Comment déjouer un elfe. [ft. Legolas]

Imladris s’éveillait, se découvrant de l’épais voile l’ayant une nouvelle fois plongée dans l’obscurité. Dans cette constante sérénité, les elfes habitant la cité merveilleuse s’étaient abandonné à leurs activités habituelles : un jour comme les autres, ni plus ni moins. Même pour Elea qui pourtant n’avait pas encore touché à ses instruments de musique car ses priorités seraient tout autres ce jour là. La jeune femme s’était réveillée aux aurores, avait revêtit la première robe qui lui était tombée sous la main et avait également relevé ses cheveux sans réelle intention d’en faire quelque chose de joli mais plus pour le côté pratique. Les instants avaient plus été caractéristiques d’un empressement tandis qu’elle s’était munie de son arc et de flèches pour ensuite sortir en trombe. Elle ne prit d’ailleurs pas le temps de prévenir qu’elle allait s’entrainer et qu’on ne la verrait pas si tôt.
Voilà un moment que l’on ne l’avait pas vue s’acharner sur une cible et c’était justement ce qui posait problème et qui lui faisait presser le pas. Son niveau était encore bien loin de ce qu’il aurait dû être ; si seulement elle s’était montrée plus assidue. La musique lui avait pris bien plus de temps avec les récents évènements à couvrir et ainsi, elle n’avait pas su s’organiser de sorte qu’elle puisse aussi s’entrainer Mais tout cela était sans compter qu’elle avait appris, la veille, l’arrivée de Legolas dans la cité d’Imladris et qu’elle lui avait promis de s’améliorer jusqu’à leur prochaine entrevue. Fort heureusement elle ne l’avait pas encore croisé, elle ignorait s’il l’avait cherché mais elle avait réussi à ne pas trop se montrer. C’était donc dans un mélange de réelle détermination et de stress qu’elle s’était rendue sur son terrain d’entrainement habituel. Il y avait à vrai dire, quelques endroits conçus où les elfes avaient l’habitude de s’entrainer. Hélas leur talent inné avait souvent pour effet de la rendre impatiente et de la décourager. Alors ses débuts furet une véritable catastrophe, si bien qu’elle en était arrivée à ne pas apprécier tirer à l’arc. Ainsi, Legolas avait eu l’idée de l’aider à s’entrainer à l’écart afin qu’elle puisse évoluer à son propre rythme et les progrès s’étaient rapidement montrés.

L’endroit était légèrement retranché par rapport à la cité, sans en être trop éloigné. Il y était là, parmi les arbres, à l’abri du vent dans certains recoins, et présentait de nombreux obstacles propices à un bon entrainement. Elea posa ses flèches contre un tronc en ayant au préalable extirpé l’une d’entre elles. En quelques secondes seulement, elle s’était positionnée, tirant sur l’arc en visant une première cible. Le temps d’un souffle coupé, les yeux rivés sur son objectif, elle décocha finalement la flèche. Fendant l’air à son passage, la pointe se planta avec violence dans un support de bois usé, recouvert d’une multitude de trous placé à quelques mètres de sa position. Cible manquée, disait elle, comme si cela en aurait pu être autrement ? Elea se mordit les lèvres, ayant eu l’espoir de ne pas avoir autant de retard. Elle ne se laissa cependant pas submerger par la colère envers elle-même de ne pas avoir travaillé sa capacité à se concentrer. Elle ne perdait toutefois pas espoir, se remémorant les astuces et conseils que lui avait offerts l’elfe de Mirkwood.
Après plusieurs flèches tirées, sur différentes cibles, Elea cessa. L’acharnement avait fini pr payer puisque les dernières flèches tirées avaient toutes atteint le milieu de la cible avec une belle précision. Elle ne se reposait cependant pas sur ses acquis, allant pour les décrocher une à une et conserver les plus intactes pour un énième tour. La forêt était silencieuse, l’astre solaire avait probablement atteint son zénith. Les cimes des arbres étaient ici si hautes qu’elles ne permettaient pas à l’humaine de se situer dans le temps ni dans l’avancée de la journée. Il allait pourtant bien falloir stopper à un moment ou à un autre pour aller à la rencontre de Legolas, entrainement ou pas. De plus, elle ne pouvait pas se permettre de se présenter ainsi ou bien il allait deviner son manque de travail et sa tentative de se rattraper au dernier moment même si visiblement elle en ressortait avec de belles améliorations. Elle s’était fixé pour objectif d’aller plus loin la dernière fois qu’elle l’avait vu. La limite n’étant pas franchie, Elea souhaitait sauver les meubles et débuter un nouveau tour mais cette fois-ci en se plaçant bien plus loin cette fois-ci.

