La Sombra

Qu’aurait elle fait sans l’aide de Chandalen ? Que serait elle devenue ? Elle serait restée en proie aux requins, noyée dans l’inconscience et ceci aurait clôturé le chapitre de sa vie. Selen n’eut pas conscience de ce qu’il se passait autour d’elle, perdue dans le néant.  Elle ignorait combien de temps il s’était passé entre ce moment où ce voile noir l’avait entourée et ce moment où la fraicheur de l’extérieur la fit frissonner. Sous les premiers signes de réveil, la jeune femme senti comme une gêne et automatiquement suite aux tapes que lui donnaient Chandalen, elle réprima des spasmes. Elle se réveilla soudainement, recrachant de l’eau et toussa pour tout faire sortir de ses poumons pendant qu’elle reprenait son souffle. Elle était en vie, ou alors elle était déjà morte ?

Selen rassembla ses esprit le mieux qu’elle le pouvait en analysant tout ce qui pouvait la raccrocher à la réalité : elle vit le bois du navire, du sang et des pieds témoignant qu’ils étaient tous agglutinés autours d’elle. Chandalen avait réussi à la ramener sur le pont mais elle n’était pas encore hors de danger et le comprit lorsque les pièces du puzzle commençaient à se remettre en place. Le requin n’était certes plus là mais elle saignait trop et le temps qu’elle remonte elle en avait sans doute perdu déjà pas mal. Selen se redressa difficilement à cause de sa blessure et chercha Chandalen du regard. Elle le vit, rassurée de voir qu’il allait bien et qu’il n’était pas blessé alors qu’ils auraient pu se faire rattraper par la mère. Mais la manière dont il avait de la dévisager avec inquiétude l’interpella. Selen remarqua aussitôt pourquoi en ayant le regard attiré par cette tâche de sang qui ne venait pas de son bras. Selen se leva soudainement, titubant, manquant encore de réflexes puisqu’elle venait de prendre conscience et se pressa dans la cabine du capitaine pour se mettre d’emblée à l’abri du regard des autres, quoi qu’il se passe. La jeune femme observa son bras ensanglanté, elle se sentait pâlir d’une part à cause du sang qu’elle perdait mais aussi par ces vives contractions qui s’imprimaient dans le bas de son ventre. Les pulsations de son cœur s’accéléraient, elle ne savait pas où donner de la tête, torturée de toutes parts. Elle ne savait pas ce qu’il était en train de se passer, jamais elle n’avait connu pareilles douleurs et ne voulait pas croire qu’elle puisse attendre un enfant qu’elle était en train de perdre.

La pirate se dirigea vers le bureau, manquant de tomber au sol par le sang qu’elle perdait en abondance et ne s’occupait pas des douleurs présentes dans son ventre tant qu’elle n’avait pas réglé le problème de son bras. Etouffant des gémissements de douleur, Selen ne parvenait pas à voir ce qu’elle était en train de faire. Elle porta son regard vers la porte d’entrée de la cabine, espérant que Chandalen la rejoigne afin qu’il puisse l’aider avec cela. Elle devinait que l’équipage était sans doute en train de se rire d’elle et que son ami devait rendre des comptes en ayant été sollicité. Ces chiens se montreraient encore ingrats alors que grâce à elle ils avaient mis la main sur un gros trésor. Selen serra les mâchoires, prenant place sur une chaise et se vida une bouteille d’alcool sur le bras.
Sa peau semblait brûler sous le contact, retenant ses cris d’agonie tout comme les contractions se faisaient progressives et violentes. Elle n’avait pas la force de faire le travail seule et de recoudre les trous que les dents du requin avait faits dans sa peau. Alors elle resta assise, le front contre le bois de la table, elle souffrait et attendait que Chandalen vienne pour le lui rafistoler. Lorsqu’il arriva enfin dans la pièce, elle semblait à bout de force, désemparée et désespérée mais surtout très essoufflée.

« Aide moi s’il te plait, j’y arriverais pas seule, j’ai trop mal. » Selen appuya sur son ventre comme si cela pouvait atténuer la douleur qu’elle ressentait là alors que l’urgence était au niveau de son bras.

Elle lui faisait pleinement confiance, après tout il venait juste de la sauver et elle saurait le remercier en temps voulu. Elle en pleurait presque, tremblante, cela ne lui était jamais arrivé. Selen étendit le bras, posant le front sur sont autre bras qui s'appuyait sur le bureau et essaya de maintenir sa respiration à un rythme normal.

