fili en mettant mon manteau sur nous deux pour nous tenir chaud. Nos corps procuraient une chaleur douce et j'étais heureuse de sentir la présence vivante de mon ami. Soudain, il bougea et mon regard bleu accrocha ses traits ; de quoi avait-il besoin ? Je l'entendis grogner, sans trop comprendre, et j'allais lui dire de se taire, de garder ses forces, quand le sens de ses mots se fit à moi, alors qu'il prononçait mieux. Il semblait agacé par sa propre faiblesse, et j'aurais presque pu rire de cette situation. J'aurais voulu lui répondre, mais il sembla retomber dans l'inconscience. Je soupirais, et me permis une petite réplique :

« Quel idiot tu fais, t'inquiéter pour moi alors que ton épaule est blessée ... On ne te refera plus, hein ? »

Son sommeil semblait plus calme, empli de la fatigue ressentie après une blessure choquante. Je vérifiais d'un coup d'oeil que la bande tiendrait, puis en me servant de la force de mes bras, je le fis tomber très doucement sur le sol où j'avais déposé mon sac comme oreiller ; mon manteau servit de couverture. Mais avant de venir moi aussi dormir, je devais faire deux ou trois choses. Je fis l'inventaire de ce que j'avais, en faisant bouillir de nouveau un peu d'eau ; la trame de mon vêtement qui servait d'outre grossière roussissait déjà et je savais que je ne le récupérerais pas. Je fis cette fois cuire un second cataplasme plus fort, pour plus tard. Nous allions devoir partir d'ici, quand la tempête serait levée, et à ce moment là, je pourrais de nouveau nettoyer sa blessure. J'avais perdu l'appétit mais me forçais à manger deux morceaux coriaces de viande séché, en remerciant mentalement Dwalin de m'avoir conseillé de toujours en prendre sur moi.

J'installais le nain le plus confortablement possible, et tout en soupirant, je m'installais à ses côtés sur l'espèce de fourrure improvisée qui servait de couche. Je restais un instant assise près de lui, mes jambes collées aux siennes sous la couverture formée par mon manteau ; je repoussais d'un geste des mèches blondes qui trônaient sur son front et après avoir longuement hésité, me couchais près de lui. Tout d'abord, je gardais une certaine distance, mais je me convainquis - entre mal et bien - que deux corps proches produiraient plus de chaleur, et bientôt je fus blottie contre lui. Nous allions devoir lutter contre le froid de plusieurs heures ; nous avions besoin de sommeil. Le feu continuait de couver, l'emplâtre d'épaissir. La fumée était discrète, blanche ; j'espérais qu'aucun ennemi n'arriverait. Tant que le blizzard soufflerait, ce ne serait pas le cas.

Je posais ma tête près de celle de Fili, sans pouvoir trouver le sommeil ; sa présence, à côté de moi, alors que je tentais de dormir, était si improbable que mon cerveau se refusait à se laisser aller. J'avais formé, dans cette grotte, autant de gestes déplacés envers un prince ! Je l'avais touché, palpé, embrassé, et voilà que je me permettais de partager sa couche ... Certes, rien de tout cela n'avait été fait dans l'intention malvenue, mais tout de même ! Mon éducation noble se hérissait à cette idée, et une partie de moi bottait le train de mes apprentissages. Fili avait besoin de chaleur, et en restant simplement allongée près de lui, j'allais lui en fournir. Où était le mal ? Je fermais les yeux, bien décidée à profiter moi aussi de quelques heures de répit.

Après avoir songé que jamais je ne trouverais le sommeil, il me cueillit comme un fruit mûr. Je m'endormis finalement, auréolée de cheveux roux encroûtés ici et là de sang et de neige. Je me repliais sur moi-même, petite créature roulée en boule, tout contre le flanc du nain à mes côtés, mes bras l'enserrant durant mon sommeil lourd. Je ne sais combien de temps je dormis ainsi, mais ce que je sais, c'est que je ne rêvais pas. Mes songes étaient trop lourds, trop voilés d'angoisse et de douleur, de honte et de déception pour que de jolies images en naissent. Au moins, je n'avais pas fait de cauchemar. Quand je rouvris les yeux, j'étais collée à mon ami, ou plutôt, nous étions tranquillement endormis l'un contre l'autre. Il faisait presque trop chaud sous mon manteau, et je me décollais très lentement de lui pour aller vérifier l'emplâtre.

