Sujet: Quand il est temps de partir [Arador] [Terminé] Jeu 6 Fév 2014 - 12:14
Quand il est temps
►Feat. Arador
Alensil revenait de la ville. Son cheval le guidait plus qu’il ne manoeuvrait lui-même sa monture, manifestement habituée à parcourir ce chemin de pierres et de terre battue. Elle l’amena ainsi paisiblement jusqu’au bout de la route, puis à l’étable. Là, il mit pied à terre avant d'exécuter des gestes mille fois répétés, sans vraiment y songer. Il avait rencontré les acheteurs cette après-midi là, ceux qui étaient venus visiter dans la semaine, et il revenait à présent du notaire chez qui il avait apposé sa signature en bas du papier qui lui était tendu en échange d’une bourse pleine et tintante. Il n’avait pas cherché à négocier le prix, ni à recompter ses pièces. En dehors des bêtes, il ne s’agissait que de deux vieilles bâtisses en bois, quelques clôtures et des champs, comme on le lui avait fait lourdement remarquer. Ses souvenirs n’avaient pas de valeur ajoutée. Mais à présent, l’escarcelle qui pendait à sa hanche lui semblait lourde. Et lui, se sentait vide. Faisait-il une erreur monumentale en se coupant à jamais du seul foyer qu’il n’ait jamais connu ? Peut-être. Mais il était trop tard pour changer d’avis, et quoi qu’il en soit, il savait que la ferme ne pourrait plus être ce qu’elle avait été par le passé. Quand il eut fini de ranger la selle et le harnais de sa jument, il en caressa le cuir usagé et ferma les yeux un instant, laissant l’odeur des vieilles poutres, de la paille sèche et de la poussière pénétrer ses sens. Il se voyait encore, se cachant derrière les ballots pour jouer, cherchant l’endroit où la chatte avait bien pu planquer ses petits, grimpant sur la charpente pour retirer les toiles d’araignées…
Il sortit de ces réminiscences puis de la grange pour observer le ciel un instant. C’était une belle journée. Ou du moins, ça aurait pu l’être dans d’autres circonstances. Petit, il serait partit se promener avec le chien, courir dans les grandes herbes folles qui ceinturaient leurs champs, et se serait fait gentiment réprimandé d’avoir ramené de la boue dans la maison par la suite. Il jeta un coup d’oeil machinal aux quelques bêtes qui paissaient tranquillement derrière leur clôture sur la gauche, et prit le chemin qui le séparait de son domicile. Ex-domicile. Quelques poules tentèrent d’attirer son attention, espérant comme toujours que ce fut déjà l’heure du repas, mais il se contenta de poursuivre jusqu’à la vieille porte en claudiquant. Il tira le verrou pour être accueilli par le son habituel des gonds qui grincent, puis pénétra dans la grande pièce à vivre. Cuisine, salon, salle à manger, aire de jeux et espace d’accueil des journaliers… Elle était tout cela à la fois. C’était également sa chambre, depuis qu’il était assez grand pour dormir seul. A côté d’un des petits lits qui se trouvaient dans la partie gauche de la salle, on pourrait ainsi remarquer qu’un sac de voyage était posé, déjà préparé. Il approcha du poêle qui irradiait d’ordinaire d’une chaleur rassurante, pour le trouver froid. Le feu avait dépéri pendant son absence et la maison semblait désormais glacée. Ce n’était pas seulement la faute de cette cheminée de fonte, non. Tout avait à présent l’air morne et figé, comme si la vie de l’endroit avait été aspirée en même temps que celle de sa défunte mère. Alensil tenta de faire repartir les braises en les secouant du bout du tisonnier, et y ajouta une des bûches qu’il avait rentrées par avance la veille. Il resta près du poêle quelques minutes, vérifiant que le bois s’enflammait, avant de faire état de ses mains, noirâtres.
Il sortit donc pour aller plonger ses menottes dans l’abreuvoir en pierre qui longeait le mur de la maison. C’était une habitude qu’il avait prise afin d’économiser l’eau. Se penchant sur l’auge, il s’éclaboussa également le visage avant de repousser quelques mèches de cheveux humides de son visage. Son attention se porta sur la route de terre qui menait à sa ferme, où une silhouette sombre se dessinait. Il plissa les yeux légèrement pour tenter de mieux discerner la forme, et pu déduire de son observation qu’il ne s’agissait que d’un cavalier seul, accompagné de ce qui devait être un chien. Par réflexe, ses doigts se portèrent à sa ceinture pour vérifier que sa dague y était bien présente, avant de retourner le long de son corps. Il ancra fermement ses pieds dans le sol en attendant son visiteur impromptu, comme il le faisait à chaque fois qu’il ne désirait pas que son handicap se remarque. Il essuya alors ses mains sur sa chemise à la teinte grisâtre, et quand l’homme fut suffisamment près pour être à portée d’écoute, il le salua d’un hochement de tête :
« Bonjour... Vous cherchez la route pour aller à Lond Daer, peut-être ? »
Cela arrivait quelque fois que des jeunes gens se perdent et viennent demander quelques indications à la ferme. Mais à bien y regarder, il y avait un petit quelque chose chez cette personne qui était étrange... familier peut-être ? Alensil ne put s’empêcher de le fixer quelques instants, observant son maintien parfait, les cheveux bruns qui encadraient son visage et sa barbe naissante sans vraiment réussir à mettre le doigt sur ce qui le titillait. Ses yeux descendirent ensuite sur le pur-sang à la robe noire, qui devait bien valoir trois fois le prix de sa jument, simple bourrique en comparaison, mais avait l’air d’avoir plusieurs dizaines de lieues dans les pattes. Quelle que soit la raison de la venue de cet homme, il y avait une chose qu’il pouvait offrir et c’était un peu de bien-être pour sa monture et son petit compagnon. Il s’écarta légèrement de l’abreuvoir en prenant discrètement appui sur sa jambe gauche :
« Vous pouvez les laisser boire, ils ont l’air d’en avoir besoin. J’ai aussi du foin si vous le souhaitez. »
Il y avait assez de réserves dans la grange pour tenir jusqu’aux beaux jours, et n’en avait plus vraiment l’utilité. De plus, un ballot entamé ne serait pas remarqué par les nouveaux propriétaires, il lui semblait donc naturel de faire cette proposition.
Dernière édition par Alensil Valronir le Ven 24 Oct 2014 - 21:45, édité 5 fois
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Sujet: Re: Quand il est temps de partir [Arador] [Terminé] Jeu 6 Fév 2014 - 22:54
A la croisée des chemins...
Accroupi au sol, ses doigts caressant une terre humide et marquée d’une trace de pas large et profonde Arador retint un sourire victorieux. Cela faisait bientôt trois jours qu’il traquait ses proies. Trois jours qui lui avaient paru bien long. Distancé et désavantagé dès le départ, il avait été semé plusieurs fois, mais finalement, au bout de deux jours le voilà de nouveau sur leurs traces. Un petit groupe d’orcs vagabonds ayant détruit une ferme en début de semaine, et fait subir à leurs habitants un supplice aussi écœurant qu’inutile. Et si il y avait bien une chose qu’il haïssait chez les orcs mis à part leur existence même, c’était bien la torture gratuite à laquelle ils aimaient s’adonner.
Ainsi il s’était mis en tête des les éradiquer. Un petit groupe de six orc était une chasse facile de part leur manque de discrétion. Seul possible soucis, un possible affrontement direct. Néanmoins, connaissant les faiblesses et aptitude de combats des orcs en général, il pensait pouvoir les gérer seul. Peut-être était-ce présomptueux, ou peut-être pas. Après tout voilà bientôt 40 ans qu’il maniait l’arc et l’épée. Il ne se dirait pas aussi expérimenté qu’un elfe, mais du côté des hommes il était pour sûr un redoutable combattant. Sachant aussi bien faire usage de fair-play dans des duels que d’astuce et de ruse dans les mêlés.
Retournant auprès de sa monture, la prunelle des yeux du roi Brytta, un fier étalon à la robe noir, Arador siffla par trois fois. Remis en selle, il prit un moment, attendant patiemment quelque chose. Et ce fut seulement au son d’aboiements joyeux qu’il talonna enfin sa monture. Celle-ci piaffant d’impatience, bondit en avant à l’ordre de son cavalier, martelant la terre de ses sabots, le tonnerre semblant être descendu dans la plaine. Il avait une chasse à l’orc à terminer, et il comptait bien en avoir finit avant la nuit, le soleil commençant déjà sa descente vers l’ouest.
Et il eut bien raison, car les orcs voyageant de nuit, ils auraient encore remis de la distance entre eux. Galopant toute l’après midi, il parvient rapidement à leur hauteur. Et le massacre put alors commencer. Sautant de sa monture, dégainant son épée avec adresse, le Dunedain plongea dans un état de transe, l’adrénaline lui montant à la tête. Mortel, il trancha avec précision et méthode la chair, et les os des ennemies se dressant devant lui, leurs armes levées. Grimaçant alors qu’il éventrait son troisième orcs, Arador ne put s’empêcher de souligner à quel point les orcs étaient de piètres combattants. Formés négligemment, ils connaissant tout juste les bases du combat à l’épée, leur style de combat relevant plus de la sauvagerie que de la technique. Ce qui bien évidement les rendait sujets à bien des erreurs, laissant des ouvertures si énormes par moment qu’il devenait presque ennuyeux de les combattre. Enfin, il n’allait pas se plaindre non plus, ce constat rendant la tâche à lui et ses pairs, bien plus facile.
Son dernier orcs pourfendu, Arador essuya maladroitement le sang présent sur son visage. Il détestait quand ça giclait de partout, mais à quoi s’attendre lorsque l’on tranchait une tête…Passons. Recouvert de sang, le jeune seigneur donnerait tout le contenu de sa bourse à l’instant pour un bon bain. Il y avait bien longtemps qu’il ne s’était point préoccupé de son hygiène. Mais il était impensable pour lui de rester ainsi couvert du sang nauséabond de ces créatures du mal. Aussi, ce fut dépité, qu’il remit sa lame Angurva dans son fourreau, notant mentalement qu’il lui faudrait dès que possible la nettoyer et l’affuter de nouveau. Elle était son meilleur allié dans ses voyages. Et c’est à son épée que l’on reconnait le guerrier. Enfin, il était tout de même quelque peu désappointé de les facilité avec laquelle il avait décimer le petit groupe. Il avait à peine commencé à réellement se battre que la bataille était finie. Frustration.
Son sifflement perça l’air, rappelant à lui ses deux plus fidèles compagnons. Arriva d’abord Asgar, cheval en partie sauvage, acceptant gracieusement d’être monté. Étalon du Rohan, taillé pour la vitesse et doté d’une grande force, il engloutit rapidement les mètres le séparant de son cavalier, trottant résolument. Derrière lui s’avançait à son rythme, un animal somme toute banal, mais d’une grand importance pour le Dunedain. Un chienne d’un âge certain, ne possédant ni race, ni pedigree, mais lui étant fidèle et à laquelle il accordait une grande part de son affection. Se retenant de lui caresser le poil à son approche, les mains encore souillées du sang des orcs, l’homme se remit en selle, sortit d'une poche, une carte en tissus qu’il regarda brièvement, et prit la direction de la ville la plus proche de son emplacement. Une ville portuaire du nom de Lond Daer.
Cela lui disait quelque chose. Il se rappelait bien de ce port construit par ceux de sa race, il y a de cela si longtemps. Pour y avoir fait un arrêt une fois, il se souvenait de la splendeur des bateaux y étant construit. Il n’était pas un connaisseur en matière de navigation, mais surement ces embarcations étaient capables de faire des miles et des miles avant de montrer le moindre signe d’usure. Enfin, il n’était pas en route pour aller admirer la beauté de la ville portuaire, mais bien pour faire une halte, se reposer, manger décemment, et reprendre des forces. Ce qu’il avait déjà eu l’occasion de faire là-bas, une fois dans le passé. Il avait même fait la rencontre d’un jeune garçon de ferme, plutôt intéressant, semblant particulièrement curieux au sujet des rôdeurs. Ce qui ne plaisait pas particulièrement à sa mère d'ailleurs. Il se remémorait la scène avec une certaine nostalgie, le temps passant trop vite à son gout.
Aussi, ce ne fut qu’après un jour de chevauché, entrecoupé de pauses plus ou moins longues qu’Arador put entrevoir avec joie un semblant de civilisation. Après tout ce temps passé en forêt à courir les sentiers, il n’était jamais contre un retour à une vie plus citadine. Après tout, n’avait-il pas grandi dans une cité. Et à la base, il n’avait jamais vraiment été un baroudeur. Plutôt un rat de bibliothèque et un doux rêveur. Mais il avait du s’adapter. M’enfin, c’était une autre histoire. Là maintenant, il n’avait pas le temps de se rappeler ses premiers pas dans la vie sauvage. Loin devant, se trouvait une petite ferme. Sans grande prétention certes. Pourtant elle lui rappelait quelque chose. Il lui semblait l’avoir déjà vu cette ferme. Sa monture continuant d’avancer, fronçant ses sourcils dans un effort de mémoire, Arador distingua au loin une silhouette masculine. Celle-ci sembla le remarquer car elle s’arrêta dans ses activités, porta une main à se ceinture pour finalement la laisser retomber. Peu inquiété par ce geste, le Dunedain se laissa encore mener par sa monture aux flancs transpirant, et finit par arriver à hauteur de la silhouette, appartenant à un jeune homme semblant n'avoir pas moins de 20 ans.
« Bonjour... Vous cherchez la route pour aller à Lond Daer, peut-être ? »
Il n’avait même pas eu le temps d’ouvrir la bouche. Le jeune homme l’avait devancé. Toujours à cheval, Arador dévisagea un long moment le jeune fermier. Son visage lui laissait une drôle impression de déjà vu. Et pourtant il n’était pas sûr et certain d’avoir déjà séjourné ici. Quoique, peut-être sa mémoire lui jouait-elle des tours et que oui, il avait déjà fais une halte en ce lieu. Qu’importe. Ce visage lui était familier. Ses yeux fixant les traits du paysan encore un moment, un déclic se fit dans l’esprit du Dunedain. Il était déjà passé par cette ferme. Une fois. Et à l’époque, il venait pour des provisions. Oui cela lui revenait maintenant. C’était il y a presque dix ans, il lui sembla alors normal de ne pas avoir percuté de suite. Le jeune homme lui rappelait vaguement de par ses traits, le petit garçon de ses souvenirs. Quel changement alors, ces dix ans ayant complètement changé son corps…lorsque lui avait à peine pris de l’âge…Tel était le cadeau -empoissonné?- fait aux descendants de Numénor.
-Inutile. J’en connais déjà le chemin. Déclara d’un ton neutre et détaché le rôdeur du nord répondant à son salut d’un signe de tête.
Arador, du haut de se monture, sentit alors le regard du jeune homme glisser sur lui, inquisiteur. Il laissa faire, même si la politesse exigerait le contraire. Enfin il n’était pas le mieux placé pour en parler ici et maintenant. Aussi, lorsque les yeux du jeune garçon virent se poser sur son destrier, il choisit ce moment pour descendre de cheval. Retrouvant avec plaisir la terre ferme sous ses bottes, il passa une main amicale sur le flanc de son pur-sang, la retrouvant sans surprise moite de sueur. Il avait bien chevauché depuis le début de la semaine. Son repos serait bien mérité. Il aurait même droit à une pomme si l’occasion d’en acheter une se présentait. Aussi, la proposition que lui fit le jeune fermier lui tira un doux sourire. Il venait de tomber sur une belle âme. Charitable malgré son apparente pauvreté. Près à faire un geste sans qu’il n’ait rien eu à demander. Il manquait de gens comme lui dans ce monde. Pourtant il n’était pas certain d’accepter. Surement aurait-il plus besoin de cela que lui-même. Toutefois, ce n’était pas Asgar qui dirait non à cette eau et cette nourriture si généreusement proposée. D’ailleurs avant même que son maître ait ouvert la bouche il s'était avancé et avait déjà plongé sa tête dans l’eau, s’abreuvant à grande lampées.
- Cheval mal élevé ! rigola le Dunedain, s’exprimant en elfique à l’oreille de sa monture, lui ébouriffant la crinière pendant un instant.
Puis recentrant son attention sur le jeune paysan, Arador, remarqua de façon distraite –surement une habitude de bretteur ou alors était-ce une forme de paranoïa- que celui-ci semblait porter tout son poids sur une jambe, et qu’à sa ceinture était accrochée une dague. Néanmoins, il s’abstint de tout commentaire, détournant rapidement son regard, ne voulant pas se trouver pris sur le fait. Aussi remettant en ordre ses vêtements, puis fouillant dans une de ses poches, Arador tendit au jeune homme une pièce d’or, oubliant complètement qu'il était encore couvert d'une bonne couche du sang noir des orcs.
-J’apprécie votre générosité, jeune homme. Mais je ne puis vous priver de ces denrées sans une compensation aussi maigre soit-elle...
Dernière édition par Arador le Jeu 27 Fév 2014 - 17:30, édité 1 fois
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Sujet: Re: Quand il est temps de partir [Arador] [Terminé] Ven 7 Fév 2014 - 21:13
Quand il est temps
►Feat. Arador
Alensil avait attendu que la silhouette qui se détachait au loin n’arrive, avant de s'enquérir de la raison de sa venue. Selon toute probabilité ce devait être un voyageur qui cherchait sa route, c’est pourquoi ce fut ce qui sortit de sa bouche en premier. Cependant, l’inconnu se contenta de le dévisager avant d’annoncer qu’il n’avait pas besoin des indications, car il connaissait le chemin menant à Lond Daer. La réponse était solennelle et sans appel, la formulation lui faisant penser un instant que l’homme venait de le rembarrer. Ce qui était peut-être bien le cas, mais il ne pouvait pas vraiment lui en tenir rigueur : après tout, il n’était qu’un étranger et n’avait pas forcément à se mêler de ses affaires et de ses projets de route. Sa mère lui avait souvent fait des remontrances à ce sujet : il était bien trop curieux vis-à-vis de leurs visiteurs ! Sa leçon n’avait pas été retenue... En attendant, il n’empêchait que cet homme était chez lui (enfin, ce qui était encore gracieusement chez lui pour quelques dizaines d’heures) et il devait bien y avoir une raison à cela.
Lui aussi s’était permis de fixer le cavalier avant qu’il ne mette pied à terre, cherchant à mettre le doigt sur quelque chose qu’il ne parvenait pas vraiment à trouver. Son regard avait peut être été insistant, mais il n’entendait par là aucune offense, ni impolitesse. D’ailleurs, sa proposition suivante montra bien qu’il n’était pas en recherche d’une quelconque querelle. Les animaux pouvaient s’abreuver et se reposer s’ils le souhaitaient, voire même manger un peu. L’homme ne lui avait pas encore répondu que le cheval prenait déjà les devants pour accepter l’invitation à sa place. Cela fit sourire Alensil, même s’il ne pensa pas réellement que la bête pouvait avoir compris ce qu’il venait de dire. Il se permit de lui flatter l’encolure un instant avant de s’éloigner d’un nouveau pas pour laisser la place au cavalier qui semblait également trouver cela amusant. Cette faible distance ne l’empêcha pas d’entendre les quelques mots elfiques qui furent prononcés, sans qu’il ne puisse les comprendre néanmoins, mais cela suffit à éveiller son attention et de nouveau : sa curiosité. Lui, ne parlait que westron et n’avait pas encore eut la chance de poser ses yeux sur un elfe. Ce n’était pas faute d’y avoir rêvé très longtemps pourtant ! Les notes de son père faisaient état de forêts enchanteresses et de cités majestueuses dans lesquelles il s’égarait parfois en songes éveillés. Il y disait que la beauté de ce peuple était incomparable, et que leurs chants pouvaient vous transpercer l’âme. Auparavant, Alensil n’avait jamais pensé sérieusement qu’il puisse un jour rencontrer un représentant de cette race, encore moins voyager jusqu’aux portes d’une de leurs villes. Mais à présent il comptait bien remédier à cette lacune en prenant les devants.
Alensil observa l’homme fouiller dans sa poche pour lui donner une pièce en compensation de sa proposition. Cela lui parut être naturel et parfaitement logique : Arador ne pouvait après tout pas savoir que cela ne lui coûtait techniquement rien. Cependant, il haussa un sourcil en remarquant l’éclat doré de la monnaie qui lui était tendue. Ce n’était pas vraiment tous les jours que l’on pouvait voir ce genre de devise, et il en avait déjà reçu quelques heures à peine avant. Etait-ce là un signe ? Le destin appuyait-il sa décision de céder la ferme ? Que ce fut le cas ou non, il fut surtout gêné de recevoir une telle somme pour quelques lampées d’eau de pluie et du foin qui n’était même plus à lui, et cela pu sans nul doute se lire sur son visage.
« Ces denrées sont très loin d’équivaloir ce type de compensation, monsieur... »
Il se donnait l’impression de le voler, bien qu’à l’évidence il devait s’agir là d’un nanti qui n’était pas à une pièce près, malgré son apparence première. Il aurait bien dû s’en douter en voyant la qualité de sa monture et la façon dont il se tenait, cependant. Quoi qu’il en soit, il ne pouvait accepter cette pièce en ces termes. Considérant alors les curieuses taches noires qui couvraient son vis-à-vis et le fait qu’il allait passer un peu de temps à la ferme (au moins pendant que son cheval se reposerait et se nourrirait), il proposa :
« Peut-être puis-je vous offrir un bain, un couvert à notr- ma table et éventuellement un lit pour rendre la chose plus équitable ? »
Il avait dû se reprendre, tant habitué qu’il était à considérer la ferme comme le foyer qu’il partageait avec sa mère ; mais il était seul à présent, et le pluriel n’avait plus aucun sens. Tout comme le fait de rester. Mais ce n’était pas là le propos. Notons que le sang d’orc était quelque chose avait lequel il n’était pas le moins du monde familier, et il n’avait donc pas vraiment compris ce qu’était supposé être ce liquide noir poisseux. (Après tout, le sang ne pouvait être que rouge, comme le sien, n’est-il pas ?) Il ne s’agissait pas là de boue, ni d’encre à priori… Sa curiosité était quelque peu piquée et il finit par demander, en pointant du doigt une éclaboussure plus visible que les autres :
« Si je peux me permettre la question… Que vous est-il arrivé ? »
Peut-être serait-il rabroué pour toute réponse, mais il songeait que s’ils devaient passer quelques heures ensembles, autant qu’elles soient passées agréablement. La discussion faisait partie des menus plaisirs, et devait bien commencer quelque part. En outre, s’il pouvait apprendre une chose ou deux de son côté au passage c’était du bonus.
Dernière édition par Alensil Valronir le Sam 1 Mar 2014 - 20:10, édité 3 fois
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Sujet: Re: Quand il est temps de partir [Arador] [Terminé] Dim 9 Fév 2014 - 14:02
Je te connais non... ?
A lors qu’il regardait le jeune homme lui faisant face dans l’expectative qu’il accepte son don, Arador décela chez lui une certaine gêne. Il semblait troublé. Probablement par la nature de sa compensation, mais peut-être et avant tout par son simple geste. Le fermier avait haussé un sourcil incrédule devant la pièce de monnaie tendue vers lui, comme s’il était rare pour lui d’en voir de si près. Ce qui surement devait être le cas, le lieu ne se prêtant pas visiblement aux transactions d’argent. Une ferme à la périphérie d’une grande ville devait pourtant avoir une certaine affluence. Après il n’était pas expert en économie, mais peut-être que cette ferme ci avait mal géré sa production. Qu’en savait-il ? Lui n’était pas là pour dresser un bilan financier.
« Ces denrées sont très loin d’équivaloir ce type de compensation, monsieur... »
Souriant, et poli, le Dunedain prit la main du jeune homme et déposa sans mot la pièce de monnaie dans sa paume. Il ne prendrait pas le risque de provoquer une discussion là-dessus. Il sentait le garçon peu enclin à accepter son offrande pour une raison qu’il devinait. Si le foin et l’eau ne lui coutaient rien, il se sentirait mal d’accepter un argent n’ayant pas le gout de la sueur et du travail. Néanmoins, s’il le rémunérait pour cela, Arador remerciait aussi de par cette pièce sa courtoisie et sa bienveillance gratuite. Qu’il le prenne comme un cadeau, car à première vue il en avait bien besoin. Pas comme lui. Car bien que les rôdeurs ne soit pas des plus riches, ils avaient tout de même à leur disposition une réserve de monnaie à usage pratique. Des bourses bien comptées qu’ils pouvaient emmener –s’ils le désiraient- avec eux pour subvenir à leurs besoins et régler leurs frais de voyage à travers les différents royaumes. Arador lui encourageant à faire usage de cette possibilité, pour que ses hommes aient des moments de répits à l’abri des ombres et des créatures de la nuit. Ainsi ils pouvaient parfois se payer une chambre dans une auberge, un bon repas, et une réserve de provisions pour le retour à leur patrie. C’était tout ce qu’ils pouvaient, et se donnaient le droit de faire avec l’argent gagné par le labeur de leurs mères, de leurs épouses, et de leurs sœurs. Des femmes qui travaillaient pour les villes et villages des hommes ou cultivaient la terre afin de faire survivre leurs communauté. Chaque rôdeur ayant pour elles un respect considérable.