Selen se laissa faire, prenant sur elle pour ne pas céder à la douleur et détournait son regard du travail qu’avait entreprit Chandalen sur son bras. Il avait du boulot, et il mit un moment avant de tout pouvoir sécuriser. La pommade la piquait mais elle savait que ce ne serait pas nocif pour elle et alors qu’il enroulait son avant bras dans un tissu pour le garder au propre, Selen était complètement à bout, désarticulée et continuait de souffrir en silence. Hélas, son supplice était loin d’être fini et au vu des contractions qu’elle avait, la suite n’allait pas se faire attendre. La jeune femme se disait qu’elle allait chasse Chandalen pour faire son affaire, elle n’avait pas envie qu’il reste, qu’il la voie dans cet état. Selen avait honte, elle ne voulait pas que cela change la vision qu’il avait d’elle ou que cela mette un terme à leur relation si particulière. Ca allait tout détruire, et malgré ses pensées, elle n’avait pas eu la force de le repousser qu’il l’avait déjà installée. Il prenait soin d’elle, alors que d’autres hommes l’auraient sans doute frappée et insultée. Comment pouvait-elle envisager de le rejeter alors qu’il lui proposait de l’aide. Selen était effrayée, elle ignorait si cela allait la tuer, si elle allait souffrir davantage, si elle allait avoir des séquelles. Alors elle se laissait contre lui, posant sa tête sur son épaule tout en essayant de respirer le plus normalement possible.

Son front était imbibé de sueurs froides, son visage était livide et elle avait de plus en plus de mal à taire ses plaintes de douleur. Malgré cela la présence de Chandalen lui fit le plus grand bien, et pour ne pas perdre la face elle essayait de faire des efforts pour ne pas se laisser submerger par la douleur. Puisque son ventre n’avait pas eu le temps de grossir, ça ne devrait pas être trop dur à sortir mais le temps que son corps accepte de le rejeter c’était très douloureux. Ses jambes tremblaient, alors elle cessa de résister et reprit sur elle pour calmer son rythme respiratoire et accepta ce qu’il était en train de se passer. Son corps savait comment réagir et quoi faire même si elle-même n’était pas certaine de ce qu’elle faisait. Mais puisqu’elle coopérait la suite fut pour le moins assez rapide et lorsqu’elle eu terminé, la tension redescendit.

Epuisée, Selen ne savait pas quoi penser, elle n’éprouvait pas de tristesse puisqu’elle n’était pas la candidate idéale pour être mère et que ce gosse aurait été plus malheureux qu’autre chose si elle l’avait correctement mis au monde. La jeune femme soupira, restant quelques secondes contre Chandalen  en profitant de sa chaleur le temps que la tension redescende et reprendre des couleurs. Elle ne disait rien, elle avait honte de se montrer aussi faible et de faire subir cela à Chandalen. La jeune femme se leva, replia la serviette sans jeter un regard à ce qui était sorti de son corps et l’enferma dans le linge pour le remettre à la mer. C’était une grande lassitude qui la prenait sans doute sous l’effet des hormones sen bataille alors qu’un trop plein de choses étaient venues la secouer en l’espace de quelques instant. Selen aurait du mal à faire face à Chandalen après cela tant qu’elle ne savait pas avec précision ce qu’il pensait de tout ce qu’il venait de se passer.
La pirate passa un linge humide sur son corps pour se nettoyer avant de se revêtir d’une blouse et d’un simple pantalon. Puis, elle s’empressa d’ouvrir le placard renfermant l’alcool et s’ouvrit une bouteille de rhum pour en avaler à grandes gorgées. Alors à ce moment là et seulement à ce moment là elle trouva le courage de relever son regard vers Chandalen tout en venant s’appuyer contre la table.

« Je te remercie…pour tout… »

Ce n’était clairement pas évident mais elle n’assumait pas tout ce qu’il venait de se passer et avait peur de connaitre l’avis de Chandalen. Au moins elle l’avait remercié, après tout il lui avait sauvé la vie et ne l’avait pas rouée de coups ni même trahie en profitant de la mutinerie qui se préparait. Comment aurait il pu ? Il est son meilleur ami, il ne lui ferait jamais de mal autant qu’elle ne pourrait jamais lui en faire. Alors qu’allait-il se passer à présent ? La concernant elle allait oublier ce détail, son comportement envers lui n’allait pas changer

« Est-ce que tu vas me haïr ? » Fit elle en ayant l’impression de s’étrangler

Cette situation ne lui était jamais arrivée alors elle était complètement tremblante, chamboulée.