Ses pieds étaient ancrés dans le sol comme si elle pouvait prendre racine. La jeune femme inspira un long moment avant de brandir son arc en visant cette cible presque trop loin pour ses pauvres yeux d’humaine. La barre était placée haute mais sa détermination avait souvent cette qualité de balayer ses limites. Concentrée dans un silence des plus absolus, Elea prenait son temps pour calculer son coup. Intensité…Vitesse…Courbe…Les mots défilaient dans son esprit, comme si le faire allait forcément l’aider à réussir. Mais le craquement d’une brindille derrière elle lui arracha une grimace, gênée dans son entreprise. Un de ses mauvais points puisqu’elle perdait visiblement toute capacité à rester focalisée dès la moindre interpellation. Sauf que cela trahissait la présence d’une personne qui avait eu au moins la gentillesse de ne pas élever la voix dans le but de ne pas la déranger. Elea resta immobile, ignorant pour le moment la personne en tentant de conserver son sérieux. Elle mesurait sa respiration sans jamais cesser de fixer son objectif. Elle libéra la flèche qui parcouru la forêt sur une dizaine de mètres avant de s’échouer dans la nature.

La déception fissura instantanément son visage, alors qu’elle avait cru avoir réuni bien assez de force pour la relâcher. C’était un bel échec mais il n’était pas là question d’abandonner ici pour si peu. Après ce laps de temps ou elle avait réalisé son échec, elle fut soudainement rappelée à l’ordre en se souvenant du bruit l’ayant perturbée. Maintenant qu’elle avait tiré sa flèche, elle était toute disposée à voir de quoi il s‘agissait…En se retournant, ses yeux croisèrent un regard bleuté familier, une silhouette connue pour être justement c’elle qu’elle n’aurait pas souhaité voir en cet instant si embarrassant. Les Ainur l’avaient sans doute punie pour qu’il vienne jusqu’à elle. Quoi qu’il en soit, Elea n’en perdit pas ses bonnes manières et s’inclina devant le prince en sentant ses joues s’empourprer de gêne. Lorsqu’elle releva la tête, elle tenta de distiller ses pensées, ce qu’il pouvait bien se dire d’elle alors que l’immonde chignon improvisé tombait sur un côté. D’un geste rapide, elle relâcha ses boucles blondes afin d’être plus présentable face à quelqu’un de son rang ainsi qu’on le lui avait toujours appris. La jeune femme étira un discret sourire, le saluant.

« Le suilon legolas. Im gelir ceni ad lîn*.» S’exprima t-elle.

Legolas était finalement venu jusqu’à elle, sans grande surprise. Elle se demandait ce qu’il avait bien pu penser de sa flèche loupée alors qu’elle s’était rendu compte qu’il avait dû l’observer avant qu’elle ne le voie. Ainsi il la salua, Elea étira finalement un immense sourire, dans le bonheur qu’elle ressentait de le revoir après tout ce temps. Lorsqu’il l’eut à son tour salué, il lui fit la remarque, qu’elle avait grandi. Il avait raison, elle avait encore évolué, ses traits enfantins s’estompaient encore mais le dynamisme de son regard n’en était pas moins appauvri. Elle se retenait de le serrer dans ses bras pour lui montrer à quel point sa journée se voyait illuminée par sa présence, ainsi qu’elle l’avait fait de nombreuses fois étant petite. Mais sa relation avec lui n’était pas aussi familiale qu’avec Elrohir. Elle avait énormément de respect pour Legolas et plus elle vieillissait plus elle sentait le fossé se creuser.

Arriva enfin le moment fatidique où il lui fit une première remarque sur son entrainement. A priori il était dit ici qu’elle venait beaucoup dans ce coin là. Il sous-entendait certainement qu’elle venait souvent s’entrainer, ce qui n’avait pas réellement été le cas ces derniers temps. La jeune femme baissa la tête, observant son arc avec gêne en étant mise devant ce triste fait qu’elle n’avait pas tenu correctement sa promesse. Elle ne souhaitait pas le décevoir, ni perdre l’intérêt qu’il lui avait porté en lui offrant ses leçons et ses précieux conseils. Il n’était pas non plus dans ses plans de lui mentir ; c’était une chose inconcevable, plutôt perdre tout les honneurs plutôt que de raconter des bobards, surtout envers quelqu’un d’aussi cher à son cœur que Legolas. Elle s’était complètement voilé la face en pensant rattraper son retard en une séance intensive de tir à l’arc, même si cela lui avait permis d’en faire un peu plus que la dernière fois. Ainsi Elea avait décidé d’assumer complètement, après un instant dans le doute de comment lui dévoiler la vérité, elle releva ses yeux bleutés vers l’elfe.