« Peut-être puis-je vous offrir un bain, un couvert à notr- ma table et éventuellement un lit pour rendre la chose plus équitable ? »
Considérant la chose, le Dunedain se prit à penser à la rencontre qu’il avait eu avec le jeune homme 10 ans plus tôt. Cheminant sur le vielle route du sud en direction du Rohan, non loin de Tharbad, le rodeur avait été stoppé par un groupe de voleurs alors qu’il traversait à cheval, le gué de la ville en ruine. Le plus âgé des larrons ne devant pas avoir au delà d’une vingtaine d’année. Des jeunes ouailles, surement orphelins, qui n’avaient trouvé que cela pour survivre. L’avaient-ils suivit tout du long, où attendaient-ils seulement qu’il ait atteint un endroit critique pour le surprendre et ainsi lui dérober ses biens. Peu importaient à l’époque. Arador s’était morigéné pour ne pas avoir pris au sérieux le sentiment qu’il avait eu d’être surveillé. A côté de lui, Anca aboyait méchamment, grognant des avertissements aux jeunes gens. Regardant droit dans les yeux celui semblant être le chef de la bande, Arador tenta à travers un regard mortel de lui faire comprendre qu’il n’hésiterait pas à faire couler le sang. Ce cheval, cette chienne, la nourriture qu’il transportait avec lui, ses vêtements, son épées, étaient siens et acquis de façon juste. Il ne se laisserait donc pas détrousser sans agir. Au final, après une altercation verbale, le rôdeur laissa la pitié s’immiscer dans son cœur, donnant aux jeunes gens de quoi se nourrir, puisant dans ses propres provisions. Lui pourrait trouver sur le route de quoi se sustenter, mais les plus jeunes d’entre eux, ne savait même pas tenir un couteau correctement…alors quant à parler de chasser. Rassasier, les jeunes le laissèrent repartir, le plus vieux de la bande le remerciant à demi-mot pour son geste.
Reprenant sa route, traversa la Gwathlò, Arador se demanda s’il avait bien fait. Il se trouvait sans nourriture, et la ville la plus proche était à plusieurs jours de cheval. Cette région de la terre du milieu étant désertée par l’homme. Mais aussi il aurait peut-être mieux fait d’apprendre à ces jeunes deux trois techniques de survie. Car il vaut mieux apprendre à un affamé à pêcher que de lui donner du poisson. Enfin le mal était fait, désormais il devait se préoccuper de sa propre survie, les plaines de l’Enedwhaith n’étant pas particulièrement réputées pour leurs proliférations d’animaux comestibles. Non plus pour la présence de forêt où se cacher. Il serait donc constamment à découvert. Mais finalement, le voyage ne s’était pas si mal déroulé. Et au bout d’une semaine de chevauchée, il avait finit par atteindre les abords d’un cité portuaire. Lond Daer. Là bas, il avait cherché partout à pouvoir faire des provisions à moindre cout, et finit par atterrir dans cette même ferme où résidaient un petit garçon et sa mère.
Tiens d’ailleurs où était donc la mère, il n’avait pas encore eu le plaisir de l’apercevoir. Plaisir qui ne serait surement pas partagé, la femme n’appréciant que peu les vagabonds de son espèce, d’après ce qu’il avait put comprendre. Toutefois il ne risquait pas de refuser une offre aussi aimable pour ce petit détail.
-Vous êtes trop bon jeune homme. Je n’en demande pas autant de votre part…mais si vous insistez je ne refuserais point.
Inclinant sa tête en signe de reconnaissance, Arador posa une main chaleureuse sur l’épaule du garçon, un sourire lumineux éclairant son visage noble. Il ne se pensait pas aussi chanceux. Si tout continuait en ce sens, il n’aurait pas besoin de dépenser trop d’argent en ville. Et puis peut-être le jeune homme se révélerait de bonne compagnie. Enfin…s’il restait assez longtemps pour s’en faire une connaissance. Après tout il avait encore des obligations lui interdisant de s’attarder de trop, comme le lui rappela le doigt curieux du fermier, pointa une tache sombre sur son vêtement.
« Si je peux me permettre la question… Que vous est-il arrivé ? »
Son regard déviant vers la zone désignée, Arador sentit sa jovialité se refroidir légèrement. Il n’avait pas l’intention d’alarmer le paysan avec le récit de son chasse à l’orc, ou encore la description de ses exploit guerriers. Aussi il fit un geste nonchalant de la main comme pour chasser une mouche persistante. Son ton toujours agréable, il répondit brièvement à la question du fermier.
-Un geste brusque, une main qui saute, de l’encre éclaboussée. Les petits accidents qui peuvent arriver à ceux qui composent les vers de poèmes comptant les hauts faits de l’histoire. Rien de bien méchant, mes avis. Déclara-t-il, ne trichant qu’à moitié.
Usant de métaphores et de mots en cachant d’autre, le rôdeur se donnait bonne conscience. Il ne mentait pas, il avait bien était victime des gestes brusque des orcs, avait bien fait sauté quelques mains, et s’était vu éclaboussé d’encre noirâtre à l’odeur nauséabonde. Et pour sûr dès lors qu’il retournait dans le Nord, il consignait les récits de ses voyages, comme pour garder une trace du passage dans ce monde de son peuple proche de l’extinction. Et tout ceci, Arador considérait que le jeune homme n’avait nul besoin de le savoir. Qu’il conserve encore un semblant d’innocence.
-Aussi je pense qu’il serait désormais plus important que nous nous présentions n’êtes vous pas d’accord ? s’écria avec vigueur le septuagénaire, sa main calleuse –conséquences d’un usage fréquent de l’arc et l’épée- tendue vers le campagnard…Mon nom est Arador fils d’Argonui, ravi d'être tombé sur vous ce jour!
Faisant franc jeu pour la première fois depuis bien longtemps, le rôdeur se présenta sous son nom véritable au garçon. Chose rare. Il se sentait un peu mis à nu maintenant, trop habitué à se masquer derrière ses différents surnoms, les seules personnes habilitées à le nommer par son prénom étant celles faisant partie de son cercle de proches. Aussi il ne savait pas trop s’il devait regretter ou pas ce geste de confiance que le jeune ne comprendrait surement pas. Mais ce qui était fait était fait.
Dernière édition par Arador le Jeu 27 Fév 2014 - 17:32, édité 1 fois
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Sujet: Re: Quand il est temps de partir [Arador] [Terminé] Lun 10 Fév 2014 - 17:48
Quand il est temps
►Feat. Arador
Ce n’était pas tant qu’il n’était pas habitué aux transactions financières. Simplement, sa mère et lui étaient généralement rémunérés par des pièces de moindre valeur comparées à cet or qu’on lui tendait à l’instant. Certes, il y avait eu un peu de labeur pour le coupage et la mise en balle du foin quelques mois plus tôt, mais ils n’en avait que faire à présent. Ainsi donc, il se sentit obligé de faire remarquer au voyageur que cette pièce était trop précieuse pour ce qu’il lui offrait en échange. Il ne trouvait pas cela très juste d’accepter un tel don en échange de quelque chose qui ne lui coûtait rien. L’homme refusa cependant toute discussion, glissant la monnaie dans sa main sans sembler vouloir en entendre davantage. Mais cela n’allait pas. Il n’était pas habitué à être payé par simple gaieté de coeur, sans avoir à lever le doigt et cela le mettait mal à l’aise. Alensil proposa donc d’équilibrer l’échange en ajoutant quelques services à la liste déjà énoncée, pour se rendre plus serein. Le voyageur parut alors entendre raison, ce qui le soulagea :
-Vous êtes trop bon jeune homme. Je n’en demande pas autant de votre part… mais si vous insistez je ne refuserais point. « Dans ce cas, je me permets d’insister. » répondit-il en hochant fermement la tête avec un sourire, ne comptant pas non plus revenir sur sa position. Seulement alors, il glissa son dû dans sa poche en estimant l’avoir gagné.
Il accepta le geste amical de l’inconnu sans y lire quoi que ce soit d’autre qu’une acceptation de ses termes. Il n’avait pas une grande éducation, ni beaucoup de bonnes manières et les contacts physiques ne le rebutaient pas plus que ça, lui semblant parfaitement normaux. Les journaliers qui venaient aider à la ferme en haute saison étaient généralement des types que le contact fraternel ne rebutait pas le moins du monde et il avait été baigné là-dedans depuis tout petit. Tout cela prenait bonne tournure, et Alensil se permit enfin de laisser libre court à une partie de sa curiosité pour demander des précisions quant aux étranges tâches peu ragoûtantes qui recouvraient l’homme. Celui-ci répondit d’un ton agréable, mais la réponse l’était cependant un peu moins au sens du fermier :
- Un geste brusque, une main qui saute, de l’encre éclaboussée. Les petits accidents qui peuvent arriver à ceux qui composent les vers de poèmes comptant les hauts faits de l’histoire. Rien de bien méchant, m’est avis.
La déclaration le laissait en effet perplexe. Il avait beau manquer de culture et ne connaître que peu de choses de ce monde, il n’était pas totalement sot. Ainsi donc, il avait parfaitement saisi qu’il ne s’agissait pas ici d’encre dès le premier regard, et c’était justement ce qui avait déclenché sa question en premier lieu. Il n’appréciait que moyennement qu’on lui mente en règle générale, mais Arador exacerba cette irritation en lui donnant l’impression qu’il le prenait ouvertement pour un joyeux imbécile. Il aurait de loin préféré qu’on lui oppose un refus de réponse pur et simple.
« Si mes questions vous gênent, n’hésitez pas à me le dire. J’en ai l’habitude et cela sera hautement préférable à des fables. »
Le jeune homme avait été très franc mais sur un ton qui restait parfaitement cordial, malgré son léger agacement intérieur. Le message n’en était pas moins clair : il préférait que l’on joue cartes sur table avec lui, plutôt que de devoir écouter d’éventuelles sottises toutes la soirée. Il tourna la tête un instant, le caquètement des poules attirant son attention comme il se faisait plus violent alors que deux d’entre elles semblaient se battre pour un ver de terre. Mais il reporta de nouveau son regard sombre, héritage paternel, sur celui qu’il avait en face de lui alors que ce dernier reprenait la parole.
- Aussi je pense qu’il serait désormais plus important que nous nous présentions n’êtes vous pas d’accord ?
L’homme lui avait tendu sa main avec grande énergie, afin de sceller des présentations qui en effet, venaient probablement à point. Pouvoir mettre un nom sur un visage était tout de même commode, surtout s’ils prévoyaient de discuter encore dans la soirée. Le jeune fermier lui serra la poigne, avec fermeté et sens, sa main faisant elle aussi le miroir d’un homme habitué au travail physique. Cependant, elle s’immobilisa à mi-parcours de la secousse en entendant la suite :
- Mon nom est Arador fils d’Argonui, ravi d'être tombé sur vous ce jour! « Je suis Alensil Valronir.... » commença-t-il de manière courtoise, bien que l’agacement pointait dans sa voix.
Il ne précisa pas quelle était l'appellation de son père, considérant que la valeur d’une vie, quelle qu’elle soit, ne reposait ni sur les mérites ni sur les fautes de celui ou celle qui lui avait donné naissance. Il n’avait pas fini de s’exprimer cependant, et continua pour dévoiler le fond de sa pensée. En effet, là où Arador avait décidé de jouer franc jeu, Alensil ne pouvais cependant y lire qu’un nouveau mensonge :
« ...Ai-je vraiment l’air si crédule, ou trouvez-vous simplement divertissant de vous moquer des petites gens ? »
La tête légèrement penchée sur le côté, une expression de contrariété pouvait se lire distinctement sur son visage. Si le second nom ne lui disait rien du tout, il connaissait celui d’Arador car il était inscrit sur les feuillets laissés par son père. Et même s’il ne savait pas exactement qui était supposé être cette personne, il avait bien compris que ce devait être un chef relativement haut placé parmi les rôdeurs. Les notes ne mentionnaient que deux missions qui avaient été appointées directement par lui, mais il transpirait de cette prose qu’il ne s’agissait pas là de faits exceptionnels. Ainsi, son père répondait manifestement aux ordres du véritable Arador, en son temps. Et on voulait lui faire croire que cette figure de haut rang venait de passer dans sa petite ferme ? Même si l’homme qu’il avait sous les yeux avait effectivement une démarche et un parlé noble, sans mentionner sa bourse, Alensil ne pouvait décemment y croire. D’autant plus quand il venait déjà de lui mentir ouvertement une première fois.
« Vos facéties de m’amusent guère. »
Dernière édition par Alensil Valronir le Sam 1 Mar 2014 - 20:09, édité 3 fois
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Sujet: Re: Quand il est temps de partir [Arador] [Terminé] Mer 12 Fév 2014 - 15:51
La vérité si je mens...
« Si mes questions vous gênent, n’hésitez pas à me le dire. J’en ai l’habitude et cela sera hautement préférable à des fables. »
Marquant un temps d’arrêt le jeune Dunedain haussa un sourcil défiant à ces mots. Prononcés avec un semblant de cordialité, ils n’en restaient pas moins dans le fond, agacés, pour qui savait les écouter. Et Arador les écouta attentivement, sentant monter en lui une pointe de confusion. Son regard vrilla celui-ci du jeune homme, cherchant dans ses prunelles sombre, une réponse quelconque. Pourquoi n’avait-il pas accepté à ses paroles ? Mentait-il si mal ? se questionna avec une pointe d’amusement le rôdeur, venant de se faire corriger. Arador savait que son attitude n’était pas des plus honnêtes. Mentir, cacher, nier les choses étaient pourtant devenu chez lui comme une seconde nature. Inconsciemment peut-être cherchait-il à se protéger. Mais de quoi ? Il ne le savait pas lui-même. C’était désormais tellement habituel, qu’il ne s’en souciait plus vraiment. Et lorsqu’il le faisait, il ne pouvait s’empêcher de se demander « quand ? ». Depuis quand est-il devenu si lâche et hypocrite ? Depuis combien de temps cache-t-il constamment la vérité à ceux qui le côtoient? Mais là non plus, il n’avait aucune réponse à ses questions. Ou alors peut-être ne voulait-il pas les voir. Ce serait admettre trop de faiblesse qu’il ne pourrait en supporter. Et il devait rester fort.
« Je suis Alensil Valronir.... »
Le dunedain hocha la tête en signe de reconnaissance. Il marqua ce nom dans un coin de son esprit, sentant que son importance croîtrait probablement dans les temps à venir. C’était en tout cas ce que lui soufflait son instinct . Et s’il y avait bien une chose qu’il ne refoulerait jamais au fond de lui-même, c’était bien cela. Cette sensibilité à l’égard des choses, qui ne lui faisait jamais faut bon. Un don que nombres de gens avaient loués. Toutefois à la suite de cette présentation, Alensil puisque c’était son nom, ajouta une phrase qui tira un froncement de sourcil contrarié à l’homme du nord.
« ...Ai-je vraiment l’air si crédule, ou trouvez-vous simplement divertissant de vous moquer des petites gens ? »
Haussant des sourcils étonnés à cette accusation, Arador les fronça tout aussi vite, son début d’agacement lui aussi bien visible. Il n’admettait que très peu l’insolence et l’irrespect. Jamais à un âge aussi précoce, il ne se serait permis de s’adresser ainsi à un senior. Car même si il n’en avait pas l’air physiquement, Arador aurait largement put être le père, voir le grand père de ce jeune daguet effronté. Et de par son statut de chef, il était désormais accoutumé à plus de déférence et de respect. Il pourrait demander pourquoi un tel traitement lui était administré…réclamer des excuses, mais il ne le ferait pas. Ce serait disproportionné, pour la vexation subie. Après quelques secondes de réflexion, optant pour une autre approche avec le paysan, il garda le silence, se contentant d’afficher une posture humble. Il ne ferait pas la même erreur deux fois. Prendre le jeune homme de haut ne ferait qu’augmenter son indignation.
« Vos facéties de m’amusent guère. »
Alors là…le rôdeur ne comprenait plus rien. Autant il pouvait concevoir que son jeu de mots au sujet des tâches sur ses habits, ait été dévoilé et peu apprécié. Autant il ne comprenait, ni n’approuvait cette soudaine humeur revêche. Certes il avait menti. Et ? Aurait-il presque envie de dire. Ce n’était pas un crime. Inutile d’en faire un drame. Il n’avait fait du mal à personne. Si le garçon était vexé de ne pas être mis au courant de sa récente activité qu’il s’en plaigne d’autres. Arador ne lui devait rien du tout ! D’autant qu’il était qu’un jeune fermier. Bien plus jeune que son propre fils. Qui lui, ne s’essaierait pas à avoir cette attitude envers lui car il pourrait aisément lui faire regretter ses mots.
S’il écoutait la petite voix pernicieuse soufflant dans son esprit, le Dunedain prendrait grand plaisir à corriger le franc parlé du paysan. S’il écoutait ce côté sombre et orgueilleux de lui-même, il mettrait à mal toutes ses convictions, tous ses principes, et agirait comme un petit bourgeois de basse-cour. Aussi il ne ferait rien. Il prendrait sur lui, repousserait cette envie aussi soudaine que malsaine. Il valait bien mieux. Si il s’emportait pour une simple rebuffade, quel genre de chef était-il alors ? A quoi aurait donc servi son éducation ? Quel regard porterait-il sur lui-même après ça ? Non il valait mieux rester calme et ferme, humble et généreux. Sinon il risquait de faire quelque chose qu’il regretterait amèrement. Et puis ce ne serait pas lui.
Aussi, c’est avec sagesse et délicatesse qu’il tenta de désamorcer un possible conflit. Et les mots auxquels il pensait, bien que simples et communs, tendaient à lui écorcher la bouche. Oui décidément il était devenu bien orgueilleux pour qu’un simple pardon soit à ce point imprononçable par ses lèvres fines. S’étonnant lui-même de cette difficulté, fronçant à de nombreuses reprises ses sourcils, s’énervant contre lui-même pour cette immense faiblesse, le Rôdeur souffla fortement avant de prendre une inspiration profonde. Il fallait que ça sorte. Ce n’était pas possible que son esprit soit devenu à ce point borné et arrogant. Il ne l’acceptait pas. Toujours en conflit avec lui-même, Arador se détourna son regard du visage curieux de l’impudent fermier. Celui-ci la tête penchée dans l’expectative d’une réponse, semblait ne pas croire une seule seconde aux paroles du Dunedain. Même alors que celui-ci venait de lui révéler dans un effort de vérité, son nom et son ascendance, chose qu’il ne faisait jamais. Vexé, presque blessé par ce dédain lui étant adressé Arador passa une main sur son visage, le cachant momentanément pour y apposer un masque de marbre. Il ne pouvait être affecté par ces paroles. Pas à cause de lui. Une fermier ne savant rien de lui. Ce n’était qu’un moment de faiblesse, cela passerait. Il voudrait bien s’en convaincre.
-Surveillez votre ton jeune homme ! Pensez vous réellement que je sois en train de me gausser de vous ? S’exprima le seigneur des Dunedains d’une voix ferme et grave, néanmoins calme et réfléchie. Certes, il en avait suffisamment entendu. Il ne laisserait pas le garçon allez plus loin dans ses récriminations. Mais inutile d’hausser le ton. A ses côtés, Anca sa chienne grondait déjà suffisamment, ses babines retroussées dans un rictus menaçant, pour qu’il n’en rajoute point.
Dévisageant Alensil, comme il réfléchissait à ses actes, Arador ôta son ceinturon d’où pendait sa lame, le posant précautionneusement au sol appuyé sur l’abreuvoir où Asgar s’hydratait encore. Ôtant sa cape, il la lança sur la selle de sa monture. Se délaissant de sa dague, ainsi que de son arc et ses flèches, il se retrouva enfin avec pour unique protection que son gilet de cuir caché sous sa tenue de rôdeurs. Ainsi il se sentit nu. C’était une sensation bien étrange. Inhabituelle, presque angoissante. Mais il ne craignait rien…non ?
-Je n’ai pas menti. Croyez-moi ou non…cela vous regarde. Honorez simplement notre accord…. Et je reprendrais ma route.
Il était déçu. Il se serait attendu à quelque chose d’autre du paysan. Quoi ? Il ne savait pas vraiment. Et c’était peut-être ç) son problème. Il ne savait pas vraiment ce qu’il voulait du jeune homme, et cela le perturbait maintenant qu’il y pensait.
Dernière édition par Arador le Jeu 27 Fév 2014 - 17:40, édité 2 fois
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Sujet: Re: Quand il est temps de partir [Arador] [Terminé] Jeu 13 Fév 2014 - 11:26
Quand il est temps
►Feat. Arador
Non, Alensil n’était pas amusé le moins du monde, et il semblait que l’agacement était un élan contagieux, puisqu’il ne tarda pas à aller infecter le voyageur qui se tenait face à lui. Celui-là même qui lui avait menti une première fois en le prenant pour le dernier des sots, le genre d’insultes qu’il n’appréciait pas du tout, avant de se présenter sous un patronyme qui ne pouvait décemment être le sien. Le fermier n’avait pas pu se retenir, et, bien qu’il estimait être resté tout à fait poli dans ses propos, exigeait des explications et des excuses pour un tel comportement à son égard, se sentant offensé. Ce n’était pas parce qu’il vivait à la ferme que l’on pouvait se jouer ainsi de lui. Mais ce qu’il attendait de la part de l’inconnu… ne vint jamais. Il insista donc, n’étant pas prêt à accepter le silence comme seule réponse. Patient, il observait le voyageur, attendant, la tête toujours penchée de côté pour marquer le fait même qu’il restait dans l’expectative. L’homme d’abord agacé sembla tomber des nues avant qu’une lueur agressive ne passe dans son regard. Cela n’échappa pas à Alensil, qui ne se retint de toucher à sa dague que parce qu’il avait déjà vérifié sa présence quand il avait vu l’étranger approcher sur la route. Finalement, l’autre prit une grande inspiration, comme pour se calmer, et se passa la main sur le visage un bref instant. Son effort sembla marcher puisque sa face était à présent de nouveau neutre et calme. Mais peut-être ne s’agissait-il là que d’un masque ?
-Surveillez votre ton jeune homme ! Pensez vous réellement que je sois en train de me gausser de vous ?
C’était effectivement le cas, il le pensait, sinon il n’aurait pas prononcé de telles paroles en premier lieu ; mais le timbre donné à l’interrogation l’amena à remettre ses pensées précédentes en question. Il restait néanmoins tout simplement impensable que ce -jeune !- homme soit le même que celui qui était mentionné dans les écrits de son père. Il le voyait tellement plus âgé… La chienne du voyageur se mit soudain à grogner pour faire écho à la colère de son maître, qui pourtant restait calme et posé. En un sens, digne malgré l’humeur qui le tenaillait visiblement. L’attention d’Alensil se tourna dès lors vers l’animal, tentant d’évaluer un instant s’il risquait ou non de lui sauter dessus. Il n’avait jusqu’alors jamais été confronté à un chien menaçant, son fidèle ami d’antan ayant toujours été très affectueux avec tout le monde. Cependant, cette concentration momentanée fut rapidement éclatée lorsqu’il vit du coin de l’oeil l’homme porter la main à sa ceinture : dans les précédentes minutes, il n’avait pas manquer de repérer l’épée qui y pendait. Le canidé n’était peut-être qu’un danger trompeur dans l’affaire, et Alensil eut un mouvement de recul automatique face à ce geste qu’il ne pouvait voir que comme agressif. Il avait bien lu l’envie d’en venir aux mains dans les yeux sombres du voyageur juste avant ; à présent, il allait sans le moindre doute défourailler sa lame et mettre cette pulsion à exécution. Le fermier n’eut pas vraiment le loisir de reculer de plus d’un pas, tapant aussitôt dans l’abreuvoir de pierre juste derrière lui dans un moment peu glorieux, avant de se hâter de sortir sa dague d’un mouvement qui, lui, était fluide et déterminé. Il songea un instant que s’il devait périr, alors ainsi soit-il : ce serait finalement son destin que de ne jamais quitter sa première demeure. Mais il ne comptait pas se laisser abattre sans se défendre avant.
Mais contre toute attente, l’inconnu déposa alors son arme à terre, et entreprit de se défaire de plusieurs autres ainsi que de sa cape. Alensil ne put que le regarder faire, extrêmement confus, sa dague toujours à la main. Que lui faisait-il donc là ?? Se mettait-il à l’aise pour pouvoir se battre aux poings, ou même en duel ? Mais il n’avait pas son épée sur lui et rien ne disait qu’il en avait seulement une. C’était… fort étrange et perturbant. Le garçon resta interdit, ne sachant pas le moins du monde comment prendre ce geste. Peut-être était-ce là une lubie de gens nobles qu’il ne connaissait pas ? Le voyageur s’exprima alors de nouveau, son regard fiché sur lui.
-Je n’ai pas menti. Croyez-moi ou non…cela vous regarde. Honorez simplement notre accord…. Et je reprendrais ma route.
Il y eut comme un flottement. Il y avait toujours, à son sens, comme une tension dans l’air malgré ce qui était à présent un évident geste de paix à son encontre. Alensil dévisagea à son tour l’homme ainsi symboliquement mis à nu devant lui, et rangea finalement sa dague, avant de se racler la gorge, quelque peu mal à l’aise. Était-il réellement qui il clamait être ? Le paysan en doutait toujours mais le voyageur semblait réellement sincère et il restait aussi la possibilité ténue mais simple que l’homme portait le même nom qu’un autre. Finalement, le paysan hocha la tête, reprenant d’une voix plus posée que précédemment, bien qu’elle restait ferme :
« Je suis un homme de parole, ma proposition sera tenue. »
Hey, il ne serait pas dit qu’il n’avait pas d’honneur en plus du reste à présent ! Le premier outrage était suffisant… Il prit à son tour une profonde inspiration, presque un soupir, avant de désigner d’un coup de menton l’attirail qui venait d’être ôté.
« Je vous en prie, reprenez vos affaires... »
Il doutait fort que l’homme souhaiterait attenter à sa vie alors qu’il avait de lui-même retiré toute arme de sa portée et il ne pouvait lui demander de laisser tout cela à même le sol. Alensil flatta doucement l’encolure du cheval qui était resté parfaitement calme pendant tout ce temps, puis esquissa quelques pas vers la maison en faisant un geste à l’adresse d’Arador.
