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Si on me presse de dire pourquoi je l'aimais, cela ne peut s'exprimer qu'en répondant : « Parce que c'était lui ; parce que c'était moi. » [ft. Nori]
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 Si on me presse de dire pourquoi je l'aimais, cela ne peut s'exprimer qu'en répondant : « Parce que c'était lui ; parce que c'était moi. » [ft. Nori]

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Si on me presse de dire pourquoi je l'aimais, cela ne peut s'exprimer qu'en répondant : « Parce que c'était lui ; parce que c'était moi. » [ft. Nori] Empty
MessageSujet: Si on me presse de dire pourquoi je l'aimais, cela ne peut s'exprimer qu'en répondant : « Parce que c'était lui ; parce que c'était moi. » [ft. Nori]   Si on me presse de dire pourquoi je l'aimais, cela ne peut s'exprimer qu'en répondant : « Parce que c'était lui ; parce que c'était moi. » [ft. Nori] EmptyJeu 15 Fév 2018 - 14:35


Dori & Nori
⚜️ Si on me presse de dire pourquoi je l'aimais, cela ne peut s'exprimer qu'en répondant : « Parce que c'était lui ; parce que c'était moi. » ⚜️

Ils étaient saufs. Il étaient saints et saufs et que Mahal en soit témoin, il y a de celà quelques heures, leur situation était incertaine. Après avoir survécu à la traversée des cavernes cernées de gobelins, échappé au châtiment du Roi gobelin, s'être frayé un chemin rocambolesque dans leur tanière vertigineuse, dangereuse et acrobatique (les mines des nains n'étaient pas ce qu'il y avait de plus praticable ceci dit) en chahutant et improvisant des joutes absurdes, ils avaient atteint la sortie d'où pointer le jour ; terreur des créatures du mal. Néanmoins, à peine récupéraient-ils de leur séjour inhospitalier chez les gobelins, que des vieilles dettes impayées resurgissaient et exigeaient leur règlement sous l'apparence de l'orc pâle. Thorin étant ce qu'il était, il s'était confronté à son ennemi de toujours dont la seule volonté était de venger son père assassiné tant dis que le reste de la compagnie tenter de survivre aux assauts infatigables de ces chiens enragés des plaines : les Wargs. Dori pouvait encore sentir leurs haleines fétide et putride lui brûler les narines et leurs yeux injectés de haine et de sang le fixer comme le dard d'une guêpe accroché à la chair qu'elle a piqué. Des horreurs et des situations alarmantes, il en avait vu et vécu mais jamais il ne s'était senti aussi cerné que cette nuit-là. La situation n'était clairement pas à leur avantage et pendant que les nains, impuissants, subissaient la terrible vision de leur roi, croulant sous les coups perfides de l'orc pâle, les pauvres guerriers se voyaient confronter à deux choix fatidiques : finir dans la gueule des warg ou bien laisser l'arbre sur lequel se suspendaient et se balançaient les nains tel des fruits murs prompt à tomber, se rompre sous leurs poids et dégringoler de la falaise. Fort heureusement ils s'étaient munis d'un guide et pas des moindres : Gandalf, un mage doté de facultés prononcées pour se sortir lui et ses compagnons des pires situations. Ainsi, leur survie, ils la devaient une fois de plus à leur sage guide et à ses relations avec les seigneurs des cieux envoyés par Manwë : les Grands Aigles.