« A vrai dire, les récents événements ne m’ont pas permis d’avoir assez de temps libre pour m’entrainer. »

Elle aurait d’ailleurs probablement l’occasion de lui montrer son évolution en matière de musique depuis que Luthien lui avait donné quelques astuces de harpe. Et de ce côté-là l’évolution avait été plus que flagrante et lui avait ainsi permis de gagner sa place au sein de la cité. Il serait probablement heureux d’apprendre qu’elle allait sous peu débuter ses premières leçons mais en tant que professeur, dévoilant ainsi la confiance qu’on plaçait désormais en elle. Mais pour en revenir au tir à l’arc, il n’avait jamais été question de laisser tomber puisqu’il était nécessaire pour elle de savoir tirer comme n’importe quel elfe. Ne pas en être une n’excusait alors rien, c’est pourquoi elle devait de faire son maximum pour avoir un niveau des plus corrects. Mais ce n’était pas non plus le genre d’Elea de rester sur un mauvais point alors qu’il avait fait un long voyage pour arriver jusque là. La jeune femme lui offrit ainsi un large sourire, lui montrant sans laisser plus de suspens l’état d’une de ses flèches qui avait dû servir plusieurs fois alors qu’elle avait fini par en tomber en rab de stock.

« Néanmoins quand je le fais, je ne fais pas semblant. » Ajoute t-elle.

Un bref rire passa la barrière de ses lèvres alors que ses pensés se concentrèrent d’avantage sur le prince.  Il n’était pas venu là pour entendre ses justifications mais bien pour voir des progrès tout autant que prendre de ses nouvelles. Oui, elle avait changé depuis la dernière fois, davantage physiquement puisqu’elle avait quitté l’adolescence mais elle avait surtout gagné en maturité. Sa détermination restait cependant la même ; Elle lui en donnait une nouvelle fois l’occasion de le constater alors qu’elle fut prise d’une soudaine grande motivation pour recommencer son coup manqué.

« Regarde ça ! » Fit-elle soudainement

Elea s’en retourna à sa cible avec en main la dernière flèche encore en bon état pour être utilisée. Elle rassembla ainsi toute sa concentration pour bander son arc et viser une nouvelle fois la cible à peine visible. Les paroles de Legolas résonnèrent à nouveau dans son esprit, mettant en place tous les conseils qu’il avait pu lui offrir pour être sure que sa flèche atteigne son objectif. Elle avait réellement envie de le faire, pour qu’il soit content et fier de son travail et de toute la volonté qu’elle y mettait en cet instant. Quelques secondes seulement, lorsqu’elle fut satisfaite de tous les points à rassembler pour réussir, elle relâcha la flèche. Cette dernière fut expédiée avec bien plus de force que la précédente, transperçant l’air avec une belle précision jusqu’à se ficher dans le bois de la cible. En bordure cependant, mais une première étape venait d’être franchie. Elea était déçue, toujours pressée d’être au top, sans concevoir le fait qu’elle soit forcément plus lente d’apprentissage que les elfes là-dessus. Elle notait cependant l’amélioration et devrait forcément faire encore mieux la prochaine fois.  Se retournant, elle se demandait ce qu’en pensait le prince. Elle ramena son arc contre elle en l’interrogeant du regard dans l’attente d’un verdict ou d’un conseil qu’elle saura appliquer à la prochaine qu’elle tirerait.

La cible avait été touchée, néanmoins elle restait dans le doute de savoir si cela était bon ou pas. Comme elle s’y était attendue, la voix de l’elfe avait résonné jusqu’à ses oreilles alors qu’il s’était apprêté à lui donné quelques conseils en plus de lui dire ce qu’il avait pensé de son tir. Elle avait eu conscience qu’utiliser une flèche usée n’était pas adapté à un tir de qualité, mais elle en avait écoulé son stock et n’avait pas eu le temps de retourner en chercher. Elle n’avait alors pas vu les choses sous cet angle là et en prenant alors bonne note. La jeune humaine écoutait les conseils et les directives de Legolas avec la plus grande attention. Tout ce qu’il lui avait dit jusque là lui avait toujours permis de se surpasser et de s’améliorer. Elea s’approcha de lui pour mieux assimiler ses mots, enjambant les quelques hautes herbes jusqu’à lui, l’arc à la main. Il était content de son travail et semblait optimiste quand à son évolution ; c’était très important pour elle d’avoir son aval pour continuer sur la voie et se donner au maximum. La jeune femme étira un large sourire en réponse à celui du prince, alors qu’il lui rappelait là tous les conseils qu’il lui avait donné avant qu’elle ne tire la flèche.

