J'ai besoin d'un garde du corps pour aller chercher des plantes, ça t'intéresse ? [Aragorn]

Quelques jours loin d’Imladris m’ont fait le plus grand bien, je dois l’avouer. Le Rohan et ses terres sauvages ont toujours été un refuge pour moi. Les vastes étendues d’herbe haute sont l’endroit parfait pour laisser ma Mearas galoper aussi loin que l’infini, puis revenir plus lentement jusqu’à la maison. Là-bas, j’y ai aussi fait quelques rencontres, et j’en repars enrichie de nouvelles amitiés, du moins je l’espère. Les Hommes ont toujours eu cette tendance à attirer ma sympathie, bien que je n’aie jamais souhaité être autre chose que moi-même. Le voyage en lui-même s’est déroulé sans encombre, et à part pour faire la démonstration à un groupe de nomades, autour d’un feu de camp, je n’ai pas eu à tirer mes armes de leurs fourreaux.

C’est avec un sourire amusé que je me rappelle leurs visages interloqués en voyant la forme de mes armes, et leurs airs outrés lorsque j’ai réussi à mettre deux de leurs plus puissants guerriers à terre grâce à cette danse que je maitrise désormais depuis longtemps. La moindre ouverture dans leurs mouvements trop brutaux, dans ces coups brusques d’épée qu’ils savent si bien manier me laisse un chemin, que dis-je, une voie ouverte pour y glisser ma lame et la placer contre leur chair pour les mettre à mal. L’entrainement a été amusant, bien que j’ai dû retenir une grande partie de cette vivacité qui fait partie de moi. Je ne peux me laisser aller à être aussi rapide face à un homme que face à un elfe, malheureusement, et risquer de leur faire mal n’était pas une option. Cela n’était après tout qu’un jeu. Les rires ont vite remplacé l’air boudeur des deux qui se sont risqués à m’attaquer, et la soirée s’est bien terminée.

C’est le lendemain que j’ai décidé de rentrer, en voyant mes provisions d’herbes dangereusement basses. M’arrêter dans les villages des nomades du Rohan a entamé mes provisions plus que ce que je pensais, et je me dois désormais d’aller les remplir afin d’être certaine de pouvoir pallier à toute situation se présentant devant moi. Et puis, n’avais-je pas promis a un petit humain haut comme trois pommes que je m’occuperais de son apprentissage en herbes guérisseuses dès que j’aurais à refaire mes stocks ?

Quelque part, Aragorn me manque. Cet enfant est un véritable rayon de soleil, et penser à lui me fait un instant oublier que je suis toujours profondément en colère contre Elladan, et ce même si sa bague de fiançailles orne toujours mon annulaire gauche. Je ne peux le laisser gâcher ma demande en mariage de cette manière, et s’en tirer comme ça. Ha ça ! Il a voulu faire sa tête de mule ? Nous verrons qui est la pire. Je l’aime en silence depuis près d’un millénaire, je peux parfaitement continuer à faire comme avant. Je vais attendre qu’il revienne et rampe à mes pieds afin de s’excuser de son comportement inacceptable. Quelle idée aussi, de dire qu’il va aller volontairement se mettre en face d’orcs pour que je le raccommode ! Comme si ma vie allait ne tourner autour que de cela, maintenant que nous sommes fiancés ! J’ai des choses à faire, et bien plus importantes que d’attendre que Monsieur ne se décide à revenir vers moi. Alors, certes mon cœur lui appartient et je ne me remettrais pas de le voir disparaitre, mais j’en reste une personne entière. Je ne vais pas commencer à dépendre de lui, à dépérir quand il n’est pas là, et encore moins à ne vivre qu’au travers de lui. Grand bien m’en fasse !

J’ai donc pris le chemin du retour et suis retournée à Imladris, Calinà galopant à une alure plus lente que lors de notre fuite sous le coup de la colère. Là, je ne suis pas rentrée chez moi, car je savais bien qu’Elladan m’y trouverais. Je suis allée dormir chez une amie avant de repartir dans les rues de la cité jusqu’à la demeure d’Elrond, que je suis passée saluer rapidement, avant de lui demander la permission d’emmener mon petit Aragorn dans les plaines entourant Imladris pour lui apprendre quelques herbes. J’ai aussi avoué à mon mentor ce que j’avais appris à son disciple lors de notre rencontre précédente, spécialement la partie où Estel a découvert descendre d’Eros, le frère du Seigneur. J’avoue avoir repoussé ce moment par peur d’avoir fait une bêtise ce jour-là. Mais, j’ai obtenu l’autorisation nécessaire, et je suis donc partie en quête du petit humain dans les couloirs de la demeure.

La matinée était bien avancée lorsque j’ai fini par le découvrir, non loin des cuisines, et un sourire est monté à mes lèvres en le voyant penché en avant comme pour vérifier qu’il n’y avait personne dans le couloir devant lui. Nouant mes mains dans mon dos, j’ai avancé jusqu’à lui, silencieuse, avant de me pencher par-dessus son épaule.

- M’est avis qu’on te vois si tu te mets comme ça. Pour aller voler quelques sucreries, je te conseillerais plus de prudence. La cuisinière est un véritable dragon…

Un rire monte à ma poitrine en le voyant sursauter ainsi et je m’incline devant lui, cachant mes lèvres avec mes doigts pour ne pas qu’il ait l’impression que je me moque de lui.

- Par contre, j’ai besoin d’un garde du corps pour aller chercher quelques herbes, et comme je t’avais promis de t’emmener avec moi… Je me demande si tu as assez progressé dans le maniement de l’épée pour tenir ce rôle… Nous pourrions aller demander quelques provisions et passer la journée dehors ?

J’ouvre alors les bras, légèrement, invitant par la même occasion l’enfant à venir me faire un câlin. Voilà un moment que nous ne nous sommes vus, et je dois avouer qu’Estel a grandi. Il me semble avoir poussé de quelques centimètres, depuis la dernière fois, il y a près de trois longues semaines.

- Viens donc me saluer comme il se doit, petit garnement !

La petite escapade d’Aragorn en quête de liberté pour pouvoir fuir le chagrin de sa mère avait eut un effet tout à fait inattendu sur le petit garçon. Naturellement, il s’était fait prendre et Elrond l’avait rattrapé avant qu’il n’ait pût aller bien loin, mais ça n’était pas ce qui était le plus surprenant dans le fond, surtout lorsqu’on prenait en compte que l’elfe tenait réellement à ce petit bout d’humain contrairement à ce que le Dunedain pensait au fond de lui. Non, il se sentait mieux… Bien mieux en réalité… Cette fugue avortée avait été une véritable libération pour l’enfant qui avait pût vider son sac et apprendre des choses qui auraient pourtant dût être évidentes à ses yeux.

Elrond l’aimait comme un fils, il le lui avait dit ce jour là dans la clairière. Il l’avait même pris dans ses bras, chose qu’Aragorn n’osait que très rarement faire. Aussi, l’elfe prenait-il soin de lui parce qu’il tenait réellement à sa petite personne fragile et non à cause d’un quelconque fardeau qu’il devait supporter bien malgré lui… Aragorn s’en voulait un peu d’avoir prêté si peu d’empathie à son tuteur, c’était vrai, mais peut-être était-ce son jeune âge qui l’empêchait de voir pourtant les signes évidents d’amour que l’elfe lui portait. Lorsqu’il était malade, Elrond veillait au grain, lorsqu’il faisait une bêtise, Elrond le punissait, lorsqu’il n’allait pas bien, Elrond était toujours prêt à lui prêter une oreille attentive, même si Aragorn avait pris son partit de ne plus aller le déranger au fil du temps. Et surtout, Elrond veillait à son éducation et lui apprenait des choses que peu, voir pas d’autres garçons de son âge n’allait apprendre dans sa vie.

Il avait de la chance, beaucoup de chance d’avoir ainsi été accueillit dans la maison d’Elrond comme l’un de ses propres enfants. Aragorn le savait, il l’avait toujours su finalement, mais il n’avait sans doute jamais mesuré à quel point jusqu’à ce qu’Elrond le rattrape dans la nature et ne le prenne dans ses bras plutôt que de lui flanquer la bonne fessée qu’il aurait sans doute mérité. Aragorn était revenu à Imladris, le cœur apaisé et empli d’amour et de reconnaissance envers l’elfe qui avait pris la peine de venir le chercher tout de suite plutôt que de le laisser dépérir quelques jours histoire de lui donner une bonne leçon. Sa maman n’était toujours que l’ombre d’elle-même et comme prévu par l’enfant, n’avait pas remarqué la légère absence de ce dernier. Mais dans le fond, qu’importe ?! Il n’était pas tout seul, il avait le seigneur Elrond pour veiller sur lui, et puis Elladan, Elrohir et Elinà aussi. Il n’était pas tout seul.

Malgré tout, Aragorn s’était tenu à carreaux quelques temps après son retours, sait-on jamais, peut-être Elrond allait-il finalement lui mettre la fessée qu’il s’était attendu à prendre lorsque l’elfe l’avait rattrapé… Mais sa nature de tout jeune garçon avait rapidement repris le dessus et il avait de nouveau pris plaisir à faire mille et une bêtise et mille et une découvertes. Il avait rapidement compris que finalement, Imladris lui aurait manqué s’il était partit tout seul sur les routes en quête de danger. Depuis ce matin déjà, il avait pris une nouvelle leçon de monte et étudié les cartes d’Eriador avant de pouvoir s’échapper prendre un peu de liberté et se défouler.

Mais le petit garçon n’avait pas franchement idée de se défouler pour le moment… Son estomac criait famine bien que l’heure du repas ne soit pas pour tout de suite et il avait dans l’idée d’aller chaparder un peu de confiture de fraise et peut-être une tartine de pain avant que la cuisinière ne le surprenne la main dans le sac. Il n’était pas un elfe, c’était vrai… Mais après tout… Il était élevé parmi eux… Il s’était donc dirigé vers les cuisines en ayant l’air aussi détendu que possible et au dernier angle du couloir le séparant de son but, il s’était arrêté et épiait à l’angle du mur pour voir s’il y avait d’éventuels allés et venues…

- M’est avis qu’on te vois si tu te mets comme ça. Pour aller voler quelques sucreries, je te conseillerais plus de prudence. La cuisinière est un véritable dragon…

Aragorn fit un bond phénoménal en entendant la voix cristalline d’Elinà juste derrière lui et si cela lui avait été possible, il aurait surement atterri au plafond, toutes griffes dehors, la tête en bas et le poil hérissé comme un chat effrayé. Naturellement, cela fit rire l’elfe surement fière de son coup alors qu’il se tournait vers elle, une main sur son cœur battant furieusement et la dévisageant les yeux aussi écarquillés que possible.

- Par contre, j’ai besoin d’un garde du corps pour aller chercher quelques herbes, et comme je t’avais promis de t’emmener avec moi… Je me demande si tu as assez progressé dans le maniement de l’épée pour tenir ce rôle… Nous pourrions aller demander quelques provisions et passer la journée dehors ?

Pas encore remis de sa frayeur, Aragorn mis quelques seconde de plus que d'habitude à comprendre le sens de la phrase de la belle dame qui lui faisait face et qui se mettait à sa hauteur avant de tendre les bras dans une invite flagrante à ce qu'il s'y précipite.

