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Le charme du passé, c'est qu'il est passé. [Ysée][Fb]
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 Le charme du passé, c'est qu'il est passé. [Ysée][Fb]

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MessageSujet: Le charme du passé, c'est qu'il est passé. [Ysée][Fb]   Le charme du passé, c'est qu'il est passé. [Ysée][Fb] EmptyLun 16 Juin 2014 - 1:48

Le charme du passé, c'est qu'il est passé.


«  ▬ Bregnus, je te laisse. J'ai autre chose à visiter qu'un commerçant idiot. »

J'eus un petit sourire par devers moi, mais cachais mon air amusé à mon second. Le pirate eut un grommellement que j'ignorais totalement. J'étais capitaine de la Mandragore, postée dans une rivière près de Minas Tirith, que j'avais voulu voir de mes propres yeux. Mais à présent que j'étais sur le plancher des vaches, d'autres besoins que la beauté architecturale me prenaient les entrailles. Remettant en ordre mon long manteau de cuir noir, je m'éloignais de mes hommes sans plus rien leur demander : ils avaient eu leur paye, et je savais qu'aucun ne remonterait avec la moindre pièce le lendemain. En attendant, j'avais ma propre bourse, mes propres occupations, et surtout je voulais me sortir de cet équipage fangeux avec qui je passais mon temps.

Aucun n'était mon ami. Surtout pas mon ami. Je n'aimais personne hormis moi - qui mieux que moi pouvait me satisfaire ? Je me mis donc à marcher le long des rues à la recherche d'un endroit pas trop sale - ce qui semblait déjà trop demandé. J'eus un soupir, et ignorais les regards qui s'attardaient sur mon bras gauche terminé par un magnifique crochet d'argent. Savaient-ils qui j'étais ? Peut-être, à voir leurs faces crispées d'effroi. Shadow, capitaine Alto.

J'arrivais dans une ruelle et rentrais dans un bordel qui me semblait, non pas propre et accueillant, mais sûrement le moins miteux du coin. J'avais envie de séduire, de charmer, de sentir mon ascendance sur une femme - peu importe que je doive payer pour cela. Au contraire, il n'y avait nulle émotion et c'était tant mieux. J'entrais tel un conquérant, et on m'accueillit comme tel : la femme de l'entrée m'invita à entrer dans le salon privé, où l'on me fit asseoir dans un fauteuil. Tel un roi, je croisais les jambes, observant autour de moi avec l'air du chat dans le terrier d'un rat. Mon regard pâle brillait de convoitise alors que mes prunelles de glace s'attardaient sur les corps exposés ici et là. Formes douces, regards langoureux, je finis par faire naître un demi sourire charmeur sur mes lèvres - uniquement parce que je le voulais. Il était rare que je montre une émotion que je ne désirais pas montrer. Une grosse femme aux multiples bijoux et au visage fardé s'approcha de moi et se pencha d'un air coquin qui m'effraya plus qu'autre chose - elle pouvait me manger, j'en étais sûr !

« ▬ Vous êtes ce pirate, là, au crochet ... » fit-elle d'une voix qui se voulait sûrement séduisante, mais qui me hérissa sans que j'en montre rien.
« ▬ De toute évidence » répliquais-je sans aucune intonation amicale dans la voix ; mon crochet reposait sur ma cuisse gauche, bien en évidence.

De plus, ma tenue elle-même parlait pour moi : la qualité de mes vêtements, les tissus que je portais, tout cela donnait l'idée d'un être aux goûts prononcés pour la qualité et la luxure, qui voulait montrer sa valeur. Je souris, et allais dégager la femme d'un ton mordant quand mon regard s'accrocha à quelque chose. Ou plutôt quelqu'un - enfin si l'on peut dire que les femmes qui se vendent ici sont des gens. Une beauté diaphane, à la jeunesse rayonnante. J'eus envie de la séduire plus que je n'eus envie d'elle - en réalité, cela faisait bien longtemps que je n'avais désire quelqu'un réellement. J'indiquais à la femme celle que je voulais, et dans un soupir, elle hocha la tête en se reculant, elle et son opulente poitrine.

« ▬ Amenez-la moi, mais uniquement si elle est propre » commandais-je d'un ton sans réplique.

Elle s'exécuta, se dirigeant vers l'inconnue. Je l'observais avec un air félin, l'air du chat chassant sa proie - j'étais exactement ainsi, en chasse. Mon minois avait prit des traits délicats et séducteurs, et ma position nonchalante avec quelque chose d'élégant et de princier. J'allais la séduire, oui ; je l'aurais. J'avais toujours ce que je voulais.

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MessageSujet: Re: Le charme du passé, c'est qu'il est passé. [Ysée][Fb]   Le charme du passé, c'est qu'il est passé. [Ysée][Fb] EmptyLun 16 Juin 2014 - 2:41

Un nouveau jour se levait sur Minas Thirit, apportant son lot de désespoir à la jeune Ysée, catin sans nom, sans avenir, et au passé qu’elle tentait, à chaque nuit tombée, de modifier à sa guise lors de rêves éveillés. Entre l’état d’éveil et le sommeil, il y avait ce petit pont de semi-conscience où on pouvait essayer de créer un rêve lucide ; c’était là qu’Ysée mettait toute son énergie, toute celle qui lui restait après avoir supporté et succombé aux avances lourdes de trop d’hommes sur la même journée. Rares étaient celles qui avaient un goût de vacances. Le mot « répit » ne faisait pas partie de la misérable existence d’Ysée. Si auparavant elle avait bénéficié d’un peu de chance dans son malheur, la mort tragique de son ancien maître – un assassinat morbide, ni plus ni moins – l’avait précipitée cruellement dans les bras d’autres Maîtres, bien moins compatissant, bien moins tendres avec leurs filles, sans parler des clients qui n’étaient pas filtrés partout de la même façon, avec les mêmes règles. Elle avait essuyé diverses humiliations, certaines relevant du pur sadisme, d’autre de l’originalité et même du génie. A cela, Ysée haussait les épaules, et chaque jour, inlassablement, elle se démenait pour trouver un moyen de jeter ces sales souvenirs dans les tréfonds de sa mémoire.

Les traits déformés par la lassitude, elle dut tout de même descendre dans le salon d’accueil du bordel où elle travaillait. Le Caméléon, dont la devise était que les filles de cet établissement s’adaptaient parfaitement aux clients, à leurs désirs et à leurs caprices, même les plus étranges et les plus absurdes. S’il attirait la clientèle, il était loin d’être un paradis pour les catins y travaillant. Toutes avaient une mine soumise ou revêche mais blessée en leur for intérieur, et elles souriaient aussi bien que si elles avaient été peintes sur le visage. Le maquillage n’était plus qu’un simple maquillage ; ici, il devenait carrément un masque, un masque-mensonge, distillant le bonheur au compte-goutte et dissimulant le désastre qu’affichaient, au naturel, ces tendres visages. Corps bafoués, pires que des objets, certains arboraient même les marques de certaines sévices corporelles. Ysée, vêtue d’une robe trop décolletée cachant à peine ses petits seins rebondis, la longue jupe dévoilant parfois un fin mollet, descendant lentement les marches des escaliers. Comme à l’accoutumée, elle alla se poster dans un coin de la pièce, dans l’attente qu’un homme décide de la prendre pour lui, durant quelques minutes ou quelques heures, selon son bon désir. Oubliant d’afficher un air souriant et avenant, elle se mordillait la lèvre, regardant la tapisserie pourpre qui gondolait sous l’humidité. Elle se perdait dans la contemplation de ce défaut dans le décor lorsque la grosse Hadweth la bouscula sans ménagement et lui cracha au visage, faisant rentrer la tête d’Ysée dans ses épaules :

