Erreur, bouleversement, destinée ? [Pv Radha]

Eradion n'aimait pas aller en mer et pourtant, il s'y était rendu. Il avait jugeait bon d'en avoir le cœur net par rapport aux pirates d'Umbar qui ne cessait d'aller à son encontre. Les deux raisons avaient été simples pour qu'il ose s'aventurer en mer malgré sa peur de l'eau et de sa profondeur. La première étant qu'il voulait connaître la raison des pirates. La seconde était plus triviale, il sentait que cela pourrait devenir quelque chose d'enivrant et Eradion ne voulait en aucun cas manqué cela. Bien qu'il souhaitât parfois ressentir le calme et que peu d'endroit lui procurait ce sentiment, la plupart du temps, il cherchait l'exaltation des combats.

Par chance, il se trouvait dans un port où des bateaux étaient amarrés et ne sachant pas dans lequel il fallait qu'il monte, il avait dû questionner plusieurs hommes des ponts, mais il n'avait pas vraiment de résultat concret. Cela était ennuyeux... Enfin jusqu'à ce qu'il aille à la taverne du port. Eradion s'y était rendu pour pouvoir glaner des informations sans réel espoir étant donner le peu de résultats qu'il avait eu au port avec les hommes y travaillant. Eradion n'était pas non plus très patient au point de redemander des renseignements. Il s'était assis à une chaise devant le comptoir du tavernier en buvant une chope tranquillement. Il réfléchissait s'il devait se rendre clandestinement dans une cale d'un des bateaux, même s'il ne sait pas lequel allait là où il aurait des pirates.

C'est alors que pendant qu'il buvait, il entendait quelques mots qui ne passaient pas dans l'oreille d'un sourd. Ces mots qu'il avait entendus étaient : livraison et empressement. Eradion ne savait pas pour qui cela était prévu. Toutefois, s'était toujours mieux que rien. D'autant que si cela se passait comme il venait d'y penser, il aurait de la chance. Les pirates attaquent souvent des convois de marchandises. Rien n'était sûr et n'aimant pas trop penser à ce qu'il pourrait arriver, il décidait d'agir dès ce soir en allant sur le bateau qui devait effectuer une livraison aux large. Buvant rapidement, ce qu'il lui restait dans sa chope avant de payer le tavernier, Eradion quittait la taverne avant les personnes qui avaient parlé de la livraison. Toutefois, ce n'était que pour se rendre quelques mètres plus loin et attendre qu'ils sortent.

Eradion attendait un certain temps avant de voir les personnes ayant discutés de cela sortir. Gardant une distance raisonnable pour ne pas se faire repérer, Eradion les suivait. Ils allaient vers un bateau arrimer sur l'avant-dernière passerelle d'embarquement. Restant à bonne distance derrière des tonneaux, il jetait un bref coup d'œil pour voir où il allait et voyant qu'il montait sur le navire se trouvant à côté de la passerelle, Eradion regardait la mer et eut un frisson de peur. Il devait utiliser la corde attachant l'ancre au navire, mais pour cela, il fallait qu'il aille dans l'eau de la mer. Pourtant, il l'a voyait, mais la peur le retenait sur place. Il ne devait pas avoir peur, pas maintenant. Serrant les poings fortement en fronçant les sourcils, il se levait et sautait pour attraper la corde. Chose qu'il réussit de justesse. Après quoi, il grimpait en regardant autour de lui pour ne voir personne en montant. Après tout, s'était déjà la nuit et peu de personnes devaient se trouver sur le pont du navire.

Restant aussi discret que possible, il faisait attention à tout et regardait autour de lui jusqu'à entendre du bruit venant de sous le pont. Il se mettait derrière l'escalier amenant à la barre de navigation. La personne poussant la porte était juste un matelot faisant une ronde. Passant aussi discrètement, il entrait dans une cabine sans savoir si elle était occupée ou non.