- Viens donc me saluer comme il se doit, petit garnement !

Ce qu'il fit sans se faire prier d'avantage. Que ce soit parce qu'il était content de retrouver Elinà qu'il n'avait pas vu depuis longtemps ou bien pour se remettre totalement de sa frayeur, Aragorn avait bien besoin d'un câlin et après avoir passé ses bras autours du cou de la jeune elfe, il posa un instant sa tête sur son épaule.

- Je suis content de te revoir.

Attendant tout de même que son coeur reprenne un rythme plus habituel et calme, Aragorn se détacha finalement de la jeune femme elfe et lui sourit. Il ne lui en voulait pas de lui avoir fait peur, après tout, il aurait surement été le premier à essayer d'en faire autant dans le cas contraire, même s'il y avait peu de chance pour qu'il y parvienne en face d'un elfe qui avait malheureusement pour lui, l'ouïe bien trop fine.

- Tu veux vraiment m'emmener avec toi ?! Lui demanda-t-il dans un regard candide. Dans l'épée... Je ne suis pas certain... Elles sont vraiment lourdes, même pour les plus petites et puis de toutes façons je n'ai pas encore le droit d'avoir une épée en dehors de mes leçons... Mais par contre, à l'arc, je rate rarement ma cible...

Il préférait être honnête et puis dans le fond, il savait fort bien qu'Elinà n'avait absolument pas besoin de garde du corps et encore moins d'un garde du corps de son âge à lui. Mais il serait fort contant de pouvoir passer une journée en sa compagnie.

- Je veux bien venir avec toi et puis je t'avais promis que je viendrais apprendre les plantes en ta compagnie...

Il avait glissé sa main dans celle d'Elinà et l'avait entrainé lentement vers les cuisines avec lui pour bien lui montrer qu'il était plus que d'accord pour cette petite escapade éducative.

- Dit, tu crois qu'ils ont de la confiture de fraise ?

Je serre ce petit garnement contre mon cœur et le berce quelques instants avant de réaliser qu’il m’a manqué. J’apprécie nos séances de cours, tout comme je commence à me plaire à être un professeur de vie. Peut être qu’un jour, j’aurais des enfants, et je serais tout à fait capable de les élever, même si je commence à douter qu’il y ait un jour des enfants dans ma vie. Vu comment ça se passe avec Elladan, je pense que je vais rester ici le temps de la vie d’Aragorn puis partir m’isoler en Valinor. Tant pis pour lui. C’est un idiot.

- Je suis contente de te revoir aussi, petit chenapan., dis-je avec une voix douce et maternelle, juste avant qu’Aragorn ne s’éloigne de moi pour me poser un millier de questions comme il en a l’habitude. Un rire monte à ma poitrine et je secoue lentement la tête de droite à gauche :

- Oui, je veux vraiment t’emmener avec moi. Et je te conseille de prendre une épée, puisque je suis meilleure à l’épée qu’à l’arc… pour ne pas dire catastrophique. Pour être tout à fait franche, personne n’a jamais réussi à m’apprendre à toucher une cible avec un arc. Pas même Legolas. Du coup, je pourrais peut être profiter de notre petit séjour à côté de la rivière pour t’apprendre quelques passes ? Tu vas devenir un grand guerrier, tu ne peux pas te contenter de l’arc !

J’ai, après tout, toujours une idée derrière la tête. Un sourire sur mes lèvres, je laisse Aragorn prendre ma main et nous nous dirigeons vers les cuisines ensemble. Estel me rappelle ma proposition de l’autre fois de lui apprendre les plantes. Il est vrai que je suis une guérisseuse et qu’un jour, ce bout de chou devra partir d’ici et courir les routes pour trouver son propre destin. Il ne peut pas rester enfermé ici jusqu’à la fin de ses jours, il est bien trop important. Je soupçonne parfois mon ancien mentor d’avoir rêvé de son futur, et de ne l’avoir recueilli que pour ça. Elrond, après tout, a du mal avec les hommes, même si ce lieu est un des rares endroits sur les Terres du milieu où les races sont toutes accueillies et mises en sûreté. Toutes, sauf les orcs, évidemment.

- En effet, tu me l’avais promis, mais il faut que tu te mette en tête que ça ne se fera pas en une seule journée. Un sourire sur les lèvres je serre mes doigts autour des siens et le laisse avancer en direction des cuisines, adaptant mon pas au sien.

Sa question me tire un sourire, puis un petit rire amusé. Quel ventre sur pattes, celui là ! Il pourrait manger de mes gâteaux toute la journée s’il le pouvait. Et voilà qu’il pense emmener de la confiture de fraises pour un déjeuner, là où je pensais à des sandwichs de pâté et autres tranches de jambon. Enfin, s’il veut de la confiture, je le laisserais en manger en dessert.

Cela dépend, à ton avis, est ce que tu as déjà tout mangé ou est ce qu’il en reste ?

Je pousse la porte et salue la cuisinière d’un signe de la tête avant de m’avancer vers elle pour lui demander de nous préparer un panier repas pour deux personnes. Je finis par jeter un regard au gamin à mes côtés et je me penche par-dessus la table pour terminer ma commande :

- Ce petit prince à mes côtés demande si nous pouvons avoir de la confiture de fraise et de la brioche pour le dessert… Et une tartine en plus pour tout de suite, afin de prendre des forces pour le trajet.

Enfin, avant de partir, nous devons passer à l’armurerie, puis prendre les chevaux. Ou un seul ? Je pense que Calinà pourra nous porter, Estel et moi. Et puis, la Mearas adore les enfants. Je pense qu’elle me laissera poser Aragorn sur son dos. Sinon, je prendrais mon étalon, et un poney pour mon petit compagnon.

Aragorn était réellement heureux qu'Elinà confirme vouloir l'emmener avec elle en balade. Malheureusement, elle semblait tenir à ce qu'il prenne une épée, mais ses professeurs lui avaient interdit d'approcher les lames hors de ses entraînements pour le moment. Il n'était pas assez doué et les épées, bien qu'elfiques, trop lourdes pour ses petits bras. Elladan et Elrohir, craignant sans doute qu'Aragorn ne se coupe un bras malgré lui, ne lui avaient donc pas encore laissé se choisir sa propre épée contrairement à son arc qui était bien à lui.

Aragorn pris cependant sur lui de ne pas réveler cet aspect des choses tout de suite et, prenant la main d'Elinà sans plus de cérémonie, se dirigea vers les cuisines en sa compagnie, lui rappelant que la dernière fois qu'ils s'étaient vu, il lui avait promis d'aller à la cueillette des plantes en sa compagnie pour qu'elle joue les professeurs. Le fait que le petit garçon se souvienne de sa promesse sembla faire plaisir à la dame elfe. Du moins, c'est ainsi qu'Aragorn ressentit les choses.

- En effet, tu me l’avais promis, mais il faut que tu te mette en tête que ça ne se fera pas en une seule journée.

Bien entendu, il ne pensait pas qu'il soit possible de tout apprendre des plantes en une seule journée, il y avait bien trop de plantes différentes pour ça et certainement que chacune d'entre elles avaient plusieurs vertus bien distinctes... Et puis il fallait admettre aussi que de tout faire rentrer dans la mémoire du petit garçon n'allait certainement pas se faire en une seule fois. Il penserait avoir bien enregistré et la fois d'après se mélangerait certainement les pinceaux... Mais ce genre de choses venait avec le temps et la pratique, comme pour l'arc, l'épée et la monte, il en était certain.

Aussi, plutôt que de s'inquiéter d'avantage du fait qu'une seule leçon d'herbologie ne suffirait pas à son apprentissage, Aragorn se demanda plutôt s'ils pourraient avoir de la confiture de fraise aux cuisine. C'était tout de même la raison principale pour laquelle il se trouvait dans les parages. Ça n'était pas de sa faute, il aimait tellement les fraises et la confiture de la cuisinière était un vrai délice à ses papilles si affamées.  

Cela dépend, à ton avis, est ce que tu as déjà tout mangé ou est ce qu’il en reste ?

- Bien sur que non je n'ai pas tout mangé... Tu es arrivée avant que j'ai eut le temps de me rendre jusque là bas. Se vexa-t-il légèrement.

Oui bon, il était gourmand, mais il était sur que c'était un pêché que partageaient tous les enfants, qu'ils soient simples mortels ou bien elfes... D'ailleurs, il était sur qu'Elinà devait bien avoir un pêché mignon au niveau de la nourriture, ou bien en avait eut un lorsqu'elle était toute petite. Il ne posa pas la question cependant car ils entraient déjà dans les cuisines et Elinà s'adressa à la responsable afin de commander un panier pique nique avant d'ajouter avec un brin de malice.

- Ce petit prince à mes côtés demande si nous pouvons avoir de la confiture de fraise et de la brioche pour le dessert… Et une tartine en plus pour tout de suite, afin de prendre des forces pour le trajet.

Aragorn cru bon de rougir d'embarras surtout lorsque son estomac confirma bruyamment les dires de la dame elfe. Il entendait déjà leurs rires amusés et ne savait plus où se mettre. Malgré tout, lorsque la tartine de confiture lui fut présenté sous le nez, il n'hésita pas une seconde avant de s'en emparer.

- Merci. Dit-il avant d'en croquer un gros morceau.

Tout à sa gourmandise, Aragorn se laissa conduire hors de la cuisine par Elinà et marcha silencieusement à ses côtés tout en dégustant sa tartine de confiture. Ca n'était pas l'envie qui lui manquait de lui parler, mais il avait appris depuis longtemps déjà qu'il était fort impoli de parler la bouche pleine et à choisir entre manger moins vite et attendre pour parler, son choix était vite fait. Ils en étaient presque arrivés à l'armurerie lorsqu'Aragorn termina enfin sa tartine.

- Hum ! C'était drôlement bon... Lança-t-il en se frottant le ventre. Mais tu sais Elinà, je n'ai pas le droit d'avoir une épée en dehors de mes leçons d'entrainement... Apparemment je serais un vrai danger public pour les autres et pour moi...

Mais il ne désespérait pas. Il finirait bien par grandir et prendre en force et en agilité et enfin, il aurait sa propre épée et se battrait aussi bien que n'importe quel autre elfe... La rapidité et un peu d'agilité en moins il ne fallait pas qu'il se fasse trop de fausses idées...

Un rire monte à ma poitrine lorsqu’Estel me dit que je ne pourrais pas tout lui apprendre en une seule journée. Oui, tout à fait. C’est même certain. Il m’a fallu plusieurs années pour apprendre mon art, et aujourd’hui encore je continue d’apprendre de nouvelles choses, de créer de nouvelles techniques. Je hausse un sourcil et contemple l’enfant, hésitant à me moquer gentiment de lui. Non, il risquerait de mal le prendre. Un sourire sur mes lèvres, cependant, je lui réponds Ne t’en fait pas. Aujourd’hui je vais rester très générale. Tu ne seras pas un guérisseur, Estel, tu as un autre destin. Cependant, il est important que tu sache reconnaitre une plante qui arrêtera le sang d’une blessure de celle qui va t’empoisonner. Non, décidément, je ne vais pas rentrer dans les détails. Il faudra qu’il connaisse les propriétés de l’Athelas, de l’ail et du thym ou encore de l’usnée, très utiles pour les blessures. Je ne lui parlerais pas des propriétés du jus d’ananas pour avoir de belles jambes sans cellulite, cela ne l’intéressera pas. Non, il n’aura de cours que sur les plantes permettant la guérison, et peut être celles contre la douleur. Lorsqu’on est blessé, appliquer un cataplasme mélangeant anti-douleur et coagulant peut être utile pour réussir à se sortir de là en gardant tous ses sens.