« Suivez-moi quand vous serez prêt. »
Il marchait plutôt lentement, en effectuant de petit pas tranquilles. C’était le genre de démarche qui donne à un homme un aspect proprement nonchalant et rêveur. Le voyageur pourrait y lire ce qu’il y voudrait, un signe d’apaisement peut-être, mais Alensil avait souvent cette allure lorsqu’il cherchait à masquer au maximum son boitement, n’aimant guère le regard que les inconnus portait sur lui lorsqu’il se déplaçait normalement. Il poussa la porte grinçante de la demeure et la laissa ouverte en guise d’invitation claire, se mettant déjà à l’oeuvre pour tenir le marché qui avait été passé en mettant de l’eau à chauffer pour le bain de son invité. Quand ce dernier passa le seuil à son tour, Alensil le regarda un instant avant de lui désigner le fond de la grande pièce, à gauche. Il y avait là trois petits lits d’un certain âge disposés contre le mur en bois. Un sac de voyage reposait contre l’un d’eux, le seul qui disposait d’un meuble faisant office de commode et de table de nuit, et sur lequel reposaient notamment des figurines de bois pour petit garçon ainsi qu’une épaisse liasse de papiers vieillis et griffonnés.
« Vous pouvez prendre un des lits libres. »
S’il était effectivement l’Arador dont il avait entendu le nom, alors plusieurs questions brûlaient les lèvres du jeune homme. Mais il n’était pas certain qu’elles soient bien reçues et il préféra refréner sa curiosité… pour le moment. Le voyageur était bien trop jeune pour être celui qu’il pensait, mais Alensil n’était finalement pas contre l’idée, car cela lui aurait permis d’avoir enfin des réponses quant à certaines choses. Sa mère avait toujours refusé de lui transmettre plus que le strict nécessaire au sujet de son père, comme si elle craignait qu’il ne désire partir sur ses traces, et la perspective d’en savoir finalement davantage était somme toute excitante.
Dernière édition par Alensil Valronir le Sam 1 Mar 2014 - 20:09, édité 2 fois
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Sujet: Re: Quand il est temps de partir [Arador] [Terminé] Ven 14 Fév 2014 - 20:20
La curiosité est un vilain défaut
L orsqu’Alensil avait eu un mouvement de recul heurtant l’abreuvoir en pierre où Asgar se désaltérait, semblant craindre un accès de violence, la rôdeurs n’avait put retenir un petit rire. Cette maladresse était rafraichissante. Bien que son origine soit bien moins innocente. Le fermier craignait pour son intégrité physique. Il craignant d’être attaqué. Il craignait Arador en quelques sortes. Celui-ci, son hilarité passée, s’était morigéné mentalement de l’appréhension à son égard… Dans son esprit, le Dunedain ne put s’empêcher de se poser quelques questions sur le fermier. Avait-il déjà tenue une arme en main ? Arador avait bien remarqué la dague coincée dans la ceinture d’Alensil, mais savait-il seulement s’en servir ? Combien de combats avait-il déjà mené ? Probablement bien peu. Il paraissait redouter un geste brusque de sa part. Pourtant il n’avait aucune intention de le frapper. Bien au contraire, il se désarmait pour lui prouver sa bonne fois et mettre entre eux un étrange pied d’égalité.
Toutefois le jeune homme ne sembla comprendre son action ainsi et dans un mouvement résolu tira sa dague, la pointant vers lui. Son regard farouche trahissait sa détermination à ne pas se laisser approcher. Aussi Arador ne savait pas exactement ce qu’il pouvait bien croire en le menaçant ainsi. A quoi pensait-il ? Etait-il donc à ce point effrayé ? Pour le Dunedain ce geste ne représentait rien de plus qu’une perte de contrôle. D’une erreur de jugement. Malheureuse et irréfléchie. Car même désarmé, le rôdeur restait en mesure de se défendre à main nue contre une menace aussi infantile. Croyait-il qu’Arador allait le tuer ? Que pour de simple paroles, sommes toutes insolente mais loin de mériter du sang versé, il allait perdre toute retenue et le transpercer. Peu de chances que cela arrive. Il pourrait s’énerver, grogner, se renfrogner, mais, jamais Arador ne lèverait la main sur le jeune garçon inconnu. Surtout que celui-ci ne lui avait rien fait, si l’on oubliait ses paroles effrontées.
Heureusement, le garçon sembla comprendre que l’adulte ne lui ferait absolument rien. Et c’est interdit, qu’il le regarda terminer d’ôter ses armes et sa cape, un silence incertain flottant entre eux. Lorsqu’il lui énonça ses conclusions, Arador sentit le jeune homme hésiter. Puis ranger son arme, reprenant contenance dans un toussotement gêné. Il s’était emballé, chose compréhensible pour son jeune âge. Arador lui-même avait été du genre à se montrer impulsif plus jeune, prenant injure d’un rien. D’autant plus lorsqu’un probable danger s’approchait de trop prêt. Aussi, au vue de cela, il n’en voudrait pas au paysan de s’être comporté ainsi. Désormais Alensil semblait avoir reprit son calme et après quelques instant de tensions, s’adressa à lui en ces mots.
« Je suis un homme de parole, ma proposition sera tenue. » « Je vous en prie, reprenez vos affaires... »
Le fermier lui désigna du menton ses affaires, le rôdeur suivant son regard, acquiesça silencieusement. Quelques secondes de latence, puis l’hériter d’Isildur récupéra son épée, et commença à se revêtir de ses armes, retrouvant avec bonheur le sentiment protection inconscient qu’elles lui procuraient. Jamais il ne l’avouerait, mais sans elles, il se sentait quelque peu dénudé, vulnérable. Comme le serait chaque guerrier solitaire. Ainsi, s’en séparer était pour lui réellement une preuve et un symbole de sincérité nue. Il ne s’attendait pas à ce que le jeune homme comprenne son geste…qu’il l’accepte serait déjà une belle avancée. Arador étant une personne n’expliquant que très rarement le pourquoi de ses actes.
« Suivez-moi quand vous serez prêt. »
Il faisait confiance au garçon pour faire ce qu’il avait promis. Après tout ce n’était pas grand-chose. Même si il n’était pas certain que le fermier imagine la quantité de nourriture que pouvait avaler le pur-sang dont il avait caressé l’encolure sous le regard étonné, voir perplexe de son propriétaire. Il était connu au Rohan que l’animal ne se laissait approcher que par le rôdeur, n’acceptant d’être touché que par lui… et le voir ainsi immobile sous la main du paysan éveilla chez Arador une pointe de contrariété. Un sentiment de possessivité s’emparant de lui alors. Un travers qu’il fit en sorte de réprimer fermement. Ses mains terminant d’harnacher son barda, il jeta un regard insistant au jeune homme se dirigeant maintenant vers son humble demeure.
Dans sa tête, il nota l’étrange démarche du jeune homme, celui-ci marchant d’un pas lent et posé, dénotant à première vue une personne flegmatique un tantinet pensive. Loin du caractère que lui avait montré Alensil peu de temps auparavant. Cela lui mit la puce à l’oreille et déclencha chez lui un questionnement sur ce que le jeune homme tentait de faire en changea constamment d’attitude et de posture devant lui, selon les moments. Aurait-il un esprit double ? Serait-il malade ? Des questions sans réponses. Aussi, Arador le suivit sans piper mots sur les pensées agitant son esprit.
Passant la porte laissée entrouverte pour lui, il pénétra dans la demeure du garçon. Modeste, un peu petite, mais propre. Il ne demandait rien de plus. Alensil, lui s’affairait déjà à mettre en branle les modalités de son contrat. Faisant couler de l’eau dans un bac, pour ensuite la faire chauffer, en vue de son bain. Le rôdeurs fit un rapide tour de la pièce dans laquelle il avait pénétré. Sentant sur lui un regard, Arador tourna ses yeux alertes vers son hôte, celui-ci le dirigeant de la main sans mots, vers le fond de la pièce pièce. Le rôdeur y jeta un coup d’œil, découvrant trois petits lits usés, semblant avoir bien vécus, posés contre un mur en bois. Un sac de voyage était appuyé contre l’une des couchettes, celle disposant d’un meuble faisant office de commode et de table de nuit. Une table de nuit sur laquelle reposaient notamment des figurines de bois pour petit garçon ainsi qu’une épaisse liasse de papiers vieillis et griffonnés. Son regard parcouru les lieux se familiarisant avec la pièce et ses composants, cherchant à les mémoriser, et percer leurs secrets. Il toucha et manipula chaque objet, comme pour analyser ce qu’il voyait et sentait sous ses doigts. Déformation professionnelle pourrait-il dire.
« Vous pouvez prendre un des lits libres. »
Hochant distraitement la tête, lançant un merci dans l'air, Arador continua son inspection. Finalement, ce fut sur la liasse de papier griffonnée qu’il se stoppa, sa curiosité attisée par l’écriture hâtive maculant ces pages. Arrêtant ses investigations, il jeta un regard en arrière pour s’assurer que son jeune hôte était occupé, et, bien que se sentant coupable d’ingérence dans une vie au tracé bien différent de la sienne, il prit entre ses mains les écrits jaunis par le temps. Incapable de faire taire sa curiosité insatiable. De sa lecture en diagonale, il comprit rapidement que ces feuillets étaient en réalité des lettres privées. Prit d’un soudain remord, il fut tenté de les reposer, mais son instinct le poussa à continuer ses découvertes, les mots défilant sous son regard éveillant en lui quelques souvenirs. Poursuivant sa lecture, il buta sur son nom à plusieurs reprises, ne comprenant pas encore vraiment ce qu’il y faisait. Cependant au bout de la deuxième feuille sortie dans le désordre, il découvrit de qui étaient ces lettres, et en quoi se résumait leur contenu. Et il ne savait pas si c’était pour lui déplaire ou non.
Sentant monter en lui un étrange sentiment d’excitation et d’enthousiasme mêlé à une certaine contrariété, il ne put retenir les sourires ou les froncements de sourcils, qui lui venaient parfois en lisant les mots du père à son fils. Des mots d’excuses. Des mots de réconfort. Des mots d’amitié d’un père à son fils. Un fils se trouvant justement dans la pièce d’à côté en train de lui préparer une bonne nuit de repos. Ces lettres lui rappelaient celles que lui-même et son père s’échangeaient et à l’intérieur desquelles Argonui lui faisait par de ses voyages, des combats qu’il menait en vainqueur contre les orques, et tant de choses encore…c’était il y a si longtemps. Arador sentit sa gorge se nouer en repensant à son propre père. Cela allait faire bientôt quarante ans qu’il était mort…mais la blessure était mal cicatrisé et éveillait toujours en lui des souvenirs douloureux.
La liasse de feuilles toujours en main, il réfléchissait. Il n’était pas encore satisfait de sa lecture. Quelques éléments manquaient. Et seule une personne pouvait effacer ces zones d’ombre. Bon gré ou mal gré lui le jeune homme parlerait, cela Arador n’en avait cure. Il lui fallait savoir ce que le jeune homme avait appris de ces missives contenant malgré elles des informations qu’il ne voulait pas voir se balader perdues dans la nature. A la portée de n’importe qui. Entre les mains d’un jeune fermier.
Un bruit survenant derrière lui, Arador pensa à reposer dans un geste vif les lettres à leur emplacement d’origine. Trop tard ou bien ? De toute façon le mal était fait, son regard n’aurait plus la même intensité lorsqu’il regarderait le jeune Alensil. Sachant désormais qu’un des ses hommes, un rôdeur du nord, son père, lui avait écrit. Faisant ainsi de lui, un des leurs…en tout cas dans l’esprit d’Arador.
Dernière édition par Arador le Mer 19 Mar 2014 - 12:30, édité 6 fois
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Sujet: Re: Quand il est temps de partir [Arador] [Terminé] Mar 18 Fév 2014 - 10:45
Quand il est temps
►Feat. Arador
Tout à ses pensées, Alensil pénétra dans la maison de son pas flegmatique caractéristique de certains jours et commença à préparer le bain de son invité. Il n’avait pas vraiment fait attention au regard qui lui avait été lancé lorsqu’il avait flatté la monture du voyageur, trouvant pour sa part ce geste parfaitement naturel tant il l’avait répété sur ses propres bêtes et celles des passagers, depuis tout petit. Il avait une foule d’interrogations en tête, mais ne savait pas vraiment comment aborder le sujet. Quelque chose en lui espérait qu’il se soit effectivement trompé en doutant de la parole d’Arador un peu plus tôt, mais il restait persuadé qu’il n’y avait aucune chance que ce fut réellement celui dont parlait son père dans ses feuillets. C’était tout simplement impossible. Avec un soupir, il remplit un grand récipient en ferraille et le mit à chauffer sur le poêle déjà allumé, avant de jeter un oeil à l’homme qui occupait ses pensées, comme il pénétrait enfin dans la pièce. Il s’était entièrement ré-harnaché, ses armes ayant manifestement repris leurs places habituelles. Le fermier lui indiqua les couchettes libres en lui disant de prendre celui qui lui convenait, le regardant encore alors qu’il avançait dans la maison, se permettant de toucher le mobilier d’une main distraite sur son passage. Mais, ne voulant pas être surpris à l’observer ainsi, il préféra secouer la tête et reprendre ses tâches. Il s’éloigna donc calmement, prenant son temps pour traverser la salle dans sa longueur jusqu’à atteindre une porte et y pénétrer sans un mot. L’homme était grand, il n’avait pas besoin de lui pour le surveiller (d’autant qu’il n’y avait pour ainsi dire rien à voler) et il pourrait toujours l’appeler s’il en ressentait le besoin.
Au centre de la pièce se tenait une baignoire en cuivre de taille respectable, et plusieurs meubles en bois se tenaient autour. Alensil s’accroupit d’abord pour ouvrir un placard et en sortit une serviette de couleur bleutée avant de la poser sur le rebord du bain. Il s’appuya ensuite contre le mur, réfléchissant une seconde à la suite des évènements. Comment allait-il amener naturellement la conversation là où il le désirait sans avoir l’air de mettre son nez où il n’appartenait pas, et sans froisser à nouveau son invité ? Tout en y méditant en silence, il ouvrit un buffet pour en sortir un pain de savon et s’arrêta net en apercevant une parure de boucles d’oreille en argent appartenant à sa mère. Elle ne possédait pas beaucoup de bijoux, et il avait pris le soin de l’enterrer avec les plus beaux quelques jours auparavant. Cette vision le ramena à la triste réalité et il poussa un soupir muet en reprenant son activité, déposant le cube de couleur blanchâtre par-dessus la serviette pour qu’Arador dispose de tout ce dont il avait besoin pour sa toilette.
Ceci fait, il sortit de la salle d’eau pour rejoindre le coeur de la maison, son regard se posant naturellement sur le voyageur près de son lit. Même s’il ne lui apportait aucunes réponses, au moins il lui permettrait de ne pas passer sa dernière nuitée ici seul. C’était déjà une bénédiction en soi. Mais cette pensée n’avait pas fini de l’effleurer qu’il réalisait ce que l’homme était en train de faire. Le bruit irrégulier de son pas résonna sourdement sur les lattes du parquet en bois. Cette fois, il était loin de prendre son temps pour se déplacer et il arriva à hauteur d’Arador en moins de temps qu’il n’en fallait pour le dire. Ce dernier avait reposé les feuilles d’un mouvement vif le temps qu’il arrive, mais le mal était fait et Alensil avait tout vu. Ou du moins, il en avait vu bien assez pour se permettre de pousser l’étranger d’un geste brutal pour l’éloigner de la commode sitôt qu’il fut à portée de bras, en explosant d’une voix teintée de colère :
« Je vous ai dit de choisir un lit, pas de fouiller dans mes affaires personnelles ! »
Si sa voix tempêtait, les éclairs étaient bel et bien logés dans ses yeux. L’irritation qu’il avait démontrée précédemment n’était rien en comparaison à la colère qu’on pouvait lire sur lui à présent. Il attrapa les lettres et notes et les glissa dans son pantalon, contre sa hanche à sa ceinture, dans un geste quasi-protecteur. Il n’était pas quelqu’un de particulièrement matérialiste, mais ces feuilles étaient de vrais trésor à ses yeux. S’il ne devait emporter qu’une seule chose en partant, ce serait ces feuillets et rien d’autre, même s’il n’était pas capapble de les lire véritablement, et qu’il les connaissait par coeur à présent. Réellement par coeur. Chaque ligne, chaque tache, chaque esquisses effectuée à la hâte mais d’une main sûre d’elle, étaient gravées dans son esprit. La sensation du papier rugueux sous ses doigts, les fronces liées aux pliures des feuilles, l’odeur qui s’en dégageait étaient incrustées en sa mémoire. Elles lui racontaient une histoire, lui susurraient des rêves d’aventures et de terres étrangères, lui faisaient caresser l’idée d’un père. Elles étaient les seules miettes de lui qu’il n’ai jamais connues, des traces infimes de racines imperceptibles qu’il ne comprenait pas. Sa patrie, son berceau, son essence n’étaient que celles du fermier qu’il avait toujours été, par défaut.
« Vous n’êtes pas chez vous ! Vous croyez-vous donc vraiment au-dessus de tout ?! »
Il bouillonnait d’une rage intérieure mal contenue, malgré la petite voix dans son esprit qui lui intimait de rester calme. S’appuyant sur sa jambe gauche, mâchoire et poings crispés, Alensil fusilla l’intrus d'un regard noir et intense. On aurait touché à la dame de son cœur qu’il n’aurait pas été plus en rogne que ça… Son courroux était si violent qu'il ne vit même pas qu'il s'agissait là de la clef d'entrée qu'il cherchait afin d'entamer une conversation sur qui était cet Arador, et ce qu'il pouvait lui apprendre ou non concernant son père.
Dernière édition par Alensil Valronir le Sam 1 Mar 2014 - 20:09, édité 2 fois
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Sujet: Re: Quand il est temps de partir [Arador] [Terminé] Dim 23 Fév 2014 - 17:22
La curiosité est un vilain défaut - Part II
P ris sur le fait. Attrapé la main dans la sac. Ou plutôt sur le papier dans ce cas-ci. Son geste vif pour reposer la liasse de feuille n’était pas passé inaperçu. Qu’avait-il donc cru. Les deux hommes étaient dans un espace tellement restreint que nul son, nul geste, ne pouvait échapper aux oreilles et à la vue de tout en chacun. Arador avait cru pouvoir profiter du fait que le jeune homme ait le dos tournée, mais comble de la malchance, celui-ci s’était retourné, le bain préparé, pour découvrir le forfait de son invité. Déjà que le rôdeurs n’avais guère fait bonne impression au jeune fermier, celui-ci devait maintenant se maudire d’avoir laissé cet étranger pénétrer dans sa maison. Un curieux irrespectueux de son intimité et n’en faisant qu’à sa tête. Il devait surement regretter sa bonté et sa bienveillance.
Arador lui de son côté, brutalement poussé sur le côté par un Alensil furieux, était bien malgré lui obligé de s’avouer qu’il avait été particulièrement impoli. Réarrangeant ses vêtements, massant doucement son côté meurtri par la force insoupçonné qu’avait mis le jeune homme dans son coup, le rôdeur masqua sa culpabilité derrière une façade calme et détachée. Le masque qu’il avait pris pour habitude d’afficher lorsqu’il se trouvait pris en faute, ou pointé du doigt. Debout droit, les mains liées dans son dos, il attendait presque avec nonchalance l’éclat du jeune homme. Il se disait intérieurement qu’il avait peu de chance de pouvoir encore loger ici pour la nuit. Il se faisait déjà une raison et réfléchissait à sa prochaine destination, car il aurait surement à trouver une auberge en ville…et débourser à nouveau. Mince alors. M’enfin ce n’était pas vraiment la perspective de devoir payer une auberge qui ennuyait le Dunedain…Il voulait savoir. Sa curiosité, piquée au vif par ces feuillets, n’étant pas encore satisfaite, sa soif loin d’être étanchée. Et il saurait avant de partir, le nom de l’homme ayant écris ces lettres, et quelles étaient ses relations avec le fermier ou sa mère. Tient d’ailleurs où était cette dernière. Elle ne devrait surement pas être loin…à moins qu’elle ne soit morte et que le jeune garçon vivent désormais seul. La maladie, la famine, ou il ne savait quoi d’autre pouvait avoir eu raison de la femme. Et bien qu’il ne connaisse absolument rien du jeune garçon si ce n’était son nom Arador fut pris d’un fugace sentiment de compassion à son égard.
« Je vous ai dit de choisir un lit, pas de fouiller dans mes affaires personnelles ! »
Il y avait beaucoup de colère et de rage dans la voix d’Alensil lorsque celui-ci s’exprima après avoir bousculé son aîné. Il était même carrément furieux. Si les eux pouvaient tuer, il n’y aurait nul doute qu’Arador serait mort sur place, pétrifié par le regard dangereux que lui lançait le paysan bafoué. Pourtant, il restait imperturbable, son visage de marbre, les bras dans son dos, faisant face avec une espèce de distance froide, à la colère du jeune adulte. Il ne laisserait jamais de telles émotions l’atteindre. Même si il se savait coupable,-ce qu’il n’avouerait surement pas maintenant-, il ne se laisserait pas déstabiliser par la colère et la rage du fermier. Il avait des questions. Et exigerait des réponses. Comment ? Pourquoi de telles informations sur lui et son peuple étaient aussi peu protégé, perdues dans la nature à la portée du premier quidam ayant l’idée –comme lui- de les lire. Désormais loin du jeune homme avenant, loin du regard pétillant qu’il laissé voir à son arriver, Arador montrer maintenant une face plus dur et insensible de lui-même. Celle du rôdeur solitaire et inflexible qui avait sur ses épaules la vie de centaines de personnes. Un côté impitoyable qui ne reculait devant rien pour obtenir ce qu’il désirait. Une face cachée de lui-même dont le jeune Alensil aurait bien du mal à se défaire, maintenant qu’elle était sur le point d’être dévoiler. Oui, Arador aurait des réponses.
Regardant le jeune homme fourrer dans son pantalon les lettres manuscrites, un léger rictus ironique sur les lèvres, Arador se dit qu’il ne lui faudrait guère de temps pour les sortir de leurs cachettes s’il le désirait. C’était vraiment puéril comme cachette à ses yeux. Presque dérisoire.
-Alors peut-être devriez-vous mieux les dissimuler, si ces lettres vous sont à le point précieuses…N’importe qui d’un peu curieux ayant pénétré ici aurait put les lire. Déclara lentement, avec une pointe d’ironie le rôdeur incapable de faire preuve de remords pour l’heure.
Et pour l’instant, Alensil n’avait rien encore vu, car l’homme en face de lui pouvait parfois se révéler parfaitement infecte. Imbuvable. Son caractère facile d’accès et agréable à vivre, remplacé par un personnage acariâtre, dédaigneux et implacable. Un changement de personnalité pouvant être aussi soudain que violent. Il n’y avait que peu de gens qui parvenait à supporter toutes ces sautes d’humeurs, aussi la plupart du temps Arador restait le plus souvent seul avec lui-même. Depuis la mort de son père. Depuis la mort de sa femme. Son cercle d’amis était restreint. Il n’avait que des camarades, que des subordonnés, que des sujets. Il ne s’en plaignait pas. Lui-même cherchait la solitude. Mais pour revenir à ce fâcheux incident entre l’invité nonchalant et son hôte furieux, le dunedain ne formulait jusqu’à présent aucune excuse. Et ce n’était pas la prochaine phrase d’Alensil qui allait l’engager sur cette voie.
« Vous n’êtes pas chez vous ! Vous croyez-vous donc vraiment au-dessus de tout ?! »
Haussant les épaules, le seigneur des Dunedains se sépara du fermier pour retourner vers le centre de la petite maisonnette. Marchant à pas lent, comme dans l’attente de quelque chose, Arador laissa son regard glisser sur la modeste demeure. Calme. Le visage neutre de toute émotion. Il réfléchissait. Comment allait-il pouvoir aborder avec le jeune homme le sujet dont il voulait absolument qu’ils parlent sans que le jeune homme ne lui arracher la tête –ce qu’il semblait à proprement parler, prête à faire. Arador n’avait jamais été un maitre dans l’art de mener des conversations là où il le désirait. Cependant il savait pertinemment comment faire parler les têtes chaudes contre leur gré. Pour avoir été de nombreuse fois à leur place. Il se rappelait de la façon qu’avait Elrond Peredhel du temps de son enfance, de lui faire dire des choses qu’il aurait bien voulu garder secrète. Un visage calme, un regard pénétrant, des mots piquant placé et dosés aux bons endroits de la conversation et il obtenait toujours ce qu’il voulait de l’enfant. Désormais adulte, Arador voudrait bien avoir cette maitrise, mais hélas il était encore bien trop « jeune » -là où Elrond avait eu des centaines années pour se façonner cette arme- et donc impulsif pour arriver pleinement à copier son père d’adoption. Néanmoins il ne manquerait pas d’essayer. Après tout il était sûr que le jeune garçon avait lui aussi des interrogations quant à ces lettres qui même si elles étaient très détaillées –ce qui accessoirement lui faisait grincer des dents, secret oblige- restaient malgré tout mystérieuses sur quelques points. Aussi le rôdeur décida de ne pas faire trop de dentelle et de tapoter le haut de la fourmilière, voir si le jeune homme allait dans son sens.
-Au dessus de tout ? Oh non rassurez-vous, je n’ai pas ce privilège. Cependant, il semble que j’ai eu celui de rencontrer l’homme ayant écrit ces lettres...
Ces mots avaient été dits avec délicatesse. Avec une douceur presque nostalgique. Une voix modulée pour répondre au désir de l’homme. Arador fixait maintenant le fermier toujours fumant de colère, ses lettre désormais cachées à sa vue mais qu’il devinait avec amusement sous le tissus de son pantalons contre sa peau. Ce garçon était encore bien jeune.