« Je m’en souviendrais »

Elea ramassa toutes ses flèches usées, bonnes à jeter mais il n’était pour elle pas question de les abandonner là puis en passant son arc à l’épaule, elle souhaitait emmener Legolas ailleurs qu’ici pour discuter un peu. Ainsi la jeune humaine releva ses yeux azuré vers son mentor, d’un sourire accompagné d’un hochement de tête, elle l’invita à la suivre à travers la forêt.

« Viens, on va s’assoir près de la rivière ! » Fit elle en l’entrainant par le bras.

Elea avait prit ainsi les devants dans la direction opposée à Imladris, s’éloignant cependant pas de la limite qu’on lui autorisait. Les bois étaient silencieux, le vent fredonnait doucement entre les feuilles. Il y avait ici une sérénité remarquable qu’elle savait apprécier à sa juste valeur.  Elle s’y promenait régulièrement ou bien trouvait le sommeil dans les ombres des arbres. Ces lieux n’avaient plus aucun secret pour elle, et elle avait relâché son emprise sur le bras de l’elfe pour se perdre un peu dans ses pensées, traçant son chemin en courbes irrégulières à mesure qu’ils évoluaient entre les hautes herbes et les obstacles. Elea demeurait silencieuse, un sourire muet sur les lèvres tandis qu’elle se retournait de temps à autres pour jeter quelques regards à Legolas. Il la suivait toujours, il l’avait toujours suivie, depuis leur rencontre alors qu’elle était encore une enfant. Elle s’épanouissait sous sa bienveillance, consciente d’être en quelques sortes privilégiée de l’intérêt qu’on lui portait.

Ephémère, tel un papillon, Elea n’en montrait pas moins de faiblesses car il n’y avait pas plus vivace qu’elle. Rien n’avait d’importance dans ces précieux moments qu’elle partageait avec des personnes qu’elle appréciait grandement, que ce soit pour sa tutrice adorée, Histiel ou même Elrohir qui l’avait sauvée et protégée. Legolas en avait tout autant sa place pour l’avoir soutenue, encouragée et avoir guidé son chemin.

Arrivés là ou coule une eau d’une rare pureté, Elea se posa enfin, débarrassant ses épaules de ce qu’elle avait emmené. D’un geste automatique, elle dégagea son visage de quelques boucles blondes venues gêner son champ de vision. Avant de lui raconter un peu ce qu’il s’est passé depuis la dernière fois qu’ils ne se sont pas vus, Elea voulait savoir ce qu’il en était de lui, ce qui l’amenait par ici et tout ce qui s’en suivait. Ses affaires princières l’intéressaient beaucoup, mais elle pouvait aussi concevoir qu’il ne venait pas la voir pour parler de tout ça ; plutôt pour changer d’air que de voir tout ceci le suivre.

« Quelles sont les nouvelles de Mirkwood ? »

Tandis qu’Elea s’était assise sur l’herbe, Legolas était resté debout, reconnaissant là ses habitudes, toujours sur ses gardes, à l’affut quelque soit l’endroit. Il avait raison ; la Terre du Milieu était pleine de surprise, pleine de dangers -  Des événements qui la dépassaient complètement. En temps que jeune femme, simple humaine, ces choses là ne pourraient presque pas la concerner. Elea est bien trop ancrée dans son monde, à l’écart du reste sous le ciel d’Imladris. C’est par ce genre d’échos, par les mouvements précipités des cavaleries elfiques qu’elle avait conscience de ce qu’il se passait à l’extérieur d’Imladris, rien de plus. Même ses souvenirs de l’attaque des orcs à l’encontre de ses parents semblaient appartenir à un autre temps, une époque à tout jamais révolue. Elle avait choisi d’oublier ces faits pour conserver la pureté des instants de joie passée avec sa famille humaine. Elea évoluait dans un paisible endroit, animé par un état d’esprit remarquable. Ses larges sourires tirés aux oreilles  avaient raison d’être et le temps s’écoulait ainsi. C’était  probablement ce que Legolas venait rechercher ici : une bulle, un semblant de paix. Il n’avait alors pas été question de l’en extirper en évoquant Mirkwood bien qu’elle fut curieuse de savoir ce qu’il s’y passait ces temps-ci.  Legolas lui apporta cependant des réponses à ses questionnements, lui faisant part des récents événements. Elea afficha un regard inquiet, traversée par toute une autre ribambelle de questions  qui resteraient muettes. Les faits étaient là, il n’y avait rien de plus à ajouter, le doute semblait persister à planer au-dessus de cela.