La mer. Cette entité si lointaine et pourtant toute proche, Radha ne l’avait jamais vécu. La mer, pour elle c’était un mot écrit dans un livre, un mot dit dans une bouche innocente, une étendue d’eau interminable dont elle pouvait admirer le scintillement, le soir de son balcon. Pour elle, c’était une grande inconnue à laquelle elle allait être confrontée. Regorgeant de danger, et d’imprévus, ce n’était pas la route la plus sûr pour se rendre là où elle voulait aller. Et pourtant, c’était celle là qu’elle avait choisi. Pourquoi ? Car malgré tous ces dangers ; la mer restait, depuis Umbar, une voie de circulation plus rapide que la terre, vers le Gondor. Il était plus facile pour un bateau marchand de pénétrer les défenses d’Osgiliath, que pour une étrangère, d’y arriver, puis d’y circuler sans encombre.  Et puis c’était aussi un bon moyen de découvrir une chose qui jusque là lui était lointaine.  

Son départ, elle l’avait voulu discret. Elle avait donc quitté les siens au petit jour, laissant derrière elle bien des pourquoi, mais se jurant de revenir au plus vite. Traversant telle une ombre, dans ses voiles sombres, les rues et avenues d’une Umbar s’éveillant doucement avec l’arrivée du soleil, la prêtresse huma pour la première fois depuis bien longtemps la véritable odeur de sa ville natale. Cela lui fit remonter des souvenirs anciens. Ceux d’une vie qui aurait put être, mais que la flamme avait réduite en cendre. Des voix, des bruits, des images lui revinrent vaguement en mémoire, bouleversants. Elle aurait put se laisser bercer par ces réminiscence, mais le grondement des vagues se brisant dans le port lui rappelèrent ses objectifs. Alors elle écrasa implacablement en elle, ces relents de passé qui lui rappelaient parfois qu’avant d’être une Gardienne, elle avait été Radha, totu simplement. Et que cette vie avait eu une autre saveur, un autre goût. Lui manquait-elle ? Absolument pas. Mais s’en rappeler provoquait parfois en elle, quelques émois, finissant néanmoins étouffés impitoyablement dès lors qu’une larme naissait aux coins de ses paupières.  

Silencieusement, regardant autour d’elle avait une curiosité retenue, la jeune femme redécouvrait avec une pointe d’émotion, des endroits qui avait vu passer son enfance. Elle revoyait le commerce de ce fameux marchand de fruits qui l’avait poursuivi naguère, l’homme probablement mort aujourd’hui alors qu’elle vivait encore, et une vie bien au-delà de ce qu’il aurait put s’imaginer alors qu’il la poursuivait à travers les ruelles du quartier commerçant, un bâton en main.  Qu’avait-elle volé déjà ? Une pomme ? Une grenade ? Elle ne se rappelait plus vraiment. Mais quelle importance, le temps –bien plus puissant que toutes les forces sur terre- avaient eu raison de l’homme. Elle revit les terrains de jeux que s’inventaient les enfants de rues de sa génération, rien ou presque n’avait changé…Elle en revanche, n’était plus la même. Qu’était devenus tous ceux qui avaient peuplés cette période de sa vie. Avaient-ils survécus à la faim, aux coups et à la maladie ? Si oui où étaient-ils aujourd’hui ? Vivaient-ils décemment ? Avaient-ils une famille ? Un foyer ? Un but ? C’était des questions sommes toutes banales, mais elle se les posait distraitement, occupant ainsi son trajet en direction des quais.

A son épaule, une besace contenant vêtement –principalement-, de l’argent –pour payer tous les frais de sa traversée- ainsi que quelques petites affaires personnelles. Elle n’avait voulu se charger de trop. Tout d’abord pour ne pas se ralentir, mais craignant en plus qu’on ne tente de la voler. Car alors que pourrait-elle bien faire ? Ce serait embêtant, à peine partie, de se retrouver sans le sous. A sa ceinture toutefois, se trouvait une chose somme toute dissuasive, pour les mains les moins habiles. Un yatagan au fourreau ouvragé, ainsi qu’une dague recourbée qui ne demanderaient qu’à servir en cas d’agression. Savait-elle les manier ? Pour avoir suffisamment pratiquer la danse et le maniement du sabre, les plus hardis se retrouveraient bien vite tenus en respect par sa lame. Pour les plus chanceux, les autres, et bien, ne verraient pas la prochaine aurore. Seulement la Gardienne n’avait jamais été mise en situation de tuer ; elle se savait capable de désarmer, de mettre en échec un bretteur qualifié dans des conditions égalitaire, cependant alors jamais le sang n’avait goutté de sa lame. Le mot tuer, n’avait pour l’heure aucune résonnance en elle. Mais elle aurait le temps d’en faire l’expérience.