Je taquine cependant Estel sur son estomac qui semble sans fond sur le chemin des cuisines et un rire m’échappe lorsqu’il m’avoue ne pas avoir encore eu le temps d’arriver aux cuisines pour tout manger. Donc, c’était bel et bien dans tes plans ? Et bien, que diraient Elrohir s’il s’avait que son petit protégé se fait prendre sur le chemin au lieu d’être retrouvé après son méfait. Il serait très déçu, tu sais. Enfin. Nous voilà dans la cuisine de la maison d’Elrond, et je prends la parole pour demander un pique nique, et une tartine pour mon petit vaurien préféré.

Espérons simplement que, le jour où j’aurais moi-même des enfants, ils ne soient pas comme ça. Je n’ai jamais disputé personne pour avoir faim entre les repas, et j’espère que mes enfants sauront me demander une tartine au lieu de venir fouiner dans mon dos. De plus, il vaut mieux manger un petit peu quand on a faim, tout en gardant le place pour le véritable repas, que de se goinfrer dans le dos de sa mère et ne plus avoir faim à table. Estel récupère donc sa tartine et je lui fais un sourire, tout en le reconduisant vers l’armurerie où j’ai une petite surprise pour lui. Je ne suis certes pas douée en forge, mais je connais un elfe qui l’est, même s’il préfère fabriquer des bijoux. Elrohir et moi avons préparé cette surprise depuis un bon mois, et s’il est parti avec Histiel en voyage en Lorien, il m’a bien dit que je ne devais pas attendre pour offrir ce cadeau à notre petit protégé, qui prend justement la parole pour m’expliquer le souci. Je le sais bien, je réponds, énigmatique. Ma main libre se pose sur l’épaule d’Aragorn et je le guide vers les épées, sans lui laisser le temps de partir vers les arcs. Là se trouve une longue boite en bois fermée par un ruban, et disposée sur un banc.

-Je crois, je reprends après quelques secondes de flottement qu’Elrohir m’a demandé de t’offrir ceci. Je désigne la boite et lui laisse le temps de décider de l’ouvrir. A l’intérieur se trouve une vraie épée elfique, mais forgée pour convenir à un enfant. Légère et parfaitement équilibrée, sa garde semble être sertie de petits fils d’or. Le fourreau en cuir reprend le même motif, et on peut y voir écrit « Estel » en caractère elfiques. Un beau cadeau, si vous voulez mon avis. Je pense que tu seras moins une catastrophe avec ceci qu'avec les épées trop lourdes pour toi... Cependant, si tu préfère ton arc, je peux toujours la rendre à Elrohir...

Donc, c’était bel et bien dans tes plans ? Et bien, que diraient Elrohir s’il s’avait que son petit protégé se fait prendre sur le chemin au lieu d’être retrouvé après son méfait. Il serait très déçu, tu sais.

Hum... Il se moquerait surement de lui car Elrohir n'était pas le dernier à vouloir lui faire faire des bêtises et rarement le premier à le couvrir en cas d'échec... Aragorn leva les yeux au ciel sans répondre, a quoi bon... Elinà avait raison de toutes façons... Malgré son nombre d'année bien supérieur à celui d'Aragorn, Elrohir était parfois un gamin pire que lui... Mais le petit garçon aimait bien ça, parce que cela lui permettait d'avoir comme des frères aînés (qui avaient moins d'écart d'âge avec lui) et il se sentait ainsi moins seul... Déjà que les enfants de son âge n'étaient pas monnaie courante à Imladris... Et puis cela changeait, les elfes étaient généralement si calmes et si sages... Lui, à côté, il ressemblait à un véritable diablotin.

Le garçonnet suivit la blondinette jusqu'aux cuisines où il la laissa volontiers commander leur repas et lui faire la surprise de demander une tartine de confiture supplémentaire pour qu'il puisse calmer sa gourmandise passagère avant de quitter les cuisines en direction de l'armurerie. Aragorn mis d'ailleurs le trajet à profit pour engloutir sa tartine aussi proprement que possible.

Une fois arrivés à destination, Aragorn cru bon d'être honnête et d'expliquer à Elinà qu'il ne possédait pas d'épée et n'avait pas le droit d'en prendre une en dehors de ses leçons avec le fils d'Elrond car il n'était pas encore assez habile pour ne pas être dangereux avec une arme encore trop lourde pour ses petits bras. Mais apparemment, Elinà semblait décidée à ce qu'il ne s'encombre pas de son arc puisqu'elle ne lui demanda pas de filer le chercher dans sa chambre.

Je le sais bien

Elle mis une main sur son épaule et le conduisit vers les épées. Aragorn, perdu, se demandait bien pourquoi elle l'emmenait par là alors qu'elle savait qu'il n'avait pas le droit d'avoir une épée en dehors de ses leçons et lui, il ne voulait pas risquer d'être puni de leçon d'escrime parce qu'il aurait transgressé la règle, car il doutait de ne pas être puni même s'il expliquait que c'était Elinà qui avait insisté pour qu'il prenne une épée.

-Je crois... qu’Elrohir m’a demandé de t’offrir ceci.

Aragorn haussa les sourcils, surpris que le prince elfe lui fasse un cadeau car il ne s'y attendait pas le moins du monde. En plus, celui-ci était en voyage à l'heure actuelle et puis il était rare que l'enfant ait des cadeaux sans raison. Il baissa les yeux vers une longue boite enrubannée et l'observa un instant avant d'oser s'en approcher à pas lents, comme s'il craignait que la boite ne se sauve s'il s'en approchait trop vite. Avec précaution, il dénoua le ruban avant de le poser sur le banc à côté et d'ôter le couvercle de bois qui cachait son cadeau. Bouche bée, il retira une magnifique épée de la boite et constata rapidement qu'elle n'était pas si lourde que ça. La portant plus près de ses yeux, il ne tarda pas à remarquer son nom gravé sur le fourreau qui en protégeait la lame et il la dégaina pour observer le magnifique travail des forgerons elfiques avant de la remettre bien à l'abri, toujours silencieux et de se tourner vers Elinà lorsqu'elle repris la parole.

- Je pense que tu seras moins une catastrophe avec ceci qu'avec les épées trop lourdes pour toi... Cependant, si tu préfère ton arc, je peux toujours la rendre à Elrohir...

Aragorn plaqua l'épée contre son torse comme s'il craignait qu'elle ne la lui prenne des mains. C'était son épée, il y avait même son nom dessus, hors de question de la rendre à Elrohir.

- Non je la garde ! Avait-il répondu tout aussi vivement. De toutes façons, il y a même mon nom dessus, personne ne pourra me la voler

C'était son épée, rien qu'à lui, et il était hors de question qu'on la lui reprenne, surtout là qu'il venait tout juste de l'avoir. D'ailleurs, elle ferait comme son arc, elle ne dormirait pas à l'armurerie, mais bien cachée sous son lit dans sa chambre. Pour confirmer ses dires, il accrocha l'épée à sa ceinture avant de lever un regard fier vers Elinà.

- Et toi ? Tu prends quoi comme arme ?

C'était vraiment chouette de pouvoir porter une épée sans se sentir pencher d'un côté parce qu'elle était encore trop lourde. Là, il la sentait à peine pendre le long de sa hanche.

- Je vais avoir une monture pour moi tout seul ou tu vas me faire monter sur ton cheval ? Demanda-t-il encore curieux.

Quel dommage que je ne sois pas douée en dessin. J’aurais pu montrer à Elrohir la tête absolument ravie d’Estel face à cette épée. J’aurais aussi pu croquer la façon dont son visage avait l’air concentré lorsqu’il a ouvert les rubans de soie. Un sourire monte à mes lèvres. Qu’est ce qu’il est mignon. Adorable. Un jour, j’espère avoir des enfants. Mais, pour cela, il faut se marier. Trouver un elfe qui veuille de moi. Qui m’accepte comme je suis. Enfin. Ce n’est pas l’heure d’y penser. J’ai l’immortalité toute entière pour ça. Un rire monte à ma poitrine lorsque, le cadeau enfin déballé, Estel la serre contre son cœur quand je lui dis que je peux la reprendre s’il n’en veut pas.Très bien, alors tu la garde. Je m’approche pour observer la lame que je n’ai toujours pas vue. Elle est magnifique. Elrohir a vraiment fait un superbe boulot. Pour lui qui a l’habitude de forger des bijoux pour sa famille, bien plus que des armes, je trouve qu’il a réellement un talent pour ça aussu. Je pense que c’est pour ça qu’Elrohir a passé autant de temps à la forge. Il voulait qu’elle soit parfaite pour toi.  Ma voix emplit l’air pour dire ce que j’étais justement en train de penser. Oups ? Bah : Estel est un enfant. Quelque part, je me doute bien qu’il doit y avoir dans sa tête un véritable flot de questions sur le pourquoi de ce cadeau. Comme savoir pourquoi Elrohir a fabriqué ceci lui-même pour lui. Et pourquoi offrir ce cadeau comme ça, sur un coup de tête. En fait, j’en suis même totalement persuadée. Si le coup de tête se trouve tout à fait normal pour Elrohir, Estel ne le côtoie peut être pas assez pour en comprendre la raison profonde. Je me dois donc de lui expliquer. Mon regard se pose sur lui et je croise les bras : Elrohir a pensé qu’une épée qui soit à ta taille te permettrait bien mieux d’apprendre à te battre avec qu’une épée plus trop grande et trop lourde pour toi. Je souris et je m’avance vers un présentoir où se trouvent des armes venues d’autres contrées. C’est là que sont les miennes. Je commence par prendre l’épée courte que je montre à Estel : Tu sais que je ne me bas pas comme les autres elfes, n’est ce pas ? J’attache l’épée dans mon dos grâce à des lanières qui viennent se croiser sur ma poitrine. J’attrape ensuite deux longues griffes que j’attache directement sur mes poignets avant de laisser les lames rentrer dans leurs supports. Ce sont des Khatars. Ces armes viennent du Rhun, très loin d’ici. Je ne suis même pas sûre qu’on les utilise encore aujourd’hui là bas. Oui, voilà bien longtemps que je n’ai pas été voir ces habitants… Je n’ai plus de nouvelles de ce qu’il se passe là bas depuis longtemps. Les routes ne sont pas assez sûres pour que je parte aussi loin et aussi longtemps. Et puis, je dois m’occuper d’Estel. Je ne peux pas l’abandonner comme ça, sur un simple coup de tête. Je m’approche ensuite de l’enfant et m’assois à côté de lui sur un banc. Je lui montre, en faisant bien attention à ce qu’il reste à côté de moi la façon dont les lames sortent toutes seules lorsque je fais un mouvement du poignet. C’est un mécanisme qui possède tout un tas de petits rouages, une version minuscule de petites roues crantées qui permet de sortir et rentrer la lame. Il faut que je mette de la graisse pour l’entretenir régulièrement, et que je fasse attention à ne pas casser les petites roues. Je ne suis pas sûre qu’on sache le remplacer si jamais ça se cassait à cet endroit. Ce n’est pas le genre de savoir des elfes. Cependant, on peut changer les lames à volonté : aujourd’hui il y a trois griffes, mais je peux aussi mettre des lames ressemblant à celles des dagues ou d’épées.