L’elfe vint prendre place à ses côtés après avoir laissé derrière lui tout ce qui lui était demandé, tout ce qui lui était important afin de recentrer la conversation sur elle. Certains elfes qu’elle côtoyait, dont Legolas l’étonnerait toujours pour cet intérêt qu’on lui portait justement pour leur différence de longévité. Qu’est ce que cela changerait à sa vie de savoir ce qu’elle avait fait ces derniers temps ? Probablement rien et pourtant il prenait le temps de savoir, de prendre de ces nouvelles. Elea appréciait ces attentions, autant qu’elle l’appréciait alors elle lui offrit un sourire heureux, levant le nez sur le paysage dessiné devant eux, Elea se demandait par quoi elle allait bien pouvoir commencer.

« Ma place comme musicienne me convient parfaitement, J’ai laissé les doutes derrière moi afin de m’y consacrer complètement. »

Il avait été primordial pour Elea de montrer sa motivation dans le but de rester vivre avec les elfes un peu plus longtemps que ce qu’on lui avait déjà accordé. Elrond avait donné son consentement et ici s’arrêtaient les dernières nouvelles qu’elle avait communiquées à Legolas. La suite allait très certainement le rendre aussi content qu’elle était surexcitée de lui dévoiler.

« Je suis généralement conviée à couvrir les banquets du seigneur Elrond. Tout comme ses réunions et certaines fêtes comme celle qu’il y a eu il y a quelques jours. »

Ayant suivit son évolution et la connaissant depuis petite, Legolas pouvait certainement mesurer la joie qu’elle avait éprouvée d’être reconnue pour ses talents de musicienne au point d’être là pour le seigneur d’Imladris. C’était clairement significatif. Elea devait cet honneur à son dur labeur mais aussi  à son entourage qui l’aidait dans son évolution.

« Luthien Ó Dorthonion est une harpiste formidable, j’ai eu la chance de l’avoir comme professeur et j’ai ainsi pu atteindre un très bon niveau ! »

Sa rencontre avec Luthien avait été très marquante pour la jeune femme, a tel point qu’Elea avait fini par se découvrir une grande admiration pour celle-ci. Ca l’avait ainsi motivée à se surpasser, afin de la rendre fière, elle aussi et avoir peut être un jour la chance de jouer avec elle de manière officielle.

« A l’occasion, je jouerais pour toi ! »

Ainsi, il avait aussi la raison du pourquoi elle n’avait malheureusement pas plus être plus assidue à l’arc ces temps-ci. Entre ses leçons, la préparation de la fête et de tout ce qui s’en suit, elle n’avait pas pu pratiquer autant qu’elle l’avait souhaité. Quoi qu’il en soit, Legolas ne semblait pas lui en tenir rigueur, elle appréciait beaucoup ce fait et lui offrirait de jolis sons à défaut de ne pas lui avoir offert un beau tir.

Il ne fallut pas bien longtemps à Legolas pour faire le lien entre cette nouvelle et le fait qu’elle n’avait pas réellement eu le temps de s’entrainer. Les joues de la jeune fille s’empourprèrent visiblement encore honteuse d’avoir à l’avouer bien qu’il ne lui en tenait pas rigueur. C’était pour elle une gêne au vu des nombreuses heures qu’il avait passé avec elle pour lui apprendre comment tirer à l’arc et qu’elle ne fusse pas capable de remplir complètement sa part du travail. Mais désormais qu’elle avait réussi à trouver sa place, elle allait pouvoir s’y remettre sérieusement, et, la prochaine fois qu’il passerait à Imladris, il serait fier d’elle, Elea s’en faisait la promesse. En attendant, la jeune femme était heureuse de savoir qu’il était content pour elle, qu’il se souvenait de quelques airs qu’il avait pu entendre d’elle par-ci et par-là. Il allait être étonné de constater ses immenses progrès et le niveau qu’elle avait atteint. Ce serait l’occasion de constater ses nombreuses heures de répétitions à travailler ses partitions notamment à la harpe où son niveau surpassait bien du monde. Elle avait d’ailleurs hâte de lui faire entendre de quoi elle était capable désormais, et avait déjà quelques idées concernant les morceaux qu’elle choisirait et qui seraient susceptibles de lui plaire le plus. Legolas avait raison, elle avait de la chance de pouvoir faire ce dont elle avait envie, elle avait conscience de cette chance, encore une fois, qu’elle puisse réaliser ses rêves. Ce n’était manifestement pas le cas pour toutes les femmes de son âge, aussi loin qu’elle avait pu entendre certaines choses les concernant, notamment par le biais de Valenwyn qui lui avait raconté comment elles vivaient. Si elle était restée avec les humains elle serait probablement mariée à un homme qu’elle n’aime pas, des enfants dans les bras élevés dans des contions peut être pas aussi agréables qu’ici.