Selen s’endormi bien vite, épuisée, elle n’avait même pas trouvé la force de répondre à ce qu’il avait dit. A l’entendre il voulait arrêter leur relation qui s’était faite de plus en plus spéciale mais pour elle c’était le début d’une lente séparation qu’elle refusait. Si là il ne voulait plus cela, après il ne voudrait plus lui parler et plus la voir et c’était juste impensable pour elle. Selen refusait de le perdre, tout devait rester comme si rien n’avait été et tout irait bien. La pirate ne donna pas suite à ses paroles, le confort du lit eu bien vite raison d’elle et la jeune femme s’endormi bien assez vite grâce à la présence bienveillante de son ami. La nuit fut terrible, hantée de cauchemars plus traumatisants les uns que les autres. Heureusement à son réveil elle ne s’en souvenait pas. Selen se redressa sur ses coudes, remarquant qu’il était trop tôt pour entendre l’équipage s’affairer sur le pont et que Chandalen dormait encore. Il n’avait pas dû passer une bonne nuit, alors la jeune femme attendit sagement qu’il se réveille, repensant à ce qu’il avait dit la veille et préparait ses arguments pour le dissuader de mettre un terme à ce qu’ils partageaient.

Lorsqu’il s’éveilla, Selen le regardait, un fin sourire sur les lèvres. Il avait l’air fatigué comme tous les jours depuis qu’ils étaient sur le brigantin. Elle lui en avait demandé beaucoup, elle ne le ferait plus parce qu’elle avait quelque chose d’encore plus important à lui demander. La pirate ne voulait pas attendre pour entamer la discussion, cela n’aurait pu rester au fond de sa gorge plus longtemps.

« Je veux pas qu’on arrête. »Commença t-elle doucement.

Selen avait étouffé un rire, venant se blottir contre Chandalen afin d’aller combler de baisers la peau de son cou et lui faire comprendre qu’il était inutile de résister. Elle savait quelle attraction elle exerçait sur lui puisqu’elle éprouvait exactement la même chose. La jeune femme ne voulait pas s’arrêter ou ce serait de grandes frustrations. Et puis quoi encore ? Il irait voir d’autres nanas sous son nez après l’avoir rejetée ? Non, ça ne se passait pas de cette manière chez elle et elle refusait de mettre un terme à ce qu’il se passait entre eux.

« Tu sais aussi bien que moi qu’on aura du mal à ne pas s’laisser aller »

Selen se montra plus entreprenante, n’ayant jamais froid aux yeux et même si elle venait de subir un gros choc, elle donnait l’impression de ne pas être touchée. C’était le cas, cet enfant avait tout intérêt à ne pas exister plutôt qu’avoir une mère aussi instable que Selen et elle assumait totalement cette façon de penser. C’était d’ailleurs sans doute la seule chose qu’elle assumait jusque là. Les mains habiles de la pirate se baladèrent sur le corps de Chandalen, redessinant les contours de ses muscles dans de douces caresses puis vint jouer avec le pendentif en pomme de pin qu’elle lui avait offert. Il n’avait pas intérêt à vouloir tout arrêter ou bien elle allait mal le vivre et il finirait bien par le comprendre que c’était inutile de résister.

Selen se foutait pas mal de souffrir physiquement, elle souffrait tous les jours dans sa vie de pirate et ne comptait plus le nombre de blessures qu’elle avait eues par les combats et les abordages. Selen se redressa pour le regarder dans les yeux et étira un large sourire, elle avait visiblement retrouvé la forme, et même la blessure à son bras semblait moins la torturer maintenant que ça cicatrisait tranquillement. Du moins les douleurs étaient bien plus supportables mais surtout elle n’avait plus les symptômes liés à sa grossesse

« T’inquiète pas c’était la première fois que ça m’arrivait et puis avec la vie que j’ai j’dois pas être aussi fertile que les harradrim ! Ca recommencera pas tu verras!»

Chandalen fit preuve de résistance, ne souhaitant visiblement pas continuer davantage mais elle sentait que ce qu’il avait décidé était en désaccord totale avec ce qu’il voulait réellement. Selen donnait l’impression d’être une femme sans cœur pour ne ressentir aucune émotion mais plus que tout elle ne voulait pas perdre Chandalen et même si pour cela elle devait faire comme si cela n’était pas important pour elle. Elle n’avait pas eu le temps de vraiment s’en rendre compte, ainsi elle ne réalisait pas trop ce qu’il lui était arrivé. Chandalen occupait toutes ses pensées et l’éventualité qu’ils ne s’éloignent était pour elle un véritable cauchemar. Selen avait insisté, encore et encore, jusqu’à ce qu’il ne finisse enfin par céder et qu’elle réveille cette attirance qu’ils avaient l’un pour l’autre et qui allait au-delà de tout problème.