Et pendant qu'ils planaient, une énième fois sauvés de justesse, survolant les monts brumeux pour atteindre le Rhovanion, ils ne se doutaient pas qu'un autre danger les attendait. Le temps de profiter de cette vue salvatrice que l'horizon projetait : leur destination, leur objectif à portée du regard : La Montagne Solitaire puis ils s'engouffraient dans des bois scrupuleusement gardés par une...bête...un homme...même Gandalf ne savait le définir...Quoi qu'il en soit, cette créature qui fréquentait ces bois détestait les intrus. Les intrus irrespectueux. Les intrus nains ou orcs irrespectueux. Les nains en général...mais apparemment et heureusement d'avantage les orcs. A peine Dori venait-il de retrouver ses frères, de les serrer dans ses bras, de les inspecter de toute part s'assurant qu'ils n'étaient nullement blessés qu'on lui apprenait qu'il risquait une fois de plus de les perdre au vu de l'individu contre lequel ils allaient devoir se confronter. Dori avait du mal à comprendre la logique de Gandalf...il le lui aurait bien fait part mais il n'en n'eut ni le temps ni le courage...Il ne tenait pas à subir les foudres du mage sous prétexte que ses manières ne lui convenaient guère mais Dori ne pouvait s'empêcher de se demander comment il comptait s'accaparer les faveurs du changeur de peau s'ils forçaient le passage dans les bois et s'introduisaient carrément dans sa demeure comme des sans gènes. Finalement, quand Dori rencontra l'ours géant, écumant de rage, il considéra que l'idée de Gandalf n'était pas si mauvaise et que de se réfugier dans la demeure (plutôt accueillante et chaleureuse en réalité, non ?) de leur agresseur était nécessaire. Ils passèrent la nuit dans l'étrange maison, craignant le retour furtif de la bête mais Gandalf leur avait assuré que pour le moment, ils étaient en sécurité. Ce n'est que le lendemain qu'ils firent la rencontre de ce gardien incroyablement géant. Il dépassait même Gandalf ! Dori se sentit encore plus petit, écrasé ainsi sous la terreur qui l'habitait. Il ne savait pas trop comment réagir ni agir, alors il se référa aux conseils de Gandalf prenant sur lui d'enterrer sa rage de guerrier fauve et de ses instincts protecteurs qu'ils avaient pour ses frères. Après maints efforts fournis des deux côtés et d'un commun accord, les tensions et les différents retombèrent d'un niveau et les détestables nains devinrent les invités de celui qui avaient failli faire un méchoui de nains quelques heures auparavant.

Dori pu enfin relâcher la pression en profitant de l'atmosphère étrangement paisible qui flottait dans cette demeure. Tout semblait en parfait harmonie, loin de toute influence maléfique, comme hors du temps, suspendu dans un paradis isolé où la flore et la faune foisonnaient. Il pensait se rafraîchir dans le minuscule étang avant de renoncer, victime des grondements de Beorn à son encontre. Il lui avait interdit de déranger les poissons et de polluer leur habitat de sa crasse. S'il n'avait pas tout à fait tort sur son hygiène, Dori se garda bien de donner son point de vue sur ce qu'il pensait du bien être des poissons quand on savait par quoi ils étaient passés depuis le Comté. L'aîné de la fratrie évita tout risque de fragiliser la faible entente et se contenta d'un seau d'eau puisé dans le puits. Il vit Ori profiter des rayons du soleil en toute innocence, en plein observation de ces énormes abeilles qui balayaient les airs en vrombissant avec ferveur. Il semblait grignoter le bout d'un crayon, complètement inspiré. Songeait-il a les dessiner ? Peut être, quoi qu'il en soit, il semblait s'épanouir dans cet univers féerique tout droit sorti d'un conte de fée. Dori songea qu'il n'avait pas beaucoup vu Nori depuis leur réveil et maintenant que leur esprit était au repos, les nains pouvaient de nouveau réfléchir calmement voir même à penser à des choses futiles. Ce dont Dori songeait à cet instant, en revanche, n'avait rien de futile et il comptait bien exposer le fruits de ses réflexions au plus concerné : Nori. Il y avait un affaire laissée en suspend, qui remontait au moment précis où les gobelins les avaient dévalisé en exposant publiquement les méfaits de Nori. Dori alla à la rencontre de son petite frère et en profita pour regarder ce qu'il faisait et en effet, on pouvait apercevoir sur le parchemin le croquis de ce qui se rapprochait d'une abeille. Il lui demanda s'il avait vu Nori et où il pourrait le trouver et sur ses confessions il alla rejoindre son cadet. Quand il le trouva enfin, Dori soupira, les traits durs et plein de reproches. Il savait qu'une fois de plus ils allaient devoir se disputer et qu'il allait devoir lui faire la morale...Il commença d'une voix qui se voulait direct et froide.

- Tu n'as rien à m'expliquer ? Vas-y je t'écoute, justifie toi, raconte moi ce brûlant mensonge que tu as si bien préparé et qui expliquerait la raison pour laquelle tu continues de me faire honte.

Il fit une courte pause puis s'avança d'un pas vers son frère.

- N'es-tu que cela Nori ? Un abject voleur ? Ne seras-tu jamais QUE cela ? Quel exemple donnes-tu à Ori en agissant de la sorte. Tu crois que tout peut t'être dû simplement parce que tu en éprouves le désire ? L'honneur de ton nom, de ta famille n'a t-elle aucune valeur à tes yeux pour la salir de la sorte ? Alors je te le redemande : explique moi la raison, cette fois-ci.