«
Y a c’jeune homme, là, avec l’crochet ; il t’demande ! Alors t’y vas, et fissa ! Fais-lui croire qu’il est heureux, 'spèce d'gourdasse ! »

Elle claqua les fesses menues d’Ysée, qui en fut toute saisie, quoique cela arrivait assez fréquemment. Ysée était, à son grand désespoir, fortement appréciée, pour son joli minois et sa fraîcheur qui ne semblait pas vouloir faner, et beaucoup d’hommes payaient pour s’offrir un moment avec cette belle créature. Malgré l’absence de vigueur, de sourires, de charme éclatant, beaucoup désiraient toucher ce corps étrangement plus intact que la plupart des jeunes et moins jeunes femmes des bordels. Et Hadweth en était clairement jalouse ; aux formes plus que rondes, obligée de faire des scènes quasi théâtrales pour qu’on la remarque, se déguisant presque, s’étalant des couches de maquillage coloré sur son faciès boursouflé, et assez âgée, elle devait se démener pour qu’un homme daigne s’intéresser à elle. Cela avait empiré depuis l’arrivée d’Ysée. Depuis, cette dernière avait été prise comme bouc émissaire par la grosse Hadweth, amplifiant la vie de cauchemar de la jeune catin.

En traînant les pieds, les bras contre ses flancs, inertes, le regard bas, elle alla à l’encontre de ce jeune homme qu’avait indiqué la Grosse. D’une voix monotone, sans aucune intonation, et sans même daigner croiser son regard – elle se mit à fixer un coin de la pièce, bien plus haut que le visage de l’homme – elle lui demanda :

«
Vous me vouliez, Monsieur ? »
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MessageSujet: Re: Le charme du passé, c'est qu'il est passé. [Ysée][Fb]   Le charme du passé, c'est qu'il est passé. [Ysée][Fb] EmptyLun 16 Juin 2014 - 11:45

Le charme du passé, c'est qu'il est passé.




J'avais détourné le regard et profité pour commander une chope de bière. J'avais faim, mais j'aurais tout le temps de manger en savourant ma victoire sur cette petite. J'avais déjà amené, par le passé, certaines prostituées à se vendre à moi naturellement, sans que je ne leur donne rien. Je savais jouer de mon charme naturel et de ma voix rauque. Je savais donner des ordres et faire croire que certains des miens n'étaient que des idées venues naturellement à mes victimes. Je vis approcher du coin de l'oeil la demoiselle commandée, et tournais mon visage vers elle.

Son ton apathique et son air lointain ne me surprirent pas, même si cela m'agaça. Je n'avais pas envie d'une créature sans âme. Je voulais qu'on me résiste légèrement, pour donner plus de saveur à ma victoire. J'allais donc devoir réveiller sa témérité, et je savais comme faire. Avec un sourire des plus charmeurs, je lui ordonnais d'une voix basse, comme si je lui chuchotais des secrets, juste pour elle :

« ▬ Assis-toi »

C'était comme une espèce d'invitation et d'ordre. Je la laissais faire, dans le fauteuil d'à côté ; son regard fuyant m'exaspéra et je mis les choses au point tout de suite, alors qu'une femme déposait ma bière sur la table basse devant nous.

« ▬ Regarde-moi quand je te parle. Et dis-moi ton prénom. Celui que tu utilises, celui qui était le tien à ta naissance, peu m'importe ; je veux pouvoir nommer ceux à qui je parle. »

Bien que caressante, mon ton était celui d'un homme habitué à être obéi. Je m'adossais dans mon fauteuil, presque langoureusement, l'air d'un félin sur son coussin et bus une gorgée de bière en observant la demoiselle de mon regard appréciateur. Oui, elle était belle, mais quelque chose chez elle désamorçait toute trace d'envie. Son regard lointain, son air de chien battu ? Que les dieux m'entendent, je détestais qu'on m'ignore, ou qu'on me regarde sans me voir. J'étais quelqu'un de théâtral et qui aimait être au centre de l'attention ; je remarquais sans peine d'ailleurs quelques regards chargés de reproches posés sur la jeune femme devant moi. Hommes comme femmes semblaient jaloux de notre situation ; à dire vrai, la femme était belle, d'une beauté jeune et douce.

Mon crochet toujours en évidence sur ma cuisse, je posais ma chope de bière fraîche sur la table et croisais les jambes, l'air princier et impérieux. Je la toisais un instant, avant de continuer sur ma lancée ; ici j'étais le patron, et elle n'avait d'autres choix que de m'obéir, car c'était moi qui payais - enfin, normalement.

« ▬ Quel âge as-tu ? Vingt ans ? Vingt-cinq ? »

Ma demande était somme toute polie, mais c'est en la prononçant que je sentis la fausseté de mes propos. Son visage était lisse, sa peau de soie, mais ... Son regard semblait contraster avec son apparence juvénile. J'avais posé une très bonne question, car soudain son physique magnifique me troublait : quel âge pouvait-elle bien avoir, exactement ?

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MessageSujet: Re: Le charme du passé, c'est qu'il est passé. [Ysée][Fb]   Le charme du passé, c'est qu'il est passé. [Ysée][Fb] EmptyLun 16 Juin 2014 - 12:21

Elle s’assit, lourdement, sans aucune grâce. Son attitude l’agaçait. Cela le voyait comme le nez au milieu de la figure, et cela la fit esquisser un sourire discret. Elle restait de marbre, bloc de pierre insensible aux caresses d’un feu, autant face à ses paroles qu’à son comportement de Don Juan et de charmeur de serpents. Serpents ? Cela tombait bien, car Ysée était d’assez mauvaise humeur aujourd’hui que pour mordre et enfoncer son venin verbal dans la chair de ce pauvre type. Même si elle en était habituée, elle ne pouvait s’empêcher de sentir un bouillonnement, léger mais bien présent, dans tout son être à la vue de ces hommes affamés de chair fraîche, et qui ne semblaient jamais repus. De plus, celui-là était jeune et beau – elle devait bien l’admettre, son visage avait de quoi plaire, même à Ysée qui était bien difficile à séduire, pour ne pas dire que c’était impossible. Du coup, que venait-il foutre dans un bordel ? N’avait-il déjà pas assez d’atouts pour mettre dans son lit n’importe quelle minette à la cuisse légère, croisée au détour d’une ruelle ou d’une auberge ? Minas Tirith était vaste, c’était une grande ville où il n’était pas bien compliqué de trouver de quoi se mettre sous la dent – ou sur la queue. Qu’avait-il à gagner à venir quérir les services des prostituées de bas étage ? Il perdait son argent. Peut-être était-il mal membré, cela arrivait que des hommes, à cause de cette tare physique, avait recours qu’aux putes pour espérer avoir quelques relations sexuelles. Mais, en général, ces hommes mal lotis ne se pavanaient pas ainsi, comme un coq dans une basse-cour, et gardait plutôt une mine penaude. Elle imaginait aisément les quolibets que ces gars-là avaient du entendre tout au long de leur vie, depuis que leur sexualité était devenue active. Elle les plaignait presque.