Ici, elle était cet oiseau précieux protégé par une cage d’or. Son chant ne serait jamais terni, jusqu’au moment où elle s’en irait. Mais ce moment là n’était pas arrivé, Elea souhaitait profiter de chaque instant qui lui était offert, avec la plus agréable des compagnies à cet instant. La jeune femme lui adressa un large sourire, ne cachant pas la joie qu’elle avait de l’entendre prononcer ces mots là. C’était important pour elle, d’avoir son avis et son approbation pour ses choix. Elle lui devait beaucoup. Elle apprit d’ailleurs qu’il connaissait Luthien, cet aveux ne l’étonna pas néanmoins elle ne pouvait pas mesurer leur entente. Connaissant les deux, ça ne pouvait être que positif ! Elle fut tout de même surprise de savoir que Legolas ne l’avait jamais entendue jouer et au vu de son très haut niveau à la harpe, ça mettait une pression supplémentaire à Elea. Non pas qu’elle se sentait en compétition mais il serait difficile de l’impressionner s’il entendait la musique de Luthien après la sienne.
Elea chassa ces dernières pensées en se frottant machinalement les bras, son sourire n’avait pas quitté ses lèvres. Elle était contente de savoir qu’il restait ici quelques jours, elle aurait alors toute l’occasion de lui faire découvrir ce talent qu’elle avait pour la musique.

« Et si on y allait maintenant ? »

Non, en fait, elle avait une très faible capacité de patience. Elle n’avait pas pu résister à l’envie de passer directement à cela et s’était relevée soudainement.

« Viens !! »

Elea tendit sa main à l’elfe afin de l’aider à se relever. Et dans toute la hâte qui illuminait son visage, la jeune femme prit les devants pour entamer le chemin inverse. Son arc sur l’épaule, Elea essayait de maitriser son empressement, car si elle s’écoutait elle se serait probablement mise à courir. Il n’aurait probablement pas compris pourquoi, le temps est une notion qui est totalement différente chez les hommes et chez les elfes. Alors elle se contentait de marcher, tenant les pans de sa robe lorsque les herbes étaient trop hautes et qu’elles menaçaient d’accrocher le tissu. Elle lui jetait des regards de temps à autres, éternellement ornés de sourires.

«Me feras tu visiter Mirkwood un jour ? »

Sa question avait transpercé le silence des bois, elle n’avait pas quitté Imladris depuis son arrivée. Elle avait quelques images dans sa tête des autres endroits où vivaient les elfes juste en entendant les autres en parler. La Lorien, Mirkwood, Elea avait des envies de voyages depuis peu, certainement influencée par Elrohir qui lui décrivait les paysages qu’il avait vu à chaque fois qu’il revenait là. Elle n’avait pas conscience du danger que cela pouvait représenter de voyager seule, même si elle s’imaginait déjà sur son cheval en train de parcourir les plaines de la Terre du Milieu. Mirkwood serait probablement l’une de ses premières destinations, ce serait alors à son tour de venir le voir et il pourrait lui montrer tous les recoins qu’il avait mentionné lorsqu’elle lui avait demandé à quoi cela ressemblait. Elle était curieuse de voir, de savoir en quoi on disait que les elfes de la forêt noire étaient assez différents de ceux d’Imladris.

Encore faut-il qu’Elrohir l’y autorise. Oui, il avait raison, Elea ne pouvait pas se permettre d’y aller sans avoir l’aval de son tuteur. La jeune femme baissa légèrement la tête se pinçant les lèvres, légèrement frustrée. Elle fut toutefois arrachée de ses pensées lorsque Legolas lui confia que ce serait avec grand plaisir qu’il lui ferait visiter Mirkwood. Voilà de quoi lui rendre le sourire,  elle l’avait tant imaginé que sa curiosité se faisait de plus en plus importante à l’égard de ces autres royaumes elfiques de la terre du milieu. Elea secoua la tête, satisfaite de cette réponse et continua sa marche jusque vers Imladris, les yeux rivés sur ses pieds alors qu’elle évitait certains obstacles naturels tout en restant à côté de lui. Le calme de la forêt ne les avait recouvert que quelques secondes seulement avant que Legolas ne reprenne la parole, transcendant le silence. S’il y avait d’autres lieux qu’elle souhaitait visiter ? Oh, oui…Il y en avait beaucoup mais les premiers qui lui vinrent en tête étonneraient certainement le prince. Ses joues s’empourprèrent alors,  mais elle ne détourna pas son attention de l’elfe tandis qu’elle se demandait ce qu’il allait penser de cette réponse. Elrohir lui en avait peut être parlé, ou peut être pas, quoi qu’il en soit elle n’allait pas lui cacher.