Une fois armée, je récupère le panier et nous commençons à marcher lentement vers les écuries. La première question d’Estel est, non pas à propos de notre destination finale, mais à propos de notre trajet. Voyons, peut-il avoir son propre cheval ou pas ? Cette journée est pour lui. Pour lui faire plaisir. Nous avons commencé par la collation, puis par l’épée… Pourquoi ne pas continuer avec une monture juste pour lui ? Si tu es assez grand pour avoir une épée à ton côté, je pense que tu peux aussi grimper seul à cheval. Non ? Evidemment, même si je me doute de la réponse, je lui laisse le choix. D’autant que j’en ai un autre à lui proposer : Est-ce que tu sais ce qu’est un Mearas ? Je lui laisse une seconde pour se rappeler le terme, que je lui ai déjà expliqué plusieurs fois et puis je continue : Parce que, je pense que ma chère Calinà pourrait accepter que tu montes sur son dos avec moi. Si tu le lui demande gentiment.

Rendre l'épée ? Son épée toute neuve ? C'était absolument hors de question. C'était la sienne, rien qu'à lui et puis en plus, il y avait même son nom gravé dessus alors personne d'autre ne pourrait l'utiliser... Non, c'était son épée, il attendait d'avoir la sienne depuis si longtemps, depuis presque aussi longtemps que depuis qu'il avait son arc propre, alors là qu'Elrohir la lui offrait enfin, il n'allait certainement pas refuser.

Très bien, alors tu la garde.

Rassuré par les paroles de la jeune elfe, Aragorn la laissa observer son cadeau de plus près sans craindre qu'elle ne le la lui pique. Il la décolla même de son torse pour la lui présenter afin qu'elle la voit mieux.

Je pense que c’est pour ça qu’Elrohir a passé autant de temps à la forge. Il voulait qu’elle soit parfaite pour toi.

Ebahi, Aragorn observa la femme elfe qui semblait avoir pensé tout haut. Mais ce qui lui importait le plus, ça n'était pas tellement ce petit instant d'égarement mais plutôt les paroles qu'elle avait prononcé... Elrohir avait forgé la lame lui-même... Il avait passé plusieurs heures, surement même plusieurs jours à la forge pour lui faire une épée à lui tout seul... S'il avait été un peu plus émotif, il en aurait eut les larmes aux yeux. Mais Aragorn se contentait d'un regard impressionné et pétillant d'admiration.

Elrohir a pensé qu’une épée qui soit à ta taille te permettrait bien mieux d’apprendre à te battre avec qu’une épée plus trop grande et trop lourde pour toi.

Et bien, à la réflexion, Aragorn pensait que son professeur avait parfaitement raison... Avec une lame adaptée à ses forces et sa taille, il aurait plus d'aisance à reproduire l'agilité elfique, en moins impressionnant naturellement. Il lui avait fallut plusieurs mois pour le comprendre, mais Aragorn était désormais parfaitement conscient que jamais il n'atteindrait l'agilité et la rapidité d'un elfe, même s'il apprenait en leur compagnie. Il questionna donc la jeune femme sr le genre d'armes qu'elle allait emporter, espérant bien qu'il ne serait pas le seul armé car il était bien loin d'avoir assez d'assurance pour se croire capable de défendre Elinà efficacement face à une meute de Ouargues.

Tu sais que je ne me bas pas comme les autres elfes, n’est ce pas ?

Parlait-elle de son peu de maitrise de l'arc ? Surement. Intrigué, Aragorn l'observa fixer de drôles d'armes à ses poignets et il s'approcha pour mieux les voir.

Ce sont des Khatars. Ces armes viennent du Rhun, très loin d’ici. Je ne suis même pas sûre qu’on les utilise encore aujourd’hui là bas.

Elinà partit s'asseoir et il pris place à ses côtés, en plus d'une leçon d'herbologie, il allait avoir un petit cours sur les armes, il en avait de la chance, sans compter qu'il avait sa toute nouvelle épée, cadeau inespéré...

C’est un mécanisme qui possède tout un tas de petits rouages, une version minuscule de petites roues crantées qui permet de sortir et rentrer la lame. Il faut que je mette de la graisse pour l’entretenir régulièrement, et que je fasse attention à ne pas casser les petites roues. Je ne suis pas sûre qu’on sache le remplacer si jamais ça se cassait à cet endroit. Ce n’est pas le genre de savoir des elfes. Cependant, on peut changer les lames à volonté : aujourd’hui il y a trois griffes, mais je peux aussi mettre des lames ressemblant à celles des dagues ou d’épées.

La bouche entre-ouverte, les yeux légèrement agrandis, Aragorn écoutait religieusement les explications d'Elinà tout en observant les armes et les mouvements de l'elfe. Elle termina de s'équiper et elle récupéra leur panier pique-nique avant de sortir de l'armurerie, suivie par Aragorn qui avait posé sa main sur le pommeau de son épée, comme pour s'assurer qu'elle ne s'envolerait pas au moindre signe de relâchement. Curieux de savoir s'il pourrait monter seul ou non, Aragorn demanda tout simplement à Elinà d'éclairer sa lanterne. Il aurait aimé avoir un cheval pour lui tout seul car il montait très bien. Depuis tout petit, il adorait les chevaux et ceux-ci le lui rendaient très bien. Mais si Elinà lui disait qu'elle le prendrait avec elle sur sa monture, il serait tout aussi content.

Si tu es assez grand pour avoir une épée à ton côté, je pense que tu peux aussi grimper seul à cheval. Non ?

Aragorn se retint juste à temps pour ne pas sauter sur place. Chouette, il allait pouvoir monter tout seul.

- Oui... Et puis ça fait longtemps que j'ai le droit de monter tout seul.

Il fallait dire qu'il s'était nettement mieux sortit avec les chevaux qu'avec les épées...

Est-ce que tu sais ce qu’est un Mearas ?

- Un seigneur des chevaux.

Le cheval le plus noble et le plus beau qu'il puisse exister... Un animal encore plus noble qu'une simple monture... Une légende.

Parce que, je pense que ma chère Calinà pourrait accepter que tu montes sur son dos avec moi. Si tu le lui demande gentiment.

Les yeux pétillant d'émerveillement, Aragorn stoppa sa respiration un peu trop longtemps. Vraiment ?! Alors là, il était prêt à oublier le plaisir de monter seul... Un Mearas... Lui, il ne montait que des chevaux normaux s'il pouvait le dire ainsi, parce qu'il était encore jeune et qu'il valait mieux pour lui s'en sortir relativement bien avec un cheval quelconque plutôt que de se risquer sur une monture plus compliquée à aborder.


- C'est vrai ?! Je serais vraiment très heureux qu'elle me laisse monter avec toi.... Mais euh... Comment je lui demande ?

Ils arrivaient finalement aux écuries pile au bon moment et Aragorn était prêt à écouter puis appliquer les instructions et recommandations de la jeune femme à la lettre.

Je suis une vilaine. Quelque part, je me dis que je n’aurais pas dû m’amuser avec les nerfs de l’enfant en face de moi. Si mon cher ami Elrohir a choisi de lui offrir cette épée, ce n’est pas à moi de la lui reprendre. Non, je n’ai ici que du jouer les transferts et donc aucun mot à dire là-dessus. Bon, sauf si Aragorn se mettait à essayer de s’ouvrir le ventre tout seul en faisant le pitre avec l’objet. Mais, il me semble bien que mon adorable petit loup n’a pas l’immaturité nécessaire pour faire n’importe quoi. Non, il possède, malgré son jeune âge, un regard étrange sur le monde, ce genre de regard qui fait qu’il sera certainement un grand Homme. Enfin, je n’ai jamais eu le moindre doute là-dessus. Aragorn est un étudiant doué, et quand il réussit à rester concentré assez longtemps, son esprit comprend vite les choses.

Enfin, voilà que la tête ébahie d’Aragorn me sort, je pense qu’il n’avait pas réalisé à quel point Elrohir pouvait l’apprécier. Si mon ami est un excellent joailler, et un forgeron plus que potable, il n’en fait que rarement usage, et généralement pour faire des cadeaux aux personnes qu’il aime. Et, même comme ça, Histiel ou moi-même devons lui répéter des heures durant que oui, cette petite vague absolument invisible à l’œil nu est bien placée, et que, non, il ne manque pas une ou deux pierres précieuses. Tout un tas d’autres petites choses du même genre m’amusent d’ailleurs. Elrohir est adorable, mais il a un manque de confiance en lui absolument étonnant pour un guerrier de sa trempe. Son grand père, et les meilleurs maitres elfes de la forêt noire lui ont donné un entrainement à l’épée des plus complets, en faisant un bretteur exceptionnel. Mais, dès qu’il s’agit de sortir du combat, toute son assurance s’envole directement. Pouf ! Plus rien. C’est tout de même super étrange. D’ailleurs, je suis presque sûre qu’il n’aurait jamais osé offrir l’épée à Aragorn tout seul. Non. Il aurait fallut que je sois avec lui, et que je lui donne de grands coups de pieds aux fesses. Pour le coup, il est presque mieux que monsieur soit parti avec sa belle Histiel. Comme ça, ils vont pouvoir se retrouver tous les deux – enfin – et puis j’ai pu offrir le cadeau d’Elrohir sans l’avoir sur le dos. Oh, il aurait aimé être là. Juste pour voir la tête d’Aragorn. Mais, il n’aurait pas aimé l’offrir lui-même.