Selen étira un large sourire, un rire s’échappa d’entre ses lèvres tandis que Chandalen relança les hostilités. Il l’attrapa en donnant des facettes plus sauvages à ce contact qui n’était pas sans lui déplaire. Encore une fois ils s’appelaient malgré eux et malgré la ferme intention qu’il avait eue de couper court à toute cette histoire. Ils s’aimantaient fatalement et la séparation n’en serait alors que plus dure. Selen essayait de ne pas y penser tout comme elle avait laissé dans un coin de sa tête la perte de leur progéniture qui de toute façon n’aurait pas tenu très longtemps avec la vie qu’elle mène. Elle n’avait ressenti ces symptômes que très peu de temps auparavant ce qui faisait qu’il avait été loin de ressembler à quelque chose. C’était les aléas de la vie, le désavantage d’être une femme et de ne pas savoir assumer le fait d’avoir le don de pouvoir porter la vie. Elle ignorait ce qui motivait Chandalen à revenir ainsi près d’elle, à se montrer aussi possessif et à vouloir la faire sienne de nouveau. Mais cela la rassurait, leur entente n’était pas perdue et allait perdurer. Selen songeait à lui cacher d’autres éventuels accidents, afin que jamais l’idée de tout arrêter ne lui effleure l’esprit.

Selen se laissait donc faire, dominée par sa carrure imposante, glissant ses mains dans le creux de ses reins comme pour avoir une maitrise de ce qu’il se passait entre eux. Elle lui mordilla les lèvres, venant approfondir le baiser qu’il lui offrait dans ce même empressement. Selen essayait de se prouver quelque chose mais elle ignorait quoi, quoi qu’il en soit la fougue qui les unissait n’avait rien d’un simple désir animal entre deux amants, c’était un besoin d’emprise sur l’autre, une possession ardente et destructrice s’ils ne faisaient pas attention. Ce n’était pas Selen qui allait s’en soucier, car après tout elle ne réfléchissait jamais à ses actes et le plus important pour elle était d’être satisfait de ce qu’elle avait sur l’instant présent. Elle avait Chandalen à elle et rien qu’à elle, il lui arrachait des gémissements à la gorge à lui en faire tourner la tête.

Elle mit fin à leur baiser en agrippant fermement sa mâchoire afin qu’il la regarde droit dans les yeux.

« Ne me redis jamais des choses pareilles Chandalen. »

Selen voulait lui dire combien elle tenait à lui, la seule façon qu’elle avait trouvé c’était de voyager avec lui, lui faire découvrir plein de choses qu’il aurait dû connaitre s’il ne s’était pas sédentarisé et de se livrer à lui lorsque la tension n’était plus supportable. Sa manière de lui prouver qu’il comptait réellement pour elle c’était tous les risques qu’elle prenait jusque là et même s’il ne le voyait pas, elle espérait qu’il finisse par le comprendre.

« Parce que même si tu veux plus de moi je continuerai à venir te voir, je refuse qu’il en soit autrement tu m’entends ? »

Ce que Chandalen déclara lui fit vraiment plaisir, alors elle savait que son envie de tout arrêter subitement n’était pas ce qu’il aurait réellement voulu. Ils auraient fini par se faire du mal s’ils avaient tenté de respecter sa volonté, connaissant Selen et son incapacité à lui résister. Elle ignorait ce que cela signifiait pour lui mais l’attirance qu’ils avaient l’un pour l’autre était bel et bien réciproque et solidifiait leur relation. Selen laissa alors reposer sa tête sur l’oreiller, laissant Chandalen faire ce que bon lui semblait d’elle alors qu’elle avait totale confiance en lui et qu’il savait toujours comment s’y prendre pour lui faire plaisir. Elle ne pouvait même plus parler, les joues rougies par l’effort et à force de s’exprimer à hauteur de ce qu’il lui offrait.