« Oui, la Lothlorien, j’aimerais vraiment visiter et puis…Il y a moins prestigieux mais j’y tiens beaucoup ; Je voudrais revoir Laketown, visiter Dale même si celle-ci est en ruines. »

Ces deux villes humaines avaient son importance dans la mesure où l’une l’avait vue naitre et l’autre avait bercé son enfance par ses récits passés du temps où les nains vivaient encore sous la montagne solitaire. En ayant passé le début de sa vie là-dedans forcément son grand père l’avait nourrie de ce désir de la visiter un jour. Pendant longtemps elle avait ignoré la présence du Dragon dans la montagne, l’image de Dale la belle était cependant restée intacte par les visions que lui avaient offert son grand-père et ainsi, elle désirait voir ses vestiges avec l’espoir qu’un jour cela redevienne comme avant. Legolas savait qu’elle venait de Laketown, il était bien assez intelligent pour faire le lien sans qu’elle ne lui rappelle. Mais en ce qui concernait cette volonté d’y retourner, elle ne l’avait pas encore éclairci.

« En vivant ici j’ai tendance à oublier parfois que je suis humaine, et sur certains aspects ça a parfois posé problème, notamment pour le temps. Commença t-elle avec un sourire gêné. Je pense que revoir Laketown me permettrait de m’aider pour mes choix à l’avenir sans que je ne sois piégée par le temps justement. Ça peut paraître idiot mais c'est comme cela que je le ressens.. »

Une destination qui lui était inévitable si elle ne voulait pas avoir de mauvaises surprises et se retrouver face à l’âge dans la vieillesse. Ceci-dit dans cette conversation le chemin vers Imladris semblait avoir été écourté et dès lors qu’ils avaient passé ses portes, Elea invita Legolas à la suivre jusque chez elle. Sur le chemin, les elfes saluèrent Legolas avec tout le respect qu’il méritait,  ce qui arrachait des sourires à la jeune femme qui se sentait privilégiée de l’avoir à ses côtés. Pas besoin de frimer plus longtemps, sa harpe se trouvait chez elle et elle devait se concentrer sur les choses sérieuses désormais. La jeune femme sentait la pression monter en elle tandis qu’elle jouait machinalement avec l’une de ses manches. Elle était sure de son niveau mais jouer devant quelqu’un qu’elle apprécie hors contexte d’un banquet, en n’étant pas qu’un fond sonore ce n’était pas très habituel pour elle. Une fois devant elle, Elea invita  Legolas à entrer et referma la porte sur leurs deux silhouettes. Par chance elle avait rangé juste avant, mais parfois elle n’avait pas le temps et ses affaires traînaient un peu partout. Ceci dit elle l’installa et entreprit de lui faire une infusion afin de le recevoir convenablement. Legolas était déjà venu chez elle, ce n’était pas grand mais suffisant pour une seule personne et puis Hitisel vivait juste à côté, elle pouvait y aller souvent.

Offrant l’infusion au Prince, la jeune femme étira ses lèvres d’un large sourire et lui tourna le dos afin d’aller s’installer près de son instrument. Elle inspira, glissant ses mains devenues légèrement moites sur sa robe avant de les placer de part et d’autre des cordes. Elle se concentra et entama les premières notes qui déferlèrent telle une cascade. Elles sautillaient, telles des goûtes de pluie dans les flaques en produisant des ondes résonnant dans tout son appartement. Elea avait choisi des gammes majeures afin d’embaumer la pièce d’un peu de gaieté, en accord avec ces retrouvailles qui l’avaient réjouie. Il pouvait de là admirer sa technique, la difficulté qu’engendraient certains accords pour ses petites mains. Mais ce n’était pas un défi insurmontable pour ses doigts habiles qui pinçaient les cordes. Ses yeux étaient rivés sur ses mains, elle sentait le regard de l’elfe sur elle et se demandait alors si le morceau qu’elle avait choisi de lui jouer lui plaisait.