Dernière édition par Arador le Mer 19 Mar 2014 - 12:29, édité 2 fois
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Sujet: Re: Quand il est temps de partir [Arador] [Terminé] Lun 24 Fév 2014 - 20:00
Quand il est temps
►Feat. Arador
Le jeune avait plus de force qu’il n’y paraissait. Les travaux de la ferme font cela à un homme, et il faut également dire que la rage aveugle qui le possédait à l’instant ne fut pas non plus en faveur d’une quelconque retenue. Il avait poussé le voyageur sans y penser à deux fois, et surtout, sans chercher à se retenir le moins du monde. Sitôt les feuillets mis en sécurité, il ne manqua pas de remarquer le rictus moqueur qui se glissa sur les lèvres de l’impertinent qui venait de violer son sanctuaire de papier, et cela ne fit qu’attiser sa colère un peu plus. Trouvait-il cela drôle ? De s’ingérer ainsi dans les affaires des autres avec le plus grand mépris pour leur intimité ? Il avait l’impression que ses plus grands secrets, ses rêves et ses racines qu’il ne faisait lui-même qu’effleurer du bout des doigts venaient d’êtres piétinés tout d’un bloc par un arriviste qui ne pouvait que les salir en les profanant ainsi. Une chose était sûre en tous les cas, il ne pouvait pas comprendre la valeur qu’avaient ces simples feuilles pour le fermier. quant à cette cachette, dans sa ceinture, si elle pouvait sembler étrange, c’était tout simplement devenu une habitude pour lui de placer les notes à cet endroit étant petit pour ne pas les perdre ni les abîmer et pour sa part il n’y repensait plus à deux fois tant cela était devenu machinal.
-Alors peut-être devriez-vous mieux les dissimuler, si ces lettres vous sont à le point précieuses…N’importe qui d’un peu curieux ayant pénétré ici aurait put les lire.
Alensil bouillonnait. Il n’avait pas à dissimuler quoi que ce soit ! C’était à lui de se retenir et d’agir correctement. Arador n’était qu’un invité dans SA demeure ! Les grandes gens n’étaient-ils pas supposés être mieux élevés que les petits fermiers ? Il devrait savoir se tenir ! Quelles manières étaient-ce là, sinon celles d’un personnage sournois et sans bornes morales ?! Le jeune homme lui cracha sa pensée à la figure, impliquant quasi clairement qu’Arador n’était qu’un petit outrecuidant. Mais cela ne sembla pas l’émouvoir le moins du monde, et le fermier serra un peu plus encore ses poings en le voyant s’éloigner de lui, lui tourner le dos comme s’il n’était pas là, comme si tout ceci n’était d’aucune importance et qu’il n’estimait pas avoir commis la moindre faute répréhensible. Alensil avait envie de lui sauter dessus et de le frapper jusqu’à ce que sa rage passe ou qu’il finisse proprement épuisé. Qu’est-ce qui lui avait pris de l’autoriser à reprendre ses armes un peu plus tôt ?! Peu importe. Il prit rapidement sa décision, même si elle était probablement des plus idiotes, et s’élança vers lui pour lui faire ravaler sa saleté d’expression neutre et supérieure. Mais ce fut le moment où le voyageur se décida finalement à lui répondre, lui coupant soudainement les jambes :
-Au dessus de tout ? Oh non rassurez-vous, je n’ai pas ce privilège. Cependant, il semble que j’ai eu celui de rencontrer l’homme ayant écrit ces lettres...
La partie concernant le “il me semble” fut complètement délaissée par sa petite caboche. Tout ce qu’il entendit, tout ce qui résonna comme un écho dans sa tête fut que l’homme en face de lui avait rencontré son père, qu’il le connaissait donc, et Alensil ne put que marquer une pause, s’arrêtant soudain dans son élan pour reprendre son appui habituel sur sa jambe gauche. Alors il était vraiment celui qu’il disait être ? Mais…
« Vous êtes bien trop jeune pour être... »
Il secoua la tête un instant, calculant rapidement et en silence, ses sourcils se fronçant un instant. Si son père était passé à la ferme et avait séduit sa mère à... mettons vingt-cinq ans, son chef était probablement plus âgé que lui à l’époque, du coup, ça voulait dire au bas mot, qu’à présent il dépassait les cinquante-cinq ans… Son poitrail se levait au rythme de sa respiration, encore profonde et rapide, trahissant le fait qu’il était loin de s’être entièrement calmé même si sa petite annonce l’avait coupé dans son élan de violence sourde. Il enchaîna sur sa conclusion :
« Vous devriez avoir au moins soixante ans ! »
Réflexion stupide ? Cela ferait peut-être rire le Dùnadan, en effet. Mais dans sa tête c’était parfaitement logique… Le voyageur n’avait pas l’air de dépasser la trentaine. Il aurait eu quoi, cinq ans quand il avait été conçu ? Alensil ne pouvait pas inventer le fait que son paternel et ses pairs vivaient bien plus longtemps que les autres hommes, là où on ne lui avait jamais rien expliqué de tel. Il ne connaissait rien à ses propres racines et n’avait pas la moindre idée qu’il avait probablement hérité d’une espérance de vie rallongée… C’était peut-être même ce patrimoine héréditaire unique qui l’avait protégé, sauvé, de l’épidémie qui avait fait un carnage dans la ville et emporté sa mère, sans qu’il n’en ait pourtant connaissance. Réfléchissant rapidement à son tour, il lança à Arador un regard brûlant, ses yeux l’avertissant tout net qu’il valait mieux pour lui être sincère et ne pas simplement énoncer ce qu’il avait envie d’entendre pour mieux se rire de lui par la suite :
« Si vous vous jouez encore de moi, je ... ! »
Il... ? Il ne savait pas trop, en réalité. Que pourrait-il bien faire de plus que de le mettre à la porte ? Ce n’était pas l’envie de lui taper dessus qui lui manquait, oh non. elle était toujours bien présente, mais en étant réaliste deux minutes il se doutait qu’il n’aurait pas le dessus sur son opposant, même en combat singulier. Noble et riche, l’autre avait probablement reçu des cours par des professionnels depuis tout petit, là où lui-même n’avait pu que croiser le fer avec des journaliers dont c’était loin d’être le métier. Et ne parlons même pas de sa jambe… Il avait beau faire tout son possible pour qu’elle ne se remarque pas, pour avoir l’air aussi performant que n’importe qui d’autre, elle restait un réel handicap par moments.
Dernière édition par Alensil Valronir le Sam 1 Mar 2014 - 20:09, édité 2 fois
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Sujet: Re: Quand il est temps de partir [Arador] [Terminé] Jeu 27 Fév 2014 - 22:09
La curiosité est un vilain défaut - Part III
T ournant le dos au jeune homme, ne pouvant voir ses expressions mais devinant que ce devait être tout un spectacle, Arador se perdit dans ses pensées. Il se remémorait ce qu’il avait bien put lire dans ces quelques lettres. Des lettres personnelles d’un père à son fils. Le genre de lettres que lui-même avait écrit à son père bien des années avant que celui-ci ne trépasse, ce lorsque la distance entre Fondcombe et le chef-lieu des Dunedains les séparait. Des écrits intimes comme ceux que cachait le jeune homme dans son pantalon, le dunedain n’avait pas encore eu beaucoup d’occasions d’en lire. Et c’est sans pitié, que ceux-ci lui broyaient le cœur en silence, comme pour lui faire regretter de les avoir lus. Il se rappelait de lui-même à l’âge d’Alensil écrivant à son père comment il lui manquait et qu’il espérait vite être de nouveau à ses côtés pour repartir sur les routes chasser de l’orc. Il se rappelait de ces nuits blanches à noircir des parchemins et des parchemins pour trouver les mots justes pour exprimer ses sentiments. Il se rappelait d’avoir garder jalousement pour lui chacune des lettres de son père lui ayant été adressée, ne les lisant à voix haute que pour Elrond, dans l’intimité de son cabinet. Les cachant tout de suite après. Aussi il se demanda où pouvait être le père du jeune homme, à cette heure. Que devenait-il ? Etait-il mort comme le sien, à faire son devoir de rôdeur ? Ou vagabondait-il toujours sur les sentiers de l’Arthedain, du Cardolan ou du Rhudaur comme lui était censé le faire à cette heure ? Enverrait-il d’autres lettres à son fils, décrivant ses aventures, lui tirant des étoiles dans les yeux, et des sourires affectueux ? Un pincement au cœur, convainquit Arador de cesser de se poser toutes ces questions. Cela ne le concernait pas. Lui tout ce qu’il désirait savoir c’était le nom de ce rôdeur décrivant avec un peu trop de précision des personnes et des lieux censés rester secrets. Divulguant des informations, à son fils certes, mais qu’il préférerait savoir bien gardées dans le cercle fermé des rôdeurs. Et pour ça il devait faire abstraction de toute culpabilité. De tout sentimentalisme. Même si en définitive ce n'était pas les cinq pauvre lettre qui le dérangeait, mais plutôt les notes de voyage les accompagnant.
« Vous êtes bien trop jeune pour être... »
Etre quoi? A ces mots Arador se retourna pour faire face au jeune homme, les mains dans le dos, un rictus amusé glissant sur ses lèvres. Devant lui Alensil les sourcils froncés, semblait se concentrer dans un effort pour deviner son âge. Si son père avait parlé de lui dans ses écrits, cela ne l’étonnerait même pas que le jeune homme sache qui il était réellement. Il ne pourrait donc jamais lui jouer la comédie. Dommage, il n’avait plus de couverture. Il était comme qui dirait à découvert devant ce jeunot de 50 ans son cadet. C’était fâcheux, mais qu’importe, à présent le mal était fait. Il ne lui restait plus qu’à découvrir qui en était l’auteur…Et puis quoi ? Le châtier ? Non c’était un peu tard pour cela vu l’ancienneté des lettres, mais peut-être un rappel à l’ordre ne serait pas superflu. Sauf si le rôdeur en question était mort, ce qui était une possibilité qu’Arador ne voulait pas envisager, mais qui était également plausible. Après tout il ne revenait que rarement dans son domaine, et même s’il recevait des rapports de ses camarades, il n’arrivait pas toujours à être au courant de tous les décès dans ses rangs. Ce qu’il regrettait bien souvent.
Souriant au jeune Alensil, le rôdeur était amusé. Son âge était toujours sujet à caution lorsqu’il croisait des jeunes hommes comme lui. Autant il faisait attention à ne pas le divulguer imprudemment, autant lorsque ceux-ci l’apprenait, ils avaient une réaction similaire à celle du fermier. De l’incrédulité. Il était certain qu’il ne faisait pas son âge, et que peu de gens l’imaginerait avoir un fils faisant presque sa taille et âgé d’une trentaine d’années bien tassées. Un fils qui bientôt lui aussi rejoindrait les rangs des rôdeurs…mais Arador préférait ne pas y penser pour le moment. Il deviendrait plus sombre s’il devait réfléchir à l’existence que devrait mener Arathorn dès lors qu’il aurait atteint ses 40 ans. Il risquait de ruminer encore de sombres pensées, et ce n’était pas vraiment le moment de se laisser aller à cela. En attendant il fixa son regard brun sur Alensil et fit l’inverse de ce que celui-ci faisait, soit deviner son âge. Arador lui tenta de deviner l’âge du père du garçon. Garçon ne devant surement pas avoir plus de 25 ans à vue de nez. Aussi à considérer qu’il avait dû connaitre l'homme de son vivant, et que celui-ci avait servi sous son commandement, il devait avoir au minimum 50 ans. Dans tous les cas, le père du garçon était probablement plus jeune que lui, Alensil lui-même étant plus jeune que son propre fils.
« Vous devriez avoir au moins soixante ans ! »
Rigolant franchement cette fois-ci, non pas pour se moquer, mais parce que la scène lui paraissait très drôle, Arador secoua doucement la tête pour signifier au jeune homme qu’il n’avait pas tout à fait raison. Mais c’était pas mal. A dix ans prêts il avait trouvé. Mais le rôdeur lui laisserait le plaisir –ou pas- de continuer à chercher son âge véritable. Il n’allait pas non plus lui donner davantage d’informations qu’il n’en avait déjà. Il tenait à ne pas laisser trop de lui-même dans cette ferme. Histoire que cela ne se retourne pas contre lui, le jour où il s’y attendra le moins. Pourtant, il ne sut pas vraiment ce qui lui prit quand sans pouvoir s’en empêcher sortit de sa bouche le chiffre…
-Soixante dix-huit… dit-il un rictus aux lèvres, l'air de dire "râté".
Il aurait voulu se maudire pour cet élan de bêtise pure. Mais trop tard. Si dans son esprit il se traitait de tout les noms, au dehors, seul le recoin de sa bouche, légèrement crispé, montrait qu’il n’appréciait pas forcément ce qu’il venait de dire. Mais quelle mouche l’avait piqué ! A croire qu’il ne pouvait pas mentir devant le jeune homme ! Il lui avait déjà révéler son nom, et son ascendance, et voilà que maintenant il lui confiait son âge ! Et bientôt pourquoi pas le nom de son fils, de sa défunte femme, ou encore le fait qu’il soit l’héritier d’Isildur pendant qu’on y était. Enfin maintenant c’était fait, il ne pouvait pas revenir en arrière, même s’il l’aurait bien voulu. Et puis peut-être qu’ne final de compte être franc avec le fermier pourrait lui permettre de gagner sa confiance et d’obtenir des informations qu’il ne lui confierait pas autrement. Oui voilà. Il devait penser comme ça. Pensait à gain et pas à perte. Il n’avait rien à perdre ici, mais tout à gagner.
Croisant le regard enflammé de son interlocuteur, Arador haussa un sourcil interrogateur. Se demandant, avec une mauvaise foi évidente, ce qu’il avait bien put faire pour mériter un tel regard, le rôdeur montra ses mains en signe de reddition et d’innocence. Il n’avait rien faire –à part lire ces lettre- pour le moment.
« Si vous vous jouez encore de moi, je ... ! »
Ah voilà il comprenait mieux. Alensil craignait qu’il ne se paie sa tête. Surement n’avait-il que très peu entendu parler de la longévité de son peuple…qui était aussi le sien. Se rendant subitement compte de cela Arador accorda un nouveau coup d’œil, au paysan. Un coup d’œil neuf, se rendant compte qu’il avait devant lui un frère. Ou du moins un cousin lointain. Probablement un demi sang, sa mère ne lui ayant pas parut venir du nord, et ne possédant aucune des caractéristiques des filles de Numénor. Relayant cette nouvelle donnée dans un coin de son esprit, le Dunedain se reconnecta sur la pièce en train de se jouer à l’instant. Maintenant il devait convaincre le garçon de la véracité de ses paroles. Et ce ne serait surement pas gagné d’avance, ayant fait au départ une mauvaise impression. Mais qui ne tente rien n’a rien n’est-ce pas, aussi Arador allait tenter sa chance en disant la vérité et en le jurant sur sa propre vie.
-Vous ? Que feriez-vous ? Me frapper? Je ne pense pas vraiment que ce soit une bonne idée. D’autant que tout ce que je vous ais dit jusqu’à présent est la pure et simple vérité. Que vous me croyez ou pas, cela ne me regarde plus. Sur ce, je pense que mon bain doit être prêt...
Dernière édition par Arador le Mer 19 Mar 2014 - 12:28, édité 1 fois
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Sujet: Re: Quand il est temps de partir [Arador] [Terminé] Sam 1 Mar 2014 - 21:42
Quand il est temps
►Feat. Arador
Alensil était quelque peu perturbé, tiraillé entre une colère furieuse qui le prenait au corps et son horrible curiosité qui le poussait à conjecturer, calculer, tirer des conclusions hâtives et… il faut le dire, ne pas tout comprendre. Il annonça son train de pensées à voix haute, émettant ainsi ouvertement ses doutes mais surtout ses lacunes. Le voyageur s’était enfin décidé à se retourner pour lui faire face, comme s’il admettait enfin qu’il n’était pas seul dans la modeste demeure, et le fermier ne put que croiser son regard alors qu’il souriait, visiblement amusé par la situation. Sans vraiment savoir pourquoi, cela le fit se sentir bête, comme s’il pressentait qu’il venait de dire une grosse idiotie. Et il n’aimait pas ça, du tout.
- Soixante dix-huit…
Soixante dix huit. le fermier répéta le chiffre qui venait d’être annoncé, peu certain lui-même de l’avoir dit à voix haute ou simplement pensé. C’était... Cela expliquerait certaines choses, certes, mais impliquerait également que l’homme en face de lui n’était pas humain. Pas comme il l’entendait, en tout cas. Pas avec ce visage-là. Et Arador n’avait pas d’oreilles pointues, pour sûr. Il le mit alors en garde, peu enclin à être pris d’avantage encore pour un benêt. Justement car il savait au fond de lui-même que, oui, il était perdu au milieu de tout ça. Et cela l’énervait grandement, ne sachant que croire et que penser. Et surtout, ne sachant pas non plus ce que cela pouvait bien dire, exactement, pour lui.
-Vous ? Que feriez-vous ? Me frapper? Je ne pense pas vraiment que ce soit une bonne idée. D’autant que tout ce que je vous ais dit jusqu’à présent est la pure et simple vérité. Que vous me croyez ou pas, cela ne me regarde plus. Sur ce, je pense que mon bain doit être prêt.. .
La façon dont l’homme avait terminé sa tirade lui donna l’impression qu’il ne lui donnait pas la possibilité de rétorquer quoi que ce soit. Alensil grogna intérieurement, légèrement frustré bien que de toute façon, il ne se serait sans doute pas gêné pour le faire s’il avait eu quelque chose à dire. Il avait également l’impression que le voyageur lui rappelait par là qu’ils avaient fait un marché, comme s’il le soupçonnait de ne plus vouloir s’y tenir à présent. Hey, il était un homme de parole, il l’avait dit !
« Je m’en charge. »
Sa voix était encore un peu dure, démontrant qu’il restait toujours en colère après Arador pour son geste, même s’il se pliait à leur contrat. Ce n’était pas parce qu’il connaissait son père, et avait été son chef même, qu’il comptait passer l’éponge sur ses actes. Il restait responsable de ses méfaits. Le visage un peu fermé, il se détourna de son invité… non, de son client, pour aller vérifier la température de l’eau. Il avait abandonné sa démarche flegmatique pour un pas plus rapide, qui lui était plus naturel et confortable. Ce n’était plus vraiment la peine de masquer son brimbalement, alors qu’il avait couru vers lui quelques minutes à peine plus tôt en le laissant entrevoir pleinement son problème de locomotion. Mais il prit tout de même le soin de le minimiser encore, n’aimant pas l’idée de donner une raison de plus à ce prétentieux de le juger négativement alors qu’il ne le connaissait même pas. (Ce qu’il était pourtant en train de faire de son côté en assumant certaines choses sur Arador si on regarde bien, maiiiiis… ne disons rien, cela vaut mieux.)
La température semblant bonne, il souleva la anse du lourd récipient à deux mains pour le retirer du feu, et traversa la pièce dans un silence de plomb, jusqu’à passer la porte de la salle d’eau qui était restée ouverte. Il y versa le contenu du pot dans la bassine en faisant attention à ne pas se brûler. Soixante dix huit, soixante dix huit… Au lieu de lui donner des réponses, toute cette affaire ne faisait que le laisser avec le double d’interrogations ! Il plissa les yeux tout en faisant la moue, se souvenant soudain qu’il était supposé s’arranger pour en apprendre plus sur son père, à la base. Et voilà que l’ambiance s’était à nouveau dégradée, qu’il avait envie de frapper pour son intrusion et qu’il ne savait plus très bien où il en était. Si Arador disait vrai, il était d’une autre race, probablement à plus longue longévité. Est-ce que cela voulait dire qu’il en était de même pour son père ? Est-ce que cela voulait dire qu’il en était de même pour lui ? Il passa une main sur son visage, comme si cela pouvait l’aider à remettre de l’ordre dans ses idées, ou en chasser quelques unes, puis laissa échapper un « Merde. ». Jurant pour lui-même, il donna un coup de pied dans la baignoire, puis encore un autre, comme si cela pouvait apaiser son agitation interne, mais il regretta immédiatement son geste. Le son sourd et métallique provoqué par ses coups résonna lourdement dans toute la salle et il réalisa qu’il était fort possible qu’il était même parvenu jusqu’aux oreilles de l’autre homme. Tant pis, qu’importe ce que l’autre pouvait bien penser de lui à ce stade. Si ça l'apaisait de taper dans le mobilier, il en avait bien le droit, c’était chez lui ici ! Il valait mieux ça que d’écouter ce qui avait été son premier instinct et de provoquer une bagarre, non ? Comme pour s’en convaincre, il donna un tout petit coup de poing dans le meuble à sa droite… une sorte de buffet léger probablement plus vieux que lui, qui au moins ne faisait pas trop de bruit quand on le frappait… Pourtant, il laissa entendre un grincement douloureux qui fit lever un sourcil à Alensil. Pas normal, ça. Il n’eut pas le temps de réaliser, que le bahut craqua soudainement, chancelant dangereusement vers l’avant.
« Wow ! »
Les portes s’ouvrirent et laissèrent échapper une partie de leur contenu avant qu’Alensil ne saisisse le meuble et ne le plaque de nouveau contre le mur pour éviter la catastrophe, non sans un son claquant dans l’air. Hé bien si, tout compte fait, il faisait plus de bruit que la baignoire quand on tape dessus… Le récipient toujours en main, il prit une large inspiration et le posa à terre, le temps de ramasser la majeure partie de ce qui avait été déversé hors du buffet. Il tenta ensuite de reprendre un faciès à peu près composé et entreprit de refaire le chemin inverse, en gardant la tête haute. Sentant un regard sur lui, il annonça simplement, d’un air qu’il espérait le plus détaché possible :
« Vous trouverez le nécessaire pour vous laver dans la salle d’eau. Si vous êtes d’accord, je m’occuperais de votre monture pendant ce temps. »
Il remplit à nouveau et le remis à chauffer, car ce ne serait pas trop pour que le niveau du bain soit confortable.
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Sujet: Re: Quand il est temps de partir [Arador] [Terminé] Mar 4 Mar 2014 - 11:43
No man's land
Arador était dépité. Intérieurement, il avait espéré que le jeune homme soit plus impulsif, plus hargneux, et désireux d’obtenir des informations. Il aurait alors put se servir de ce caractère spontané pour mener la conversation là où il aurait voulu qu’elle aille. Mais rien ne se passait selon ses désirs. A son injonction, le jeune fermier avait ravalé une partie de sa colère et avait acquiescé, pour finir par s’exécuter promptement. Le rôdeur aurait dû se douter que le paysan n’oserait pas s’insurger contre une commande venant de lui qu’il devait surement voir comme un grand seigneur. Si seulement il savait. Arador n’était rien de tout cela. Si les pièces de monnaies qu’il avait en sa possession avait put laisser croire à une possible richesse, il n’en restait pas moins qu’elles devaient lui durer six mois…Et il en avait déjà dépensé la moitié en trois semaines. Avait-on déjà vu un rôdeur plus dépensier ? Oh certes il ne dispensait pas l’argent en frivolité. Il donnait souvent généreusement aux gens dans le besoin, il s’en servait pour obtenir des informations, parfois comme laisser passer, ou encore pour sortir de certaines situations difficiles. Mais tout de même, il n’en restait pas moins qu’il faisait une mauvaise gestion de sa monnaie, donnant souvent plus qu’il ne faudrait, comme tout à l’heur avec Alensil. Une pièce d’or pour une couchette modeste, un peu de foin et un bain c’était peu. Avec la même somme il aurait put avoir dans une auberge, le diner compris.
M’enfin il ne dirait rien. Il n’était déjà pas dans les bonnes grâces du jeune homme, il n’allait pas aggraver son cas, en rétorquant au jeune garçon que son seul désir était de lui tirer les vers du nez. Ce serait –déjà pas très subtil- très blessant. Et s’il se savait avoir beaucoup de défauts, ceux-ci cultivés au fil de ses temps d’errance, Arador ne voulait pas y rajouter celui d’être une personne offensante. Et pourtant, ne l’avait-il pas déjà été en lisant les papiers du garçon, sans son accord, mais en le narguant d’autant plus sur sa cachette misérable. Il savait que ce qu’il avait fait était mal en quelque sorte, et pourtant il ne le regrettait pas. Il s’excuserait pour son manque de civilité, mais pas pour avoir lu les lettres. Car il avait put apprendre des choses qu’il n’aurait pas su autrement. Des informations qu’il aurait à faire parvenir à la famille de son camarade, restée au village et attendant un être cher qui ne reviendrait pas. En revanche, ils auraient peut-être le bonheur de savoir qu’un nouveau fils leur avait été donné. Si seulement Alensil acceptait ses origines et désirait réellement en savoir plus sur sa famille paternelle. Ce serait un autre sujet à questionner. Décidément, cette rencontre se promettait d’être de plus en plus riche.
« Je m’en charge. »
La voix du jeune homme était dure, encore chargée d’un certain ressentiment à l’égard du rôdeur. Chose normale me direz-vous. Arador lui, ne s’en étonna, ni ne s’en offusqua, se sachant responsable de cette raideur persistant entre eux. Aussi il fit un signe de tête solennel au jeune homme, indiquant qu’il avait bien perçut son mécontentement. Mais qu’il remerciait aussi son honnêteté et la fidélité qu’il accordait à sa parole. Des qualités qu’il savait apprécier à leur juste valeur, et trouvait d’autant plus honorables qu’il n’avait pas vraiment eu une attitude méritant ces attentions. Que le jeune homme prenne soin de tenir son engagement était pour lui le signe d’une personne digne de confiance. Le Dunedain saurait s’en souvenir lorsque viendrait le temps pour lui de faire ses excuses. Un moment que, bien malgré lui il redoutait un peu. Non, il n’aimait pas s’excuser. Il n’avait pas eu à le faire depuis bien longtemps…Et il ne savait pas si les mots réussiraient à sortir de sa bouche sans sonner faux.