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Si on me presse de dire pourquoi je l'aimais, cela ne peut s'exprimer qu'en répondant : « Parce que c'était lui ; parce que c'était moi. » [ft. Nori] Empty
MessageSujet: Re: Si on me presse de dire pourquoi je l'aimais, cela ne peut s'exprimer qu'en répondant : « Parce que c'était lui ; parce que c'était moi. » [ft. Nori]   Si on me presse de dire pourquoi je l'aimais, cela ne peut s'exprimer qu'en répondant : « Parce que c'était lui ; parce que c'était moi. » [ft. Nori] EmptyLun 26 Fév 2018 - 19:59


Oh fury, my fury

Dori & Nori

and when you lied before, you broke our tie before


  
J’en ai connu des aventures, j’en ai connu des frayeurs. Ce n’est pas la première fois que j’ai fait face à ma propre mortalité, loin de là, mais ce qui nous est arrivé ces deux derniers jours a été un enchaînement de situations plus critiques les unes que les autres. Je ne l’avouerait pas facilement, mais je pense bien ne jamais avoir eu si peur que lorsque nous étions juchés sur cet arbre, s’accrochant à nos vies avec l’énergie du désespoir. Il n’y avait pas de plan de secours, pas d’issue miraculeuse, pas d’échappatoire possible. Il n’y avait que nous, ces orcs menaçants et cet arbre qui promettait de céder d’une minute à l’autre, nous destinant à une longue chute mortelle. Je me souviens encore avoir regardé mes compagnons comme s’il s’agissait de la dernière fois, avoir regardé mes frères pour m’assurer d’emporter avec moi l’image de leurs deux visages dans l’autre monde. Je sais que mon cerveau a cessé de fonctionner pendant ces terribles instants, paralysé par l’horreur, figé par cette réalité difficile à accepter : j’allais mourir dans les secondes à venir, et avec moi sombreraient mes frères. Nous allions partir tous ensemble, à trois, une fin que je n’avais jamais imaginée et que je regrettais. Ce n’était pas ce qui devait arriver. Que je meure c’était une chose, mais pas eux. Pas eux. Pas Ori, ce jeune nain innocent, courageux, fantastique et intelligent, pas Ori, mon petit frère, qui avait encore tant de choses à vivre, un avenir si prometteur devant lui. Et Dori, oh j’en ai prié Mahal, je le reconnais. Pour tout ce qui a pu se passer entre Dori et moi, en cet instant j’aurais voulu hurler toute ma colère à l’idée qu’il perde la vie à son tour. Ils ne méritaient pas cela. Deux nains honnêtes, bons, plus loyaux qu’aucun autre… Mes frères. Ils allaient mourir en ayant suivi leur roi dans une quête inespérée, tout comme notre père avant eux. Quelle ironie lugubre, quel coup du sort insoutenable. Et je ne pouvais rien faire, j’étais aussi impuissant que tous mes camarades, m’accrochant vainement à une branche de cet arbre condamné.
Je ne saurais dire ce qu’il se passait entre Thorin et l’orc pâle à ce moment là, tant mon attention était retenue par ce constat désespérant, par l’imminence de notre mort prochaine. Je me souviens avoir croisé le regard aussi paniqué de Dori, je me souviens de ces quelques secondes d’observation, de communication silencieuse. Tout sembla passer entre nous à cet instant, et je ne savais si je comprenais ce qu’il me disait, ou si je lisais dans son regard ce que moi j’essayais de lui transmettre. Des regrets, de la tristesse. Des remerciements, un amour fraternel inébranlable. Un adieu.

Mais nous ne sommes pas morts, Mahal en soit loué. Nous devons nos vies une fois de plus au magicien, une dette dont nous pourrons difficilement nous acquitter, si vous voulez mon avis. Je ne pense pas que nous puissions un jour lui sauver la vie à trois reprises, bien que cette quête idiote soit loin d’être terminée. Toujours est-il que nous étions sains et saufs, et nous n’eûmes pas posé pied à terre depuis plus d’une dizaine de secondes que déjà Dori me fonçait dessus, vérifiant de ses mains hâtives que j’étais bien vivant, et en un seul morceau. Je le prenais dans mes bras, puis embrassais Ori à son tour, soulagé, plus soulagé que jamais auparavant. Nous étions sains et saufs, heureux, miraculés. Mais loin d’être sortis d’affaire, car Gandalf, tout magicien qu’il soit, décida de mettre de nouveau notre vie en péril en nous faisant entrer par effraction dans la demeure d’un ours géant. Cette idée me parut tout à fait stupide, et pourtant, aujourd’hui, après une bonne nuit d’un sommeil bienvenu, je dois reconnaître que le magicien semble savoir ce qu’il fait, une fois de plus.
Nous avons un toit, à manger, et cet endroit est aussi paisible que Fondcombe, avec le distinct avantage d’être dépourvu d’elfes et de leur musique étrange. Nous avons même pu faire un brin de toilette ce matin, ce qui ne fut pas désagréable après tout ce que nous avons enduré depuis notre départ inopiné de chez les elfes.