Toutefois, non, ce jeune homme au crochet avait trop d’assurance et de confiance en lui pour être membré comme un poussin. Alors, la seule raison était qu’il faisait partie de ces obsédés, jamais satisfaits, toujours prêt à forniquer à droite et à gauche, et lorsqu’une fille ne se présentait pas assez rapidement, il déboursait quelques piécettes en échange d’une baise rapide. Ah. Donc, avec un peu de chance, Ysée n’en aurait que pour quelques minutes. Ce fut à ce moment, où elle pensait en avoir vite fini avec ce client, que celui-ci entama une espèce de discussion. A quoi jouait-il ? Ysée daigna enfin le regarder furtivement dans les yeux, avant de reposer ses yeux pleins de lassitude à un endroit quelconque du salon. Elle poussa un profond soupir, ennuyée, n’essayant même pas de cacher cela. Qu’il s’énerve et qu’il s’en aille, ça lui ferait les pieds !

Le voilà qui lui demandait son nom. D’une voix froide, tel un blizzard, elle répondit. Elle n’allait certainement pas lui donner le plaisir de l’interroger sur son propre nom. Elle s’en fichait bien, de qui il était, de comment il s’appelait, d’où il venait et ce qu’il faisait en dehors de niquer des demoiselles plus ou moins dignes de lui. S’il existait seulement une seule fille dans ce monde digne de lui, d’ailleurs. Alors qu’il lui demanda son âge, ses yeux s’agrandirent d’étonnement. Pourquoi posait-il cette question ? Avait-il deviné que quelque chose clochait chez elle ? On ne lui demandait jamais ça, les autres s’en cognaient royalement de connaître son année de naissance, c’était même rare qu’on désirait savoir la nommer. Seul son cul semblait avoir de l’importance en général et l’interrogatoire de ce type était à la fois surprenant et exaspérant. Elle se raidit, tout à coup mal à l’aise, et d’un ton qui n’était plus simplement froid, mais carrément lourd de méfiance, elle répondit par une autre question.

«
En quoi cela vous intéresse-t-il ? Qu’est-ce que cela peut bien vous faire ? »

Ysée jeta quelques regards autour d’elle, vérifiant qu’on ne les écoutait pas. Hadweth avait un homme très vieux dont la tête disparaissait entre ses énormes seins, et elle riait à gorge déployée, vulgaire. Aucune autre catin ne se trouvait dans le salon. L’une d’elle montait, accompagnée d’un homme blond et particulièrement laid et rachitique. La présence des autres filles se prouvait qu’à grands renforts de cris – de faux orgasme, ou de douleur. Ils étaient, on pouvait le dire, seuls, en tête à tête. Cela la gênait mais elle était également contente que personne ne soit témoin de cette étrange conversation. Elle reporta son attention sur le gars au crochet, l’œil brillant d’un étrange éclat, celui d’une profonde suspicion.

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MessageSujet: Re: Le charme du passé, c'est qu'il est passé. [Ysée][Fb]   Le charme du passé, c'est qu'il est passé. [Ysée][Fb] EmptyLun 16 Juin 2014 - 12:45

Le charme du passé, c'est qu'il est passé.




Je ne laissais à présent voir que ma curiosité. Cette femme était réellement surprenante : là où d'autres en auraient profité pour jouer leurs séductrices sur ma personne, elle semblait ignorer tout ce qui se passait. Je ne savais rien de la vie des prostituées avec qui j'avais autrefois passé une nuit, et à dire vrai, cela m'intéressait autant que les chaussettes de mon second. Mais elle, il y avait quelque chose qui m'aiguillait. Qui me taraudait. Au premier regard, j'avais désiré, non pas son corps mais la séduire. Pour me prouver que je le pouvais encore - ce n'était guère un défi, au premier abord, car séduire une prostituée est aussi édifiant que de mettre un pas devant l'autre. Mais cette fille, Ysée ... Il y avait quelque chose chez elle, oui. Sans que je puisse mettre le doigt dessus.

J'avais mis la bride à mon agacement, bien qu'il resta là, au fond de mes entrailles comme mon monstre caché. Je détestais son indifférence totale, et le fait qu'elle m'ignore, me regarde à peine froissait mon égo masculin. Bien entendu, je n'en montrais rien ; cela aurait été une victoire pour elle que de voir son petit manège réussir. Sa question en réponse à la mienne était méfiante. Je sentais que je l'intriguais, et je me demandais un instant si j'avais enfin ferré le poisson. Combien de ses clients discutait avec elle avant de se la fourrer ? Sûrement aucun ; je ne sais même pas si ceux qui la payaient entendaient le son de sa voix hormis dans ses gémissements aussi authentiques que le maquillage de la grosse.

La salle s'était vidée ; ne restait qu'elle et moi, ou presque. En tout cas, l'endroit où nous étions était désert, et je repris un instant ma bière pour peser mes mots. De toute évidence, j'avais allumé un intérêt en posant mes questions. Néanmoins, je ne devais pas me précipiter comme un idiot la tête en avant ; cela n'était pas dans mes habitudes et cela ne le deviendrait pas. Je caressais un instant ma joue droite, mon crochet allant se harnacher à ma ceinture, comme si par ce geste je lui prouvais que je n'allais pas m'en servir. Mon regard pâle posé sur elle flamboyait d'amusement, mais mon sourire restait séducteur. En fait, quand bien même j'arriverais à la séduire, je ne voudrais pas la mettre dans mon lit. Même si j'avais passé trois bonnes semaines en mer, je ne désirais pas tirer un coup. Je désirais faire la cour.

Etonnant pour un pirate ? Et pourtant, c'était ce que j'aimais. Cet instant où la femme que je désirais se perdait irrémédiablement dans mes bras, ce moment où la victoire était totale, pas encore gâchée par une partie de jambes en l'air. Non pas que je ne sache pas satisfaire les deux partis, moi comme elle, mais à dire vrai, le sexe avait un intérêt limité chez moi. Le seul besoin naturel, et lorsqu'il était comblé, je m'en désintéressais. Je continuais de l'observer un instant, et repris, toujours de ma voix basse et modulée, presque mélodieuse :

«  ▬ Parce que je m'intéresse toujours à ceux que j'ai en face de moi.   » Et comme cela ne me semblait pas assez convainquant, j'en remis une couche, en tirant un petit sourire désabusé, comme si je partageais une idée avec elle : « Avoir des informations est le seul rempart qu'on peut demander aux autres. Cela me permets de me faire une idée. De voir si j'ai raison d'avoir des attentes ou non. Je réitère donc ma question : quel âge as-tu ?   »

J'avais apprécié qu'elle me vouvoie. Si, de mon côté, j'avais tous les droits sur elle, en tant que client, j'aurais dédaigné sa familiarité. Je détestais qu'on face ami-ami avec moi. J'étais un capitaine, et pas n'importe lequel ; j'aimais qu'on me donne le respect qui m'était dû. Mais cette Ysée, elle, n'était pas seulement polie mais froide et suspicieuse. Imaginait-elle ce que j'avais en tête ? Non, sûrement pas. Je devais être un énième client, aux moeurs bizarres. Les cris venant des étages étaient loin d'être excitants : il y régnait une effroyable bifurcation, comme si les personnes féminines d'où provenaient ces cris se dédoublaient, pour ne pas avoir à vivre cela, et qu'elles laissaient leur partie bestiale prendre le dessus. Cela résonnait comme des cris de gorets à mes oreilles, mais je retins la grimace qui aurait pu apparaître sur mes traits. Je gardais le même visage neutre, avec ce sourire doux et séducteur, et mon regard curieux.