Suivant du regard Alensil, Arador ne put manquer une fois de plus la démarche étrange de celui-ci. Il attarda son regard sur les jambes de celui-ci et dans son esprit il se fit la réflexion que le jeune fermier avait dû se blesser plutôt gravement pour boitiller ainsi. Ce boitement…il apparaissait au rôdeur qu’Alensil faisait en sorte de le cacher. Mais pour ses yeux aguerris aux combats, ce petit détail était immanquable. Un soupçon d’inquiétude le prit lorsque dans son esprit il se demanda quelles étaient les compétences du jeune homme en guérison. Avait-il soignée cette blessure tout seul ? Elle l’handicaperait encore plus dans le futur si elle avait été mal traitée. Mais après, ce n’était pas ses affaires…n’est-ce-pas ? Pourtant il ne pouvait se séparer de cette pointe d’inquiétude qui le prenait à chaque pas que faisait le jeune homme. Il se savait capable de bien des choses en guérison…n’avait-il pas grandi auprès du plus grand guérisseur de la terre du milieu ? Ne disait-on pas que les mains du roi sont des mains guérisseuses ? Néanmoins si la blessure était très ancienne il ne savait pas ce qu’il pourrait tenter pour améliorer les choses …mais surtout, le jeune homme le laisserait-il faire ? Il avait des doutes. De gros doutes.
Le garçon semblait être une personne fière. Aussi le regard qu’il lui avait lancé, et les coups colériques qu’il entendait à travers les murs de la salle d’eau, ne donnait pas lieu à de grandes espérances de conciliation. Aussi en désespoir de cause, Arador haussa les épaules. Advienne que pourra. Mais tout de même, ces bruits que produisait le plus jeune avaient le don de faire sourire le dunedain. Grace à son ouïe affutée et la finesse des murs, il entendait tout ce qui pouvait se passer dans la petite pièce. De ce fait, il ne manqua pas d’entendre le bruit d’un meuble basculant, le « Wow » lâché par le jeune homme et le bruit de quelques objets tombant au sol. Il se serait bien porté au secours du jeune, mais il se doutait que sa présence ne serait guère appréciée. Aussi il se contenta de poser sa main contre ses lèvres pour ne pas laisser s’échapper un petit rire.
Secouant sa tête, feignant le fatalisme, Arador commença à se défaire-encore- de toutes ses armes. Une nouvelle fois il défit sa ceinture, déposa son épée dans un coin de la pièce, ôta son arc et son carquois de son épaule. Et surtout plaça avec précaution sur une table devant en temps normal servir de table à manger, diverses lames de fabrication naines cachées dans ses vêtements. Il en dénombra cinq…il en avait 8 au départ. Les trois autres devaient être restées fichées dans les têtes de quelques orc malchanceux. Ses sourcils se froncèrent, puis finalement revinrent à leur apparence initiale. Bah, si ce n’était que 3 sur 8, il n’allait pas en faire une maladie. Ce n’était pas comme si il avait égarée Angurva, son sabre elfique.
Dans des gestes prompts, le rôdeur commença à défaire les attaches de ses vêtements souillés du sang d’orcs. Il lui faudrait les laver. Il avait le temps, il pouvait se le permettre. Aussi les lacets de sa cape défaits, il se défit de son manteau, ôta sa tunique, et déchaussa ses bottes, déposant le tout non loin de son armement. Désormais torse nu, la pudeur ne l’étouffant pas le moins du monde, Arador sentit enfin l’humidité régnant dans la ferme, la fraicheur des murs lui tirant un frisson. Sur sa peau d’albâtre, des anciennes blessures avaient laissées leurs traces. Pour la plupart bien soignées les cicatrices étaient fines et blanches, mais certaines, pour lesquelles il n’avait put faire autre chose qu’un bandage, les marques était plutôt disgracieuses. Certains auraient essayé de les cacher à la vue de tout être humain, mais le rôdeur n’en avait pas honte. Elles faisaient partie de lui en quelque sorte. Et il se reniait déjà suffisamment pour ne pas en rajouter avec ses cicatrices, gagnées durement au combat. Délassant les liens de son pantalon, celui-ci ne tenant désormais plus que grâces aux os de ses hanches, Arador reporta son regard sur son hôte revenu de ses pérégrinations dans la salle de bains.
« Vous trouverez le nécessaire pour vous laver dans la salle d’eau. Si vous êtes d’accord, je m’occuperais de votre monture pendant ce temps. »
Sa monture ? Asgar ? Se laisser toucher par un autre que lui. L’idée lui paraissait saugrenue, ce cheval était plus têtu qu’une mule et d’un caractère plutôt difficile, presque farouche. Il ne savait pas lui-même comment il parvenait à le monter. Aussi il doutait que le fermier puisse s’en occuper sans mal…mais il se rappela comment le jeune homme avait caressé l’encolure de la bête sans que celle-ci n’esquisse le moindre geste. Et bien que cela lui tira un soupçon de jalousie, sa possessivité faisant un retour sans surprise, il dû admettre en lui-même que le garçon avait peut-être des chances de s’en sortir avec le pur-sang. Un des meilleurs coursiers du Rohan. Son compagnon de route. Au pire, s’il arrivait quelques chose, il ne serait pas bien loin. Signifiant au jeune homme son accord, Arador ne put toutefois s’empêcher de rajouter.
-Prenez garde, il a son caractère, il risque surement de ne pas se laisser faire docilement… aussi ne tentez pas votre chance, si vous voyez qu’il s’énerve, écartez vous. Ah ! Et si vous pouviez également, faire entrer la chienne qui attend au dehors, elle n’est pas dangereuse et sait se tenir. Je vous en serais…reconnaissant.
Le dernier mot, il l’avait dit avec une certaine douceur. Il ne désirait pas plus longtemps froisser le fermier. Aussi il faisait en sorte de commencer un processus de rachat…ne restait plus qu’à voir comment cela se passerait.
Dernière édition par Arador le Mer 19 Mar 2014 - 11:59, édité 2 fois
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Sujet: Re: Quand il est temps de partir [Arador] [Terminé] Sam 8 Mar 2014 - 12:43
Quand il est temps
►Feat. Arador
Alensil n’avait que faire du fait qu’Arador était un grand et noble seigneur. Un titre ne donne pas sa valeur à une vie, et le fermier n’était pas du genre à acquiescer docilement simplement à cause de cela. Cependant, ils avaient passé un marché et se tiendrait à ses premiers mots. Il dû donc ravaler la colère âpre qui le brûlait encore, et s’affaira à préparer le bain du voyageur, le coeur encore lourd et la tête prise dans un brouillard d’interrogations. Les coups donnés à la baignoire furent très loin de le défouler autant qu’il l’aurait fallu pour qu’il se sente apaisé intérieurement, mais sa légère mésaventure avec le buffet eut tôt fait de le calmer. Sa mère aurait été présente, qu’elle l’aurait très sûrement réprimandé pour son comportement enfantin. Et il aurait lu dans ses mots qu’elle n’avait pas la force de vivre plus longtemps avec un enfant, il lui fallait grandir et mûrir, pour eux deux.
Quand il ressortit de la salle de bain, ce fut avec un visage composé. Il essaya de ne pas penser au fait qu’il avait dû paraître ridicule si l’homme l’avait entendu, et ralentit presque en le trouvant à demi nu au milieu de la pièce à vivre. Pas que ça le dérangeait en soi, il en avait vu d’autres, mais il ne s’y était tout simplement pas attendu. Il poursuivit sa route et remis un bac d’eau à chauffer, avant de proposer de s’occuper de la monture du voyageur, tandis que ses yeux s’attardaient sur quelques unes des cicatrices les plus profondes qui s’étalaient sur la peau laiteuse. Il les détourna rapidement cependant, ses propres doigts massant un instant sa hanche droite sans qu’il n’en soit réellement conscient, la toile de son pantalon râpant légèrement sous la pulpe de ses doigts. Il avait ses propres stigmates, lui aussi, mais il était encore loin de les accepter. Ces marques faisaient pourtant partie intégrante de ce qu’il était, depuis longtemps déjà. Mais le souvenir de la douleur, de la terreur et de la fièvre s’imposaient à lui à chaque fois qu’il y repensait. Les abjectes entailles étaient épaisses et encore boursouflées, le rendant à ses yeux difforme et répugnant. Elles lui rappelaient aussi son impuissance de jadis et ses limites actuelles, en une évocation indélébile. Pour sa part, il avait donc honte de cette partie de lui-même et préférait la garder cachée. Les regards et murmures qu’il obtenait à cause de son boitement étaient déjà bien suffisants, et il préférait ne pas donner cause à plus encore. C’est pourquoi il préféra ne pas fixer les marques présentes sur la peau du voyageur, par considération, même si l’homme ne semblait pas le moins du monde gêné par cela. Arador acquiesça son accord quant à sa proposition, avant de prendre soin de le mettre en garde contre le caractère du pur sang :
-Prenez garde, il a son caractère, il risque sûrement de ne pas se laisser faire docilement… aussi ne tentez pas votre chance, si vous voyez qu’il s’énerve, écartez vous. Ah ! Et si vous pouviez également, faire entrer la chienne qui attend au dehors, elle n’est pas dangereuse et sait se tenir. Je vous en serais…reconnaissant.
Cela aurait presque fait sourire Alensil, et il retint de justesse une remarque narquoise à l’adresse d’Arador. Quoi qu’il en soit, au moins il était prévenu et cela lui éviterait des surprises. Il ne tenait pas vraiment à se faire massacrer son autre jambe, s’il pouvait l’éviter… Il ne releva pas le fait que le voyageur avait tenté de mettre un peu de douceur dans sa voix sur la fin de sa demande. Il était trop occupé à réfléchir, encore. (Qui a dit que ce n’était pourtant pas du tout son fort ?). Soyons clairs, Alensil n’était pas un grand manipulateur et ne le serait sûrement jamais. Mais une opportunité se présentait à lui, même si ce n’était pas grand chose, et il décida de tenter sa chance. Il releva ainsi la tête pour fixer le rôdeur et lui annoncer le plus sérieusement du monde :
« J’hébergerais et nourrirais votre chienne... si vous acceptez de répondre à mes questions ? Enfin, après votre bain, bien entendu. »
De qui se moquait-il ? Il savait qu’il le ferait même si l’homme refusait de lui répondre… La chienne n’avait pas à subir la faim et le froid à cause de son maître. Hey, quand on y pense il serait même limite plus volontaire pour faire l’inverse. Garder le cannidé au chaud et mettre l’homme dehors… Mais cela serait revenir sur sa parole et surtout, ça ne l’aiderait pas à faire le tri dans ses pensées et mettre des réponses sur tout ce qui tournait dans sa tête à l’instant, alors… il ferait avec le maître aussi. Le voyageur pouvait bien l’envoyer bouler ou tenter de négocier, son animal serait tout de même traité correctement car le jeunot n’était pas du genre à rejeter les fautes de quelqu’un ou ses propres colères sur des bêtes innocentes (les meubles en revanche, … Bref.). Tout ceci était bien joli mais même en admettant qu’Arador accepte de répondre au moins en partie à ses questions, encore fallait-il qu’Alensil sache exactement ce qu’il souhaitait demander, et comment. Il fallait également qu’il se fasse à l’idée de passer pour un gros ignare, ce qui le mettait tout de même assez mal à l’aise. Mais il savait tellement peu de choses sur son père, sur ce qu’il était, ce qu’il faisait, d’où il venait et j’en passe, qu’il fallait déjà commencer par le début, et il se doutait que cela n’aiderait pas l’image mentale que le voyageur se faisait de lui : un petit bouseux sans éducation, ignorant de tout ou presque. Ce n’était pas pour rien qu’il avait précisé que l’affaire se tiendrait un peu plus tard. Déjà, car même s’il était proprement impatient à présent, il n’allait quand même pas lui faire subir un interrogatoire à moitié nu au milieu du salon. Ensuite, parce qu’il ne voulait pas avoir l’air trop pressé et souhaitait avoir le temps de méditer aux demandes qu’il énoncerait peut-être.
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Sujet: Re: Quand il est temps de partir [Arador] [Terminé] Lun 24 Mar 2014 - 14:30
Come on boy, don't be shy...
Continuant de se dévêtir sans la moindre gêne, Arador donnait maintenant dos au jeune fermier. Sa chemise, sa veste en cuir, ses brassards et, son manteau, ôté, ne lui restait plus que ses bottes, son pantalon. Peu dérangé par sa semi-nudité, le rôdeur attrapa une chaise traînant dans la pièce et s’assit dessus nonchalamment, entreprenant de se débarrasser ses chausses usées par les chemins.
« J’hébergerais et nourrirais votre chienne... si vous acceptez de répondre à mes questions ? Enfin, après votre bain, bien entendu. »
Relevant la tête pose plonger ses yeux dans ceux d’Alensil, Arador esquissa un air faussement surpris. Avant de secouer la tête d’exaspération mêlée d’amusement. Reprenant son ouvrage, à savoir ôter ses bottes, il ne retint pas un petit rire caustique. Ce garçon avait de quoi le divertir. Autant pas sa jeunesse, son orgueil, et sa naïveté. S’il pensait pouvoir tenir un argument comme celui-ci devant un rôdeur, il était bien présomptueux. Ancan, sa chienne avait déjà vécu bien des hivers. Elle avait déjà connu le froid, la faim, la soif. Elle ne souffrirait pas d’une nuit d’automne passée dehors. S’il souhaite le faire parler, il allait devoir faire des efforts. Car pour le moment, c’était un bien piètre chantage qu’il lui mettait sous le nez. Mais au moins avait-il le mérite de le faire rire. De toute façon, il n’avait pas prévu de refuser.
Au fur et à mesure des minutes qu’il passait ici, Arador voyait une idée se dessiner dans son esprit. Il voulait des informations, cela était un fait, mais il ne pouvait pas laisser le jeune homme ici. Il avait dans la tête une idée pour ce jeune fermier, qui, à ce qu’il pouvait préjuger de sa maison et de l’absence de sa mère, vivait désormais seul. Il avait même un projet pour lui. Et si leurs échanges avaient été plutôt houleux depuis leur première approche, le rôdeur tenterait de se rattraper en répondant honnêtement aux questions que le jeune homme semblait vouloir lui poser. Même si en contrepartie, il ferait en sorte de lui aussi recueillir des informations qui lui seraient nécessaire pour comprendre comment de telles lettre étaient arrivé ici, en apprendre plus sur le jeune homme et son lien avec les rôdeurs, et peut-être l’amener à lui faire prendre conscience doucement de ce que tout ceci impliquait. Pour lui, comme pour Arador.
Enfin déchaussé de ses bottes, le jeune dunedain se leva, ses mains se portant désormais à sa ceinture. Dans son esprit, trottait déjà un avenir pour le paysan. Mais il aurait tout le temps d’y penser. Pour l’instant il avait à répondre à son « ultimatum ». Souriant, il dit d’un ton badin.
-Et bien nous voici avec un accord, très cher ! Cependant il n’est nul besoin d’attendre la fin de mon bain, car je pense que vos questions doivent être de la plus haute importance ! J’ai passé l’âge de m’effaroucher de la nudité.
Disant cela, il tira d’un coup sec sur sa ceinture pour l’ôter de sa taille et la lança non loin de ses bottes. Tournant dos de nouveau au fermier, il fit glisser de sa taille ses braies qui tombèrent alors au sol et qu’il envoya négligemment sur la petite pile que formaient désormais ses vêtements. S’étirant tel un fauve sortant de sa sieste, ses muscles secs mais dessinés à force d'entrainement et de batailles se mouvant puissamment, l’homme, que l’exposition de son corps bardé de cicatrices fines ne semblait pas déranger, se gratta nonchalamment l’épaule avant de se retourner sans gêne pour inviter du regard le jeune fermier à aller chercher sa chienne au dehors. Il ne savait pas qu’Alensil désirait de son côté du temps pour réfléchir et remettre en ordre ses idées. Et même s’il le savait, il n’aurait pas changé sa déclaration. Il aurait bien au contraire, profité de la confusion du jeune homme pour retourner l’interrogatoire, et ainsi l’amener à parler de lui.
Aussi, même si extérieurement, Arador ne montrait que du détachement face à cette nudité qu’il étalait sans pudeur, intérieurement le rôdeur s’amusai d’avance des réactions qu’il allait surement provoquer en agissant ainsi. Provoquer. Il n’était pas un maître dans cet art, mais autant dire qu’il appréciait les moments où il pouvait en faire usage sans craindre de représailles armées. Surtout quand en face de lui sa victime était encore jeune et ne manquerait pas de lui faire savoir sa gêne. Il ignorait en revanche qu’Alensil lui-même considérait son corps avec un tout autre regard que lui Si Arador voyait ses cicatrices à lui comme des marques de ses exploits guerriers, ou encore ses fautes, Alensil lui, n’avait aucune fierté à exposer les siennes, préférant les cacher aux regards des autre qui ne manqueraient pas alors de murmurer sur son passage. Mais les deux hommes se connaissaient trop peu pour que le rôdeur puisse avoir connaissance de cela. Aussi se dirigea-t-il tranquillement vers la salle la fraîcheur et l’humidité ambiante, faisant courir malgré tout sur sa peau d’opale un frisson.
Pénétrant dans la salle d’eau, il trouva un grand bac en métal remplit à moitié d’eau. Y plongeant un doigt, il en apprécia la température, et n’hésita pas longtemps avant de s’y glisser, ne retenant qu’à peine un soupir satisfait. Il semblait avoir laissé derrière lui toute la tension accumulée durant son voyage et imprégnées dans ses nerfs. S’asseyant dans le bac d’eau chaude, il se laissa aller à ferme les yeux pour relâcher la raideur de ses muscles progressivement. Pour l’instant, il se détendait, il entamerait sa véritable toilette plus tard. Pour l’instant l’eau était encore à peu près claire et il ne voulait pas encore la souiller de crasse, de sueur et de terre. Car alors il ne se sentirait pas l’envie d’y rester.
-Ainsi donc je vous attends pour l’interrogatoire, sieur Alensil. S’écria-t-il à travers les parois de bois de la salle d’eau, rigolant intérieurement de l’embarras dans lequel pourrait probablement se trouver le jeune homme.
Il se rappelait comment lui-même n’appréciait pas les gens se mettant à nu devant lui. Mais c’était sans compter un vieil ami. Un vieil ami oui. Il se rappelait de son visage, souriant narquoisement alors que se profilait des opportunités de baignade. C’était lui qu’il lui avait apprit à ne plus craindre la vue d’un corps nu, ni le regard d’un autre sur le sien. Mais il y a bien longtemps déjà qui a disparu. Par sa faute d’ailleurs. Mais cela, Arador ne voulait pas y penser. Pas maintenant.
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Sujet: Re: Quand il est temps de partir [Arador] [Terminé] Jeu 27 Mar 2014 - 19:59
Quand il est temps
►Feat. Arador
Il avait saisi la perche qui lui était tendue, proposant un nouveau marché au voyageur. Mais si l’intrus arrêta un instant de triturer ses lacets pour le regarder, surpris, il laissa bien vite échapper un rire moqueur. Bien entendu, il n’était pas pris au sérieux… Alensil aurait pensé que le bien-être de sa chienne valait bien de répondre à quelques questions, mais il semblerait qu’il s’était trompé. Il ne put empêcher une moue de s’emparer de son visage, et se retint de lever les yeux au ciel. Il ne lui demandait pourtant pas grand chose… Quelques réponses au sujet de son père, il n’y avait pas là de quoi faire un drame. Il ne demandait pas à ce que soit révélés des secrets d’état.... ou du moins, si c’était le cas il n’en serait pas le moins du monde conscient. Ce n’était pas cela qui l’intéressait, et il ne se rendait même pas compte que sa curiosité pouvait en effet éventuellement aller en ce sens.
Quoi qu’il en soit, il avait là une occasion unique, et il ne comptait pas la laisser passer entre ses doigts sans rien tenter. Sa proposition était rejetée, il en ferait une autre. Ou il tenterait une autre approche, il ne savait pas encore… Il commença déjà à réfléchir à ce qu’il pouvait bien faire quand l’homme finalement, accepta malgré tout :
-Et bien nous voici avec un accord, très cher ! Cependant il n’est nul besoin d’attendre la fin de mon bain, car je pense que vos questions doivent être de la plus haute importance ! J’ai passé l’âge de m’effaroucher de la nudité.
La dernière partie de la déclaration le piqua au vif. Arador semblait le narguer, comme s’il avait senti son léger malaise précédent concernant sa nudité et sous-entendait à présent que cela démontrait qu’il n’était encore qu’un gamin. Mais cet embarras n’avait pas été provoqué par sa semi-nudité en elle-même, simplement par le fait qu’il ne savait comment se comporter face à ses cicatrices, préférant finalement ne pas y porter son regard. C’était une autre forme de pudeur que celle à laquelle le voyageur pensait. De plus, il avait la très nette impression que l’on se moquait ouvertement de lui en évoquant ainsi l’importance de ses questions d’un air narquois, comme s’il ne s’agissait de rien. C’était pourtant de son héritage dont il était question. De ses racines, quand bien même il ne savait rien d’elles. Et là était le problème, justement. Il soupira pour lui-même, laissant échapper en un souffle une déclaration qu’il ne pensait pourtant pas utile :
« C’est important pour moi. »
Le rôdeur n’avait-il pas lu ses lettres pour comprendre que tout cela n’était pas une simple affaire de basse curiosité sans intérêt ? Alensil l’aurait bien fixé dans les yeux pour marquer son point, pour montrer que si lui prenait le tout à la plaisanterie, il était pour sa part parfaitement sérieux, mais l’homme choisit alors de lui faire dos le temps de défaire le reste de ses vêtements. Si le fermier ne put s’empêcher de laisser ses yeux traîner un instant sur le royal fessier, ils étaient de nouveau pudiquement détournés quand Arador se retourna finalement vers lui. Tant pis s’il passait pour un blanc-bec… De plus, avoir un peu de retenue dans ses actions n’était pas forcément un mal, dirait sa mère.
Du coin de l’oeil, il le vit s’étirer avant de se retourner enfin, pour croiser son regard et lui indiquer silencieusement de commencer par remplir sa part du marché. Alensil hocha la tête, sans un mot non plus, et se détourna de lui pour rejoindre la porte, de son allure toujours légèrement traînante. Il l’ouvrit pour faire entrer la chienne, et, ne sachant pas son nom, se contenta du terme générique pour l’appeler : « Le chien ? Viens là... ». Il jeta un regard discret au voyageur qui pénétrait dans la salle d’eau et retourna dans la pièce, entendant le bruit d’un corps qui se plonge dans l’eau comme la porte avait été laissé ouverte. Hésitant, il fit presque un tour sur lui-même, regarda Anca, et lui dit : « Trouve-toi un coin et sois sage. Oh, et ne monte pas sur les lits ! ». Sait-on jamais… Entendant la voix d’Arador s’élever, il fronça les sourcils légèrement, sa voix légèrement agacée trahissant son état d’esprit :
« J’arrive ! »
Il n’avait pas le temps de réfléchir, de peser ses mots, de cibler ce qu’il voulait savoir exactement… Il se dépêcha néanmoins, allant tout d’abord remettre ses feuillets à l’abri dans sons ac de voyage. Ensuite, il retira le baquet d’eau du feu pour le remplacer par une marmite en cuivre qui avait manifestement connu de meilleurs jours, son éclat disparu et le métal cabossé par endroit. Il prit le tout premier récipient en main, et se dirigea vers la salle de bain, songeur. Il était embêté par le fait qu’il n’avait pas eu le temps de réfléchir plus avant à ce qu’il allait demander, même si rien ne disait que quelques dizaines de minutes supplémentaires aurait réellement été utiles. Il déposa le bac près de la baignoire, afin qu’Arador puisse s’en servir de la façon qui lui convenait le mieux, dans le bain directement ou en eau de rinçage. Silencieux, et sans vraiment regarder l’homme nu présent dans sa baignoire, il rapprocha une chaise qui était appuyée contre un mur et y prit place. Il frotta son menton du dos de sa main d’un air semi-absent, avant de la reposer sur son genoux.
« Donc. Mon père... »
Il n’était pas sûr de savoir où commencer. Il ne savait rien de lui, si ce n’était quelques banalités. Il avait donc encore tout à apprendre. Sa mère n’avait jamais voulu lui donner de détails à son sujet, arguant qu’elle n’en savait pas plus que lui. Alensil n’avait jamais su si elle disait vrai ou cherchait à lui dissimuler la vérité. Ne lui avait-elle pas déjà menti par le passé ? Quelle était la frontière entre ses fables et la vérité ? « Il était grand et brun, tu lui ressembles un peu. » disait-elle. « Un grand voyageur. » Il était supposé avoir péri en Mer, avant d’être soudainement mort sur les routes, bien des années après son supposé premier décès. Son fils lui en avait voulu longtemps pour ses mensonges, avant de comprendre qu’elle avait dû se protéger elle-même, s’inventer un amour qui n’avait pas existé, un mari fictif et une raison à son absence. Qu’elle avait tenté de le protéger aussi, même si cela n’avait jamais vraiment empêché les villageois les plus jeunes de le traiter de bâtard pour autant…
« Puisque vous dites l’avaoir connu...» Il était sincèrement gêné de devoir avouer qu’il ne savait rien sur son propre géniteur, et n’avait toujours pas posé ses yeux sur celui qu’il était pourtant supposé interroger. « Je voudrais en savoir plus sur lui. Qui il était, ce qu’il aimait… Où il habitait lorsqu’il ne voyageait pas… »
Ohir. Tant de questions enrobaient ce nom. Tant d’interrogations étaient liées fermement à son ombre. Et d’autres encore se rajoutaient, maintenant qu’Alensil se retrouvait à douter de son propre sang. Si Arador était si vieux, quel âge avait ce père qu’il n’avait pas connu ? Quelle était son espèce ?... Il releva finalement le regard sur son invité, ses prunelles trahissant malgré lui son inconfort, mais aussi en partie, la détresse qui l’étraignait... Il avait attendu des réponses sa vie entière, incapable de faire autre chose qu’imaginer et spéculer. Maintenant qu’il caressait l’espoir de se faire une idée réelle de la vérité, ce n’était pas le moment de lui mentir, pas le moment de le rejeter. Et dans tout ça, Alensil ne savait pas qu’Arador ignorait de qui il parlait... C’était à peine s’il était au fait qu’il s’agissait d’un de ses hommes, et le rôdeur venait maintenant d’apprendre qu’il n’était plus de ce monde. Peut-être comprendrait-il alors pourquoi le sujet n’était pas lieu à plaisanterie, pourquoi le fermier avait réagi aussi négativement en le voyant bafouer la seule relique qu'il avait de son père.