Au bout d’un moment, Selen prit le dessus en attrapant ses poignets pour les immobiliser contre le matelas en prenant le contrôle de leur échange qui se faisait bien plus sauvage de minutes en minutes. Elle mordilla sa peau, profitant qu’il ne soit pas libre de ses gestes pour lui faire subir un supplice qui elle la faisait jubiler tandis qu’elle cherchait à lui arracher d’autres gémissements. Elle avait aussi entendu les bruits de pas des membres de leur équipage s’affairer alors qu’elle n’en avait pas donné l’ordre et se doutait qu’ils devaient être en train de préparer la mutinerie. Ils devaient d’abord mener le brick à port avant d’entreprendre quoi que ce soit et la journée promettait d’être particulièrement tendue là-haut si l’équipage s’échauffait ; fort heureusement aucun d’entre eux n’était qualifié pour prendre la barre sans avoir sa surveillance et là-dessus, Diema avait bien joué. Ce qui voulait dire qu’ils ne pouvaient tuer ni l’un ni l’autre avant d’être arrivé à bon port. Mais même avec cela, Selen n’en avait que faire, ils lui obéiraient une dernière fois avant qu’elle ne finisse par tous les saigner un par un. Heureusement ils atteindraient les côtes d’Umbar en fin d’après midi et les quelques dernier kilomètres seraient vite avalés. Selen et Chandalen n’auraient plus qu’à prendre une chaloupe pour atteindre le port après avoir nettoyé le pont de ces cadavres. De telles actions méritaient bien un petit remontant et à ce moment là ils avaient tout pour les motiver. Chaque mouvement de bassin électrisait sa peau, et la pirate observait le visage de son ami, ayant contrôle de ses ressentis. Puis, Selen se redressa, prenant les mains de Chandalen dans les siennes pour les embrasser et se retourna pour observer la porte d’entrée de peur que ces derniers n’essayent de mener leur affaire plus tôt que prévu.

« ca commence à chauffer derrière. Faut qu’on puisse arriver à Umbar avant qu’ils ne commencent. » Fit elle remarquer entre deux soupirs

Si elle avait écouté sa raison elle aurait mit fin à leur activité pour aller d’emblée leur botter le train mais n’en avait vraiment pas envie alors que l’activité à laquelle elle s’adonnait pour le moment lui était bien plus plaisante. Selen se détourna, reposant son attention sur Chandalen et étira un large sourire. Elle lâcha ses mains pour lui laisser loisir de poser les mains sur elle s’il le désirait et intensifia ses mouvements. Elle ne retenait pas ses soupirs contrairement aux autres fois où elle avait essayé d’être discrète et se foutait pas mal qu’on l’entende pour le coup d’autant plus si cela pouvait les frustrer un coup, ce serait d’autant plus amusant.

Selen redoubla d’efforts, jusqu’à atteindre un seuil de non retour lorsque ses muscles vinrent à se crisper en même temps qu’elle tira Chandalen vers elle pour l’inciter à se redresser et la prendre dans ses bras. Dans des soupirs plus saccadés, se remettant de ses émotions, Selen se laissa totalement partir durant un instant qui lui sembla hors du temps et reprit doucement son souffle tout en serrant Chandalen contre elle. C’était bien mieux qu’une bouteille de rhum pour commencer la journée. Une fois redescendue sur terre, Selen bien qu’épuisée continua ses mouvements de bassin et scella ses lèvres à celles de son amant qui semblaient toujours lui manquer.

Dans les derniers instants de leur étreinte, Selen fut surprise de la délicatesse du baiser qu’il lui offrit. Ce n’était pas la première fois qu’il l’embrassait de cette manière mais cela venait crée un nœud dans son ventre, une tension agréable et douloureuse à la fois comme s’il s’agissait de véritables sentiments. Bien sûr qu’elle tenait à lui mais elle avait la nette impression qu’elle ne pourrait jamais refouler ce qu’elle éprouvait réellement pour lui. Selen n’assumait pas, encore et toujours, elle ne voulait pas lui faire de mal et ne souhaitait pas voir leur confiance mutuelle détruite. La jeune femme ne pouvait résister à son appel, glissant ses doigts dans ses longs cheveux pour approfondir le baiser et y mettre autant de sentiments qu’il en mettait. Il lui faisait tourner la tête, elle était complètement mordue de lui et il laisserait des marques indélébiles dans son esprit. Faible, voilà ce qu’elle était, à se laisser avoir une nouvelle fois par l’amour alors qu’elle avait déjà aimé Tharabas. Elle ne savait pas ce qu’il en était de ce dernier, voila trop longtemps qu’elle ne l’avait pas vu et n’était pas certaine de pouvoir résister si elle le croisait, mais Chandalen…Chandalen c’était tout autre chose qui la dépassait totalement. Et lorsqu’il la quitta elle senti son cœur se soulever d’une manière qui ne lui avait jamais été permis de ressentir. Elle l’observa s’habiller, demeurant assise sur le lit puis détourna les yeux afin de faire de même dans un lourd silence. La jeune femme veilla à s’armer correctement, ses deux sabres dans leurs fourreaux et ses quelques couteaux visibles et cachés dans le cas où elle n’ait pas le temps de revenir en prendre avant que tout ne se mette en place.