Le soleil est chaud et son contact agréable sur ma peau. Je me suis installé dehors, pour nettoyer mes armes en compagnie de Dalor et de Gloïn. Assis sur un rondin de bois, je fume tranquillement, écoutant Gloïn nous raconter pour la énième fois la façon dont il rencontré sa tendre épouse. J’ai beau avoir entendu cette histoire de nombreuses fois, je souris encore en entendant l’enthousiasme de notre camarade marchand qui ajoute de nouvelles anecdotes à chaque fois, parlant avec bonheur et entrain. Ah, pour sûr, il ne fait aucun doute qu’il aime sa femme. Parfois j’ai presque l’impression qu’elle est parmi nous, tant nous en entendons parler. Dalor rit de temps en temps, pose des questions tout en aiguisant sa hache. Mes couteaux favoris posés devant moi sur l’herbe grasse, je les nettoie avec soin, une activité aussi utile qu’apaisante. Je ne dis rien, tirant sur ma pipe paisiblement, profitant de la sérénité de cet endroit. Au bout d’un moment, Dalor se lève, désirant aller manger un bout, et Gloïn lui emboîte le pas, clamant avoir si faim qu’il en mangerait presque un warg. Je secoue la tête doucement, les écoutant s’éloigner. Je ne suis pas mécontent d’être seul, bien que depuis notre départ de la Comté je me suis habitué à mes compagnons bien plus que je ne l’avais imaginé avant le début de la quête. Il faut dire que défier la mort au quotidien, ça forge des liens. C’est assez étrange comme sensation d’ailleurs. Si nous étions restés en Ered Luin, il est évident que je n’aurais jamais adressé la parole à tous ces nains, en tout cas pas en des termes aussi civils voire parfois presque amicaux. A l’exception de Dalor et de Bofur, jamais un nain honnête n’aurait eu une conversation avec un criminel comme moi. Mais les choses sont différentes dans cette quête. Nous sommes une équipe, lancée dans une quête suicidaire, il faut faire preuve de solidarité – en tout cas, c’est l’idée. Bien sûr, je n’oublie pas la petite princesse Kili, qui garde une dent contre moi, mais on ne peut pas plaire à tout le monde. Quand à Dwalin, eh bien…

Je suis sorti de mes pensées en entendant le bruit caractéristique de bottes crissant sur la terre sèche. Mes mains s’arrêtent dans leur mouvement, et je tourne la tête pour voir qui est en train d’approcher. Je ne suis pas vraiment surpris en distinguant la silhouette familière de mon grand frère, mais mon estomac se serre légèrement en le voyant marcher vers moi d’un pas décidé. Comme à chaque fois qu’il vient me parler, je ne sais pas à quoi m’attendre. Du positif ? Des remontrances ? Depuis le début de cette quête, nous nous sommes rarement disputés, sauf lorsqu’il s’agit de Ori et que je lui fais remarquer qu’il fait trop sa mère poule. Nous n’avons pas non plus eu de grandes conversations, mais le simple fait d’être ensemble sans nous hurler dessus est une amélioration indéniable. Je reste fidèle à moi-même, n’attendant rien de mon frère, ne cherchant pas son approbation, ne demandant rien de sa part. Nous voyageons souvent à trois avec Ori, et lors des batailles c’est vers eux que mes pas me conduisent, instinctivement. Vers eux. Vers mes frères. Vers Dori. La simple idée qu’il périsse dans cette quête m’insupporte, je donnerais ma vie pour sauver la sienne et pourtant… Et pourtant, lorsqu’il s’approche de moi, j’ai toujours cette même appréhension. Je m’attends au pire, et je sais qu’il aurait des raisons de venir me tirer les vers du nez : ce sac de vaisselle elfique que les gobelins ont renversé lorsqu’ils nous ont fouillés. Mais nous avons failli mourir hier, à plusieurs reprises. Nous avons manqué d’y passer, et je me souviens encore de ce regard que nous avons échangé. Peut-être ne vient-il pas me sermonner. Peut-être ne devrais-je pas me sentir sur mes gardes ainsi.