Le feu s'était éteint, mais cela n'avait plus d'importance : le blizzard s'était tu pour laisser le soleil aveuglant reprendre son règne. La neige avait de nouveau fondue, laissant des traînées pâles souillées de terre sur le sol glacé. Je réservais l'emplâtre collant de côté, et m'assis près du nain qui semblait encore dormir. Ses traits étaient encore tirés, mais il avait l'air plus calme, plus apaisé. Je me retins de caresser son visage ; il fallait que j'arrête avec ça ! Je n'avais jamais songé que j'aurais pu rechercher son contact pour autre chose que pour me battre, mais la vérité était là ; allongé ainsi, presque tranquille, j'avais envie de sentir sous mes doigts le chaume de ses joues, sa peau rugueuse, tiède au toucher, de ... Je secouais la tête ; avais-je de la fièvre pour ressentir de telles choses ? Je me tins à distance respectable un instant, en faisant le point.

Fili était l'héritier de Durin.

Mon ami.

Mon compagnon d'armes.

Nous étions liés, certes, mais cela n'irait pas plus loin. Jamais. Pour la simple et bonne raison que nous étions amis, que je n'avais imaginé penser cela un jour, penser à tout cela. Penser à quelqu'un de façon ... désirable. Je soupirais, passais mes mains sur mon visage pour retrouver partiellement mes esprits, et je fis ce pour quoi j'étais bonne : enfermer mes désirs dans un recoin de mon être, comme on cacherait un objet honteux dans un coffre à jouets. J'aurais voulu perdre la clé, mais ces émotions pulsaient, au fond, comme un monstre terré là.

Il était temps de le réveiller.

« Fili ? Réveilles-toi ... Héritier de Durin, Lion de Durin ... Tu sais, après ce que j'ai vu hier soir, quand j'ai vu ta fureur sur le champ de bataille ... J'ai su ce que je voulais : te servir, quand tu seras roi. Je veux être à tes côtés, pour t'être utile. Tu feras un bon roi. Je sais, je devine que tu fais tous les efforts du monde pour qu'on puisse voir en toi un digne successeur ... Mais je vois plus que ça, moi. Je vois ce que tu seras : un roi juste, bon et courageux. Tu sauras insuffler aux gens ta joie et ta droiture. Comme tu me l'a insufflée à moi ... Tu deviendras un roi, Fili. »

A mes oreilles, ces mots résonnaient comme un adieu, un au revoir, murmuré avec des mots trop doux pour ma voix, comme si quelqu'un d'autre les disait.. Comme si je disais au revoir à un ami. Etait-ce le cas ? Peut-être. Peut-être que je dirais adieu au nain que j'avais connu, pour espérer ne plus voir en lui qu'un ami et un futur souverain. L'avais-je désiré, durant ces derniers mois ? Je n'en savais rien. Je ne voulais pas le savoir, comme je ne voulais pas savoir la nature exacte de mes sentiments pour lui.

J'étais son amie, il était mon futur roi.

Je le secouais délicatement et souris, bravement. Je n'avais nulle raison d'être triste ; j'étais même heureuse. Il était vivant, et c'est tout ce qui comptait.

« Hé Fili ! Réveille-toi ! » fis-je plus fort. « La tempête s'est levée ! On va pouvoir partir ! »

Et quand je le sentis bouger sous mes doigts, je battis en retraite, ne cherchant pas plus son contact. Je me levais et m'approchais de la neige fondue pour m'y laver les mains ; j'en retirais consciencieusement le sang coagulé, laissant à Fili le temps de reprendre ses esprits. Et me laissant le temps de sourire, de comprendre ce que je venais de réaliser.





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MessageSujet: Re: Chasseur chassé. [Flashback][Fili][Terminé]   Chasseur chassé. [Flashback][Fili][Terminé] EmptySam 31 Mai 2014 - 22:53

Compagnons de sang et d'armes.

Mes paupières se faisaient de plus en plus lourdes, terriblement lourdes et la chaleur combinée du feu et de nos deux corps côte à côte m'aidait à me sentir mieux, malgré la fièvre qui n'était pas encore totalement tombée. La douleur m'avait achevé et je me fichais bien de rester éveillé à présent, puisqu'Ilhy était là pour veiller sur moi. Cette pensée me fit sourire tout doucement alors que ma tête heurta l'épaule de la naine. J'avais un gardien à mes côtés, en plus d'une amie et d'une compagne d'arme et de sang.