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Sujet: Re: Quand il est temps de partir [Arador] [Terminé] Mer 9 Avr 2014 - 23:00
I need a name
« C’est important pour moi. »
Ces mots prononcés plus tôt avaient atteint quelque chose. Surement un peu de la compassion que le rôdeur cachait derrière la gangue de glace qui entourait son cœur endurci par de nombreuses années de solitude. Des mots qui remuèrent en lui quelques souvenirs, tristes pour la plupart, certain plus que d’autres. Il les chassa, les réprimant dès lors que leurs contours commençaient à se dessiner dans son esprit. L’homme ne se souvenait pas de la dernière fois qu’il avait été réellement heureux. Et il ne voulait pas vraiment s’en rappeler maintenant.
Désormais dans son bain, les muscles détendus, la tension de ces derniers jours de chasse à l’orc relâchée, le rôdeur n’en restait pas moins à l’écoute de chacun de bruit provenant des gestes de son hôte. Il entendit distinctement le soupir agacé, les cliquetis des griffes de sa chienne sur le sol dur, le froissement de vêtements, le bruit de bottes. Rien n’échappait à son oreille. Et c’était pour le mieux. Rien ne pouvant ainsi le surprendre. De l’eau dans ses mains, il en répandit une partie sur ses cheveux, l’autre sur son visage. Avec un léger souffle, Arador contempla la saleté qui glissa alors de sa tignasse brune pour rejoindre l’eau du bain. Depuis quand ne s’était-il pas décemment laver ? Il avait cessé de compter les jours.
Distraitement, il distingua la voix du jeune homme qui ordonnait à sa chienne. Il retint un petit rire. Nulle ne pouvait commander à l’animal. C’était un esprit libre. Bien patient serait celui qui arriverait à lui tirer obéissance. Il lui avait fallut la sauver de la mort, et de nombreuse année de vagabondages pour parvenir à tisser avec l’animal des liens autrement plus fort que celui simple de maitre à vassal. Et même en cela, il ne parviendrait jamais complètement à retenir l’animal. Et ne le désirait pas. Car lui-même friand de liberté.
Sur cette pensée, le rôdeur commença à frotter la peau de son cou, l’en débarrassant de la crasse s’y étant logée. Il commença à faire de même avec son torse lorsque le jeune fermier revint avec un bac d’eau pur qu’il déposa non loin de la baignoire. Avec un signe de tête, le rôdeur l’en remercia. Il savait que cela devait coûter au garçon. Autant car il avait bien conscience de ne pas être d’une compagnie très agréable, autant car l’eau surement avait-il du la puiser plus tôt pour un autre but. Aussi il ne regrettait pas d’avoir payé d’une pièce d’or les service qui lui étaient rendus. Maintenant, lui restait encore une tâche à accomplir avant d’avoir rentabilisé complètement sa monnaie.
« Donc. Mon père... »
Nous y étions. Ainsi commençait l’interrogatoire. Dans quel sens irait-il ? Serait-il à l’avantage d’Arador, qui sans nul doute en profiterait pour extirper toutes sortes d’informations au jeune homme…ou Alensil parviendrait-il à tirer les vers du nez, à son invité ? Pour sûr le rôdeur espérait que cet conversation soit à son avantage, mais il avait bien appris que rien n’était jamais gagnée d’avance. Aussi les mot du paysan, la tonalité de sa voix, sa postur,e et les traits de son visage…tout cela éveilla en lui un sentiment étrange. Il lui semblait se revoir lui-même de longues années plus tôt, dans le bureau d’un certain Semi-Elfe. Un elfe qu’il avait longtemps appelé son père, avant de réellement chercher à savoir qui était réellement son paternel. Il ne se rappelait pas de tous les détails de la conversation qu’il avait eut. Mais pour sûr, cette entrée en matière ne lui laissait pas le droit de se conduire avec nonchalance. Un soupçon de l’identité de l’auteur des notes et récits de voyages lui avait effleuré l’esprit, mais désormais il en était sûr. Et cela était d’autant plus troublant que désormais il se sentait dans l’obligation de traiter le jeune homme avec des pincettes. Pourquoi ? Et bien les affaires de familles étaient pour lui un sujet sensible. Et il se rendait compte maintenant qu’il savait, que ses actes envers le fermier, avaient été quelques peu légers. Mais pour sa défense, égoïste certes, il n’en savait rien. Toutefois par considération le rôdeur changea subtilement d'attitude, se montra plus...à l'écoute dirons-nous.
« Puisque vous dites l’avoir connu...»
Stoppant tout mouvement, Arador mit enfin toute son attention à l’entière disposition des paroles d’Alensil. Il avait décidé de ne plus agir avec désinvolture. Le sujet ne s’y prêtant d’ailleurs pas vraiment. Le père d’AlensiI. Un rôdeur du Nord comme lui, à ce qu’il avait lu dans ces feuillets que le garçon cachait encore dans son pantalon. La pensée le fit sourire mentalement. Il cherchait lui-même à en savoir plus sur cet homme mystérieux qui citait son nom dans ses récits. Désormais il était conscient que celui-ci avait une valeur sentimental aux yeux de son hôte, et s’il avait été un peu moins « vieux », rompu à la vie dur des terre du Nord, et sa compassion effeuillé, il aurait sans nul doute adoucit son regard. Inutile de préciser qu’il ne le fit pas. Il avait déjà vécu bien des choses, et c’était peut-être injuste, mais il ne se sentait pas le devoir d’épargner les autres là où lui avait tant souffert. Néanmoins, un certain honneur lui intimait toutefois d’être honnête et sincère avec le garçon. Il avait déjà pas mon écorché sa fierté, et son l’intimité sans réel but. Et tout paysan qu’il soit, , le garçon pourrait se révolter plus durement de son attitude et se refermer complètement. Ce qui serait embêtant, Arador cherchant lui à savoir le nom dudit père.
Mais pour revenir à l’interrogatoire, et après ce petit moment de réflexion le rôdeur se sentait le devoir de remettre à l’heure quelques pendules, histoire de ne pas se retrouver pris à défaut. Il avait certes dit avoir connu l’auteur des lettres…mais comme il était connu de beaucoup de dunedains... L’auteur de ces lettre en étant un, de cela il était sûr…et oui il était probable qu’il l’ait connu. Mais cet écrivain pouvant être n’importe qui dans son entourage proche où lointain, il n’avait cependant pas de nom ni de visage précis en tête pour répondre à des questions précises. Au départ, il avait surtout sorti cette affirmation comme un moyen de capter l’attention du garçon au tempérament primesautier.
« Je voudrais en savoir plus sur lui. Qui il était, ce qu’il aimait… Où il habitait lorsqu’il ne voyageait pas… »
Et il avait désormais sur les bras des questions auxquelles il ne pouvait donner de réponses précises. Enfin si, il pouvait toujours répondre…mais ce serait surement très vaguement, et cela sonnerait comme encore une mauvaise blague. E t même s’il pouvait affirmer qu’il ne se préoccupait pas de ce que l’on pouvait bien penser de lui, il lui était étrange de cerner au fond de lui-même, qu’être déprécier par le jeune homme n’était pas ce qu’il voulait. Il ne voulait pas vraiment être apprécié non plus. C’était autre chose. Mais il ne pourrait pas en parler. Aussi, rejeter sa tête en arrière, il tourna son regard vers celui du fermier qui semblait confus quant à ses désirs. Un peu gêné peut-être. Le jeune homme était assis non loin de lui, de sorte qu’il pouvait détailler chaque trait de son visage. Un visage qui avait des similitudes avec certain de ses semblables. Mais rien qui ne puisse l’aider à deviner de qui il pourrait être le fils. Après tout, des rodeurs du nord, l’on savait bien que tous étaient bruns, grand, et portait noblesse et sagesse sur leurs visages. Et mis à part la noirceur de ses cheveux et la finesse de certains trait de sa figure, rien ne laissait apparent qu’ils étaient parents.
Enfin ce qui importait déjà pour l’instant c’était de stopper la litanie de question qui risquait de lui tomber dessus quant à la mécompréhension d’Alensil quant à ses paroles. Mais quelle idée de toujours faire des doubles sens aussi. Quelques fois Arador maudissait les elfes pour lui avoir inculqué cette façon de ne jamais vraiment en venir au fait. Cette façon de toujours louvoyer avec les mots, les énigmes, les points de vues et les sens-cachés. Il s’en serait bien passé en quelques occasions comme celle-ci. Levant la main pour couper court au flot de paroles l'assaillant, Arador s'exclama.
« Je t’arrête tout de suite garçon…J’ai dit que j’ai connu celui qui a écrit ces lettres…mais je n’ai jamais dit que j’ai connu ton père. Si tu veux des réponses précises à tes questions, il va d’abord falloir me donner un nom…où je pourrais passer le reste de mes jours à te raconter l’histoire de chaque rôdeur ayant croisé mon chemin»
Et il est fort probable que tu n’y survive pas…que tu ne me survive pas surtout, voulut-il rajouter…mais il se retint, ce serait un trait d’humour qu’il surement ne serait pas apprécié pour l’heure. Assis de façon plus ou moins confortable dans la « baignoire » du fermier, le chef des dunedain se demanda distraitement, s’il pourrait emmener le garçon avec lui après cette nuit. Après tout, il en apprendrait beaucoup plus sur la vie de son père en allant dans le nord, qu’en restant ici à chérir des feuilles de papier jaunis. Mais ce ne fut qu’une pensée, qui disparue aussi vite qu’elle était arrivée, le laissant de nouveau attentif.
Dernière édition par Arador le Mar 20 Mai 2014 - 21:10, édité 3 fois
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Sujet: Re: Quand il est temps de partir [Arador] [Terminé] Mer 23 Avr 2014 - 16:06
Quand il est temps
►Feat. Arador
Les questions se bousculaient dans sa tête. Il ne savait où commencer mais formula quelques premières interrogations, pour tâter le terrain. Demanda d’abord des choses vagues, ce que son père aimait par exemple… finissant par une autre plus précise et plus pernicieuses : où il habitait. Derrière celle-là se cachaient bien d’autres choses, qui le hantaient depuis tout petit. Mais il n’eut pas le temps de penser plus avant. Il ne comptait pas révéler aussitôt ses pensées à ce sujet, déjà suffisamment honteux de devoir admettre de pas connaître son propre père, et mériter son appellation de Corniaud, mais peut-être aurait-il demandé d’autres simili-banalités, oui. Il s’arrêta cependant tout net, discipliné, en voyant la main se lever devant lui, l’eau laissant entendre son léger clapotis sous ce geste.
« Je t’arrête tout de suite garçon…J’ai dit que j’ai connu celui qui a écrit ces lettres…mais je n’ai jamais dit que j’ai connu ton père. Si tu veux des réponses précises à tes questions, il va d’abord falloir me donner un nom…ou je pourrais passer le reste de mes jours à te raconter l’histoire de chaque rôdeur ayant croisé mon chemin »
Mais celui qui avait écrit ces lettres était son père… Le fermier avait laissé l’homme s’exprimer, dubitatif, avant que ne s’échappe finalement de sa bouche un rire bref et sombre, proprement désabusé. Il était si stupide. Peut-être que le voyageur avait bien fait de le prendre de haut et le prendre pour un idiot finalement, c’était bien ce qu’il était apparemment. Pour aller jusqu’à croire ses propos et espérer comme une pauvre gourde qu’il pourrait enfin avoir les réponses que sa propre mère s’était toujours refusée à lui donner. Ce, le jour-même où il passait sa dernière nuit chez lui. Une telle coïncidence… était pure folie. Et lui, était la poire de l’histoire. Il se pencha légèrement, tête baissée tandis que sa main passait sur son visage. Quel imbécile s’attardait encore à chercher ses racines à son âge de toute façon ? Il était un bâtard. Les garçons de la ville l’avaient toujours appelé ainsi et il aurait mieux fait de s’y faire plutôt que d’espérer il ne savait quel sottise. Ce n’était pas comme si ces réponses allaient le rendre plus heureux de toute façon, si ? Elles ne pouvaient décemment atténuer la peine qui étreignait son coeur, de se savoir seul au monde à présent. Chasser un fantôme n’aiderait en rien. Même si c’était son rêve de petit garçon... il était temps de grandir. Il ne serait pas son père. Qui qu’il fut. Il était sa propre personne. Pas le résidu de sa semence. Sa mère l’avait élevé seule et ce Ohir n’avait rien fait d’autre que lui mettre des idées de voyages en tête. Il ne serait pas cet homme. Cet homme incapable de comprendre derrière les mots de celle qu’il a engrossée que Si, elle a besoin de lui, quoi qu’elle dise. Cet homme qui préfère sa liberté à ses responsabilités. Ou, pour tout ce qu’il en savait, avait peut-être bien une autre famille ailleurs, une vraie et officielle. Cet homme qui avait écrit à peine quelques mots sur des années, comme si cela pouvait suffire à se dédouaner. Comme si cela avait pu suffire à un fils.
Alensil prit une profonde inspiration avant de relever la tête et finalement se redresser, sans manquer de regarder son invité, cette fois. Ses yeux, sombres mais perçants, se plongeant dans ceux du rôdeur. Il rompit le contact visuel pour se lever, prenant toujours appui sur la même jambe sans même y prêter attention. Le voyageur avait eu l’air sérieux, pourtant, quelques minutes avant. Comme s’il était réellement prêt à l’écouter, et à lui parler. Mais l’annonce lui avait fait l’effet d’un seau d’eau glacial. Ca réveille et remet les choses en perspective. Rien ne lui disait qu’Arador saurait lui répondre. Rien ne lui assurait qu’il lui dirait la vérité. Et encore une fois, rien de tout cela ne garantissait que cela le changerait en bien, ou saurait l’apaiser... Il se le figurait réellement pour la première fois. Et il se sentait vide. Même sa colère et sa fougue avaient disparue, et il eut beau fouiller au fond de lui un instant, il eut beau avoir l’envie de vouloir s’énerver, de vouloir lui décocher une droite en plein visage pour lui apprendre à jouer ainsi avec les gens, Alensil ne trouva même pas la force en lui pour ce faire. Il était simplement vide, et soudainement fatigué de tout cela. D’avoir couru et chasser toute ces années après une idée, qui ne pourrait de toute façon jamais être à la hauteur de ses espérances. Sans un mot, il parcourut les quelques pas qui le séparaient de la porte de la salle d’eau et l’ouvrit, laissant entendre le très léger grincement familier. Il y marqua tout de même une pause, et annonça sans prendre la peine de jeter un coup d’oeil en arrière, d’une voix quelque peu monocorde mais néanmoins parfaitement audible :
« Ohir. Son nom c’était Ohir... »
Après quoi il referma la porte derrière lui. Symboliquement, disait-il au-revoir à ce Ohir ? C’est ce qu’il aurait aimé penser, mais rien n’était moins simple. Déjà, les pensées se bousculaient à nouveau. Il tacha de se faire ferme, de les repousser. Mais l’une d’elle s’imposa à lui. Certes il n’était pas son père, mais comment pourrait-il jamais fonder une famille et avoir un fils lui-même, s’il ne possédait pas quelques informations sur son sang ? Que faire si ses enfants lui demandaient pourquoi il avait l’air d’une jeune homme à soixante ans (pour peu que ce soit possible, et que ce fut son cas) ? Il fallait qu’il puisse leur donner ces informations-là au minimum. Combien de temps ils auraient devant eux. Combien il en avait devant lui. Tant pis. Il ne voulait pas retourner dans la salle de bain, et décida qu’il poserait la question plus tard, sérieusement. De toute manière, s’il était un sang mêlé il n’y aurait aucun moyen de prédire avec justesse sa longévité. Sauf si le cas s’était déjà présenté. Mais en attendant, il sortit prendre l’air et puiser un peu d’eau pour qu’ils puissent boire, et pour rallonger la soupe qui leur servirait ensuite de dîner.
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Sujet: Re: Quand il est temps de partir [Arador] [Terminé] Mar 20 Mai 2014 - 23:52
« C'est pataud, un homme, quand il est ému, il ne sait pas exprimer ses sentiments, par pudeur virile. »
Arador avait toujours sût qu’il n’était pas doué avec les sentiments. Ou du moins il avait déjà suffisamment blessé de gens autour de lui pour l’avoir compris. Les siens comme ceux des autres n’étaient jamais à l’abri. Il se savait toujours constamment en danger lorsque s’approchait de trop près une âme meurtrie. Car lui-même durement éprouvé, et pas totalement guérie, ne savait comment gérer peine et douleur. Comme il venait de le démontrer à l’instant en tuant dans l’œuf l’espoir d’un jeune garçon qui souffrait de n’avoir jamais connu son père. L’espoir qu’il avait eu de trouver des réponses auprès du Dunedain, le jeune garçon l’avait vu s’évanouir à l’instant où celui-ci leva la main pour l’interrompre. Presque inconsciemment, en coupant l’élan du fermier, Arador avait voulu se protéger égoïstement. Se protéger d’un nouveau désastre…qu’il avait finit immanquablement par provoquer.
Le rire sombre et sans joie du jeune homme le secoua plus durement qu’il ne l’aurait souhaité. Il n’avait pas voulu ça. Ce n’était pas de sa faute ! Il s’en persuada. Pourtant la culpabilité revint l’aiguillonner alors qu’Alensil passait sur son visage désabusé une main rendue rude par le travail des champs il supposait. Lorsque le garçon planta son regard sombre, acéré, dans le siens, le rôdeur voulut s’excuser pour ses paroles, c’était sa dernière chance de le faire…mais aucun mot ne franchit ses lèvres. Il resta muet, et observa le jeune homme se lever dans l’intention de quitter les lieux. Qu’avait-il fait ? Pourquoi cela devait-il toujours se passer ainsi !
« Ohir. Son nom c’était Ohir... »
Ce furent les derniers mots d’Alensil avant que celui-ci ne referme derrière son passage, la porte de la salle d’eau. Sans même un regard en arrière. Arador lui, se sentit tout à coup misérable. D’un geste aussi rageur que dépité, il jeta son poing dans l’eau. Comment avait-il encore put se montrer aussi détestable ? Que se passait-il dans sa tête pour qu’il n’arrive pas à converser avec le jeune homme sans automatiquement lui causer du tort ! Il se savait difficilement empathique, mais à ce point il n’en revenait pas lui-même. Sa tête rejetée en arrière, son souffle douloureux, le rôdeur ferma les yeux, essayant de sa souvenir de la dernière fois où il avait eu une véritable conversation avec quelqu’un…la dernière fois où il avait put parler sans que ses mots ne déclenchent aigreur ou encore colère. Il ne se rappelait pas. Tout ce qu’il revoyait c’était le miroitement d’une chevelure auburn, aux éclats cuivrés, et deux yeux bleus pénétrant, lui forant le cœur avec sadisme. Miriel. Sa douce épouse. La mère de son fils. Pourquoi l’avait-elle abandonné ? Pourquoi était-elle partie ? Elle l’avait laissée seul avec ses démons, et un fils qui grandissait, lui devenant de plus en plus étranger. Elle était la dernière personne avec qui il avait encore été lui-même. Vraiment lui-même. Pas ce simulacre, qui ne répandait autour de lui que morgue, et dédain. Que les valars lui pardonnent…
Son lourd soupir et les clapotis de l’eau dont il usait, furent les seuls bruits qui emplirent la pièce dans les minutes qui suivirent le départ du fermier. Tentant de mettre de côté sa culpabilité, le rôdeur entreprit de se nettoyer de toute la crasse le couvrant. Il frottait fort, très fort, peut-être trop, la peau d’albâtre qu’il avait hérité de sa mère disait-on. Il laissait sur elle les marques rouges d’un traitement acharné. Il s’était frotté comme pour ôter sur lui autre chose que la saleté de la route. Il ne savait pas quoi, mais il fallait que ça sorte. Cette gêne pourtant ne fit à son grand dam que s’accentuer. Et de guère lasse, il finit par reposer l’éponge qui lui avait été prêté. Sortir du bain s’avéra plus difficile que prévu. L’homme se sentait pataud. Avoir relâché autant de tension l’avait amolli, et le temps qu’il retrouve toute sa force, il sentit ses jambes lui faire faux-bon l’espace d’une seconde. Sortie du bain, l’eau laissée derrière lui grise et saumâtre, Arador se rhabilla des vêtements qui lui avaient été alloués. Attachant ses braies, il cherchait un moyen se sortir de cette affaire malaisée dans lequel il s’était mis. Tout aurait été beaucoup plus simple s’il avait simplement été en ville. Mais non il avait fallut qu’il se remémore être passé par-là dix ans plus tôt. Il avait fallut qu’il se souvienne d’un petit garçon de treize ans l’ayant intrigué par la curiosité de ses yeux. Il avait fallut qu’il s’enquière de savoir ce qu’il était devenu. Et bien désormais il avait sa réponse.
Revenu dans la salle principale, telle une ombre, muet, il resta un moment à observer le jeune homme remuer dans un chaudron bosselé, le diner qu’ils allaient surement partager dans un silence gêné. Son regard gris détaillait la position pensive, peut-être accablé du jeune homme. Comme si celui-ci était aux prise avec des réflexions trop profondes pour qu’elles le laisse de marbre. Le silence entre eux était pesant et lourd alors. Arador aurait presque put le couper de sa lame. Il aurait put le laisser s’éterniser. Se murer dans le silence, et fuir les demandes qu’il avait lui même déclenchées, par sa curiosité intempestive et son désir de contrôle sur tout ce qui pouvait se rapporter à lui. Il aurait put fuir oui. Mais alors il n’aurait put se regarder en face et se nommer seigneur, sans mourir de honte. Il aurait put dédaigner le garçon, mais au lieu de cela, il fit quelque chose de bien plus sage. Après tout, l’autre était de son sang. Il lui devait au moins çà.
-Ton père…commença-t-il d’une voix lointaine, comme voilée par le temps qui avait passé. Le rôdeur soupira lourdement avant de s’assoir lentement sur un tabouret de bois simple, délaissé non loin de celui d’Alensil…j’ignore si ce que je vais te dire, sont des choses que tu as longtemps rêvé d’entendre, si elles vont te réjouir, te laisser indifférent, ou encore te blesser…séchant sa longue chevelure en de petits gestes énergiques, il ne regardait toujours pas le jeune fermier, peut-être trop lâche, peut-être parce qu’il n’avait pas besoin de le regarder pour savoir que le garçon n’avait aucune sympathie à son égard, et qu’il le méritait bien, …je ne sais pas ce que ça fait d’être né sans père…j’ai eu l’immense honneur d’en avoir eu deux...
Il repensa alors à Argonui. Treizième chef de dunedains. Héritier d’Isildur, seingeur du Nord et du Gondor si les dieux avaient été plus cléments. Son père, son roi. Son meilleur ami. Et Elrond. Le Semi-elfe, seigneur d’Imladris, régent de terre qui lui appartienne de droit. Son tuteur, son mentor, Son père d’adoption. Sa pierre de touche, il fut un temps. Oui il repensa à ses deux pères. A ce qui les unissait dans son cœur. A ce point qui les séparait…ce gouffre qui les séparaient…l’un était mort sans que l’autre n’ai rien fait… Valait-il mieux en avoir deux que pas du tout ? Ou même un, que rien ? Il ne saurait répondre à sa propre question. Vu où cette double paternité l’avait mené, il ne se sentait pas la force d’explorer plus loin les avantage et désavantage d’être un bâtard, ou d’être au contraire un pupille. Avoir un géniteur, et avoir un père étaient déjà des choses bien compliqué à concevoir pour un enfant, et difficile à avaler pour un adulte. Et quand l’un des deux mourrait par la faute de l’autre, comment réagir alors ? Il avait choisit la haine. La colère, le rejet. C’était plus fort, c’était plus facile, et ça permettait de continuer à avancer en transformant la douleur en arme. C’était aussi lâche et bien humain. Mais c’était cela que parfois il avait oublié lors de son enfance à Imladris, c’était bien sa condition de mortel...Ohir lui, ne l’oubliait, jamais.
-Oui,…ton père je l’ai connu. Peut-être pas aussi bien que d’autres, mais assez pour t’en parler brièvement... Un homme honorable, qui respectait l’ordre et qui aimait la vie, un peu solitaire, mais je ne suis pas le mieux placé pour en juger…il prit une profonde inspiration… et qui comme beaucoup d’autres hommes avant lui, était un rôdeur du nord. Un dunedain comme moi-même,…un noble gardien des terres du Nord, un grand voyageur, un pauvre vagabond, ou encore un vaurien qui a pris ta mère, lui a refilé sa semence pour ensuite la laisser sur le carreau…c’est comme tu veux, ce n'est pas à moi d'en décider.
Dieu qu’il aurait voulu sur le moment une bonne pinte de bière et de l’herbe à pipe.
-J’ignore comment il est arrivé ici, si il aimait vraiment ta mère ou pas…je pense que même si je le savais ça ne changerait pas grand-chose maintenant…Il n’aurait jamais put rester vivre avec vous… Ta mère et toi… Parce que sa vie était déjà ailleurs. Sa femme ? Son devoir. Son fils? L’innocent sur les routes de la vielle Arnor. Et rien ne lui tenait plus à cœur que cela.
Ses mains jointe le dunedain avait les yeux rivés au sol, sentait se déverser hors de lui des mots qui ne semblaient plus vouloir être brimés.