A dire vrai, cette femme m'intriguait totalement. Je voulais la voir se détendre, et la dominer. Non pas dans un lit, mais face à moi. Savoir que j'avais gagné ce petit jeu dans ma tête. Je détestais perdre, et je pouvais devenir violent si je n'avais pas ce que je voulais. Je n'aurais aucun scrupule à lui faire du mal si elle devenait un poids pour moi ; si je la payais, elle serait rémunérée. Elle devait avoir l'habitude de faire des choses horribles pour de l'argent ; les prostituées étaient comme des esclaves, sauf qu'on les payait. Morceaux de chair modelables selon nos envies et nos pensées. Si j'avais le désir de planter mon crochet en elle, qui m'en voudrait ? Bon, je n'irais peut-être pas jusque là, car c'était un joli brin de fille, et gâcher sa beauté aurait été idiot. Mais j'avais d'autres idées en tête, et l'usage de mon crochet n'était pas la seule manière que j'avais de faire du mal. Continuant de la toiser, je m'étais tu, attendant mon dû - sa réponse. J'étais tel le roi attendant le verdict : jambes croisées, mes traits hautains tournés vers elle, j'avais l'air d'un chasseur face à sa proie. J'avais l'air, non plus d'un serpent, mais d'un félin, d'une panthère noire aux joues couvertes de chaume, et au regard de glace flamboyante. Tout chez moi contrastait avec l'endroit glauque et je n'en paraissais que plus magnifique.

Taquin, je décidais de pousser mon interrogatoire. J'avais de multiples questions à lui poser, mais je voulais tout d'abord tester ses connaissances et sa ruse. Si elle donnait une bonne réponse, cela risquait de me mettre de bonne humeur. Quant à une mauvaise, ou une feinte ... Le contraire serait mauvais. Ma voix de basse gronda, mélodieuse et flûtée, rauque et amusée.

« ▬ Sais-tu qui je suis ? »

Comme pour l'aiguiller, je fis bouger mon crochet à ma ceinture ; des capitaines avec une main en moins, cela ne courrait pas les rues. Mais je n'avais jamais mis les pieds ici ; ma célébrité m'avait-elle devancé ? Je l'espérais - pour elle et pour moi.
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MessageSujet: Re: Le charme du passé, c'est qu'il est passé. [Ysée][Fb]   Le charme du passé, c'est qu'il est passé. [Ysée][Fb] EmptyLun 16 Juin 2014 - 13:26

Mais quel enquiquineur, celui-là ! De drôles d’olibrius, elle en voyait souvent, toutefois, elle aurait bien apprécié qu’il s’en tienne au but initial de son arrivée en ces lieux ! Elle fronça les sourcils et lança un regard bardé d’éclairs et de noirceur sur cet homme. Elle savait que, non seulement elle lui donnait satisfaction, mais que si son Maître percevait un tel regard chez elle, elle serait fouettée – au minimum. Peut-être même qu’il lui couperait un orteil, ou l’affamerait durant trois jours. Tout était possible, dans ces foutus bordels, où la femme était relégué au rang de propriété sans âme ni intelligence individuelle. Pires que des trous postés sur deux gambettes qui se devaient d’être assez jolies, malgré les zébrures violacées dont elles pouvaient être recouvertes. Celles d’Ysée se croisèrent, pour se décroiser assez rapidement et être ramenés vers elle, sous ses fesses, en une position à moitié fœtale. Une façon de s’asseoir à l’opposé d’une attitude tentatrice, celle qu’elle aurait du adopter, mais elle s’en fichait. Au pire, si son Maître avait un tant soit peu de bon sens, il verrait rapidement que ce gars en face d’elle n’avait aucune envie de sexe – en tout cas, pas tout de suite.

Diantre. C'est qu'il insistait sur sa question, le bougre. Au tour d’Ysée d’être agacée, qui aurait voulu lui envoyer sa chope de bière en plein visage pour retourner à sa solitude réconfortante. Sauf qu’ici, on lui imposait une courtoisie qui la dégoûtait en plus de tous ces hommes répugnants. Hors de question, de ce fait, de se comporter comme une gourgandine sans éducation. Sans éducation, elle l’était, mais il fallait être stupide pour asperger de bière un client, à moins d’être masochiste.

Elle se résigna et entrouvrit les lèvres, avant de les refermer aussitôt. Ses yeux se perdirent à nouveau ailleurs. Pensive, elle se demandait si elle ne devrait pas lui mentir. Il lui donnait vingt ou vingt-cinq ans. Qu’elle lui dise vingt-trois et il serait content. Au fond, n’était-elle pas encerclée de tous les mensonges possibles et imaginables ? De faux bourgeois, de faux orgasmes, de fausses séductions, de faux amants. Seul l’argent était vrai, cliquetant dans les bourses, sur le comptoir, dans la main du Maître. En fait, même ce type, là, il puait le mensonge. Ses iris glacés lui donnaient froid dans le dos. Un frisson lugubre parcourut son échine tandis qu’il patientait toujours, dans l’espoir qu’elle s’incline et lui réponde. Ce ne fut pas qu'une parole qu’elle prononça ; elle siffla, telle une vipère :

«
Vingt-neuf ans. »

Pourquoi lui avait-elle dit la vérité ? Aussitôt, elle baissa les yeux, s’insultant intérieurement d’idiote. S’il la considérait comme une menteuse, chose qui allait certainement arriver, elle allait en prendre pour son grade. Grade pas très haut placé, qui plus est… Bon sang, elle allait morfler. Elle se mordilla la lèvre, tout à coup moins sûre d’elle. Son client buvait, étalé dans ce fauteuil au cuir abîmé, à l’aise comme un seigneur sur son trône. Qu’est-ce qui lui donnait autant d’assurance, au final ? Qu’avait-il de plus – ou de moins – que les autres hommes de cette ville pour qu’il se sente en droit de se comporter d’une telle façon ? Elle n’aimait pas son genre, elle n’aimait pas sa façon de sourire, de la reluquer, de mouvoir sa main et son crochet stupide, de s’asseoir, avachi, comme s’il était dans ses appartements. Elle espéra de tout cœur que son manque d’enthousiasme le lasse suffisamment pour qu’il décide de partir, car elle décela en lui… un monstre. Elle ne sut pas préciser quel genre de monstre, et ce qu’il aimait faire subir aux autres, mais ce n’était pas un homme faisant partie de ceux en qui on peut avoir toute confiance. Au contraire. On ne plaçait pas un masque de félonie sur soi si on ne l’était pas, au moins partiellement. Malgré une peur sourde et croissante, elle brava son regard de ses prunelles sombres, les traits crispés, la mâchoire serrée et durcissant son minois.

«
Qui vous êtes ? »

Elle n’en avait aucune idée. Ignorante comme la plupart des catins, Ysée l’était encore plus, car elle passait le plus clair de son temps à rester cloîtrée dans sa chambre, ne prenant part à aucune soirée tranquille où les filles de l’établissement se réunissaient pour tenter de se donner un semblant de vie normale, comme si elles étaient amies, ou sœurs, et non des catins désœuvrées coincées dans la même galère. Incroyablement solitaire, elle était totalement coupée de tout, à tel point que son cerveau n’était même pas capable d’imaginer une autre vie que celle-ci. Ysée n’était qu’un bloc de pierre depuis des années, asséchée de l’intérieur à force d’avoir tant pleuré. Un jour, pourtant, elle avait cessé de se lamenter, tout simplement car elle s’était demandé sur quoi elle pleurait. Elle n’avait pas de famille lui manquant, aucun ami qui l’attendait, aucun amour, aucune autre perspective d’avenir plus agréable, aucun passé où elle désirait retourner et qu’elle regrettait. Rien sur quoi pleurer. Elle avait donc séché ses dernières larmes, pour un très, très long moment. C’était ses yeux totalement secs qui restaient plantés dans ceux de givre de son client.

