Le passage de la nuit (SOLO)

Endriad se rappelait enjouée à l'idée du mariage de cette jeune fille qu'elle avait apprécié voir grandir et s'épanouir au fil des années, au fil des passages. Elle avait voulu croire, crû simplement en cette histoire conté des lèvres d'Hadrian. Partir, revenir, découvrir le monde au delà des limites établies, c'était une aventure, le choix d'une vie, ou peut-être juste apprendre à devenir meilleur, moins ignorant des autres, moins ignorant de soi-même. Elea avait parcouru ce chemin jalonné d'inattendus... Et la joie de cette nouvelle résonnait maintenant tel un champ funèbre, le croassement d'un oiseau de mauvais augure. Ici elle avait fait halte comme prévu pour ne trouver que de tristes mots échappant au seigneur des lieux.  C'était un homme bon, de ce qu’en avait jugé la lossoth, elle qui n'était pas souvent complaisante pourtant. Le voyage jusqu'ici n'avait pas était si facile et voilà que toutes promesses de retrouvailles s'évaporaient sous le soleil lourd du Rohan. Elea, Hadrian, disparu dans la poussière étouffante d'une galop éperdu vers le Nord.

Endriad n’oubliait rien de ce qui lui en avait coûté pour rejoindre le Gondor et son père. Jamais elle n’avait plus failli devant lui auparavant, et pourtant elle n’avait su baisser les yeux, ni s’avouer vaincu face à ses paroles désobligeantes. Rien n’était jamais perdu tant que l’espoir, la hargne de s’en sortir subsistait. La Lossoth croyait en sa force, autant qu’elle avait cru en l’espoir de retrouver son compagnon de voyage, indifférente au temps que cela avait pris. A présent, une petite voix grave résonnait dans sa tête alors qu’elle prenait un temps de repos dans cette demeure inconnue il y avait de cela quelques heures. Ils avaient mangé, s’étaient accordés quelques heures de sommeil difficiles, autant que le requiert un enfant. Cette maison les avaient abritée dans les brumes indistinctes de la l'arasement physique autant que celles d'un abattement plus intériorisé. Pour l'heure, la jeune femme ne savait que penser de la réaction de son ancien compagnon de voyage. Elle ne pouvait totalement lui en vouloir d'avoir dérogé à sa parole quand sa soeur se trouvait plongée dans le malheur. N'aurait-elle pas fait pareil? Peut-être... Pas sans oublier ces autres qui comptaient eux aussi.  Elle était trop inquiété par le sort de son amie pour se concentrer sur la frustration, le ressentiment qui s'insinuait dans son esprit. Qu'il y avait il à attendre de toute façon?

Quand l’aube était apparue au lointain la jeune femme n’avait pas vraiment fermé l’oeil, tout en sachant que les tourments agitant son esprit la confrontaient seulement à plus de difficultés. Firmen dormait encore lui et elle caressa sa chevelure de jais dans un long soupir. Elea était ce qui importait le plus, son affection pour la blonde se devait de surpasser le reste de ses remises en questions. Hadrian avait pris les devant, et elle suivrait, pas pour lui tirer les oreilles, seulement pour venir en aide à celle qui les réunissait. Là était une vérité bien plus claire que les limbes, un élément vacillant qui aurait toujours dû rester au premier plan. Endriad n’avait jamais rien attendu des hommes, trop prompt à laisser les bagages derrières, à aller et venir en la laissant s’occuper du reste. Elle était doué pour cela, n’était-ce pas le principal ? Que pouvait-elle faire de plus si ce n’était retrouver la terre qui l’avait vu naître après avoir accompli sa mission et rassurée son coeur à propos de sa chère amie. Ses pas la dirigeaient vers le nord envers et contre tout.

Le seigneur leur avait offert des vivres, et elle le remercia une énième fois en sachant que c’était trop peu pour la bonté dont il avait fait preuve envers les inconnus qu’ils étaient. A défaut de l'assurance de pouvoir lui rendre ses dons, elle parlerait de lui là où elle allait, en vantant ses mérites. Elle se délesta cependant de la parure qui lui restait encore, faites de ses mains jadis sur les routes, attestant de ses origines. Cela ne valait pas grand chose en l'état mais elle souhaitait qu’il l’offrit à son enfant à naître comme témoignage de sa gratitude pour son accueil. Un rien, mais un rien qui le rendrait reconnaissable à ses yeux, et elle l’espérait, lui porterait chance dans sa future vie. Puis, Firmen en bagage elle remonta sur le cheval dont elle avait fait son compagnon depuis quelque temps. Ce n’était pas une fine cavalière mais elle s'améliorait de jour en jour. Rien à voir avec ses loups, suivant leur sillage certes, cela n’en restait pas moins un animal dont elle percevait au fur et à mesure toute l'intelligence et la grâce. Ainsi prirent-ils à travers les plaines vertes du Rohan pour rejoindre la trouée sans se retourner.