-Tu peux lui en vouloir, c’est ton droit. Tu peux aussi m’en vouloir, je ne suis pas exempte de reproche. Mais avant, j’aimerais te raconter un histoire…une histoire qui remontent plusieurs générations avant ma propre naissance, et qui peut-être va t’explique rbon nombre de chose sur ton père et sur toi-même…veux-tu l’entendre ?...
Disant cela, il releva la tête, incertain, demandant de ses yeux la permission au jeune fermier de continuer à exprimer tout ce qu’il avait encore à dire. Après tout, l’histoire qu’il allait raconter, les concernaient tous les deux, tout descendant des grand hommes de jadis qu’ils étaient.
Dernière édition par Arador le Ven 30 Mai 2014 - 15:49, édité 1 fois
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Sujet: Re: Quand il est temps de partir [Arador] [Terminé] Sam 24 Mai 2014 - 18:22
Quand il est temps
►Feat. Arador
Il avait plongé son regard sombre dans le sien, sans réellement savoir pourquoi. Etait-ce pour y déceler quelque chose de particulier ? Pour lui montrer qu’il lui en voulait à un point où les mots ne suffisaient plus ? Pour lui laisser une dernière chance de s’exprimer en le regardant en face s’il l’osait ? Peut-être tout ça à la fois. Mais si l’étranger sembla un instant vouloir lui dire quelque chose, il n’en fut rien et bientôt, Alensil fut à la porte de la salle de bain, un nom sur ses lèvres, et il laissa son invité, ou plutôt son client, à sa toilette.
A peine sorti, les pensées l’assaillaient déjà de nouveau, le laissant face à une évidence nette : s’il ne devait plus s’enquérir de son père, il lui fallait à minima savoir ce qu’il en était de sa propre personne. Il descendit dans la cour, afin d’aller puiser de l’eau pour le dîner. Il frissonna en sentant la brise le fouetter. L’air s’était encore passablement rafraîchi et le soleil menaçait à présent de disparaître à l’horizon, par-delà la plaine et les champs. S’avançant en direction de l’étable pour y trouver un seau (l’autre étant occupé avec Arador), il fronça les sourcils un instant en devinant une masse sombre à l’intérieur, avant de marquer une pause surprise en comprenant quel était le tableau qui lui faisait face.
« Je vois que tu as déjà trouvé ton dîner… »
Le cheval plia sa noble encolure pour le regarder, l’air parfaitement tranquille. Cela fit même sourire le garçon le temps d’un court instant, ses questions s’effaçant alors de son esprit pour un moment de répit, qui ne dura cependant pas. L’expression s’effaça de son visage qui redevint sombre et pensif. Puis, tout en continua à parler à la bête d’une voix égale, comme s’il tenait une conversation avec un autre être humain, il parcourut l’étable du regard et retira du passage quelques objets qui auraient éventuellement pu lui porter préjudice, pour les enfermer un peu plus loin. Ainsi, la monture pouvait rester là et y passer la nuit à l’abri sans que cela ne pose de souci. C’était probablement le mieux ; son propriétaire pourrait venir l’attacher plus tard s’il le souhaitait, mais au vu de son avertissement précédent et du fait qu’il ne l’ait pas fait en premier lieu, Alensil préféra le laisser tranquille. Les ballots de foin étaient à sa disposition, et s’il désirait boire l’abreuvoir de la cour n’était pas bien loin. Le fermier prit ensuite son seau, et referma tout de même un des battants de l’entrée et coinça le second par précaution avec une grosse pierre afin que le cheval puisse aller et venir à sa guise sans que le froid ne s’engouffre trop à l’intérieur. Quand ce fut fait, il tapota le museau de sa propre monture qui demandait son attention derrière les murets de son box, et sortit de nouveau. Il alla puiser de l’eau à la force des bras avant de retourner dans la ferme afin de s’affairer rapidement à sa soupe. Elle était déjà prête et il se contenta de rajouter un peu d’eau avant de la mettre à chauffer. Il y avait assez pour deux personnes, car il y avait mis une partie des vivres qui étaient en réserve pour sa mère et lui. D’habitude, c’était plutôt elle qui cuisinait pour eux deux, et pour les occasionnels journaliers qui venaient les aider en haute saison. Or, cela faisait déjà deux jours qu’il mangeait la même tambouille ordinaire, dont la saveur n‘égalait pas la sienne, rappelant un peu plus vividement encore sa perte.
Quand il entendit finalement le son du pas régulier du rôdeur derrière lui, Alensil se crispa malgré lui légèrement, sortant de ses pensées et souvenirs en un instant. Il ne savait trop à quoi s’attendre à présent, ni comment il était supposé se comporter. Il fixa encore plus intensément le bouillon qu’il touilla encore, histoire de se donner quelque chose à faire, mais ce fut l’étranger qui prit les devants. Ses premiers mots lui firent redresser la tête de quelques millimètres sans qu’il n’en soit conscient. Son père... Maintenant qu’il avait son nom, Arador allait-il lui en parler ? Non. Le fermier se houspilla mentalement, se refusant à porter ses espoirs trop haut, et à retomber dans les mêmes travers. Son coeur battant pourtant plus que d’ordinaire, il tendit l’oreille. Mais sans se retourner, sans le regarder. Les yeux toujours rivés sur le pseudo ragoût… Comment pouvait-on avoir deux pères ? Sa mère avait-elle pris deux époux successivement ?... Il ne posa pas la question, jugeant qu’il en avait déjà assez fait avec sa curiosité incessante pour la journée. De plus, ses réelles préoccupations étaient ailleurs. Ses lèvres se pincèrent quand Arador poursuivit enfin, confirmant qu’il avait bien connu l’auteur de ses lettres. Pas très bien, mais il l’avait connu. C’était toujours plus que ce qu’il pouvait dire de son côté. Lui qui était pourtant son fils. Mais il ne laissa pas la jalousie s’emparer de son esprit à cet instant, face à cet homme qui avait eu deux pères et connu le sien. Cela ne le traversa pas même une seconde.
Non, mais en revanche il s’agrippa à chaque mots qui se déversa de la bouche de son aîné. Honneur. Respect. Amour de la vie. Légèrement solitaire. Rôdeur et gardien du nord, Dùnadan. Alensil avait retenu son souffle en partie en cours de route, sans même s’en apercevoir, et cessé de remuer stérilement son potage également. Mais quand sa mère fut évoquée, il posa ses mains à plat sur le meuble devant lui, se penchant légèrement en avant alors qu’il s’y appuyait, et il tenta de reprendre une respiration qui se voulait normale. Ses doigts se contractèrent sur le bois massif à l’écoute de la suite sans qu’il n’y puisse rien faire, ses articulations devenant presque blanches sous la pression. Les innocents en Arnor. Son devoir. Toujours silencieux, plus que jamais même, et parfaitement immobile, presque tendu dans cette position, le fermier pouvait sentir ses yeux se gonfler de façon alarmante. Allons donc... Il cligna des yeux et se redressa, saisissant à nouveau la louche et se remettant à remuer la soupe. Il ne pouvait pas se laisser gagner ainsi par les émotions. Il ne comprenait même pas d’où elles venaient et ce qu’elles étaient. Etait-il soulagé, heureux, en colère, ou accablé ? Il ne saurait le dire lui-même. Mais il remarqua que sa main tremblait presque, et son propre état l’énerva un peu plus encore. Est-ce qu’il en voulait à son père ? Oui, cela il en était certain. Ces explications n’avaient pas changé ce fait, et si cela faisait de lui un égoïste, ainsi soit-il. S’il en voulait tout autant à sa mère de l’avoir laissé dans l’ombre, de lui avoir menti, il ne pouvait pardonner si facilement au premier responsable. Avoir des activités nobles sur les routes ne l’exemptait pas de toute faute. Ne le blanchissait pas d’avoir abandonné sa famille ainsi, sans un regard en arrière pendant toutes ces années. Il aurait pu comprendre, pourtant. S’il avait été seulement un peu plus présent. Il aurait pu comprendre son sens du devoir et ses longues absences. Il aurait même pu en être fier, qui sait ? A la question, il releva la tête et se contenta de répondre simplement :
« Puisque vous semblez disposé à parler... »
Sa voix quelque peu étranglée trahissait son émoi et il se maudit un instant pour cette faiblesse qu’il ne comprenait définitivement pas. Il n’était plus un enfant. Il ne voulait pas paraître ainsi devant l’Autre. Qui s’était ri de lui, avait désacralisé son bien le plus précieux, avait menti et… et… et il ne savait même plus quoi ! Trop de choses se bousculaient et il ne savait plus où il en était. Toujours dos au rôdeur, il ferma les yeux un instant et se raccrocha à sa seule constante, aussi ironique soit-elle. Le souvenir de sa mère l’apaisa. Son ancre, même après son trépas. C’était elle qui lui disait qu’il valait mieux avoir les pieds sur terre que de rêver à un père qui n’était plus. Enfin, il se remit en mouvement et cessa de tourner le dos au rôdeur pour aller rassembler des écuelles, verres et couverts, et les rapporter à table. Sans croiser le regard d’Arador, trop fier probablement pour avoir envie de trahir un peu plus encore son état, il se contenta de les placer devant eux et de prendre place sur son tabouret de bois, en silence.
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Sujet: Re: Quand il est temps de partir [Arador] [Terminé] Ven 30 Mai 2014 - 15:42
« You're my flesh and blood»
Assis sur son tabouret, le dos courbé dans une position pensive, l’héritier d’Isilidur hésitait. Il hésitait car ce qu’il s’apprêtait à raconter au jeune fermier n’était pas seulement, l’histoire de son peuple, l’histoire d’une race, mais aussi son histoire, son héritage, son fardeau. Et cela s’avérait plus difficIle que prévu. Il avait toujours cette espèce de boule au ventre en pensant que tant de choses auraient put être évités. Parfois il se prenait à refaire l’histoire, à changer les attitudes des ses ancêtres. Il se prenait à rêver des grandes cités d’Annuminas, de la citadelle de Fornost, de tous les trésors de son peuple perdus par l’orgueil et la cupidité. Mais ce qui était fait était fait. Et désormais il se devait d’accepter le passé, et construire le futur. C’était son devoir. Et peut-être celui d’Alensil, si après son récit, il souhaitait rejoindre ses semblables.
« Puisque vous semblez disposé à parler... »
A ses oreilles, la voix du garçon, sonna comme un rappel de sa propre maladresse. Il avait vraiment été inconscient de la souffrance du fermier, que c’était avec insouciance qu’il avait bafouillé son intimité, piétiné ses sentiments. Et s’il s’en voulait pour sûr, désormais ce qu’il désirait, c’était repartir sur de bonnes bases…ou au moins se faire pardonner. Il ne le dirait jamais franchement, mais il en avait besoin de ce pardon. Le pardon n’étant pas une chose qu’il donnait aisément lui-même, mais il s’y savait sensible. Aussi Arador n’aurait pu espérer mieux que ces mots lâchés à la dérobé, après avoir joué aux montagnes russes avec les émotions du garçon. Celui-ci semblait prêt à l’écouter, malgré que son dos fût la seule chose que le rôdeur puisse voir de lui, et c’était tout ce qu’il demandait. Se redressant, il prit une grande inspiration qui lui redonna une énergie nouvelle, et peut-être un peu d’espoir. Devant lui, le garçon venait de déposer écuelles, et couverts, pour en définitive s’assoir en face de lui, ses yeux fuyant les siens. Mais cela, Arador ne le releva pas, conscient d’avoir probablement ébranlé le garçon avec ses récentes révélations. Lui-même n’aurait pas eu suffisamment d’humilité pour permettre à un impudent inconnu de lire dans son regard, la profondeur de ses émotions. Il comprenait l’attitude du garçon, celui-ci lui renvoyant comme un reflet de lui-même à son âge.
-Par où commencer…
Bonne question. Il ne savait pas. Le garçon devant lui pouvait bien être un de son sang, il n’en restait pas moins qu’il avait été élevé dans un ferme, pour devenir fermier. Avait-il seulement reçu le tiers de l’éducation qui lui avait été fournie à Fondcombe. Seulement le tiers…Savait-il lire, écrire, compter ? Déjà ça. Ensuite avait au moins entendu parler de l’histoire de la terre du milieu. L’histoire des hommes. Même racontée par des soulards, cela lui suffirait pour démarrer.
C’était une question qu’il se posait alors qu’il mettait en place une trame sur laquelle il pourrait s’appuyer pour étoffer son propos. Une question importante, car elle sous-entendait que si le garçon après réflexion désirait rejoindre les dunedains, il aurait à être éduqué sur sa propre histoire. Mais par qui ? Quelques années plus tôt, il aurait dit Fondcombe, mais cette idée ne lui traversa même pas l’esprit. Peut-être un ancien du village ferait l’affaire, pensa-t-il, avant de ses reprendre. Le gamin ne quitterait pas sa maison, seul, n’irait pas choisir une vie bien différente de tout ce qu’il n’avait jamais connu, pour finir aux côtés d’un vieil homme qui lui ferait la leçon. De tout façon, il était déjà assez grand pour ne plus avoir à obéir à quiconque, il était majeur et sa vie lui appartenait. Et si’l décidait de rejoindre leur peuple, il n’aurait pas le temps, une fois arrivé sur les rives du lac Evendim, de prendre un livre et se mettre aux études. On le placerait de suite avec une épée et un arc en main, voir comment il se débrouillait, on lui ferait passer des petits tests surement, puis ensuite, il serait mis à la garde et la protection des campements des rôdeurs. Pas forcément ce dont un jeune zouave pouvait rêver. S’il partait il aurait besoin d’apprendre sur le tas, dans l’action, et pendant la route. Il économiserait ainsi beaucoup de temps. Et puis du petit aperçu qu’il avait eu de son caractère, le garçon ne supporterait pas longtemps de rester enfermé dans une pièce à étudier, l’histoire, les langues, les sciences, l’astrologie, etc. S’il devait apprendre tout cela, ce serait au grand air, avec des exemples concrets et des situations réelles. Mais qui se chargerait de lui enseigner tout cela ?...La réponse aussi évidente sembla-t-elle le laissa un moment interloqué. Il n’y avait que lui pour faire cela. Mais était-il prêt à prendre un pupille ? Et le garçon le voudrait-il ?
-Au temps des grands roi de jadis, Elendil après la chute de Numénor, fonda l'Arnor et sa première capitale Annúminas dans les terres situées à proximité du royaume elfe du Lindon. Plus connues sous le nom d'Eriador. Ce alors que ses fils, Anarion et Isildur, fondèrent le Gondor dans les terres situées plus au Sud, ainsi que leur première ville: Osgiliath. Commenca-t-il d’une voix posée, prenant son temps pour assembler ses pensée dans un ordre cohérent.
Jamais ses pas ne l’avaient mené à Osgiliath la banche. Les récits la disaient pourtant magnifique. Ce n’était pas faut d’envie, mais ses devoirs l’appelaient à rester au nord. Et puis la ville lui semblait-il avait été dévastée par les orques lors d’une attaque il y a de cela des années. Surement peu de gens y vivaient encore, et probablement avait-elle perdu de sa superbe. Encore un gâchis.
-C'est à partir de cette époque que les Númenóréens exilés, furent rebaptisés Dúnedain. Hommes de l’Ouest qu’ils avaient fui. Les deux royaumes nouvellement créés prospérèrent paisiblement pendant près d'un siècle. Jusqu’à ce qu’une autre puissance, elle aussi grandissante, ne se manifeste. Une puissance ténébreuse. Le Mordor. Et son maitre Sauron. Continua-t-il, son ton s'assombrissant alors qu’il parlait du Serviteur de Morgoth.
Il ne savait pas si le fermier avait même déjà entendu parler de Sauron. Bien des gens de petite condition ne se souciait que de savoir ce que serait leur repas du lendemain. Ce avec raison. Mais cet état d’esprit les rendait alors, bien indifférents aux troubles qui pouvaient se passer dans le reste de la terre du milieu. Cela les rendait ignorant de l’histoire. Une terrible erreur.
-Les forces du Mordor partirent à l'assaut -entre autres- des royaumes Dúnedain, mais un pacte, la Dernière Alliance des Elfes et des Hommes, fut fait entre Gil-Galad, le dernier Haut-Roi des Elfes et Elendil. Alors, les armées du Lindon et des Dúnedain combattirent ensemble le Mordor et finirent par triompher de Sauron, mais au prix de la vie de Gil-Galad, Elendil et Anarion son fils.
Il était fort probable que le garçon se demande intérieurement pourquoi il lui racontait tout ça. Qu’est ce que cela pouvait bien avoir à faire avec son père, ou avec lui. Mais justement, cela avait tout à voir. Et il allait bientôt comprendre. Du moins, Arador l’espérait.
-Après la guerre, débuta le Troisième Age qui semblait s'annoncer plus paisible que les précédents, mais il n'en fut rien. Tout commença quand en 1112, Isildur, fils d’Elendil, fut pris dans une embuscade Orc dans les Champs aux Iris, et périt sous leurs flèches, alors qu’il se rendait en Arnor régner sur le royaume de son père. Son fils Vlandil survécut, et fut couronné roi d’Arnor à sa majorité. Et bien, que la paix dura encore quelques temps, cet évènement présageait le retour de temps difficiles tôt ou tard.
Intentionellement, il cacha au jeune garçon l’histoire de l’anneau Unique. Cela ne le concernait déjà pas. Mais en plus ne ferait que soulever plus de questions auxquelles il n’avait pas le droit de répondre. De toute façon, l’anneau était perdu, nul besoin d’en parler. Parler de chose comme celles-ci ne faisaient que les rendre plus réelles. Et nulle sur cette terre ne voulait voir réapparaitre cet objet maudit. Aussi il continua, rien ne pouvant laisser suggérer qu’il venait de cacher quelque chose à son cadet.
-La mort d'Isildur eut pour effet direct de séparer définitivement les deux royaumes du Nord et du Sud, qui bien qu'amis évoluèrent dès lors indépendamment. Ainsi les Dúnedains aussi se divisèrent en deux peuples plus ou moins distincts: les Dúnedain du Nord et les Dúnedain de Gondor.
Et là arrivait la partie la plus intéressante de l’histoire. Celle qui les concernait déjà de plus près. Celle qui avait conditionné son existence, et régit celle d’Ohir. Cette partie de l’histoire qui avait fait de lui ce qu’il était aujourd’hui, et qui surement avait poussé le père du jeune homme à ne pas rester avec la femme et le fils qu’il avait engendrés. Une histoire plutôt tragique. Une histoire de rois cupide et orgueilleux. Il détestait cette partie là. Beaucoup de chose auraient été évités, si la convoitise et la fierté ne s’étaient pas mêlées. Mais après tout, ils n’étaient que des hommes. Son regard cette fois-ci se posa sur le jeune homme qui de son côté, continuait à éviter tout contact visuel avec lui ; pourtant certain, que celui-ci écoutait quand même religieusement.
-La vie paisible des Dúnedain du Nord s'acheva pourtant en l’an 1300. Quand le royaume d'Angmar commença à leur mener une guerre plus ou moins constante, leur puissance s'affaiblie peu à peu. Pour ajouter à cela, les trois fils d’Ëarendur , dixième et dernier roi d’Arnor, chacun se déclarant roi à sa mort , séparèrent l'Arnor en trois royaume. Et à partir de ce moment, leur nombre ne cessa de diminuer. En l’an 1409, il ne restait que très peu de Dúnedain au Rhudaur. Au Cardolan, les derniers d'entre eux périrent lors de la Grande Peste de l’an 1636. En Arthedain, ils résistèrent plus longtemps, mais quand en l’an 1974, le royaume fut finalement anéanti, ils ne restaient qu'un petit nombre de Dúnedain du Nord qui ne devaient leur survie qu'à l'aide des Elfes du Lindon et de Fondcombe. Toutefois, l'adversité ayant préservé leur hardiesse, leur courage et leur noblesse d'esprit, la plupart d'entre eux devinrent les Rôdeurs qui se donnèrent pour mission de protéger les rares survivants des Peuples Libres en Eriador, parmi eux les Hobbits et certaines lieux de vie des hommes comme le Pays de Bree.
Il s’arrêta là. Le silence qui emplit soudainement la pièce le fit frissonner. Il n’avait peu eu conscience que sa simple voix, racontant solennellement l’histoire des grands hommes des deux dernières Ages, avait à ce point occupé l’espace. Il se sentait soudainement vidé, comme si retracer ainsi le passé, l’avait privé d’une énergie considérable. Mis étrangement, même si épuisé par son récit, il se sentait bien. Etrangement bien.
-Et je suis le descendant de ces hommes là. Tout comme toi. Nous sommes des Dunedains. Moi, Arador, par le sang d’Argonui, mon père. Et toi –pour une raison qu’il ne saisissait pas encore, il laissa tomber le vouvoiement, distant, pour un tutoiement, aimable bien qu’encore un peu solenel- Alensil, par ton père, Ohir. Tous les deux nous appartenons aux derniers survivants d’un peuple qui fut autrefois prospère, noble et respecté. Craint par ses ennemis. Loué par ses pairs.
Il n’avait pas connu ce temps là. Où la race des hommes était glorieuse, et noble de cœur comme de corps. Il aurait aimé. Cela dans les chansons, ne ressemblait en rien à ce qu’il pouvait vivre aujourd’hui. Ils avaient de grandes cités, contrôlaient, l’Arnor, et le Gondor. Ils étaient roi, ils étaient princes. Aujourd’hui, errants, et secrets. Vagabonds disaient les simples hommes.
-Descendant des Numénoréens, nous sommes bénis d’une longue vie et de certaines…capacités dirais-je. Les maladies nous font peu d’effets, nous guérissons rapidement, l’âge ne nous rattrapent que très tard, et au combat, chacun d’entre nous vaut bien deux ou trois soldats du gondor. Parfois en rêves des visions du futur se manifestent aux plus nobles d’entre nous. Notre grande taille, nos cheveux bruns ou noirs de jais, et nos yeux gris font de nous des êtres tout à fait reconnaissables.
Lui-même étant le parfait archétype du dunedain. Svelte, et élancé, ses yeux gris perçant comme ceux d’un faucon, sa longue chevelure sombre le distinguait comme un pur membre des Dunedains. Son fils en revanche lui, de par sa mère, avait hérité d’yeux gris tirant vers le bleu. Mais tout aussi grand et ténébreux, que son père. Une fierté. Et devant lui, s’il n’avait les yeux clairs des rôdeurs, Alensil possédait néanmoins leur allure, et leur chevelure couleur de la nuit.
-Il m’apparait maintenant que nous étions peut-être destinés à nous revoir. Il y a déjà dix ans, peut-être que tu ne t’en souviens pas, mais je suis passé par cette ferme, et déjà enfant, tu étais d’un naturel très curieux envers les rôdeurs. Malgré toutes les précautions que pouvaient prendre ta mère en ma présence, tu n’étais pas dupe. Je me suis dit alors que ce n’était pas que la simple curiosité d’un enfant, avant de me raviser. Mais aujourd’hui, tout semble s’expliquer...Aussi je te demande…
Allait-il enfin le dire ? Ce mot si difficile à prononcer. Surement le plus difficile.
-…pardon. Pour mon attitude envers toi. Pour ma curiosité déplacée. Pour avoir surement brisé certains de tes rêves. Je te demande pardon pour m’être introduit dans ta vie ainsi. Mais je pense que tout cela a une raison d’être…Je ne pense pas me tromper en disant que j’arrive dans ta vie au moment où il te faut faire un choix…ta mère n’est plus là –de cela il en était désormais certains, sinon il y a longtemps qu’elle aurait rappliqué- tu es un homme, et je suis certains que tu aspire à autre chose que cette ferme…
C’était le moment, maintenant. Il allait lâcher le morceau. Cette idée qui tournait dans sa tête depuis qu’il savait le fermier, fils d’un de ses camarades. Lui proposer de rejoindre son clan. Ce n’était pas par charité qu’il faisait cela. Ce n’était pas non plus par compassion. C’était pour lui une évidence. Le garçon faisait parti de son peuple, grâce à son père. Car quoiqu’il en dise, son père lui fournissait de son nom, un toit et une protection, un avenir –peut-être pas aussi radieux que s’il était née d’un noble nanti- . Il serait toujours prêt à accueillir sans conditions, quiconque possédait en lui le sang de ses ancêtres. Certes, ce ne serait pas un choix facile pour le garçon.
Après tout peut-être avait-il d’autres attaches ici que celle du fantôme de sa mère. Peut-être avait-il des amis, une personne qui faisait battre son cœur….S’il décidait de rejoindre les rôdeurs, il devrait abandonner tout cela. Mais alors, il se ferait de nouveaux amis. Des vrais. De ceux qui dure tout une vie. Il ne serait pas mis de côté pour sa jambe. Oui il savait le garçon handicapé. Depuis un moment déjà il avait remarque ses efforts pour cacher son boitement. Mais et alors ? On lui apprendrait comment se mouvoir malgré ce handicap. Il serait comme un deuxième fils pour lui. Et peut-être que là-bas au nord il trouverait une fille à aimer…enfin…il aurait une nouvelle famille.
-Et si tu le désire, tu peux faire parti des nôtres...
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Sujet: Re: Quand il est temps de partir [Arador] [Terminé] Lun 2 Juin 2014 - 22:08
Quand il est temps
►Feat. Arador
Le jeune garçon avait fini par dresser la table rapidement puis prendre place en face du voyageur. Pour autant, il ne chercha pas à croiser son regard, toujours sous le coup d’émotions trop longtemps refoulées. Arador souhaitait parler, encore, lui conter une histoire relative à son peuple, leur peuple. Une histoire supposée l’aider à mieux comprendre son père. Qu’y avait-il de plus à comprendre ici ? Il avait choisi un devoir au-delà d’un autre. Ce n’était peut-être pas ce qu’il aurait voulu entendre, mais c’était la vérité et il l’acceptait en tant que telle. Et c’était toujours beaucoup plus facile à avaler que l’hypothèse selon laquelle il aurait eu une autre famille, ailleurs, dont il aurait préféré s’occuper, plutôt que la sienne. Il pourrait faire la paix avec cette réalité. Pas tout de suite, mais un jour, peut-être.