«
Vous êtes… un pirate. » dit-elle, d’une voix peu assurée, tout en haussant les épaules pour garder contenance.
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MessageSujet: Re: Le charme du passé, c'est qu'il est passé. [Ysée][Fb]   Le charme du passé, c'est qu'il est passé. [Ysée][Fb] EmptyLun 16 Juin 2014 - 18:22

Le charme du passé, c'est qu'il est passé.




Elle avait l'air plutôt mécontente que j'insiste. Qu'elle soit de mauvaise humeur ou non m'importait peu ; je voulais des réponses et j'allais les avoir, c'était aussi simple que cela. J'étais un enfant gâté, capricieux, qui n'aimait ni perdre ni voir son jouet cassé. Ysée était, aujourd'hui, un jouet que je convoitais et si elle osait me filer entre les doigts, je risquais de devenir méchant. Oh, bien entendu, je n'avais rien contre une petite course-poursuite. Notre petit jeu des questions m'amusait pour le moment, d'autant plus qu'elle s'y pliait de mauvaise grâce.

Sa réponse était digne d'une vipère venimeuse et perfide. Son âge était comme une insulte lancée à mon visage, et je pense qu'elle me haïssait à cet instant. Néanmoins, j'avais ce que je voulais, pour le moment, et me mis à réfléchir sur cette réponse pour le moins inattendue. Vingt-neuf ans ? Vraiment ? Je savais que certaines femmes faisaient jeunes, mais elle était sûrement celle qui prouvait cela. Sa peau paraissait sortir de l'adolescence, ferme et sans aucune ride. Ses cheveux étaient soyeux, son corps ferme. Aucune trace d'avoir passé les vingt-cinq ans, et pourtant, je savais qu'elle ne me mentait pas.

J'avais eu cette idée, sur le coup : non, ce n'était pas possible. Mais j'étais un menteur né, et je savais quand on me disait des mensonges. Ce chiffre sifflé de manière menaçante n'était que la stricte vérité. Et mes esprits se mirent à battre la campagne, cherchant une logique à tout cela. Mes vastes lectures sur le sujet magique m'amenèrent à penser à bien des choses, la plupart n'étant pas humaine, et même si je n'avais aucun fondement sur les théories qui se mettaient en place sous mon crâne, mon intérêt pour elle s'accrût. Etait-il possible qu'elle fut plus qu'une humaine et que j'ai été attiré par son aura singulière ? J'avais envie que cette supposition soit vraie, que quelque chose de magique chez elle soit entré en résonance avec ... je ne sais pas, peut-être une magie naissante chez moi ? J'étudiais avec soin tous les ouvrages que je trouvais sur le sujet ; j'étais parfois obligé de piller des endroits dangereux juste pour trouver quelques feuillets parlant de magie. Je voulais savoir maîtriser les sortilèges et les évènements étranges ; je voulais devenir puissant et fort. L'étais-je devenu sans le savoir ?

En attendant, mon regard pâle s'était accroché au sien, sombre. J'y lisais toutes les émotions qui émanaient d'elle : méfiance, suspicion mais aussi menace, colère, rage. Bien, bien ; au moins ce n'était plus de l'indifférence. Je détestais que les gens m'ignorent ; comment pouvaient-ils, face à mon charisme et ma beauté, face à mon aura de leader ? Elle ne savait pas qui j'étais. Voir son ignorance dans les traits de son visage me laissa pantelant de déception. On ignorait donc qui j'étais ! Dire que j'étais déçu était un euphémisme : j'avais gravi les échelons un à un en risquant ma vie ; j'avais eu un passé des plus terribles et j'avais réussi à me faire un nom - certes un faux, mais quand même. Et ici, personne ne connaissait Shadow ? J'en aurais brisé l'anse de ma chope si je l'avais eu en mains ; je restais aussi calme qu'un moment avant, mais mon sang charriait dans mes veines le besoin de piller cet endroit, de faire crier les gens pour qu'ils connaissent mon nom. Je tempérais mes ardeurs, difficilement, mais j'y arrivais, sous couvert d'un visage calme et impassible.

Sa réponse fit naître un demi-sourire narquois sur mes lèvres ; c'était osé, mais cela me plaisait. Je hochais presque délicatement la tête, comme si j'hésitais à lui accorder ce point ; je finis par déclarer à voix basse :

« ▬ Oui, effectivement, je suis un pirate ... Mais pas n'importe lequel. »

Je n'allais pas lui raconter tous mes exploits, nous y serions encore là demain matin que je n'aurais pas dit la moitié. Le sourire sur mon visage se changea en une grimace carnassière. Mon regard pétilla d'amusement ; je pense qu'elle avait peur de moi, et elle avait raison. J'étais un être sans scrupule, et je n'aurais eu aucun remord à la tuer si elle venait à dire un mot de travers. Mais la violence physique, bien que j'adore cela, n'était que mon dernier recours. Je ne désirais pas lui faire du mal - même si l'idée m'était passée par la tête, bien sûr ...

« ▬ Je suis le Capitaine Shadow, et mon bâtiment est la Mandragore. Cela m'étonne que tu n'aies pas entendu parler de moi, nous avons pillé une ville des alentours il y a de cela trois jours. »

Si elle savait, je saurais qu'elle aurait peur. Si elle ne savait pas, hé bien, tant pis pour elle. Nos pillages m'avaient menés jusqu'à une petite ville où j'avais littéralement rasé les maisons. Ma fureur avait trouvé son origine quand le marchand chez qui j'avais vendu mon butin avait refusé de me donner ma récompense, un magnifique ouvrage de cuir parlant de la magie de guérison elfique. Au lieu de cela, il l'avait brûlé, en se gaussant de moi. Dernière chose qu'il avait faite, d'ailleurs, avant de se retrouver avec mon crochet planté dans la gorge. Je me souvenais parfaitement de sa vision d'horreur, lorsque son sang coulait sur son si beau tapis ... L'ouvrage était perdu, et je ne m'en étais pas encore remis ; il y avait de bonnes choses, d'être connu - la plupart des gens me donnaient ce que je voulais rien qu'à la mention de mon nom. Mais certains se rebellaient, voulant voir jusqu'où j'étais prêt dans ma quête de puissance.

« ▬ Tu es jeune. Non, tu parais jeune. Toutes les demoiselles des environs doivent jalouser ton teint de pêche et ta chevelure soyeuse ... Entre nous ... Je peux t'avouer que tu ne me sembles pas totalement humaine. »

Ma voix avait été réduite à un murmure, et si mes paroles pouvaient être prises comme des insultes, elles révélaient aussi que la demoiselle n'était sûrement pas une créature humaine. Une femme qui vieillissait lentement ... Oui, j'avais déjà lu quelque chose là-dessus, sur une lignée humaine, ainsi ... Néanmoins, je ne me rappelais plus de cela - la magie de leur sang et de leur vieillesse décélérée étaient dues à la parenté, et je ne pouvais rien faire pour en profiter. Je m'étais donc écarté de ce sujet.