Lorsqu'elle eut terminé, la jeune femme releva les yeux, le sourire aux lèvres et attendait son verdict.

Elea savait bien que Dale et Laketown n’avaient à l’heure actuelle rien d’extraordinaire. Mes si les étoiles emplissaient ses yeux à l’évocation de ces souvenirs ce n’était pas pour leur architecture ou leur ambiance générale. Elle n’irait pas pour l’apparence de ces villes mais bien pour retrouver cette part d’humanité laissée au-delà des frontières d’Imladris, se retrouver et chercher à réconcilier ces deux parts d’elle-même souvent en conflit. Elevée comme une elfe mais humaine de racine, Elea avait tout intérêt à revoir ces villes là pour se dire que ces deux choses là étaient possibles. Tout comme Elrohir, Legolas pouvait projeter de l’y emmener à l’occasion en ayant rassemblé certaines conditions. Elle pouvait tout à fait le concevoir même si cela la frustrait quelque part. Le temps avançait, elle vieillissait et elle redoutait que ce jour n’arriver trop tard pour elle.

Quoi qu’il en soit elle n’avait d’autre solution que se plier à leur volonté et n’avait ainsi rien ajouté, se contentant de lui adresser un joli sourire alors qu’il lui sous-entendait que cela serait sans doute possible. Elle le croyait, elle ne doutait pas une seule seconde que s’il avait l’occasion de l’y emmener, il le ferait sans la moindre hésitation. Cette idée l’avait rassurée sur un point tout comme elle appréciait le fait qu’il ne l’oublierait certainement pas. Mais pour l’heure, elle laissa de côtés ses pensées alors qu’elle s’était concentrée pour lui offrir une mélodie de harpe qu’il avait écoutée attentivement dans un silence des plus respectueux. La mélodie enveloppait sa maison, apaisant son cœur et toutes ses interrogations. Elea adorait jouer, elle avait juste besoin de faire glisser ses longs doigts sur les cordes de sa harpe pour éloigner toute trace de mauvaises ondes sur elle. Une bouffée d’air frais à chaque accord, et cela se voyait aussi sur son visage qu’elle aimait ce qu’elle faisait. Elle avait alors espérée que les ressentis soient aussi agréables pour Legolas autant que pour elle. A en juger le sourire qu’il étirait, il semblait avoir apprécié, ce qui la rassurait déjà sur un premier point. Puis le verdict tomba et encore une fois, Legolas savait donner son avis tout en la poussant vers le haut, la motiver à progresser toujours plus. C’est ce qu’elle appréciait aussi chez lui ; il savait être objectif et lui donner du challenge peut être sans réellement en avoir conscience. Elea étira alors son sourire, se levant de derrière son instrument en hocha la tête, lui promettant de lui jouer un morceau plus compliqué sur la technique pour lui prouver qu’elle pouvait parfaitement progresser encore et encore.

Elea le rejoignit, se servant aussi une tasse de thé avant de s’assoir près de lui. Elle ne recevait que très rarement de la visite, et à chaque fois elle oubliait combien son appartement semblait plus gai quand elle avait de la compagnie. Histiel venait de temps en temps mais pas pour ce genre de rencontre. Lorsqu’elles passaient du temps ensemble à papoter, Elea avait plus tendance à aller chez elle plutôt que l’inverse puisqu’ici c’était bien plus petit. Mais puisque Legolas était de passage à Imladris, elle n’avait pas voulu manquer cette occasion de lui offrir un thé et passer un peu de temps avec lui. Ainsi sur quelques heures, ils discutèrent de tout et de rien. Elea lui raconta quelques anecdotes, des plus drôles aux plus sérieuses. Elle avait toujours cette impression de pouvoir parler de tout avec lui sans craindre d’être jugée. Elle lui demanda conseil sur certaines choses et les réponses qu’il lui apporta furent rassurantes.

Lorsque fut le moment de partir, la jeune femme eut un léger pincement au cœur, trouvant ces moments éphémères bien trop courts et parce qu’elle avait encore un tas de questions à lui poser. Elles seraient posées alors en temps voulu, et c’est tout de même avec un large sourire qu’elle l’invita à revenir la voir quand il le souhaitait pour qu’elle lui joue de d’autres instruments ou tout simplement pour discuter autour d’un thé. Sur ces derniers mots, elle lui offrit une accolade, sur un élan de tendresse avant de lui dire au revoir et le remerciant une dernière fois d’être venu la retrouver et de l’avoir écoutée.