Je sentis le sommeil me prendre doucement entre ses doigts fins et perdis conscience du monde qui m'entourait, d'Ilhy, sa chaleur et son odeur sauvage à côté de moi... Je sombrai dans un sommeil sans rêve, calme et reposant.

Quand je me réveillai, je me rendis rapidement compte que j'étais allongé sur le dos et un poids reposait contre mon bras droit. Je bougeai tout en gardant les yeux fermés, les affres de la fatigue me tenant encore, en pensant qu'il s'agissait du mur et alors que je pensais me faire mal en rencontrant quelque chose de solide et froid, mon bras rencontra un obstacle tendre et chaud. Je pris conscience de ce dont il s'agissait - de qui il s'agissait - et ouvrit les yeux brusquement. Tournant ma tête vers Ilhy, je la vis endormie tranquillement contre moi et sous ma barbe, je pus sentir quelques couleurs. Que faisait-elle ici ? Enfin, je savais que nous étions tombés et qu'elle m'avait soigné après ça, mais là maintenant, contre moi ? C'était assez gênant mais le feu éteint, nous avions besoin de chaleur pour survivre. La douleur me fit un petit signe, elle aussi et je grimaçai en reprenant ma position initiale et je retournai dormir rapidement.

Plus tard, j'entendis une voix, très lointaine. J'étais encore un peu dans les vapes aussi, mais je reconnus la voix d'Ilhy. Elle était donc réveillée... J'étais curieux de ce qu'elle avait à dire et surtout, à qui parlait-elle ? Nous avait-on retrouvés finalement ? Allais-je enfin avoir droit à un bon lit et plus encore à un bon bain ? Non, elle me parlait à moi. Ses paroles allèrent droit à mon coeur, piquant ma fierté et l'amitié que j'avais à son égard. Cela me faisait plaisir que d'entendre ce qu'elle voyait en moi. Un roi... J'aurais aimé que Thorin me disent ça également mais c'était plus intime encore, entre lui et moi. Mais il y avait quelque chose de sous-jacent dans ses paroles. Du moins c'est ce que je ressentis. J'étais amer à l'idée de comprendre que c'était un adieu pour le futur. Elle serait garde, je serais roi.

Et mon coeur s'écrasa.

Quand je sentis qu'elle me secouait pour me tirer de mon état flottant, je grognai en plissant mon nez et voulus me retourner. Manque de chance, c'était du côté de mon épaule blessée. C'est fou ce que ça s'oubliait vite, ce genre de détail ! J'ouvris les yeux et retins un nouveau grognement, simplement transformé en souffle court de douleur.

« Je suis un abruti par le sang de Dùrin ! »

Une bonne nuit de sommeil et je jurai à nouveau comme un tavernier ! Ah la magie du repos... Je restai allongé et gratifiai Ilhy d'un sourire chalereux.

« Merci de t'être occupée de moi, j'ai apprécié ce geste. Maintenant, nous sommes liés par le sang ! »

C'était dit sur le ton de l'humour mais c'était vrai, en quelque sorte. Et son geste que j'avais apprécié... J'étais encore dans les vapes plus tôt mais je m'en souvenais parfaitement bien. Un peu trop bien même. Mon esprit avait imprimé l'instant comme si je devais m'en rappeler à tout jamais et je me sentais gêné. Gêné parce que si j'avais été dans un état normal - cela ne serait jamais arrivé - ma conscience m'aurait dicté de me laisser faire. Malgré l'amertume de la décoction, la sensation avait été agréable, chaleureuse. Mais j'effaçai rapidement ces pensées car c'était la fatigue et la fièvre qui parlaient encore pour moi.

« Je suis content qu'Adur et les autres n'aient pris aucun risque pour nous retrouver. Qui sait ce qui aurait pu leur arriver ? »

Je me levai tant bien que mal et claudiquai jusqu'à la petite rivière, formée par la neige fondue. Là, j'enfouis mes mains dans l'eau fraîche et m'en passai sur le visage avec un soupir de bonheur. Un peu de fraîcheur et de propreté, c'était délicieux... On allait pouvoir partir, rentrer dans les montagnes bleues mais un détail m'inquiétait.