Mais, voilà venu l’heure de m’équiper moi-même. Après quelques explications sur mes propres armes, nous voilà en chemin vers les écuries. Si je sais qu’Aragorn peut bien monter seul, j’ai envie, moi aussi, de lui faire un cadeau : après tout, il n’a pas souvent l’occasion de sortir de la cité, et faire de ces moments de véritables moments d’émerveillements ne serait pas de trop, à mon humble avis. Il a encore le temps pour devenir un vieillard aigris qui regardera le monde avec un œil critique. Oh, parfois, j’aimerais qu’il ne grandisse pas. Mais, le temps fait on œuvre, inlassablement, et il va grandir. Et moi ? Oh, moi je vais rester la même. Ne pas changer. Simplement observer le temps passer. Et, attendre que l’appel pour Valinor se fasse ressentir. Notre temps en ces terres est presque écoulé, à nous autres, immortels elfes.
Mais, nous voilà devant les écuries, et je tourne le regard vers Aragorn suite à une proposition qu’il n’a certainement pas pu voir venir. Calinà n’est pas le genre d’animal qu’on monte tous les jours. Même moi, je ne l’utilise pas comme une simple monture. Non, elle est une véritable compagne, intelligente et rare. Lorsqu’elle me laisse caresser son poil, j’ai l’impression de toucher de la soie. Lorsque je suis sur son dos et que ses membres puissants avalent les lieux, je me sens comme si je volais. Non, Calinà est plus qu’un cheval. Et, si je propose à Aragorn de monter sur son dos aujourd’hui, je dois avouer que je ne sais pas encore si la demoiselle va accepter ou pas. Elle est difficile, et il m’a fallu de longs mois pour l’apprivoiser.Et bien, on lui demande simplement et poliment. Et, surtout, n’oublie pas de la saluer.Simple n’est ce pas ? Si la réponse est positive, alors elle s’agenouillera pour que tu puisses monter sur son dos. Sinon… Eh bien, je te prêterais un autre animal. J’entre donc dans l’écurie et me dirige vers la stable de la demoiselle, suivie d’Aragorn. Je passe la porte en bois, toujours ouvert et tends les doigts pour permettre à la créature blanche qui se repose là de les sentir. Aujourd’hui, elle semble heureuse de me voir et presse ses naseaux contre ma paume pour réclamer des caresses. Doucement toi ! Ma main glisse dans sa crinière et je me tourne ensuite sur le côté pour dévoiler l’enfant qui est resté sagement à l’entrée. Je te présente Estel. Il a quelque chose à te demander. Je fais signe à Aragorn d’avancer dans la stable et m’approche de lui. Je m’accroupie et lui tend une main. Calinà aime connaitre l’odeur des gens. Fais lui sentir ta paume. Elle ne te mordra pas. Ensuite, tu pourras lui poser ta question. Je n’ajoute pas « comme si elle était humaine », car cela me semble superflu. Parfois, je me demande si la Mearas comprend réellement ce qu’on lui dit, ou bien si ce sont simplement nos intonations qui lui permettent de deviner le sens de nos paroles.

Le chemin vers les écuries ne semble pas si long que ça finalement, peut-être simplement parce qu'Aragorn n'était pas si impatient que ça maintenant qu'il pouvait également songer à son cadeau tout neuf, réalisé spécialement pour lui et dont il rêvait depuis longtemps maintenant. Elnà suggéra la possibilité que le petit garçon monte sur son Méaras, un animal noble et rare, à condition que ce dernier soit disposé à le laisser faire et le petit humain n'en cru pas ses oreilles. Mais il ne devait pas se montrer trop enthousiaste, peut-être que la monture ne voudrait pas de lui sur son dos et alors, il s'y plierait. Cependant, pouvoir approcher un tel cheval de près n'était déjà pas une chose courante et Aragorn se sentirait déjà chanceux de pouvoir le faire.

Peu rassuré quant à la marche à suivre, Aragorn préféra malgré tout demander à Elinà de quelle façon il devait s'y prendre pour demander à son cheval s'il voulait bien de lui sur son dos pour l'emmener en promenade. C'était sans doute idiot, mais peut-être la jument avait-elle quelques habitudes qui puisse la mettre de bonne humeur et toute disposée à l'accepter pour cette promenade.

Et bien, on lui demande simplement et poliment. Et, surtout, n’oublie pas de la saluer.

Aragorn confirma d'un signe de tête, commençant déjà à se sentir impressionné. Il ne trouvait pas ça idiot du tout, habitué lui-même à parler aux chevaux et à entendre les elfes le faire également comme si les animaux étaient capables de leur répondre.

Si la réponse est positive, alors elle s’agenouillera pour que tu puisses monter sur son dos. Sinon… Eh bien, je te prêterais un autre animal.

Bon... Et bien du moment qu'elle ne cabrait pas pour le faire sortir vite fait de son box, il n'avait pas d'inquiétudes à avoir. Après tout, comme disait Elinà, il pourrait toujours prendre un autre cheval pour l'accompagner dans sa cueillette. La femme elfe entra dans le box sans crainte, laissant l'animal flérer sa main avant de venir y cogner ses nasseaux, reconnaissant sans peine sa propriétaire. Aragorn, lui, restait bien sagement à l'entrée du box, n'osant avancer plus avant sans permission.

Doucement toi !

Se satisfaisant grandement de pouvoir observer l'animal avec un regard rempli d'admiration et d'intimidation, Aragorn vit à peine Elinà se décaler pour laisser tout le loisir à sa monture de voir qu'elle n'était pas venue toute seule. Le regard pétillant devant la beauté de la magnifique monture, la bouche légèrement entre ouverte et n'osant faire le moindre geste pour ne pas l'effrayer, Aragorn entendit Elinà reprendre la parole.

Je te présente Estel. Il a quelque chose à te demander.

Aragorn ferma immédiatement la bouche, se mordant la lèvre inférieure, mal à l'aise. Malgré tout, lorsqu'elle lui fit signe, il s'avança et vint s'arrêter à hauteur d'Elinà qui s'était accroupie et lui tendait une main. Aragorn tourna un instant les yeux vers la blonde puis plaça une main dans celle qu'elle lui tendait.

Calinà aime connaitre l’odeur des gens. Fais lui sentir ta paume. Elle ne te mordra pas. Ensuite, tu pourras lui poser ta question.

Avalant sa salive avec difficulté, réellement très intimidé, Aragorn confirma d'un signe de tête et pris une profonde inspiration avant de tendre doucement sa main vers la tête de l'animal, paume ouverte vers le haut. Il ne devait pas trembler, même si cela trahissait d'avantage sa joie d'être ici plutôt qu'une quelconque peur. Les chevaux aiment généralement savoir que leur cavalier savent ce qu'ils font. Se forçant à respirer calmement et profondément, Aragorn vit la jument pencher la tête pour pauser son nez contre sa paume et le souffle équin lui chatouilla un instant la peau fragile de sa main.

- Bonjour Calinà. Murmura-t-il doucement après quelques secondes. Je suis vraiment très content de te rencontrer... Elinà m'a beaucoup parlé de toi... Tu es magnifique.

Et il pensait réellement ce qu'il disait. Aragorn adorait les chevaux, il avait toujours eut beaucoup d'affinité avec eux, d'après sa mère, ça datait même d'avant son arrivée à Foncombe. Il était tellement à l'aise avec ces nobles animaux qu'il aurait pût prétendre avoir su monter avant de marcher. A ses yeux, chaque cheval était beau à sa manière, et la Méaras ne faisait pas exception.

- Elinà veut m'emmener en balade... Tu voudrais bien que je monte sur ton dos en sa compagnie ? S'il te plait ? Demanda-t-il en laissant retomber sa main comme l'animal ne semblait pas y porter plus d'intérêt. Mais si tu ne veux pas, c'est pas grave. Précisa-t-il.

Les dés étaient lancés... Il ne pouvait guère faire plus que d'attendre de voir si Calinà accepterait ou non qu'il grimpe sur son dos en compagnie de l'elfe.

Oh, qu’il est adorable, ce bout de chou, lors de sa demande. Je n’aurais pas mieux fait moi-même. D’ailleurs, si je me rappelle bien de notre première rencontre à tous les deux, je ne m’en étais pas aussi bien sortie que lui. C’était un soir de pluie, il y a peut-être quarante ans. J’étais poursuivie par des orcs, et incapable de leur faire face seule. Et puis, dans un champ, j’étais tombée sur Calinà, alors toute jeune pouliche. Avec la pluie et la boue sur sa robe, je l’avais d’abord prise pour un animal normal, et j’avais tenté de grimper sur son dos pour fuir les orcs. Bien entendu, ça ne s’était pas aussi bien passé que ce que je l’espérais : Calinà avait rué et m’avait désarçonnée, me faisant tomber sur le sol avec dureté. Et le pire dans tout ça ? elle m’avait regardé avec une expression qui me faisait penser à un rire : comme si elle se moquait de moi. Quatre essais plus tard, je m’étais mise en colère et lui avait crié dessus. Les orcs n’étaient plus très loin, et j’avais le choix entre continuer à courir droit devant moi jusqu’à en tomber d’épuisement, ce qui était très proche, soit convaincre cette tête de mule de m’emmener. On raconte que les Mearas ne portent sur leur dos que les descendants de rois et reines, en souvenir de leur ancêtre, et quelque part, j’ai eu l’impression ce jour là que c’était vrai. Il a fallut que je crie à cette demoiselle que j’étais la petite fille d’un roi et qu’aucun cheval de pacotille ne me tiendrait tête pour qu’elle tourne son regard vers moi, intéressée soudainement, et qu’elle me donne un coup de naseau pour en savoir plus. Comme je n’en avais pas le temps, je suis remontée sur son dos et nous sommes parties au galop nous mettre à l’abris dans une caverne des montagnes rocheuses. Là, elle a insisté pour m’écouter raconter mon histoire jusqu’au bout, allant jusqu’à m’empêcher de dormir. Je n’aurais jamais cru un jour devoir obéir à un cheval.

Je n’ai réellement compris ce qu’elle était qu’une fois rentrée en Lorien : là j’ai pu nettoyer son poil soyeux et en découvrir la teinte argentée. Au vu de la tête de l’elfe qui s’occupait alors des écuries de Caràs Galadhon, c’était aussi la première fois qu’il en voyait un. Depuis, nous sommes inséparables, elle et moi, et les palefreniers ont pour consigne de ne jamais fermer la porte de sa stable, au cas où elle voudrait aller et venir. Jamais je ne me considèrerais comme étant la propriétaire de cette créature de magie pure. Non, je sais parfaitement qu’un jour viendra où elle me laissera pour partir vivre sa vie à elle, et je n’aurais pas le droit de la retenir. C’est un partenariat. Et, ce partenariat prendra fin, un jour.

Mais, revenons à Estel et à Calinà en ce jour d’été. Ma chère amie tourne la tête vers moi après avoir humé la main du garçonnet, et elle finit par s’intéresser à nouveau à Estel. Elle prend quelques longues secondes pour réfléchir, et puis elle finit par poser ses genoux sur le sol, invitant l’enfant à grimper sur son dos. Je lui montre comment s’y prendre et l’y rejoins une fois la jument remise sur ses pattes. Sans selle, sans bride, je me contente de lui indiquer où nous allons : au bord de la Bruinen, et elle se met en marche. Fais attention à ne pas tomber. J’entour Estel de mes bras et attrape la crinière de Calinà. Celle-ci est joueuse, et dès les portes de la cité passées, elle se lance au grand galop pour frimer devant Estel, certainement, avant de piler presque net une fois notre destination atteinte. Je saute sur le sol la première et prends une grande inspiration. Ha, j’aime cet endroit. J’aime cet emplacement parfait pour trouver des plantes et pour passer un bon moment. Et si nous commencions par piqueniquer ? Il ne doit pas être loin de midi, et mon estomac gronde.

Attendant patiemment et nerveusement que la jument se décide à l'accepter ou non sur son dos, Aragorn tentait tant bien que mal de ne pas paraître trop agité. Bien sur, il savait que l'animal sentirait son état de stress, même infime puisqu'il ne s'agissait pas de n'importe quel cheval, mais peut-être se rendrait-il également compte des efforts qu'il faisait pour maîtriser ses nerfs et sa capacité à ne jamais tenir en place.