Il resta muet, fixant un point ou un autre de la pièce en attendant qu’Arador ne rassemble ses pensées. Finalement, ce dernier commença par lui parler de la fondation de l’Arnor et du Gondor. Alensil connaissait ces royaumes, principalement pour les avoir vu sur des cartes, en particulier celles tracées hâtivement par son père dans ses notes de voyages. Pour lui, c’était des noms, des signes, parfois quelques dessins ou phrases associées, mais rien de plus véritablement. Il ne connaissait pas l’histoire de ses ancêtres. Ilúvatar le créateur avait créé Arda, les elfes, les hommes. Ils étaient ses enfants et parcouraient sa Terre. Son éducation en la matière n’était pas bien plus élargie que cela. Certes, habitant non loin d’un ancien grand port, il avait bien sûr entendu parler de Nùmenor, tout comme il était conscient des grandes guerres de jadis, mais il ne pourrait dire qu’il les connaissait réellement, et saurait en parler lui-même. Nombre de choses lui échappaient encore. Il tacha donc de se concentrer, n’étant que peu sûr d’être capable de mémoriser tout ce qui lui serait dit. Trop de noms, trop de lieux, dès les premières phrases déjà. Elendil, Anarion, Isildur. Annùminas, Osgiliath. Il resta attentif et silencieux, répétant mentalement les conclusions de ce récit. Il descendait donc de pauvres hères éxilés. L’alliance avec les elfes contre les attaques du Mordor, il la connaissait. Les noms des grands rois tombés au combat, en revanche, non. Elendil et Anarion morts, il comprenait tout seul qu’il ne restait plus qu’Isildur à la tête des Dùnedain. Ce dernier ne fit pas long feu et voilà qu’on lui parlait à présent de son fils… Allait-il lui refaire toute la généalogie de leurs Rois ? Il n’était pas certain d’en voir l’intérêt à l’instant, même s’il était toujours partant pour ne pas mourir plus bête qu’il ne l‘était... Dùnedain du Nord et dùnedain de Gondor… Il était aisé de se figurer que son père avait dû faire partie des premiers. Des guerres, des royaumes qui se divisent, encore des guerres. Une race qui s’amenuise et se fait chasser pour finalement devenir un peuple errant, au secours des autres. C’était un bien beau conte, mais Alensil ne se sentait pas plus ému que cela par ces bribes d’histoire. Les décisions des grands faisaient le malheur des petits, c’était ainsi. Mais lui, il vivait dans le présent, ou dans le futur proche. Peut-être parce que les paysans comme lui n’avaient pas le loisir de s’épancher sur les siècles et âge passés. Ils ne changeait rien à ce qui les attendaient le lendemain, à s’ils arriveraient ou non à faire pousser leurs cultures, à nourrir leurs enfants. Il observa un instant Arador. Lui, au contraire, semblait exténué par ce récit, comme s’il avait été un poids sur ses épaules. A mi-mots, il termina la complainte d’un Jadis perdu.
Enfin, il parla d’autres caractéristiques liées à ce qu’ils étaient. Une longue vie. Résistance aux maladies, comme à celle qui avait emporté sa mère et décimé le village. Son père, par son sang, lui avait donc sauvé la vie. Il l’avait donnée et prolongée, à défaut de s’y être intéressé plus que cela. Cela le fit presque sourire, amèrement. Et pour la première fois depuis le début de ce long récit, il coupa son invité pour lui poser une question :
« Et vos bâtards ? De combien d’années disposent-ils ? »
Il était cru, mais c’était bien ce qu’il était, après tout, un bâtard. Il se l’était suffisamment entendu dire. Arador ne saurait peut-être pas répondre à cette question, mais Alensil se disait qu’il ne devait certainement pas être le seul corniaud de son genre, si ce qu’il restait de ce peuple passait sa vie à errer dans la campagne. Peut-être les siens avaient-ils pu observer l’espérance de vie de ces autres enfants.
°°°
Alors ainsi, ils s’étaient déjà rencontrés. Alensil ne s’en souvenait pas vraiment. Peut-être était-ce de là que venait son léger sentiment de déjà vu. L’homme lui parlait à présent de destinée, et lui demandait pardon pour ses actes précédents. Le jeune fermier ne put que le fixer un instant, un sourcil se relevant légèrement face à ce flot de demandes d’excuses inattendu. Il lui proposa alors ni plus ni moins que de quitter sa ferme et de rejoindre les siens. Alensil se recula pour caler son dos à la chaise, et fixa le rôdeur. C’était son tour de parler, en ce cas. Et c’est ce qu’il fit, sans la moindre hésitation.
« Non. Je ne désire pas faire partie des vôtres, Arador. »
Sa voix était sombre mais elle trancha le silence de la maisonnée avec une clarté nette. Sa réponse ne semblait pas ouverte à débat. Faire partie des leurs... Retrouver ses racines et faire partie d’un tout. Il en avait rêvé, de cette possible seconde famille qu’il ne connaissait pas. Mais qu’il n’avait jamais réellement compté connaître, avant. Car jamais il n’aurait abandonné sa mère. Les choses avaient changées, cependant. Mais lui, non. Le voyageur avait vu juste sur un point, cependant. Et il devait le lui concéder, pour mieux souligner son erreur.
« Ma mère n’est plus, en effet. Et la ferme ne m’appartient plus désormais. J’ai déjà fait mon choix. »
Il n’avait pas besoin de lui, de son apparition en chevalier servant, pour venir le mettre face à son destin. Il avait déjà pris sa décision, bien avant qu’il n’apparaisse en sa demeure, et souhaitait que cela transpire au travers de ses propos. Aucun seigneur ne viendrait changer sa vie et sa destinée en claquant des doigts, ne viendrait lui offrir une porte de sortie dans sa grande bonté. La porte, il l’avait trouvée tout seul. C’était sa propre résolution, il n’avait pas eu besoin de lui pour y parvenir.
« ...Je pars demain. »
En était témoin son sac de voyage, déjà prêt et n’attendant que lui au pied de son lit, à quelques mètres de là. Alensil fit un signe de la main, en sa direction. Son visage était sérieux. Où partait-il exactement, il ne le savait toujours pas : il n’avait pas su se décider encore. La Terre du Milieu était vaste, et il avait tant de choses à découvrir. Tant de choses dépeintes dans les notes de papier froissées qui l’avaient fait voyagé pendant déjà bien des années, depuis cette ferme. Et apparemment, il disposait de plus de temps que prévu pour ce faire. S’il ne rencontrait pas de malencontreux évènement en cours de route, bien entendu. Il ne connaissait rien des périls de ce monde, c’était vrai. Et sûrement aurait-il été sage, cette décision en tête, de s’allier à quelqu’un qui avait les connaissances nécessaires pour que sa première expédition se passe bien. Mais, pas ainsi. Non.
« ...Mais je ne serais jamais l’un des vôtres. Pas si pour ça, je dois devenir cet homme qui abandonne sa famille pour obéir à vos… »
Il se coupa de lui-même, et fit à la place un geste vague de la main, élusif. Sa moue était suffisamment explicite pour faire comprendre le jugement négatif qu’il portait à la chose. Cet homme qui abandonne sa famille pour obéir leurs règles, à leur pseudo devoir, à tout ça. Il ne serait pas son père, non, il se l’était juré. Jamais il ne laisserait sa famille seule et dans le besoin, pour aller vaquer sur les routes. Même si on lui clame qu’ils rôdent pour toutes les bonnes raisons. Le jour où il la trouverait, cette famille, elle serait son premier devoir, son refuge et sa fierté. Et même si dire qu’il ne désirait pas en savoir plus sur son peuple était complètement faux, si dire qu’il ne savait pas qu’en acceptant sa proposition il pourrait en apprendre tellement plus sur tellement de choses l’était davantage encore, il ne se soumettrait quand même jamais à une telle association. Pas sans poser ses termes. Pas sans être sûr que l’autre comprenne ce qu’il désirait, et qui il était. Il resterait un esprit libre. Il n’était pas un simple pion qu’un grand seigneur pouvait venir cueillir pour en faire ce qu’il souhaitait. Le jour où il estimerait en avoir assez appris, celui où il en aurait marre de ses jeux ou celui où il trouverait mieux pour lui-même qu’une vie d’errance, il ne faudrait pas s’attendre à ce qu’il reste tranquillement et suive des ordres stériles. Il vivait sa vie pour lui-même à présent, pas pour les autres. La seule personne pour qui il aurait pu abandonner tout rêve n’était plus. Il n’irait certainement pas perdre sa liberté pour un homme qu’il connaissait à peine, et s’était déjà joué de lui tant de fois en quelques heures à peine. Il aurait été un idiot de se rallier à lui sans un mot de plus.
« ...Alors n’attendez aucun serment de ma part. Je préfère encore mourir seul sur la route à cause de mon ignorance. »
Il le lui avait déjà dit : il était un homme de parole. Il ne ferait jamais de promesse qu’il savait ne pas pouvoir tenir. Que ce fut à lui, l’étranger venu piétiner ses racines pour mieux les lui dévoiler, ou à quiconque d’autre se présenterait sur son chemin. Donc non, il ne se joindrait pas à lui, si c’était ce que l’on attendait de lui.
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Sujet: Re: Quand il est temps de partir [Arador] [Terminé] Ven 4 Juil 2014 - 15:55
«That's your choice.»
« Et vos bâtards ? De combien d’années disposent-ils ? »
Le fermier le coupa. Et à cette question, le rôdeur resta muet un instant, surprit mais également songeur. Puis fronçant les sourcils, il déclara.
-C’est à eux d’en décider.
Pour les plus nobles des hommes et femmes de Numénor, la mort était bien souvent un choix. Ils décidaient, entre guillemets, de mourir et ainsi quitter ce monde quand le moment leur semblait bon. Parfois, certains par lassitude, d’autre par amour, certains encore par devoir, pour laisser la place à leurs héritier. Il ne savait pas lui-même combien d’années il lui restait à vivre. Surement plus qu’Alensil, mais encore, il ne pourrait pas les quantifier. Et l’idée de choisir le jour de sa mort, avait quelque chose d’assez intrigant. Pour l’instant il ne se voyait pas vraiment mourir. Cette pensée, lui était assez répugnante. Il avait toujours maudit la mort. Et il était certains de ne jamais pouvoir réellement la considérer comme un cadeau.
OoOoO
Assis à table, ses couverts devant lui, considérant de son regard gris orage le jeune fermier, Arador, gardait le silence. Il n’avait plus rien à ajouter. La messe était dite, et c’était désormais à Alensil de s’exprimer. Le rôdeur lui avait proposé un autre chemin, à lui de voir si cela lui convenait, à s’il était prêt à s’y lancer. Ce serait pour sûr une route difficile, pas forcément agréable, mais c’était celle qui lui était venue à l’esprit sur le moment. Peut-être n’était-ce pas la meilleure. Mais comment pourrait-il le savoir, lui qui était né pour servir. Il n’avait jamais vraiment eu le choix qui était offert à Alensil. Fuir ses responsabilité, il y avait déjà pensé, maintes fois. Mais l’image de son père, cadavre sanguinolents dans ses bras, murmurant ses derniers mots à son oreille, lui revenait toujours en tête, le rappelait durement à ses devoirs.
« Non. Je ne désire pas faire partie des vôtres, Arador. »
Comme un couperet la réponse tomba, nette. Appuyé contre le dossier de sa chaise, le regard franc, et fixé sur lui, le jeune homme venait de se décider. Et si Arador eu ce petit pincement au cœur que pouvait toujours procurer un refus, il n’en montra rien, et continua à observer Alensil sans mot dire. Il était toujours difficile pour lui de se voir refuser quelque chose. La dernière fois que, quelqu’un n’avait pas jugé bon de lui dire oui, avait refusé d’accéder à une simple requête… des morts avaient suivies. Dont celle de son père. Celui lui rendait le refus et le rejet particulièrement amer à entendre. Il était certain pour lui qu’Alensil serait beaucoup plus en sécurité auprès de son peuple, que seul dans l’immensité de la terre du milieu. Seul face à tous les dangers qu’elle pouvait receler. Face aux ténèbres d’endroits toujours plus dangereux. Qu’avait-il vu de ces terres en dehors de son village, et de Lond Daer. Le monde était beaucoup plus vaste que cela. Et lui, qui pourtant avait déjà maintes années de vies derrière lui, n’avait pas encore tout vu.
« Ma mère n’est plus, en effet. Et la ferme ne m’appartient plus désormais. J’ai déjà fait mon choix. »
Suivant du regard le geste d’Alensil, le rôdeur laissa son regard tomba sur un baluchon posé nonchalamment au pied d’un lit modeste.
« ...Je pars demain. »
Le garçon semblait bien décidé. Mais savait-il seulement ce qui l’attendait au dehors ? Que savait-il de la nuit ? Des loups ? Des brigands ? Des orcs ? Si l’idée qu’il se faisait de la terre du milieu résidait dans les notes de voyages qu’il avait dû lire et relire maintes, fois, il aurait quelques désagréables surprises. Mais ce n’était pas à Arador de le lui faire remarquer. Il ne serait pas écouté de toute façon. Il avait bien trop entamé la confiance du garçon, pour que celui-ci veuillent encore prendre le temps de l’écouter. Il voulait partir, il était prêt à partir. Prêt à marcher sur les grandes routes, visiter les villes des hommes, rencontrer du monde. Voir du pays comme diraient certain. Il avait la vie devant lui…mais encore faudrait-il qu’il sache la conserver cette vie. Et c’était de cela dont Arador doutait. Le garçon, boitait. Et cela, n’importe qu’elle racaille de Bree un temps soit peu observatrice, le remarquerait. Savait-il se servir d’une épée ? D’un arc ? D’un couteau ? Ou d’une arme quelconque ? Si non, alors il courrait de graves dangers tôt ou tard. De l’avis du rôdeur, le jeune homme serait sage, de vérifier ses capacités à se débrouiller seul dans la nature, à survivre à une situation périlleuse, avant de se lancer dans une telle aventure.
« ...Mais je ne serais jamais l’un des vôtres. Pas si pour ça, je dois devenir cet homme qui abandonne sa famille pour obéir à vos… »
A cela, Arador ne put réprimer un rictus. Le gamin n’était pas stupide, et cela avait de quoi lui plaire. Même s’il restait assez déçu par le refus que lui avant soumis le garçon, il n’en restait pas moins qu’il l’aurait trouvé bien stupide d’accepter ainsi sa proposition sans poser la moindre question. Le geste de la main ainsi que la moue du garçon ne firent qu’ajouter un plus à son hilarité. Enfin…une hilarité qui ne dura qu’un temps. Car bien qu’il trouva la réponse du garçon pleine de bon sens, qu’il accable ainsi son père, n’était forcément pour lui plaire. D’accord celui-ci l’avait abandonné lui et sa mère. Mais pour qu’elles raisons ? Cela, lui-même l’ignorait. Mais il se doutait bien que ce n’était pas simplement par désintérêt ou par amour du devoir. Il devait y avoir autre raison, et cette raison seule la mère et le père du garçon, la connaissait. Mais pour la leur arracher, il faudrait que ceux-ci ne soient pas morts… La vérité rendue inaccessible par la mort.
Certes leurs lois et leurs codes pouvaient sembler particulièrement durs à un regard extérieur. Mais c’était ce que leurs ancêtre leurs avaient légués. Et même si Arador ne les acceptaient pas forcément. Qui était-il pour les changer. Il était encore bien jeune pour la plupart de ses compatriotes, et pour certains, il n’y avait pas de salut autrement que dans la mission confié par un passé révolu. Voilà ce qui tuait son peuple à petit feu. La passé. Les dunedains ne se projetaient pas assez dans l’avenir. Toujours à louer le passé, à penser au présent, mais jamais aux lendemains. Pourtant si certains d’entre eux avaient des dons de prescience, n’était-ce pas pour voir plus avant. Mais encore une fois, même s’il aurait voulu y changer quelque chose, comment passerait-il outre l’avis de ses conseillers. De plus il avait trop de responsabilité qui pèseraient sur lui au cas où il se tromperait. Il aurait des vies entre ses mains, et chaque erreur pourraient lui en couter beaucoup trop. Ils s’éteignaient. Doucement, mais surement. Et ce n’était pas lui qui irait accélérer le processus. Aussi leurs lois, et leurs missions, resteraient telles quelles, jusqu’à ce qu’il ait la certitude de pouvoir y remédier sans gaspiller de vies.
« ...Alors n’attendez aucun serment de ma part. Je préfère encore mourir seul sur la route à cause de mon ignorance. »
Un léger sourire aux lèvres, bien que ses yeux restèrent froids, le rôdeurs se prit à admirer la détermination du garçon. D’un certain point de vue, il était bien plus sage que ne pourrait le laisser suggérer son âge. Mais après tout, il avait surement vécu des choses qui l’avaient forcé à grandir. Et c’était d’ailleurs ainsi que l’on devenait un homme. En surmontant les épreuves, et en apprenant de ses erreurs. Cela, Arador s’employait à le faire chaque jours un peu plus. Et même si pour certaines part de son passé, le pardon restait difficile à imaginer, ils n’en restaient pas moins indispensables pour soulager son esprit. Il ne pourrait pas se projeter plus loin dans l’avenir s’il ne parvenait pas à pardonner. Mais pour le moment, il se complaisait à éviter ces sujets douloureux. .
-Si c’est ton choix, je n’ai rien à y redire. Seulement, ceci…trouve toi un compagnon de voyage qui sache se battre, et chasser, qui sache également soigner blessures et maladies, comme ça au moins tu éviteras de mourir, seul sur la route à cause de ton ignorance. Et si toutefois un jour tu cherche un abri, ou de l’aide, demande des nouvelles du vent du Nord, peut-être aura-tu de la chance de tomber sur un de nos amis.
Il aurait voulu ajouter quelque chose aussi par rapport à sa jambe, mais finalement s’arrêta là. Il devinait que c’était un sujet plutôt sensible, et que le conseiller là-dessus, surtout maintenant, ne serait pas forcément judicieux. Il préférait le laisser méditer ses paroles.
-Sur ce, je pense que le souper est prêt et ne demande plus qu’à être servi.
Il mettait ainsi la discussion entre parenthèses. Surement pour mieux la reprendre plus tard.
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Sujet: Re: Quand il est temps de partir [Arador] [Terminé] Mar 12 Aoû 2014 - 19:35
Quand il est temps
►Feat. Arador
Il n’avait pas pu louper le rictus qui s’étala sur la face d’Arador. Pour autant, il tint ses positions. Au contraire même, il les affirma plus fermement encore, assurant qu’il préférait mourir idiotement plutôt que de lui prêter un quelconque serment, rejetant en bloc non pas ce qu’il était en tant que personne, mais ses règles et les divers principes qu’il ne connaissait pas vraiment mais qui allaient assurément de pair avec une entrée dans son clan. Cela aurait pu mettre un peu plus encore le feu aux poudres, raviver les tensions qui existaient déjà clairement entre eux et ce depuis le début même de leur rencontre, mais Arador fit preuve de retenue. Ou peut-être n’était-il tout simplement pas vexé, comprenait-il son point de vue ou l’acceptait-il en tant que tel. Quoi qu’il en soit, la réponse qu’il prononça ne fut pas celle à laquelle s’attendait le garçon (non pas qu’il s’attendait à quelque chose de précis, mais….).
Le fermier fut surpris des mots choisis, presque sages et amicaux, et plus particulièrement des derniers. « Nos amis »... Alensil avait eu beau le rejeter, rejeter ses règles du moins, Arador parlait comme s’il le comptait tout de même comme l’un des leurs, lui qui n’avait jamais été inclus, n’avait jamais fait véritablement parti d’un tout, d’un clan, d’une famille en dehors du simple duo honteux qu’il formait avec sa mère. Ce n’était pourtant pas faute d’en avoir rêvé plus d’une fois… La plupart des saisonniers étaient de braves gaillards, certains lui avaient appris nombre de choses, mais le plus souvent ils ne restaient que quelques lunes tout au plus, et ne revenaient pas toujours l’année suivante. Sa réaction avait peut-être (sûrement) été impulsive, tout comme elle était plus qu’assurément en désaccord avec ses désirs les plus profonds, mais elle n’en était pas moins réfléchie. Il ne pouvait rien promettre aujourd’hui qu’il n’était pas certain de pouvoir tenir demain. Il ne désirait pas se lier sans savoir dans quoi il mettait les pieds. Il ne pensait pas que partager un peu de sang avec quelqu’un faisait nécessairement de lui quelqu’un d'adapté à ce que le dùnadan attendait de lui, ou voulait dire qu’il faisait partie des leurs. Les rapports humains n’étaient pas basés sur la seule notion de lignée, ou du moins ne devraient pas l’être à ses yeux. Rien ne disait qu’il se plairait à ses côtés. Rien n’assurait qu’ils n’allaient pas s'entre-tuer, comme ils en avaient déjà eu envie plus d’une fois en une seule soirée. Il y avait encore des myriades de choses à considérer pour qu’il puisse réellement s’estimer être l’un des leurs, être accepté, être à sa place avec eux. Malgré cela, malgré un refus peut-être brutal, Arador lui offrait une aide hypothétique, pour l’avenir. Une promesse qui n’était peut-être que du vent, mais qui était prononcée avec soin et considération. C’était bien plus que ce que le jeune homme aurait pu espérer ou demander en premier lieu.
Au final, ces simples paroles, qui sonnaient comme plus réalistes, plus honnêtes, eurent pour effet de calmer l’orage qui planait encore en son coeur. Il hocha la tête, silencieux, en guise de remerciement muet à son encontre, autant pour cette main tendue que pour le simple adjectif possessif qu’il avait utilisé malgré tout le reste. Quant à tous les autres conseils prononcés précédemment, même s’ils étaient loin d’être bêtes, Alensil ne pouvaient guère les appliquer. Pas que ce fut contre sa volonté, mais il n’avait tout bonnement pas de compagnon avec qui voyager, expérimenté ou non. Arador était à vrai dire le seul à être au courant de ses plans d’escapade. Ou plutôt, le seul à s’y être intéressé, disons. Et le jeune homme venait juste d’exprimer son refus de vouloir gonfler ses rangs, donc...
« Sur ce, je pense que le souper est prêt et ne demande plus qu’à être servi.»
Le jeune fermier se leva sur la suggestion d’Arador, dont il ne doutait pas une seule seconde que le but était plus de clore la discussion en cours que de soulager un ventre affamé. Il ramena le pot de cuivre qui avait continué de chauffer lentement pendant que les deux hommes échangeaient, nullement gêné par sa jambe traînante, et posa le récipient à même la table de bois épais, sans se soucier le moins du monde d’y laisser une éventuelle marque. Il avait toujours fait ainsi jusqu’à présent, aussi loin que sa mémoire remonte. En silence, il leur servit deux bonnes louchées de soupe chacun, réservant l’os auquel s’agrippait encore un tout petit peu de viande dans une troisième assiette, qu’il laissa à terre pour la chienne. Il partagea également une boule de pain, pour alourdir un peu ce repas frugal, ou ni fromage, ni vin, ni dessert ne venait orner la table. Mais Alensil se refusait à s’excuser du peu qu’il avait à offrir. Le souper se passa dans ce calme silencieux, l’esprit d’Alensil vagabondant ici et là, retournant se loger dans les notes de son père ou ressassant quelques un des mots qu’Arador avaient prononcés un peu plus tôt. Quand ils eurent terminés, ce qui fut vite fait, il débarrassa et alla nettoyer leur vaisselle rapidement avant de la ranger avec soin, comme s’il était encore possible que l’on vienne lui reprocher d’avoir mis tel objet dans le placard de gauche alors qu’il devait aller dans celui de droite. Quand ce fut fait, il avisa le soleil qui commençait à disparaître à l’horizon, et alla chercher dans la chambre de sa mère sa lampe à huile en terre cuite, pour la donner à son visiteur :
« Le jour diminue. »
En temps normal, il aurait été sage de ne pas chercher à rester éveillé trop tardivement, mais il n’était plus utile de chercher à économiser la mèche, Arador pouvait s’en servir s’il le souhaitait. Pour sa part, Alensil savait qu’il valait mieux pour lui ne pas veiller trop tard, car une longue route l’attendait le lendemain. Il retourna donc auprès de sa couche, et retira ses chausses et sa chemise pour ne garder que ses braies, se mettant à l’aise pour la nuit sans se dévêtir plus que nécessaire pour autant. Il remonta même légèrement le vêtement sur sa hanche, cachant la cicatrice qui y remontait et fouilla ensuite dans ses affaires pour en extraire ses précieux feuillets. S’installant sur son lit pour les parcourir une nouvelle fois, ses lèvres formaient parfois les syllabes couchées sur le papier sans qu’aucun son n’en sorte pour autant. Il ne devait pas oublier, car plus personne ne serait là pour lui rappeler quels étaient les mots qui étaient sous ses doigts à présent, si la mémoire venait à lui faire défaut. Son index retraça une ligne de la carte qu’il examinait. Il hésitait toujours : devait-il remonter le Gwathlò en direction du Nord, ou au contraire descendre en direction du Gondor ? Il ne savait quelle région serait plus susceptible d’avoir besoin de bras, et donc de lui offrir un travail ou un autre pour quelques temps. Le jeune fermier jeta alors un oeil du côté de son voisin :
« Dans quelle direction voyagez-vous ? »
Non pas qu’il souhaite s’imposer, surtout pas après avoir refusé de devenir l’un de siens. Mais les mots d’Arador sonnaient encore à son oreille. Peut-être pourrait-il lui porter encore conseil, même si Alensil était frustré de devoir faire appel à lui, et ainsi, étaler encore son ignorance.
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Sujet: Re: Quand il est temps de partir [Arador] [Terminé]