« Tu sais où se trouve notre maison ? Un roi qui sait pas s'orienter, bravo... Et euh, avec mon épaule et ton bras, ça risque de prendre un peu de temps. Je peux marcher mais je me sens pas dans mon assiette. Désolé de m'être fait bêtement épinglé... »

Je savais que ce n'était ni ma faute, ni la sienne, mais je ne pouvais m'empêcher de m'excuser, pour passer au-dessus de ma gêne. J'étais extrêmement nerveux à cause de ce qui s'était passé plus tôt. Pourquoi aurais-je hypothétiquement réagi ainsi ? Il fallait que je me recentre, j'étais fiévreux, un point c'est tout. J'avais chaud, je voulais une bière et un bain et je voulais dormir, point ! Et après, donner une fête pour Ilhy, qui m'avait sauvé. M'était avis que Thorin la remercierait chaleureusement - avec toute la chaleur dont il faisait preuve envers les autres - d'avoir maintenu une lueur de vie dans mon corps. Même si cela voulait dire m'embrasser et dormir à mon côté... Je toussai pour chasser les rougeurs sous ma barbe et me relevai tant bien que mal.

« Ma foi, en avant chère amie ! »

J'avais la tête qui tournait un peu et mon épaule qui pulsait de temps à temps comme un second petit coeur mais je restai brave devant la douleur. J'étais le Lion de Dùrin, je devais rester fort.


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MessageSujet: Re: Chasseur chassé. [Flashback][Fili][Terminé]   Chasseur chassé. [Flashback][Fili][Terminé] EmptyDim 1 Juin 2014 - 0:22


Chasseur Chassé


F
ili n'était pas un nain comme les autres ; hormis son statut d'héritier de Thorin Oakenshield, il était loyal, fort et courageux. C'était un nain bon et juste, et je pensais chaque parole que je venais de dire au silence de son sommeil. Je n'aurais jamais eu le courage de les lui dire en face ; je n'aurais pour rien au monde voulut affronter son visage alors que je lui assenais un discours aux teintes d'adieu. Je ne partirais pas, je ne l'abandonnerais pas ; ma vie était liée à lui, peut-être plus étroitement encore que je n'avais imaginé. Tout en ricanant à sa phrase, je finis de laver mes mains et mon visage. L'eau glaciale me remit les esprits en place, et je sus ce que je devais faire.

Absolument rien.

Je devais me comporter comme d'habitude, en espérant que mon cher Lion de Durin ne se souvienne pas de ce moment si gênant. Alors que j'allais touiller l'emplâtre dans l'optique de lui en remettre sur sa blessure, je vis son sourire lumineux. Diantre, cette nuit de repos lui avait réussi ! Les mots qu'il prononça me firent frissonner ; oui, les liens du sang ... J'avais le souvenir vif comme un vent glacial du goût de son sang. Non, ce n'était pas aussi froid et impersonnel, bien au contraire. C'était chaud, plein de vie, au sens propre comme figuré. J'avais senti le liquide sombre qui agitait ses veines, j'en avais senti l'odeur et le goût. C'était profondément intime et puissant, et l'idée de bouleversement qui me remuait les entrailles quand j'y pensais était plus déstabilisant encore que toutes les entorses aux bonnes manières que j'avais commises cette nuit-même. Bien que l'espèce de baiser soit en deuxième position, bien placée sur l'échelle de mes hontes.

Je hochais la tête tout en rangeant les affaires ; Fili avait raison. D'après ce que j'avais entendu avant de m'endormir, le blizzard avait soufflé avec une violence inouïe. Si les nains avaient tenté de nous retrouver, je ne donnais pas cher de leurs peaux ; j'espérais qu'ils avaient eu la présence d'esprit de nous laisser pour se mettre à l'abri. Fili était l'héritier, certes, mais à deux nous avions pu nous en sortir.

« Ils ont sûrement eu la présence d'esprit de s'abriter. Et puis, on ne s'en est pas si mal sorti que ça hein ! Deux éclopés, certes, mais vivants ! Et presque en bonne santé ! »

C'était le bon moment pour faire des blagues, non ? Au moins, il n'y avait aucune tension entre nous. Il ne devait pas se souvenir, tant mieux. Cette idée me laissa songeuse ; je serais donc la seule à garder un souvenir précis de ce qui s'était passé ? C'était presque triste, mais sûrement mieux pour tout le monde. Si Thorin l'apprenait ... Par la barbe de mes ancêtres, je risquais d'avoir de sacrés ennuis ! Je m'en tiendrais à la version courte : j'étais fautive, j'avais conduit Fili dans cette chasse et l'avais mis en danger. Que je l'ai sauvé ne découlait que de ma propre erreur, et j'en ferais les frais, j'y étais prête. Je le méritais, et j'aspirais presque à ce châtiment, peut-être en espérant qu'il me libérerait de mes émotions contenues.