« ▬ Peu importe ce que tu es, en fin de compte. Néanmoins, tu perds ton temps ici. »

Ici à Minas Tirith, ou ici au bordel ? A elle de voir ce qu'elle voulait dans mes paroles. Je songeais qu'elle perdais son temps, car je devinais chez elle une force de vie singulière. Même si elle ne semblait pas s'en être rendu compte, elle était forte. Cela venait de son sang, peut-être.
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MessageSujet: Re: Le charme du passé, c'est qu'il est passé. [Ysée][Fb]   Le charme du passé, c'est qu'il est passé. [Ysée][Fb] EmptyLun 16 Juin 2014 - 23:31

Ysée aurait ri si elle avait eu le cœur à rire, en observant la mine déconfite du pirate. Enfin, non, ses traits n’avaient pas bougé d’un cil, mais une vive lueur avait éclaté dans ses iris givrées, trahissant furtivement sa déception, liée à de l’amertume. Il n’avait pas apprécié la réponse d’Ysée, cela dit, elle n’avait menti. Elle s’était fiée à la tenue audacieuse et à l’arme vissée à son avant-bras amputé pour lui répondre ce qu’elle avait déduit. Pour le reste… Elle n’en savait réellement rien. L’homme se présenta sous le surnom de Shadow ; les commissures de ses lèvres s’étirèrent légèrement. Elle aurait voulu le vanner sur ce patronyme prétentieux mais elle s’abstint, de justesse. Décidément, ce garçon, qui ne devait pas être plus vieux qu’elle ou à peine, ne manquait pas une seconde de sa vie pour se mettre en avant et se vanter autant que possible. Cela la rendait encore plus méfiante, et plus dégoûtée par l’énergumène en question. Il exprima son étonnement face à l’ignorance d’Ysée, à cela, elle haussa les épaules, penchant la tête sur le côté.

«
C’est que le monde extérieur m’intéresse peu. Enfin, il m’intéresse, mais ne pouvant partir d’ici, je ne désire pas le connaître. J’aurais l’impression de me nourrir de rêves impossibles à réaliser. Je me gâcherai la santé. »

Elle commençait à converser réellement, amenée doucement, sans même qu’elle s’en rende compte, par le pirate sur le chemin de la discussion. La catin en oublierait presque la raison initiale pour laquelle il était venu dans cet endroit sordide. Au fond, pourquoi ne pas discuter avec lui ? Elle gagnait du temps, qu’il payait de toutes évidences, et pouvait ainsi éviter un autre client, du genre un gros lourdaud ou un fanfaron trop jeune pour être entre ses cuisses et surtout insupportable, car c’était sa première relation sexuelle. Ah, les jeunots qui venaient se dépuceler ici, il y en avait à la pelle, et Ysée les trouvait insoutenables. Ils n’étaient pas bien méchants, mais ils perdaient un temps fou en détails pratiques pour même pas une minute de ramonage. En soi, tant mieux, mais c’était parfois atroce d’attendre ainsi qu’un marmot comprenne enfin comment faire rentrer sa petite queue dans l’orifice de la dame… Du coup, en se prêtant au jeu de la conversation avec le pirate à la fois charmeur et hostile, elle évitait de vivre un désastre de plus digne de son métier. Elle lui offrit un sourire des plus hypocrites, un brin moqueur, quoiqu’elle frémisse toujours en son for intérieur qu’il ne décide de s’en prendre physiquement à elle. Si elle exagérait, elle passerait un mauvais quart d’heure, elle choisit donc sagement de ne pas dépasser la limite de la singerie courtoise. Très courtoise. Ysée, un peu téméraire, faisait tout de même preuve de prudence.

Comme elle se taisait, il reprit la parole. Il revint sur son âge et finit par sortir une étrange déduction. Elle cessa d’afficher un air faussement ravi pour, à nouveau, ouvrir de grands yeux surpris, ses sourcils s’arquant en point d’interrogation. Comment ça, « pas totalement humaine » ?

«
Que voulez-vous dire par là, en disant que je ne serais peut-être pas humaine ? Êtes-vous aveugle ? Regardez-moi ! Je n’ai rien d’autre que le corps d’un humain, tout ce qu’il y a de plus normal ! Ce n’est pas parce que je reste étrangement plus jeune que les autres femmes de mon âge qu’il faut tout de suite sortir que je suis d’une… autre race. Quelle absurdité ! » Elle croisa les bras sur sa poitrine menue. C’est là que le pirate ajouta qu’elle perdait son temps à rester ici. Sa moue boudeuse changea, elle était maintenant outrée, et eut un rire nerveux. « Vous ne manquez pas de culot ! Vous débarquez ici, et au lieu de me baiser comme n’importe qui d’autre, vous vous jouez de moi et essayez de me faire rentrer dans la tête des stupidités pareilles. Histoire de m’abreuver de rêves insensés ? Si la torture psychologique vous amuse, passez votre chemin, vous êtes fort en retard pour tordre mon esprit par de belles paroles ! Je suis rodée ! »

Elle se leva brusquement, tapant de son pied déchaussé, nu. D’un mouvement sec du menton, le regard dur, elle indiqua l’étage supérieur, où se trouvaient les chambres. Elle le fixa intensément, énervée, même si elle tentait de se contenir ; le léger tremblement de ses mains la trahissait.

«
Montons et faites ce que vous avez à faire. Ensuite, vous payez pour le temps que je vous aurais accordé et vous vous en irez aussi vite que vous êtes venu. »

Debout face à lui, toujours avachi dans son fauteuil, les bras croisés, elle essayait vainement de contrôler ses émotions.
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MessageSujet: Re: Le charme du passé, c'est qu'il est passé. [Ysée][Fb]   Le charme du passé, c'est qu'il est passé. [Ysée][Fb] EmptyMar 17 Juin 2014 - 12:26

Le charme du passé, c'est qu'il est passé.




J'avais retiré délicatement le crochet de ma ceinture pour le poser de nouveau sur ma cuisse ; son poids sur mon membre et au-delà de mon poignet était familier et me rassurait, en quelque sorte. Cet objet que j'avais longtemps haï comme chose extérieure était devenue partie intégrante de mon être. Il avait remplacé une main, et si l'efficacité des doigts et d'une paume restait exceptionnelle, le système de bracelet de cuir et d'ustensiles fixables était un petit bijou dont je n'étais pas peu fier. Le crochet était mon arme favorite : elle impressionnait rien qu'à la vue ; certains de mes marins m'avaient avoué que cela rendait mon aura de capitaine plus impressionnante encore, et qu'après avoir vu l'utilisation que j'en faisais en combat, ils avaient eu des cauchemars précis et sanglants.

Sa réponse était, en soi, d'un ennui terrible. Elle se coupait du monde, pour ne pas se gâcher la vie ? Pauvre petite chose fragile, songeais-je avec ironie. Elle n'avait nullement conscience de ce qu'elle était, et c'était bien dommage. Mais je ne comptais pas lui en dire plus. En tout cas, mes paroles avaient éveillé sa colère et son incompréhension. Presque boudeuse, elle tenta de me remettre à ma place, de montrer qu'elle n'était qu'humaine. Mais je ne tombais pas dans le panneau, restant tranquillement installé, sans bouger d'un pouce, comme un énorme félin suivant des yeux un oiseau fébrile.