Au bout de longues secondes qui parurent durer une éternité pour le jeune homme, l'animal pressa ses naseaux contre la paume de sa main, lui envoyant son souffle chaud alors qu'elle faisait sa connaissance puis elle s'intéressa un instant à sa maîtresse avant de retourner son énorme tête vers le petit garçon qui n'avait pas bougé d'un pouce, souhaitant lui laisser tout le loisir de vérifier si jamais elle n'avait pas assez bien sentit. Mais Calinà sembla en avoir décidé tout autrement puisqu'elle fini par plier ses pattes avant afin de s'abaisser au mieux en signe évident pour Aragorn qu'il était accepté à bord.

Tout souriant, le garçonnet laissa éclater sa joie en prenant un instant l'encolure de l'animal entre ses bras. Oui, il lui faisait un câlin... Puis il se détâcha du Méaras pour suivre les instructions d'Elinà qui l'aida à monter en croupe, comme s'il n'avait jamais fait une telle chose de sa vie. Il ne fit aucun commentaire cependant, même s'il était souvent agacé intérieurement par les elfes qui le traitaient comme un bébé de trois mois, il s'était fait une raison depuis longtemps... Peut importe qu'il ait sept ou soixante-dix-sept ans, ils le verraient toujours comme un gamin vu leurs siècles au compteur.

C'est donc sous le silence d'un Aragorn qui avait quand même levé les yeux au ciel, qu'Elinà grimpa derrière lui avant de donner sa destination à sa monture qui ne perdit pas de temps avant de se mettre en marche, quittant aisément l'écurie. Dès le premier pas, Aragorn apprécia d'avoir la chance de monter une telle bête, se sentant comme sur un nuage, sentant à peine les mouvements de balancier provoqués par les pas lents de Calinà.

Fais attention à ne pas tomber.

Prêt à répliquer à Elinà qu'il savait monter à cheval depuis longtemps, Aragorn se félicita ne d'avoir rien dit quand il fut surpris par la brusque montée d'allure prise par le cheval qui s'amusa à profiter d'un peu de liberté, à peine les portes de l'écurie passées. Il parvint à garder son équilibre, bien aidé par les bras d'Elinà au début et malgré un petit sursaut dans sa respiration, il ne fit aucun bruit, profitant de la course, lui qui avait toujours aimé sentir le vent s'engouffrer dans ses cheveux. Puis ils arrivèrent à destination et cette fois-ci, bien que l'arrêt fut quelque peu brusque, Aragorn fut moins surpris que pour le départ. Il laissa Elinà sauter au sol en premier et il se laissa glisser le long du dos de Calinà pour rejoindre la terre ferme à son tours.

Et si nous commencions par piqueniquer ? Il ne doit pas être loin de midi, et mon estomac gronde.

- Tu me connais, jamais je ne dirais non à une proposition pareille. Sourit le petit garçon.

Il pris le panier et le déposa là où l'herbe lui semblait relativement plate avant de s'asseoir en tailleur à même le sol. Ils n'étaient pas loin du bord de l'eau, mais tout de même assez éloigné pour ne pas risquer de tomber dedans ou d'y envoyer le panier dans un geste malencontreux. Pas qu'Aragorn ait peur de l'eau, bien au contraire, voila longtemps que les jumeaux lui avaient appris la nage, mais s'il pouvait éviter d'être tout tremper ou pire, de gâcher leur seul déjeuné...

- Tu vas avoir besoin de beaucoup de plantes aujourd'hui ? Demanda-t-il alors qu'il croquait dans son premier sandwich.

Nous voilà donc, tous les deux, installés à côté de la rivière. Mon regard se perd un instant dans le vide pendant que je prépare la nappe sur le sol, puis par-dessus le panier remplis de victuailles. Une outre de jus de fruit bien frais, pressés certainement quelques minutes avant qu’on ne la mette dans le panier, les sandwichs bien garnis, sentant bon la cuisine. Autrefois, j’ai été emmenée dans ce genre de paysage par ma tante, et les souvenirs d’enfant remontent rapidement à la surface, cette époque où j’étais en train de me reconstruire après la perte de mes parents, principalement, cette époque où je ne parlais plus du tout. J’évoque rarement cette part de ma vie, parce qu’aujourd’hui encore elle est difficile à expliquer. J’étais en état de choc, et si je n’ai jamais été capable de raconter ce qu’il s’est passé, disant que je n’ai rien vu depuis mon buisson, la vérité est toute autre. Je n’aime pas mentir, tout comme je crains de ne jamais être capable d’ouvrir mon cœur à quiconque sur ce point précis.

Alors, pour chasser les mauvais souvenirs, pour me forcer à rester concentrée sur le présent, je m’occupe de mon petit disciple. Oh, qu’il est adorable celui-là. Qu’il est gentil et patient, avide d’apprendre aussi. Quelques fois, lorsque je suis avec lui, je me demande si je n’ai pas loupé ma vocation. J’aurais peut-être dû choisir la voie de l’enseignement, apprendre à ceux qui m’entourent ce qu’il se passe autour d’eux. Mais, les voyages m’ont toujours attirée, même si je sais parfaitement que c’est particulièrement dangereux, surtout pour une elfe seule. Mais, que peut faire une princesse sans royaume et sans sujets à part partir seule sur les routes ? Je ne saurais jamais réellement où est ma place, attirée par les ruines d’Ost-In-Edhil comme je le suis, ruines que j’ai visité plusieurs fois déjà sans jamais comprendre pourquoi elles ont autant d’importance à mes yeux, ce ne sont après tout que des cailloux sans importance, vestige d’un passé où un père que je n’ai pas connu a grandi.

Un soupir monte à ma poitrine et je me mets à parler, interpelant le petit goinfre à côté de moi pour lui dire qu’il semble que j’entends son estomac gronder. Il a faim, et moi aussi car j’ai une fois de plus sauté le petit déjeuner au profit d’une matinée à tourner dans la cité. Oh oui, je te connais, je lui réponds avec un sourire amusé. Comme si je te connaissais depuis toujours. Un rire cristallin sort de ma poitrine et je secoue lentement la tête de droite à gauche Heureusement que tu fais du sport régulièrement. Sinon tu deviendrais rond comme une bille ! Quel grand guerrier tu ferais, hein, si aucun cheval ne peut te porter ? Je me moque de lui, gentiment certes, mais je me moque. Cette blague sur sa gourmandise pour le moins illimitée m’amuse, et je la lui sors souvent sous diverses formes, tout en lui donnant toujours plus de gourmandises à se mettre sous la dent.

La question que me pose le gourmand me fait croiser les bras et prendre quelques minutes de réflexion. Je n’ai pas l’habitude de sortir avec quelqu’un, et j’avoue ne pas réellement prévoir le temps que je vais y passer voir même le nombre de plantes différentes à récupérer. Voyons voir. J’ai besoin de racines de pissenlit et de l’écorce de chêne pour mes cataplasmes… De l’Athelas, bien sûr… Si on trouve des toiles d’araignées abandonnées, je pourrais les utiliser pour d’autres cataplasmes… de l’ail, et… Des graines de pavot pour faire des infusions contre la douleur… Non, pas grand-chose en fait. Des choses courantes, principalement, qu’on peut utiliser et trouver partout sur les Terres du Milieu. Et, bien sûr ce ne sont pas que des plantes, car l’herboristerie n’est qu’une petite partie de la guérison. un sourire et je croque dans un morceau de pain avec du fromage dedans. C’est délicieux. Le soleil brille, il fait chaud, pas encore assez pour transpirer, mais nous n’aurons pas froid aujourd’hui. Mon regard est attiré par des oiseaux sur une branche et je tends le doigt pour les montrer à Estel, tout en lui faisant signe de ne pas être trop brusque.

Elinà se moque de lui, mais, loin de se vexer, Aragorn se contenta de sourire en rougissant légèrement. Il savait bien qu'elle ne le faisait pas méchamment, depuis le temps, il avait l'habitude et il ne le prenait pas mal du tout. Et puis ça n'était pas de sa faute s'il avait tout le temps une petite place de libre dans son estomac... Il était en pleine croissance et comme l'elfe venait de le préciser, il se dépensait énormément... Il était donc logique qu'il ait un si grand appétit... Et puis ça n'était pas comme s'il ne le satisfaisait qu'avec des friandises... Non, non, non, pour Aragorn, tout était bon à caler un petit creux... Un vrai Hobbit dans ses heures perdues... Il avait surement loupé sa véritable nature quand il était venu au monde.

Quoi qu'il en soit, plutôt que d'approfondir le sujet de son estomac qui ressemblait plus à un puys sans fond, Aragorn demanda à Elinà si elle avait beaucoup de plantes à récolter pour cette fois-ci. Il en profita pour prendre un sandwich à sa portée et croquer dedans à belles dents alors que la dame était en pleine réflexion.

Voyons voir. J’ai besoin de racines de pissenlit et de l’écorce de chêne pour mes cataplasmes… De l’Athelas, bien sûr… Si on trouve des toiles d’araignées abandonnées, je pourrais les utiliser pour d’autres cataplasmes… de l’ail, et… Des graines de pavot pour faire des infusions contre la douleur… Non, pas grand-chose en fait. Des choses courantes, principalement, qu’on peut utiliser et trouver partout sur les Terres du Milieu. Et, bien sûr ce ne sont pas que des plantes, car l’herboristerie n’est qu’une petite partie de la guérison.

Écoutant religieusement la demoiselle, Aragorn continuait de manger son sandwich en silence. Au moins, il savait à quoi ressemblait un chêne et puis il savait aisément reconnaître une toile d'araignée. En plus, s'il lui fallait les récupérer, ça ne lui faisait pas peur.

Alors qu'il se rassurait intérieurement sur son expérience qui n'était pas si inexistante qu'il l'avait d'abord songé lorsqu'elle lui avait proposé de l'accompagner dans sa cueillette, Elinà lui montra quelque chose de la main et le garçonnet tourna le regard pour observer un oiseau posé sur une branche pas si éloignée que cela. S'il avait été doué pour le dessin, il aurait bien essayé de le dessiner, mais Aragorn n'était pas fait pour ce genre d'activité, c'était trop calme et trop long pour lui. Cependant, il pris bien garde de mesurer le ton de sa voix pour ne pas faire fuir le volatile, il avait bien le droit de rester là si cela lui plaisait.

- Ca va être amusant de chercher tout ça... Mais j'avoue que j'ai encore du mal à reconnaître l'Athélas.

Théoriquement, il connaissait les propriétés de cette plante dont il avait déjà entendu parler en leçon. C'était apparemment une plante très souvent utilisé dans la guérison. Mais pour ce qui était de la reconnaître, c'était une autre histoire, pour lui, les plantes se ressemblaient toutes plus ou moins.

- C'est tellement dur de voir la différence entre certaines plantes... Elles sont petites et vertes...

Alors au milieu d'autres petites plantes vertes... Mais peut-être qu'avec l'expérience et le temps il y arriverait plus facilement. En tout cas, il espérait bien retenir tout ce qu'Elinà voudrait bien lui apprendre juste au cas où Elrond aurait la mauvaise idée de l'interroger à son retours.