Elle pensait trop, elle en avait marre d’avoir des pensées contradictoires ou qui n’avaient pas de liens les unes aux autres entre Chandalen et ce qu’il était en train de se passer sur le navire. Alors elle jeta son dévolu sur la bouteille de rhum que son ami avait entamée, descendant de longues gorgées avant de reposer son attention sur Chandalen tout en essuyant sa bouche d’un revers de manche. Elle posa sa main sur la sienne tandis que celle-ci avait agrippé la poignée et ouvrit la porte.

« Ca risque d’être tendu, ouvre l’œil et ne t’aventure pas trop sur le pont durant la traversée. »

La capitaine passa la première, elle entendit des rires en remontant sur le pont et il y eu quelques bavardages jusqu’à ce qu’elle prenne la voile. Elle allait se montrer particulièrement vigilante, même si Chandalen était sensé être dans le coup ils n’étaient pas à l’abri d’une nouvelle trahison. L’adrénaline commençait à se distiller dans ses veines, veillant sur son ami comme une lionne, prête à leur arracher les boyaux avec les dents au moindre mal qu’il lui serait fait. Heureusement que c’était un guerrier et qu’il avait toutes les capacités pour savoir se défendre mais c’était toujours cette possession à son égard qui faisait qu’elle n’était pas sereine.

« Levez l’ancre, déferlez les voiles !!! Cap à l’est !! » Cria t-elle à travers le vent.

La brise leur était favorable et ils arriveraient assez vite à Umbar. Puisqu’ils l’avaient eux aussi remarqué, ils s’étaient vite affairés aux manœuvres du brigantin. Elle laissa Chandalen faire ce qu’il voulait, il avait toutes les bases de navigation et elle n’avait désormais besoin de lui dire où il y avait besoin d’aide puisqu’il le verrait d’instinct. Mais surtout s’il ne voulait pas y aller et rester à ses côtés elle le laissait, préférant le savoir d’ailleurs ici près de la barre plutôt qu’au milieu de ces ingrats sournois

« Comment ça va se….. » Elle n’eut pas le temps de demander qu’un rapace fit irruption et se posa sur la barre.

Selen s’était soudainement baissée, surprise par son arrivée avec son envergure atteignant les deux mètres cinquante. Mais puisqu’elle connaissait l’oiseau elle se redressa vite, fouillant dans sa besace les morceaux de viande qu’elle avait préparés en s’étant attendue à sa venue. La jeune femme lui donna le morceau de viande qu’il mangea goulument avant de se poser sur la barrière puisqu’elle n’avait pas de quoi le prendre sur son bras. S’il était là, c’est qu’ils se rapprochaient bien de la terre mais contrairement à bien des oiseaux, ses ailes immenses lui permettaient de supporter les bourrasques de vent même en pleine mer et d’aller plus loin. Il avait dû sentir qu’elle arrivait et comme souvent, il avait fini par la retrouver.

« Chandalen, je te présente Cheveyo, mon plus fidèle allié ! »

Il tombait à pic, un grand aigle de mer est non seulement utile pour les messages mais il est aussi un chasseur impitoyable. Il allait sans aucun doute les aider à en finir avec ces traitres. La jeune femme donna un morceau de viande à Chandalen afin qu’il le lui donne et sache qu’il était une personne proche de Selen, ainsi il ne viendrait jamais l’attaquer.

« C’est aussi une de mes meilleures armes… Fais attention à tes doigts, jette juste ça sinon il peut te les arracher… Je n’ai pas eu toutes mes cicatrices à cause d’actes de piraterie » Glissa t-elle avec un large sourire.

Selen ne lui avait pas parlé de sa grande passion pour les rapaces mais puisqu’elle ne les croisait qu’occasionnellement elle avait omis de lui en parler. Elle en avait apprivoisé quelques uns mais Cheveyo était celui qu’elle appréciait le plus et avec qui il y avait une véritable connexion depuis au moins 10 ans

Selen laissa la barre à Chandalen afin qu’elle puisse s’occuper de son oiseau et vérifier qu’il était en bonne santé. Il se laissa faire, à condition qu’elle lui donne une récompense car dans la mesure où elle n’était pas toujours avec, même si elle l’avait recueilli oisillon, il était très sauvage. Mais Cheveyo aimait beaucoup Selen et avait pleinement confiance en elle car elle arrivait à lui donner de la nourriture sans user de gants et il se montrait assez délicat. Il lui arrivait également de lui témoigner son affection et ce dernier aimait tout particulièrement les caresses sur la tête. La jeune femme répondait également aux questions de son ami, lui dévoilant l’histoire qui la liait à ce grand aigle et lui dévoila également qu’elle avait d’autres oiseaux. Elle pourrait lui apprendre à les apprivoiser, ce n’était pas chose impossible à condition de ne pas avoir peut et d’être très patient puisqu’ils sont très intelligents et capricieux. Ils allaient peut être croiser le hibou grand duc également puisqu’il ne restait jamais trop loin d’elle dans le cas où elle ait besoin d’envoyer des messages à Aaren.