Je la laissais finir, et une fois levée, se tenant devant moi, elle ressembla à une enfant qui ne comprend pas ce qui se passe et qui fait des efforts pour revenir à une situation qu'elle connaît. C'était pathétique, et je la regardais sans ciller, silencieux comme une tombe, mon visage redevenu neutre, sans sourire ni étincelle dans le regard. Mes traits étaient à présents aussi indifférents que possible, alors que je semblais réfléchir à ce qu'elle avait dit. Enfin, je me levais avec une lenteur menaçante et je me tins devant elle, plus grand, plus fort, plus puissant. Sans sourire, je me penchais doucement alors que mon crochet se posais sur la base de son cou ; la pointe effleura sa peau et s'y posa, sans pour autant la blesser. Le contact d'argent devait être froid, et je fis très très lentement descendre l'arme le long de son décolleté, comme si je pouvais réellement y éprouver le contact, alors que ma voix murmurait, basse et grondante comme un animal :

« ▬ Tu es une catin. Je paye pour ton temps, peu importe ce que j'y fais. Ne devrais-tu pas être heureuse que je m'intéresse à ta conversation plutôt qu'à ton corps ? Ton corps ... Quand j'ai dis que tu n'étais pas humaine, je ne voulais pas dire que tu étais un monstre. L'homme a peur de ce qu'il ne comprend pas ; ce qui ne lui ressemble pas l'effraie. Pourtant, certains monstres ont apparence d'homme et sont plus dangereux que des créatures au physique repoussant ... Mais je m'égare. Je ne veux pas te donner d'espoirs ou de rêves. J'avance cette théorie, qu'elle te plaise ou non, et tu devrais y réfléchir plutôt deux fois qu'une : tu n'es pas humaine. »

Mon ton était tel qu'il ne demandait aucune réponse, qu'il était implacable comme une chape de plomb. Mon crochet s'était arrêté entre les deux seins, présent sans pour autant lui faire du mal, et ma main la tenait à présent par la taille. Mon regard la fixait avec intensité, et je ne montrais rien d'autre qu'un vague intérêt, alors que je m'amusais énormément.

« ▬ Mais tu as raison, nous avons bien mieux à faire ... Tu vends ton corps pour de l'argent, après tout, petite catin impatiente ... Sache également que ce n'est pas toi qui m'accorde ton temps. Je te paye pour cela, et tu dois satisfaire les moindres de mes désirs. Je vais donc satisfaire ta demande : montons à l'étage. Mais tu regretteras bien vite de ne pas avoir continué à discuter ... »

Mon crochet fit perler une goutte de sang, là où la pointe parfaitement limée pénétra rapidement dans la peau, entre les deux seins, avant de s'éloigner d'elle, comme le reste de mon corps. Je venais de reculer de deux pas, menaçant comme un ciel d'orage, mon regard devenant tempête. La minuscule blessure que j'avais faite ne se voyait pas, et c'était plus un avertissement qu'autre chose. Qu'avais-je espéré au juste ? La séduire ? Par les Dieux Marins, elle était une prostituée ! Elle soulevait la jupe pour une piécette. Je méritais bien mieux que cela ; je méritais quelqu'un qui me résisterait un peu plus. Qu'elle soit humaine ou non, j'allais faire ce qu'elle avait demandé : monter avec elle, et non pas la baiser comme elle semblait s'y attendre, mais faire bien plus. Je lui réservais quelque chose d'inoubliable. Avec un sourire carnassier qui ne disait rien de bon, je murmurais d'une voix rauque :

« ▬ Après toi ... »

De ses propres mots, elle avait demandé à ce que l'on monte. Allait-elle avoir le courage d'aller jusqu'au bout ? De me braver jusque dans le lit ? Elle devait s'attendre à ce que je la fasse souffrir ; elle avait parfaitement raison. Je voulais voir si son sang avait le même goût que celui des autres ; peut-être y avait-il quelque chose de plus dans le sien ? Je la fixais, immobile devant elle ; elle ne fuirait pas. Elle ne pouvait pas. Où irait-elle de toute façon ? Elle n'avait aucun choix, et la situation désespérée où elle était me tira un rire intérieur. Je savais reconnaître une âme désespérée quand j'en voyais une ...

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MessageSujet: Re: Le charme du passé, c'est qu'il est passé. [Ysée][Fb]   Le charme du passé, c'est qu'il est passé. [Ysée][Fb] EmptyMar 17 Juin 2014 - 17:06

Le pirate s’était levé à son tour. Valar, qu’il était grand ! Il la dépassait d’une bonne tête et demi, si pas deux, et il n’eut aucun mal à la toiser à sa guise. Ysée eut réellement du mal à soutenir son regard, son éducation ainsi que son statut social ne l’aidant pas dans cette démarche de bravoure puérile et imprudente. Cela dit, ce n’était pas plus mal, en y repensant sérieusement. Que gagnerait-elle à attiser l’animosité d’un homme qui pouvait faire ce qu’il désirait d’elle, excepté la tuer ou la rendre trop laide pour attirer d’autres clients ? Elle aurait adoré le repousser dans ses retranchements, tout en elle lui hurlait de le remettre à sa place. A sa petite place de petit pillard des mers, à sa petite place de coq qu’elle désirait plumer, à sa petite place de prétentieux pourri jusqu’à la moelle ! Qu’aurait-elle donné pour lui cracher autre chose que quelques paroles, malheureusement contenues, à la figure ? En plein sur ses yeux transperçant, histoire qu’il les ferme un peu, en même temps que sa grande gueule ? Ne pouvait-il donc pas se taire ? Qu’avait-elle fait pour mériter de se coltiner les pires phénomènes de Minas Tirith, et même ceux qui voyageaient et atterrissaient ici ?

Le crochet glacé vint caresser de sa pointe limée la fine peau protégeant le haut de sa poitrine. Le capitaine s’amusa à le faire descendre dangereusement. Elle poussa un long et fébrile soupir, pour évacuer son stress, mais elle feignit l’ennui et le désintéressement total face à son attitude menaçante. Elle jouait la comédie, bien sûr, car dans ses entrailles naquit la terreur, tordant son estomac et lui mettant une boule dans la gorge. Elle n’avait rien à répondre de plus face à l’insistance de l’homme, qui persistait à lui faire avaler qu’elle n’était pas qu’une simple humaine, donc, elle se tut. Elle haussa à nouveau les épaules, jouant le rôle d’une femme sûre d’elle, et réussit à peu près à être crédible, même lorsqu’il l’empoigna par la taille d’un vigoureux mouvement, augmentant son emprise sur elle. A la fois physique, mais, même si elle n’aurait jamais voulu l’avouer, psychologique aussi. Elle avait beau eu dire qu’elle en avait vu d’autres des cas comme lui, on ne s’habitue jamais à l’humiliation et aux divers sévices que l’esprit humain pouvait inventer pour détruire une tierce personne. Ysée craignait toujours de vivre pire que ce qu’elle avait déjà connu, car elle était convaincue que l’horreur n’avait pas de limites quand elle se liait au sadisme.

Les paroles de Shadow eurent peu d’effet sur elle ; lui rappeler sa condition de catin et la rabaisser à n’être que ça, c’était une chose devenue son lot quotidien. Son Maître se prêtait à ce manège avec une étrange satisfaction, sachant bien le pouvoir qu’il avait sur ses prostituées, et il en profitait allégrement. Aucune ne rétorquait jamais. Non seulement parce que c’était généralement vrai, ensuite, par crainte fondée des représailles du Maître. Celui qui tenait l’établissement du Caméléon était particulièrement odieux, d’une façon très sournoise ; voix suave et mielleuse, l’air adorable avec ses filles de prime abord, dans l’ombre, il rejetait ses beaux habits de parade pour n’être qu’un monstre de violence. Toutes, ici, avaient une peur bleue de cet homme. Toutefois, en cet instant, Ysée ressentit une plus grande peur encore, car l’homme qui se tenait en face d’elle ne semblait pas se rassasier de la violence brutale, mais d’une toute autre façon de faire souffrir. Elle lut entre les lignes de ses mots, en reflet à l’éclat d’audace de ses yeux clairs, qu’elle pouvait déjà regretter sa proposition de monter dans sa chambre.