Le jeune homme pris le temps de boire un peu avant de se servir un deuxième sandwich de crudités et de l'entamer tout aussi rapidement que le premier. Prenant soin de vider sa bouche avant tout, il demanda.

- Tu sais ce que c'est comme oiseau ?

Oui bon... Il était plus calé en therme d'équitation et d'escrime ou de tir à l'arc qu'en tout autre chose... Mais il faisait des efforts jours après jours pour pouvoir tout retenir... Enfin tout ce qu'il pouvait.

Oh, c’est normal. Tu es encore très jeune ! Je souris à mon petit élève. L’Ahtelas est une plante qui, pour beaucoup, passe pour de la mauvaise herbe. Elle a été petit à petit oubliée, et arrachée par les jardiniers qui préfèrent dans leurs allées des pommes de terres et des carottes. Alors, cela ne m’étonne pas du tout qu’Aragorn ait parfois un peu de mal. Je hausse les épaules : Ne t’en fait pas, ça s’apprends. Il faut regarder la tige, les feuilles, parfois mêmes les fleurs lorsqu’elles sont là. Chez certaines, ce sont les racines qui sont utiles, et parfois même, une partie peut être bonne et une autre toxiques. L’art de l’herboristerie est un métier à part entière, et je ne te demanderais jamais de tout savoir. Je lui tends un petit gâteau et lui fais un sourire sincère, une nouvelle fois. Ton destin n’est pas de devenir un guérisseur, mon petit Estel. Il est bien éloigné de tout cela. Tu seras certainement un guerrier. Comme son père. Mais, je ne peux pas lui parler de son père. Pas vraiment. Elrond le prendrait mal je pense. Je risquerais de me faire taper sur les doigts, et bien fort même ! J’ai juste l’intention de t’apprendre, petit à petit, les bases dont un guerrier peut avoir besoin.

C’est vrai qu’au départ, j’avais un peu l’impression que toutes les plantes étaient semblables moi aussi ! Et puis, j’ai compris que toutes les feuilles avaient leurs particularités, j’ai trouvé quelques moyens mnémotechniques pour me rappeler de tout. Et puis, pour être franche, après des siècles à pratiquer, je ne me pose même plus la question. Tout cela est devenu tellement naturel que… ça fait partie de moi tout simplement. Je n’attends clairement pas cela de mon jeune étudiant, non. Mais, j’espère qu’il va en retenir assez pour pouvoir se guérir tout seul et se sauver les miches d’une infection. Après tout, il a un destin qui l’attend. Ne t’en fait pas. Nous verrons tout cela petit à petit. Après tout, tu disais la même chose pour les anciennes guerres, n’est-ce pas ? Et aujourd’hui, tu les connais presque toutes. Je pose un doigt sur mon menton, un faux air pensif sur les traits Ou bien c’est parce que je suis un très bon professeur, qu’est-ce que tu en pense ?

Quoi ? On ne peut pas se faire mousser un peu ? Parfois, je me dis que si personne ne me complimente, autant le faire moi-même, non ? Un rire monte à mes lèvres et je hausse les épaules. Estel attire à nouveau mon attention en me demandant ce qu’est l’oiseau que je lui ai montré il y a quelques minutes. Un rouge gorge je pense. Mes yeux d’elfe sont perçants, certes, mais je ne me suis jamais très intéressée aux oiseaux. Entre les plantes et les cataplasmes, ma vie a été bien assez remplie comme ça. Cependant, les rouges gorges, je les aime bien. Comme les pies. Ils se reconnaissent avec leur poitrail rouge.

Elinà ne perdit pas de temps à le rassurer à propos du fait qu'elle n'attendait pas de lui qu'il reconnaisse toutes les plantes se sache en nommer toutes les propriétés à la seconde où on les lui demanderait. Apparemment, elle le voyait plutôt devenir un soldat quand il serait plus vieux et Aragorn pensait que ça serait effectivement le cas. Il n'était pas vraiment porté sur l'étude et le fait de rester de longues heures à faire des recherches. Il avait besoin de grands espaces et de liberté... Mais peut-être qu'avec les années, cela changerait et qu'il deviendrait plus pausé, comme les elfes... Mais jamais autant qu'eux, ça il en était certain, il n'avait certainement pas assez de temps devant lui pour ça.

Ne t’en fait pas. Nous verrons tout cela petit à petit. Après tout, tu disais la même chose pour les anciennes guerres, n’est-ce pas ? Et aujourd’hui, tu les connais presque toutes. Ou bien c’est parce que je suis un très bon professeur, qu’est-ce que tu en pense ?

Aragorn rosi de plaisir lorsqu'il entendit Elinà lui rappeler ce qu'il avait déjà appris et ça n'était pas rien car il y avait beaucoup de choses à dire et à retenir sur les anciennes guerres. Mais le petit garçon ne se venta pas, cela aurait été mal venu. Il préféra féliciter Elinà sur ses capacités en temps que professeur.

- Bien sur que tu es un bon professeur... J'aime la façon dont tu expliques, parce que c'est jamais avec des mots trop compliqués et puis on voit que tu aimes ce dont tu parles...

Elinà avait la capacité de retenir l'attention d'Aragorn assez longtemps pour lui faire rentrer un peu de savoir dans la tête et croyez moi ça n'était pas rien. Tout en continuant de manger avec appétit, il demanda à Elinà si elle savait de quelle espèce était l'oiseau qu'elle venait de lui montrer. C'était un tout petit oiseau avec le dessous du bec tout rouge, comme s'il avait attrapé un vilain rhume.

Un rouge gorge je pense. Ils se reconnaissent avec leur poitrail rouge.

Aragorn fit un signe affirmatif tout en continuant de manger silencieusement. Il avait bien vu que l'oiseau était tout rouge sous le bec et pour une fois qu'il avait un nom facile à se rappeler et surtout à associer avec son apparence...

- Tu crois que quelqu'un comprend leur langage ? J'ai entendu dire une fois, que les nains pouvaient dialoguer avec les corbeaux et que les istaris aussi... Les elfes, ils savent parler avec une espèce animale à part les chevaux ?

Aragorn ne parlait pas si souvent que ça, mais quand il était lancé, c'était presque impossible pour lui de ne pauser qu'une seule question à la fois.

- Qu'est-ce que tu préférais apprendre toi quand tu étais petite ?

Voir Estel rentrer dans mon jeu et me dire que je suis un bon professeur est agréable. Pourtant, aussi bon que soit le professeur, il ne peut rien faire si son étudiant se braque ou n’a pas envie d’apprendre. Depuis que j’assume ce rôle dans la cité, j’essaie de me mettre à la portée de ceux qu’on me confie, d’utiliser des mots qui leurs sont simples et compréhensibles. Et, aussi étrange que cela puisse paraitre : cela me plait. Moi qui ait vécu toute ma vie pour les voyages et la guérison… Je me découvre une nouvelle passion. Parfois je me dis que j’aurais été plus simple de trouver cette voie plus tôt. Comme cela, les voyages ne me manqueraient pas autant lorsque je reste longtemps sédentaire comme cela. Un sourire monte à mes lèvres et je m’approche d’Estel au travers de la nappe étalée entre nous pour lui ébouriffer les cheveux. Vil flatteur va ! Je ris et secoue lentement la tête de droite à gauche Je plains ta future femme ! Tu vas la mener par le bout du nez, en apprenant aussi tôt à manier les compliments comme ça ! Mais, oui : ça me fait plaisir. Vraiment plaisir.

Mais voilà que nous parlons maintenant des oiseaux, matière en laquelle je suis assez peu callée, il faut l’avouer. Mon petit cerveau a ses limites, et après avoir appris l’histoire des différents peuples, les différents arts de la guérison, la couture et la cuisine, il n’y avait plus assez de place pour l’ornithologie ! Sans compter que j’ai aussi été l’élève de maitres d’armes assez peu orthodoxes, apprenant ainsi à manier dagues et lames rétractables comme s’il s’agissait d’extension de mon corps. Mais, les oiseaux… Non. Les animaux de la forêt non plus. Dommage, n’est ce pas ? Tant que je sais les cuisiner pour les dévorer lors de mes voyages, je me fiche un peu de leur nom ! Un sourire monte à mes lèvres à cette pensée. Enfin, il y en a quand même beaucoup dans ma petite tête, et ce n’est déjà pas si mal ! Oh, je suis sûre que oui. On ne peut pas connaitre tous les secrets de toutes les races. Sa question sur les elfes me pose souci. Je prends quelques secondes pour réfléchir et fronce les sourcils. Je n’ai pas entendu de légendes disant qu’il y a d’autres races auxquelles les elfes savent parler, non. Mais, nous comprenons le langage de la forêt, ce qui n’est pas négligeable.

Deux secondes après ma réponse, voilà qu’Estel me pose une autre question, sur la matière que je préférais apprendre lorsque j’étais moi-même étudiante. Là, la question ne se pose pas. Les arts de la guérison. Mes maitres étaient… Tellement inspirants ! Mes yeux pétillent alors que je suis projetée dans le passé. En Lorien, il y avait Maitre Erÿë. Il était tellement gentil. Il m’a appris tout ce qu’il y a à savoir sur les plantes et leurs usages. C’est la première chose à savoir quand on apprend la guérison. Et, c’est un sacré morceau tu sais… Je ris et puis repousse mes cheveux dans mon dos. Comme toujours, ils sont lâchés sur mes épaules et finissent par venir sur mon visage. Ensuite, j’ai été envoyée en Imladris, et je crois que je n’en suis jamais repartie depuis. Maitre Elrond a été l’un de mes maitres, notamment pour apprendre à utiliser la magie qui coule dans mes veines. C’était l’un des plus stricts, mais en même temps il était très juste et passionnant.

Ce qu'Aragorn aimait bien avec Elinà, c'était qu'il y avait toujours quelque chose a dire ou a écouter. Il passait du coq à l'âne et cela ne dérangeait pas la femme elfe plus que celà puisqu'elle enchaînait avec aisance pour répondre à ses questions les unes après les autres et tant pi si cela n'avait aucun rapport avec le sujet précédent, elle ne perdait pas le fil et Aragorn ne pouvait qu'en être ravi.

La conversation faisant son petit bonhomme de chemin, ils en vinrent à parler de l'enfance d'Elinà et particulièrement de son enseignement auprès de ses paires. Aragorn, qui avait en général du mal à imaginer tous les elfes qu'il connaissait à l'âge de l'enfance, se demandait quel genre d'élève Elinà pouvait être lorsqu'elle n'était pas plus haute que lui. Sage et appliquée surement, il avait entendu dire que les jumeaux d'Elrond étaient des cas à part en ce qui concernait les mauvais tours à longueur de journée.

Aragorn demanda à la blonde ce qu'elle préférait apprendre lorsqu'elle n'était encore qu'une toute jeune elfe et le regard de celle-ci se fit rêveur et lointain le temps d'un instant de réflexion où elle se permis de se perdre dans ses souvenirs avant de lui répondre avec une voix à la fois encore un peu rêveuse mais pleine d'enthousiasme.