Au bout de quelques heures de voyages, la vigie cria qu’il y avait la terre à l’horizon. Alors Selen laissa Cheveyo aller se poser sur un mat et l’appellerait au moment où elle aurait besoin qu’il se mette en chasse. Ainsi ils arrivèrent près du port, Selen ordonna que l’on affale les voiles et que l’on jette l’ancre. Bien sûr ils n’avaient d’autre choix que d’obéir, et, comme prévu lorsque le bâtiment fut complètement immobilisé, ils se regroupèrent dégainèrent leurs armes et vinrent à s’agglutiner devant eux. Selen n’était pas impressionnée le moins du monde, prenant appui sur le bastingage avec un large sourire empli d’ironie.

« Y’a-t-il un problème ? »
« Aye, c’est toi l’problème ! » Cracha celui qui était visiblement leur porte parole.
« Parle donc mon ami ! »
« On refuse de rentrer à port, ça va nous porter malheur d’avoir navigué sous le commandement d’une femme alors on veux t’sacrifier. »

Selen dégaina son sabre sans plus attendre et le lui planta dans le ventre sans faire dans la demi-mesure. Il étouffa sous l’agonie, observant sa meurtrière avec de grands yeux béats.

« T’aurais pu devenir un homme riche. »

Selen retira son arme, laissant le cadavre retomber au sol et s’empressa d’essuyer le sang en raclant sa lame sur la barrière.

« Démone !!! » Entendit-on hurler dans l’assemblée.

Et c’est l’un d’entre eux qui lança l’assaut en s’en prenant derechef à Chandalen, puisque ce dernier ne semblait pas vouloir s’allier avec eux et parce qu’ils le craignaient davantage, ils le prirent d’abord à parti. La jeune femme avait confiance en lui et savait qu’il pourrait les décimer seul. Alors s’engagea le combat, la pirate donnait des coups de sabre de manière précise et rapide pour en tuer le plus possible. Elle observa son aigle en haut entre deux tués, elle faisait de grands gestes en portant ses coups pour exciter l’oiseau et qu’il fasse correctement son travail quand elle lui ordonnerait de venir. Selen s’éloigna, du gaillard, progressant sur le pont tout en veillant à ne pas trop se prendre de coups. Elle présentait déjà quelques coupures, mais il était difficile avec autant d’adversaires d’un seul coup.

Lorsqu’elle senti qu’ils étaient trop submergés, Selen ordonna à son aigle d’attaquer en criant quelque chose qu’il était seul à comprendre et qu’il reconnaissait comme un signe de se mettre en chasse. Cheveyo pouvait attraper des animaux faisant six fois son poids en usant de vitesse lorsqu’il plongeait vers une proie, ainsi attaquer un humain était loin d’être un problème pour lui, à ajouter avec cela que ses serres lorsqu’elles se plantaient dans la peau étaient redoutables. Cheveyo prit son envol, tourna autour du bateau et finalement vint se joindre au combat d’abord en débarrassant Chandalen d’un homme. Ses serres se plantèrent dans son épaule, il lui picora le visage et le fit passer par-dessus bord en l’entrainant tout simplement. Selen était quelque peu débordée, subissait des assauts de tous les côtés et gardait en même temps un œil sur Chandalen. Jamais elle n’avait dû faire face à autant d’ennemis en étant seule. L’oiseau plongea de nouveau et fit tomber un autre homme trop près de Selen à son gout et lui arracha la peau du ventre en quelques coups de becs. Ses entrailles révélées, Cheveyo fit un véritable massacre.
La pirate se prit un coup dans la tête, qui sans la faire tomber dans les pommes vint la déstabiliser. Sa vue se troubla, elle tituba et tentait de se défendre du mieux qu’elle pouvait. Elle recula, ses coups de sabres étaient lancés au hasard mais l’un d’entre eux vint à l’attraper et logea sa lame à sou cou.

« Blackburn ! » Hurla t-il si fort que les quelques survivants cessèrent d’attaquer et plongea le navire dans le silence.