« De là où les orcs étaient placés, tu n'as rien pu faire. Ne sois pas si dur avec toi-même. Tu es un combattant très courageux ; tu en as massacré un bon tiers à toi tout seul. Ma jambe va très bien, ne t'inquiètes pas. On va rentrer, cahin-cahan, mais on va rentrer. »

Je ne faisais même pas attention à ma blessure à la jambe, et aux diverses éraflures qui parsemaient mon corps. Je n'avais pas non plus prêté attention au ton étrangement nerveux du nain : j'étais occupée à rouler en boule les morceaux de chiffe, et je fus contente de retrouver le poids de mon manteau bien chaud. Quand Fili proposa d'y aller, je lui lançais un regard perplexe.

« Tu ne veux pas nettoyer ta blessure ? Tu as si hâte de rentrer et de te faire mousser par de jolies naines barbues qui s'extasieront devant ta blessure ?» le grondais-je gentiment.

Soyons honnêtes, c'était tout à fait son genre. Charmeur et charmant, il était un prince, et beaucoup de naines désiraient s'attirer ses faveurs. Je comprenais cela et l'acceptais, tout comme Kili attirait lui aussi nombre de prétendantes. J'éclatais de rire et haussais les épaules. Si il voulait absolument y aller, hé bien allons-y ! Je prélevais l'emplâtre pour le mettre dans un de mes bols, le recouvris de tissu pour le garder dans un coin et une fois mes affaires ré-empaquetées, je sortis sous le soleil aveuglant. J'avais repris ma place près de Fili, épaule contre épaule - non blessée bien entendu. Je faisais attention à ne pas boiter, et à ne pas heurter non plus trop fort son imposant poitrail. Je devais me répéter, inlassablement : il est ton futur roi, il est prince sous la montagne, pour ne pas avoir d'idées dans la tête. Est-ce que j'allais perdre les vifs souvenirs qui me revenaient en tête ? Je regardais autour de moi puis posais mon regard sur lui ; j'allais dire quelque chose mais mes yeux se perdirent sur son visage, un instant. Non, je ne devais plus y penser.

« Il va falloir remonter la colline, ici. Et après, on devrait voyager vers le nord. Allez, courage ! Un pas en avant est un pas vers une bonne bière, un ragout bien chaud et un bain bouillant. »

Je souris vaillamment et nous nous mîmes en route. Nous montâmes la pente enneigée, aussi rapidement que l'on put ; plusieurs fois, nous faillîmes tomber, ma jambe cédant sous nos poids, mais nous nous retenions l'un à l'autre comme à une bouée pendant un naufrage. Alors que le temps passait et que nous marchions, nous entendîmes des cris : au loin, des silhouettes gesticulaient. Le groupe ! Ils avaient donc réussi à se mettre à l'abri ! Je les vis s'approcher en courant ; je profitais donc de mes derniers instants avec Fili pour lui tapoter le dos, ni trop haut ni trop bas - une espèce de geste presque amical, sauf qu'à mon sens, c'était comme toucher du doigt un rêve qui se briserait.

« Nous serons bientôt à la maison. Je prendrais mes responsabilités : sans moi tu n'aurais pas fait partie de cette chasse, et tu as été blessé par ma faute. Je m'en veux terriblement, et je m'excuserais publiquement, devant toi et ton oncle pour avoir risqué ta vie. Fili, tu es précieux, à mes yeux comme à ceux de ton peuple et de ta famille. Si ... Si tu étais mort ...» Ma voix se fêla et je toussotais avant de reprendre, comme si ça n'avait été qu'une poussière dans ma gorge : « Tu ne peux pas prendre des risques, et je suis navrée de t'avoir poussé à les prendre. J'étais inquiète. Et pas juste parce que tu es le Lion de Durin. Fili, tu es mon ami, mon compagnon d'armes. Je mourrais pour te protéger, sache-le. Ne meurs pas.  »

Je m'étais arrangé pour finir mon discours juste avant l'arrivée des nains. Je souris, d'un air bravache, au lion puis laissais l'un des nains prendre le relai. Je m'écroulais à moitié sur un autre, et éclatais de rire quand je les entendis nous parler de notre ténacité pire qu'un hobbit à qui on volerait son quignon de pain. Non, je n'avais pas réellement avoué mes sentiments, mais il savait une chose, à présent : oui, nous étions liés, mais c'était moi qui l'était à lui. En tant que compagne d'armes et amie. Je laissais les autres nains du groupe prendre le relai ; bientôt, nous serons à la maison. Bientôt je pourrais laver la saleté, le sang. Mais je ne réussirais pas à laver une chose. Mes souvenirs.