Les arts de la guérison. Mes maitres étaient… Tellement inspirants ! En Lorien, il y avait Maitre Erÿë. Il était tellement gentil. Il m’a appris tout ce qu’il y a à savoir sur les plantes et leurs usages. C’est la première chose à savoir quand on apprend la guérison. Et, c’est un sacré morceau tu sais…

Aragorn confirma d'un signe de tête, silencieux, bien conscient qu'elle n'avait pas fini de lui révêler ses souvenirs.

Ensuite, j’ai été envoyée en Imladris, et je crois que je n’en suis jamais repartie depuis. Maitre Elrond a été l’un de mes maitres, notamment pour apprendre à utiliser la magie qui coule dans mes veines. C’était l’un des plus stricts, mais en même temps il était très juste et passionnant.

Cette fois-ci le signe de tête approbateur d'Aragorn fut nettement plus prononcé. Mais après tout, il apprenait beaucoup de choses au près d'Elrond et il était donc bien placé pour savoir que ce dernier exigeait beaucoup de ses élèves car il savait tout le potentiel qui se cachait en eux, même si ces derniers n'en n'étaient pas toujours conscient.

- Ada est toujours très strict mais juste... Parfois, j'ai l'impression qu'il attend trop de moi... Et puis après je me rend compte qu'il avait bien raison parce que finalement je parviens au but qu'il m'avait fixé... Même si ça prend certainement plus de temps que pour un elfe.

Aragorn savait bien que ses lointains ancètres étaient elfiques, mais il n'avait lui-même aucun don dans les veines et il devait donc se débrouiller sans aucune facilité pré-acquise dans une matière quelconque.

Tu penses que tu aurais autant aimé les plantes et la guérison si tu n'avais pas eut ce don ?

Il se demandait souvent ce qu'aurait été Elrond s'il n'avait pas eut le don de guérir et plutôt celui de faire pousser les tomates... C'était une façon de penser naturellement, mais parfois, l'image en elle-même l'amusait beaucoup.

Je suis contente de voir qu’Aragorn partage mon impression que Elrond, bien que je ne l’ai jamais dite à voix haute. Ca non. Elrond est réellement un homme sévère. Juste, mais sévère. Il attend le meilleur de ceux qui travaillent avec lui et il les pousse jusque dans leurs derniers retranchements. Mais, c’est pour le mieux. On ne s’en rend pas forcément compte tout de suite, mais c’est vraiment le cas. Oh, combien de fois suis-je rentrée dans ma chambre en pleurs parce que j’avais l’impression de ne rien savoir après m’être faite disputer… Je crois que c’est impossible à compter, au fond. Mais, avec le recul, je me rends compte que s’il a été aussi sévère avec moi, c’est simplement parce qu’il voyait un potentiel certain. Potentiel qui, aujourd’hui, étend ses ailes sur la cité. Non seulement je suis guérisseuse en place à Imladris, mais je suis aussi assez dans la confiance du maitre des lieux pour enseigner dans les lieux, aussi bien la guérison que d’autres matières. J’apprécie cette nouvelle vie qui s’offre à moi, bien loin de tous les tourments des voyages. Il m’arrive encore parfois de voyager, mais plus tant que ça. Je suis bien à cet endroit. Je suis bien en Imladris. C’est l’impression qu’il donne à ceux qu’il considère comme capables de plus, tu sais. Je souris à Estel et hausse les épaules. Tu grandis bien trop vite pour un elfe, petit bonhomme. Vraiment trop. Cela me fait peur, je crois. Mais, il est facile de l’oublier, tu sais. Tu fais tellement partie de nos vies…

Quand à la question suivante, elle me laisse pantoise quelques secondes. Est-ce que j’aurais autant aimé la guérison ? Vraiment ? Je dois avouer que je ne sais pas. Ce n’est pas une bonne question que celle là. Je soupire tristement et hausse les épaules. Est-ce que je serais venue vivre ici si mes parents n’avaient pas été tués par des orcs ? Est-ce que j’aurais appris à me battre avec autant d’ardeur si j’avais eu une famille heureuse et unie ? Est-ce que j’aurais des frères et sœurs aujourd’hui ? Je laisse ma voix se briser légèrement et secoue lentement la tête de droite à gauche. Tu sais, il y a beaucoup de questions de ce genre. De « Et Si ». Et, je crois qu’il vaut mieux ne pas avoir la réponse à ces questions. Les choses sont ce qu’elles sont et c’est pour le mieux. Illùvatar nous a mis des épreuves sur le chemin et nous avons fait des choix à un moment ou à un autre qui nous amènent à cet instant. Un seul choix différent et nous serions nous même différents. On ne peut pas réécrire le passé. Je ne suis pas sûre qu’Estel comprenne ce que je veux lui dire. Je croque dans un morceau de pain et hausse à nouveau les épaules. Aujourd’hui j’aime les arts de la guérison, autant que j’aime enseigner diverses choses. Je suis heureuse d’être ici, avec toi, sous ce soleil magnifique. Et je crois que je ne changerais ça pour rien au monde, petit prince.

C’est l’impression qu’il donne à ceux qu’il considère comme capables de plus, tu sais. Tu grandis bien trop vite pour un elfe, petit bonhomme. Vraiment trop. Mais, il est facile de l’oublier, tu sais. Tu fais tellement partie de nos vies…

Peut-être... Oui peut-être qu'ils oubliaient facilement qu'il n'était pas un elfe, mais lui il n'oubliait jamais qu'il n'avait pas leur immortalité. Aragorn connaissait ses faiblesses par rapport aux elfes, même les plus jeunes et à vrai dire la seule différence qu'il y avait avec les années, c'était qu'à présent il comprenait pourquoi il ne pourrait jamais égaler l'un d'entre eux, il s'était fait une raison, même si il donnait toujours le meilleur de lui-même.

Gêné de ces compliments voilés, Aragorn questionna Elinà à propos de ses préférences en guérison. C'était une question qui lui était venue comme ça, d'un seul coup, sans trop y réfléchir, mais a dire vrai, il était plutôt satisfait de sa curiosité. C'était une bonne question, relativement tordue certes, mais il lui tardait de connaitre la réponse. Réponse qui ne semblait pas si évidente que ça aux yeux de l'elfe.

Est-ce que je serais venue vivre ici si mes parents n’avaient pas été tués par des orcs ? Est-ce que j’aurais appris à me battre avec autant d’ardeur si j’avais eu une famille heureuse et unie ? Est-ce que j’aurais des frères et sœurs aujourd’hui ?

Le petit garçon se sentit triste tout à coup, malgré lui, il semblait avoir fait remonter de mauvais souvenirs chez Elinà bien que ce ne fut pas du tout son intention. Il resta silencieux, ne comprenant pas tellement ce que tout ceci avait comme rapport avec sa question. Mais il avait l'habitude, les elfes avaient tendance à philosopher plus souvent qu'à leur tour.

Tu sais, il y a beaucoup de questions de ce genre. De « Et Si ». Et, je crois qu’il vaut mieux ne pas avoir la réponse à ces questions. Les choses sont ce qu’elles sont et c’est pour le mieux. Illùvatar nous a mis des épreuves sur le chemin et nous avons fait des choix à un moment ou à un autre qui nous amènent à cet instant. Un seul choix différent et nous serions nous même différents. On ne peut pas réécrire le passé.

Ca revenait à la phrase qu'il avait souvent entendu "avec des si on refait le monde". Mais ça ne répondait pas tellement à sa question ou plutôt si, cela lui faisait comprendre qu'Elinà ne connaissait pas la réponse. C'était une chose rare aux yeux du petit garçon qui avait pratiquement pris pour acquis que les elfes savaient tout sur tout.

Aujourd’hui j’aime les arts de la guérison, autant que j’aime enseigner diverses choses. Je suis heureuse d’être ici, avec toi, sous ce soleil magnifique. Et je crois que je ne changerais ça pour rien au monde, petit prince.

Ou comment détourner la question sans y répondre. Pendant une seconde, Aragorn se demanda s'il allait lui faire comprendre qu'il n'était pas dûpe mais il abandonna l'idée.

- Parfois, je me demande comment aurait été la vie si mon père n'était pas mort et si maman n'avait pas été tellement enfermée dans son chagrin... Mais je n'arrive pas à imaginer... Il y aurait surement des choses bien... Mais surement aussi des choses qui me manqueraient.

Se contenter de ce qu'on avait... Cela se résumait à tout.

- J'ai plus faim... J'ai un peu trop mangé je crois. Avoua-t-il avec un léger rougissement et un petit sourire.

Je me contente de hocher la tête lorsqu’Estel me dit qu’il se demande ce qu’aurait été sa vie si son père avait été vivant. Une ombre passe sur mon visage et je prends une inspiration un peu stressée. S’il avait été vivant, son père … Oh, oui tout aurait été différent. Estel ne serait pas ici. Estel ne serait pas en Imladris sous la tutelle d’Elrond, et je ne lui enseignerais rien du tout. Sa mère serait encore cette femme forte qui inspirait le respect et non l’ombre d’elle-même qui passait sa vie à errer dans les jardins d’Imladris. Parfois, j’avais l’impression de voir là une elfe en train de se laisser mourir après la perte de son être aimé. Oui, Quelque part, c’était très, très proche. Je crois que cela ne sert à rien d’essayer de savoir comment serait notre vie avec telle ou telle variable, tu sais. Si tu veux changer ta vie, c’est à toi de te prendre en mains. A toi de faire le nécessaire pour que ta vie soit celle que tu rêve qu’elle soit. Le passé est écrit. C’est ton futur que tu dois tracer. Un sourire monte à mes lèvres. Oui, l’avenir est à nous. J’aime cette idée, j’aime cette notion. J’aime le fait qu’on puisse tout changer d’un coup de tête. Je n’aime pas réellement cette impression qu’on peut avoir quand il faut tout changer. Ce sentiment de faire la mauvaise chose. De prendre la mauvaise décision. Mais, de savoir tout au fond qu’on fait ça pour le mieux. Un soupir monte à ma poitrine et je contemple le vide durant quelques secondes, jusqu’à ce qu’une phrase étrange parvienne à mes oreilles.

Ai-je mal entendu. Je tourne le regard vers Estel et fronce les sourcils. J’ouvre la bouche, la referme, et finalement secoue lentement la tête de droite à gauche. Est-ce que tu es sérieux ? Alors là, celle là, on ne me l’a jamais faite. Vraiment jamais. Et si je m’y attendais… Vraiment ? Tu vas réussir à te lever pour que je te montre les plantes ou tu préfères faire une sieste pendant que je ramasse tout ? Les deux me vont. Je peux très bien lui donner quelques bases une fois les plantes coupées. Elles n’ont pas à être sur les plans. Sans compter que j’irais plus vite si je n’ai pas à lui expliquer ce qu’il faut couper et pas sur chaque plante, afin qu’elles puissent repousser une nouvelle fois et donc éviter de détruire les plans. Je pourrais lui montrer cette partie là une autre fois, de toute façon. Au printemps, peut être, lorsque les plantes seront nombreuses. Si on m’avait dit qu’un jour le petit humain le plus gourmand du monde arriverait à ne plus avoir de place dans son estomac…