Il s’approche et dès que je distingue son expression courroucée et un brin fatiguée, je comprends que j’ai eu tord d’espérer. Il ouvre la bouche et les mots qui en sortent me paraissent être crachés avec toute la rancœur du monde. Instantanément, mes yeux se plissent et je sens tout mon corps se tendre, passant en stature défensive. Il me demande une raison, une explication, un mensonge. Il me demande pourquoi je suis ce que je suis, pourquoi je me complets à salir encore et encore l’honneur de notre famille. Les mots ne sont pas nouveau, ne sont pas inédits, et j’ai appris à les laisser glisser sur ma peau sans qu’ils ne puissent m’atteindre. Ou en tout cas c’est ce que j’essaie de faire croire, c’est l’image que j’essaie de renvoyer. L’image d’un gamin turbulent, un félon, un voleur sans foi ni loi qui se fiche bien des conséquences. C’est ce que les autres voient, ce qu’ils croient. Mais Dori me connaît mieux que les autres. Dori n’est pas comme les autres. Ses mots ne glissent pas sur ma peau : ses mots, accusateurs, chargés de douleur et de venin, se plantent directement en moi, au plus profond d’un cœur que je prétend ne pas avoir. Dori est censé me connaître mieux que les autres, et pourtant il ne voit pas cela. Il ne sait pas. Il ne comprend pas. Il ne voit pas pourquoi je réagis à chacune de ses remontrances, ne cherche pas, ne trouve pas. Il se contente de reprocher, encore et encore, et je ne sais rien faire d’autre que lui renvoyer ces reproches, crier plus fort que lui, trouver des mots aussi douloureux que ceux que la colère lui fait dire.

Il parle, me parle d’honneur, d’exemple, et je serre les dents, sentant mon sang bouillir un peu plus à chaque mot qui sort de sa bouche. Il est mon frère, et pourtant il me semble parfois qu’il est mon pire ennemi tant il m’arrive d’éprouver l’envie irrésistible de lui coller mon poing dans la figure. Un abject voleur. Voilà tout ce que je suis pour lui, c’est lui qui l’a dit, une fois de plus. A peine a-t-il fini sa tirade que je me lève et lui fais face, le poing serré sur la dague que je tiens encore dans la main, oubliée. J’aimerais avoir le sang froid et le tact pour lui répondre calmement, amener la dispute sur le territoire diplomatique du dialogue comme certains savent le faire. Mais je ne peux pas. Pas avec lui. Pas avec Dori. Il n’y a que lui qui sache me faire perdre mes moyens, et en cet instant le simple fait de le voir me rend fou de rage.

« Je n’ai aucune explication à te donner, aucune, » je lui crache alors avec mépris, sentant la chaleur me monter au visage. Mes mains tremblent sous l’effet de la colère, je sens mes muscles tendus, prêts à en découdre. Mais malheureusement pour eux, malheureusement pour moi, je sais qu’il n’y aura aucun défoulement possible pour libérer toute cette colère soudaine. Rien que des mots, rien qu’une dispute, comme toujours. « Je ne t’en dois pas. Je ne te dois rien. Et Ori est assez grand pour faire ses propres choix. » Je ponctue ces derniers mots avec une légère pichenette du bout de ma dague sur son sternum, provocation irréfléchie et qui pourrait être considérée comme complètement suicidaire quand on connaît la force brute de Dori. Mais la colère a toujours pris le pas sur la raison quand il s’agit de mon aîné et de ses éternels sermons. « Rappelle-moi qui nous a embarqués dans cette quête suicidaire ? Tu te préoccupes de l’honneur, tu te préoccupes de mon image... » J’ai un rire narquois et totalement dénué d’humour, aucun sourire ne venant illuminer mon regard plein de rage. « Mais est-ce que ton honneur est plus important que sa vie ? S’il meurt pour cette quête, s’il meurt pour ton sacro-saint honneur de guerrier, de mouton suiveur... » Je fronce les sourcils, ma bouche se tord en une grimace hargneuse. Je m'emporte, je parle sans réfléchir, les mots se formant sans crier gare, plus durs et plus injustes que je ne le réalise sur le coup de la colère. « On reparlera alors de qui est vraiment abject entre nous deux. »
  
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