« lâche ton arme, c’est fini l’navire est à nous ! »

cheveyo prit son envol de nouveau, ses larges ailes battaient le vent avec telle puissance que les marins se retournèrent pour observer. Ils pensaient sans doute qu'il avait fui, alors qu'il se remettait en vérité en position d'attaque. La jeune femme tenta de crier afin de lui ordonner de venir mais l'homme qui la tenait vint l'étouffer en posant sa main sur sa bouche.

Prise en otage, la jeune femme senti la lame aiguisée de son ravisseur venir glisser sur sa peau. Le sang commença à couler et la jeune femme se senti petit à petit glisser dans une semi conscience qui vint s’amplifier avec l’agitation. Sonnée, Selen eu du mal à retrouver ses esprits malgré que Chandalen lui hurlait dessus de se bouger. Finalement au bout de quelques instant et en essayant de se remettre sur pieds, la pirate se redressa, ses deux sabres en mains et le visage couvert de sang. Elle inspira longuement avant de crier comme une guerrière et de charger un autre groupe d’hommes. Déchainée, la lionne arracha des morceaux de visages, plantait son sabre sans ménagement et ôtait sauvagement la vie de ces hommes. Elle essuya d’autres attaques mais l’adrénaline agitant la totalité de son corps faisait qu’elle ne craignait ni la mort ni la douleur. Cheveyo continuait d’attaquer sans merci, excité par la vue du sang, par l’odeur de la chair et lorsque tout fut terminé, Selen vint s’appuyer sur l’un des canons pour souffler un coup.

Ils étaient tous les deux debout. Le pari avait été dur mais au moins c’était fait et ils étaient débarrassés de ces traitres. Tout se passerait bien mieux quand Chandalen serait le capitaine. En voyant ce massacre, Selen ressentait de l’amertume, du dégout, de la déception. Jamais elle ne pourrait avoir son propre équipage, parce que les femmes pirates étaient rares mais les femmes capitaines n’existaient pas. Elle avait envie de changer ces mœurs, bousculer mais elle se confronterait toujours à ce souci de mutinerie. De toute façon sa place était aux côtés d’Aaren et elle ne pourrait jamais espérer place plus haute. Elle avait touché un rêve du bout des doigts grâce à Diema, désormais il lui faudrait retourner à la réalité. Songeuse, baissant la tête, la jeune femme essuyait son visage en ayant déchiré la blouse de l’un de ces matelots décédés. Elle essayait de ne pas trop étaler le sang mais ce n’était pas évident. Avec la fatigue accumulée ces derniers jours, elle se sentait quelque peu essoufflée. Elle avait besoin d’un bon nain avant d’accoster Umbar ou bien elle se ferait arrêter si elle était encore couverte de sang

Cheveyo se donnait à cœur joie de dévorer l’un des cadavres. Selen n’aimait pas qu’il mange de l’humain parce qu’elle ne voulait pas être associée à une proie pour lui. Mais c’était la rège lorsque l’on chassait avec un rapace : il avait droit à sa part du butin. Selen enfila le gant de cuir épais qui lui permettait de le prendre sur son bras, prenant un morceau de viande elle l’appela et il laissa son repas pour venir se pose sur son bras.

« Il adore le poulet » Fit-elle remarquer tandis que Chandalen passa près d’elle.

Elle lui donna le reste de sa besace et lorsqu’il fut rassasié elle le laissa aller se percher dans les mats. Au moins il n’essayerait pas de les attaquer pendant qu’ils jetteraient les corps dans l’eau. Ceci fait, la jeune femme se tourna vers son ami

« Excuse moi j’t’ai fait une frayeur ! J’voyais plus rien » Commença t-elle.

Selen était touchée par la ferveur dont il avait fait preuve pour la secourir et avoir aussi peur qu’elle n’ait perdu la vie.

« J’te paye une bière au port, d’abord on va nettoyer le pont et se décrasser ! »

La jeune femme lui adressa un marge sourire, posant sa main sur son épaule. Elle aurait eu envie de l’embrasser mais puisqu’elle était sobre, elle avait encore de la retenue. Selen traina les cadavres pour les regrouper et les ligoter par cinq puis les attacher à un boulet de canon. Ainsi ils resteraient bien au fond de l’eau et n’iraient pas flotter jusque vers le port. Cela demanda encore des efforts physiques, Selen prenait encore sur elle en faisant preuve de courage et ne voulait certainement pas se laisser aller. Elle allait bien, elle avait juste connu mieux mais maintenant que ça c’était fait, ils allaient pouvoir être tranquilles.