Serrant dans un geste rassurant la poignée de son yatagan, alors qu’elle traversait une sombre ruelle menant aux quais sur laquelle elle devait embarquer, Radha apprécia étrangement la sensation d’être en insécurité. Cette excitation particulière, mêlée à une pointe de peur, qui était devenue si rare dans l’enceinte des murs où elle demeurait plus tôt. Sortant de l’ombre, la Gardienne arriva enfin sur les quais. Serpentant entre les marins se préparant à partir, ses yeux tentaient de repérer son embarcation. Et quand elle l’eut trouvé, ce fut avec diligence qu’elle s’en approcha. C’était un modeste navire marchant, aucun pavillon de battant à son grand mât, ses marins semblant venir d’horizons différents, il ne payait pas de mine, et n’attirait guère l’attention parmi la myriade de navires imposants, déversant leurs cargaisons dans la ville-royaume. Son regard parcourant la coque du bâtiment, finit par accrocher celui-ci d’un homme debout sur le pont, probablement le capitaine, à son regard, inspectant les alentours. Lui faisait un vaguement salut, elle ne reçût qu’un coup d’œil désintéressé de sa part, suivis d’une invitation de la tête à embarquer.

Radha se serait sans nul doute exécutée, si une voix bien connue n’avait pas tenté de la retenir. Elle ne s’imaginait pas devoir affronter à son départ un visage si familier et chéri, mais les émotions que firent naitre en son cœur les yeux noirs de sa chère amie, ne parvinrent pas à bout de sa détermination. Et après un bref échanges des mots amers, elle embarqua, scellant ainsi son destin.  

Sur le pont du navire, tout le monde s’activait. Reçue par le capitaine en personne, un ami du Temple, et  unique détenteur de sa véritable identité, -les autres n’ayant reçu aucune information la concernant- Radha, fit rapidement le tour de la dunette, avant de demander à rejoindre ses quartiers. On lui assura qu’ils étaient surement les plus confortables du navire, ce à quoi elle ne put répondre que d’un vague sourire, son confort à elle dépassant surement leurs standards. Aussi, ils lui furent rapidement indiqués, et elle décida de s’y rendre.

Passant devant quelques marins, s’excusant de couper certains dans leur élan, elle parvint à l’escalier menant aux dortoirs –hamacs suspendus ça et là en dessous du pont- et pris un couloir sur sa droite menant à une porte de bois simple, légèrement entrouverte. Pour le coup, cela lui fit lever quelque poil sans qu’elle n’en connaisse la raison. Elle n’avait pourtant aucune raison de frissonner ainsi. La température était douce, et sur l’heure peut de chose pouvaient réellement la menacer. Alors quel était ce sentiment étrange…Posant une main sur la poignée de la porte, l’autre serrant la dague accrochée à sa ceinture, Radha poussa dans un geste vif la porte de sa cabine, prête à dégainer son cimeterre.

Le bruit grinçant de la porte, et celui de sa lame dégainée, fut suivit d’un long silence, alors que devant les yeux sombre, de la belle du sud, s’érigeait la vision frappante homme de dos, dont la taille n’avait d’égale que le volume de ses muscles. Son regard dévalait alors la cascade de cheveux lui courant sur la peau, puis finit par atterrir sur la lame pendu à son côté. Surprise tout d’abord par cette apparition impromptue, Radha se reprit bien vite, et croyant parler à un des matelots du navire - bien qu’il n’avait guère de ressemblance avec les bougres qu’elle avait croisé plus tôt- elle énonça d’une voix de glace, s’adressant à l’inconnu, debout de dos au milieu de sa couchette.

-Puis-je savoir ce que vous faite dans mes appartements…Vous n’avez absolument rien à faire ici !