Dernière édition par Ilhy le Lun 2 Juin 2014 - 21:08, édité 1 fois
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MessageSujet: Re: Chasseur chassé. [Flashback][Fili][Terminé]   Chasseur chassé. [Flashback][Fili][Terminé] EmptyLun 2 Juin 2014 - 1:32

Compagnons de sang et d'armes.

Si Ilhy imaginait mon trouble, elle s'en voudrait jusqu'à sa mort, je décidai donc de ne pas lui parler de mes souvenirs de la veille. Ou de quelques heures plus tôt, car j'ignorais totalement combien de temps était passé depuis notre chasse victorieuse. Et puis ce n'est pas comme si j'étais extrêmement gêné ! ... En réalité, je l'étais mais je tentais tant bien que mal de refouler tout cela au fond de moi.

Quand je me morfondis sur mes qualités pathétiques de guerrier, Ilhy tenta de me rassurer et cela me fit sourire un peu. Un bon tiers, je n'en étais pas sûr, mais j'en avais tué quelques uns, c'était une certitude et cela me remonta le moral. Nous étions des guerriers, elle et moi, et elle avait su le prouver dans notre traque. J'espérais qu'Adur répandrait le mot avant moi et s'il ne l'avait pas fait, je serais en quelque sorte le héraut des exploits de la jeune naine. Je voulais qu'elle soit reconnue par tous, pour sa valeur et ses qualités au combat.

« Tu ne veux pas nettoyer ta blessure ? Tu as si hâte de rentrer et de te faire mousser par de jolies naines barbues qui s'extasieront devant ta blessure ? »

Un regard interloqué dut se voir sur mon visage. Qu'avait-elle fait à ma blessure hier, sinon la nettoyer ? J'étais dans les vapes avant notre sommeil, avais-je rêvé alors ? Ou s'était-elle contenté d'abuser de moi ? Je dus retenir un sourire à cette pensée totalement loufoque. Non, elle n'aurait pas osé. Du moins, ce n'était pas son genre. Enfin, je l'espérais...

« Ma blessure n'était pas propre hier ? Enfin, comme tu dis, je me ferais un plaisir d'exhiber mes blessures de guerre ! Quand oncle Thorin aura fini de me tirer les oreilles... »

Oh que oui, je le voyais d'ici me faire comprendre que j'étais l'héritier de notre lignée, que je devrais régner après lui et que j'avais été élevé pour ça. Et ce serait légitime de sa part. Je soupirai à cette sentence qui m'attendait, inéluctable, mais ce serait pour mon propre bien et je comptais défendre Ilhy sur ce point. Elle voulait faire ses preuves et moi aussi, nous nous étions donc rendus à la chasse aux orcs, point.

Sur la colline encore un peu enneigée, je dus plisser les yeux à cause du soleil qui était revenu, ce qui n'aida pas notre crapahutage. Car c'était bien ce dont il s'agissait. Nous ne marchions pas, nous crapahutions, presque en rampant. Au bout d'un certain temps, nous fûmes en vue du groupe et ma tension se relâcha un peu. Ils étaient tous en vie, excepté l'archer dont je ne connaissais pas le nom, qui était mort hier. Par le sang de Dùrin, ils étaient en vie... Mais je n'eus pas le temps de me réjouir plus que la voix d'Ilhy attira mon attention. Ce qu'elle dit me laissa sans voix mais je finis tout de même par réagir, un sourire ourlant mes lèvres.

« Tu n'as pas à t'excuser pour ça, mon amie. Tu as fait ton devoir de garde et j'ai exprimé le souhait de "voir le monde". J'ai poussé mes limites et je risque également de prendre une douche froide sous le regard de Thorin. Je te défendrai, ne t'en fais pas. »

Je n'avais rien ajouté, ne voulant pas tomber dans quelque chose que nous ne contrôlerions plus. Je n'avais pas continué sur ma lancée même si j'avais été tenté d'ajouter "contre mon oncle, et contre toute autre chose." Mais non, je me contentai de lui tapoter l'épaule amicalement avec un sourire brillant, pour la rassurer. C'était le mieux que je puisse faire actuellement.

Le groupe nous rejoignit rapidement pour nous aider et nous rentrâmes ainsi, à cinq. Il me tardait d'arriver chez moi et même d'affronter la colère de mon oncle... Cela me prouverait doublement que j'étais vivant.

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