Une légère chaleur coula entre ses seins. Ysée baissa le regard sur son sternum et y vit une perle rouge se répandant dans le tissu ocre de son décolleté, l’imbibant d’un peu de son sang. Relevant les paupières lentement, elle perdit une bonne partie de sa confiance en elle. Ce n’était pas un homme, c’était un loup. Il lui semblait prêt à la dévorer, arrachant ses membres un par un, en commençant par les ongles, les doigts, l’avant-bras, l’épaule se déboîterait en écho avec le craquement de ses cotes tandis qu’un museau avide fouillerait ses organes… Il ferait en sorte de pouvoir entamer son repas macabre tout en la gardant en vie et, lorsqu’il n’en pourra plus de l’entendre hurler d’agonie, il lui déchirera la carotide pour achever le festin de son corps… Ysée eut un vertige, la pièce toute entière se mit à tourner, de plus en plus vite, tandis que son cœur s’emballait furieusement. Son sang se mit à battre dans ses veines à grosses pulsations, menaçant de les faire exploser dans toute sa chair. Elle manqua un souffle, deux souffles, et se mit à ventiler. Tout se passa en quelques secondes ; elle plaqua une main crispée sur sa poitrine et s’écroula. Pas inconsciente, mais ses jambes ne la tenaient plus, tout simplement. Elle se cogna à la rampe de l’escalier, tenta de se rattraper maladroitement mais finit tout de même à terre. Le malaise passa rapidement, mais elle eut du mal à reprendre sa respiration normale. Elle observa Hadweth, à moitié nue, sa chair molle débordant de ses derniers vêtements, qui la fixait d’une façon étrange. Inquiète, mais tout de même contente de voir défaillir celle qu’elle haïssait tant pour sa beauté.

Cela motiva Ysée à se relever le plus vite qu’elle le put. Elle se remit sur pieds, son corps vacillant quelque peu, elle devait se tenir aux meubles. Elle tourna le dos au pirate, monta quelques marches, et voyant qu’il ne la suivait pas tout de suite, elle pivota la tête dans sa direction. Sur son visage se lisait un désespoir immense mêlé de l’ultime force que le courage lui permettait encore de ressentir. Son regard s’enfonçait dans celui du pirate, même si son cœur battait la chamade. Elle ne dit rien, laissant ses yeux parler pour elle. Elle l’incitait à la suivre.


Dernière édition par Ysée le Ven 20 Juin 2014 - 15:50, édité 1 fois
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MessageSujet: Re: Le charme du passé, c'est qu'il est passé. [Ysée][Fb]   Le charme du passé, c'est qu'il est passé. [Ysée][Fb] EmptyMar 17 Juin 2014 - 18:15

Le charme du passé, c'est qu'il est passé.




Comment une putain osait-elle me tenir tête ? Je distinguais bien la peur dans son regard, malgré qu'elle tente de le cacher, mais je pouvais y lire aussi de l'effronterie, de l'insolence. Même si elle tremblait presque devant moi - ce que je comprenais tout à faire, ce que je désirais totalement - elle ne flanchait pas. Le contact de mon crochet ne laissa quasiment aucune trace, hormis une petite tâche d'un rose soutenu. Quasiment rien.

Mes paroles laissèrent planer un silence pesant, et soudain, elle s'effondra. Je crus un instant qu'elle s'était évanouie, mais je ne bougeais pas. Elle bougeait encore, et il semblait qu'elle n'ait juste plus eu de forces. Je continuais de la fixer sans faire le moindre mouvement pour l'aider ; elle se releva bien assez tôt, comme si elle était gênée que j'ai pu la voir dans un tel état de faiblesse - moi ou la femme de tout à l'heure. L'inconnue nous couvait du regard, apparemment heureuse de voir Ysée dans une situation embarrassante. Je revins à la prostituée pas tout à fait humaine, qui se tenait debout comme elle pouvait, bravant ses propres forces et sa propre peur. Elle avança sans me regarder, puis fit volte-face et dans son regard, je vis l'invitation désespérée. Je me mis donc en branle et montais derrière elle l'étage.

L'escalier donnait sur un couloir. Les diverses portes devaient sûrement être des chambres. Avait-elle une pièce attitrée ? Ou était-ce un peu comme cela venait ? Je la suivis sans sourciller, retenant avec amusement le geste réflexe que je sentais venir : celui de porter mon crochet à ma langue, pour sentir et goûter la saveur de son sang. Nous entrâmes finalement dans une petite pièce quasiment vide, hormis un tapis sale sur le sol tout aussi sale ; le lit au milieu était sûrement rempli de puces et d'autres saletés. Je fronçais le nez : même mon navire n'était pas aussi sale après un mois en mer ! Je ne dis cependant rien jusqu'à ce que la porte ne se ferme sur nous. Alors, dans un mouvement ample, je sortis une bourse d'un endroit discret, et posais la panse de cuir sur le meuble branlant servant à déposer des affaires. Je penchais la tête sur le côté, mes prunelles pâles brillant d'un éclat presque maléfique.

«  ▬ Je payerais chaque minute passée en ta compagnie. Mais tu devras faire ce que je te dis. Si tu es sage, je ne te ferais pas trop mal. »

Ma voix était presque mélodieuse, un brin amusée. Je restais debout, ne désirant nullement m'asseoir. L'endroit le plus propre ici était sûrement le plafond ! Non pas que la crasse me répugna, j'avais vécu bien pire dans mon enfance, chez mes parents pêcheurs, ou bien même sur le bateau d'Igrot. Je repoussais ces pensées ; songer à l'être diabolique dont j'avais été l'esclave ne pouvait que me conduire à faire du mal à Ysée. Et pour le moment, je ne souhaitais pas la tuer. J'avais d'autres choses intéressantes à faire.

«  ▬ Déshabille-toi. Et, pendant que tu enlèves ces nippes, contes-moi le souvenir le plus affreux que tu connaisses. »

Je voulais savoir, parce que j'étais fasciné par l'horreur de la condition de putain. Jamais je ne connaîtrais le désespoir qu'elles pouvaient vivre, jamais je ne pourrais comprendre qu'on vende son corps. Je n'étais ni compréhensif ni doux, au contraire ; j'étais brutal et sans pitié. Je voulais la briser, je voulais la voir détruite. Pourquoi ? Parce que j'avais du temps à perdre, parce que j'avais payé. Parce que je le pouvais. C'était aussi simple que cela. Je m'approchais du lit et retins un grognement, avant de mettre mon manteau de cuir sur la paillasse et d'y poser mon postérieur.

«  ▬ Tu semblais impatiente, en bas, que je m'occupe de toi ... Suis-je à ton goût, Ysée ? Ne suis-je pas séduisant ? » fis-je d'une voix railleuse, prononçant son prénom comme une insulte, m'amusant à renverser un instant les rôles comme si elle avait le loisir de me choisir, comme si le choix lui revenait.

Non. Elle n'avait aucun choix. Elle ne pouvait que ramper pour quelques piécettes. Plutôt mourir que d'être rabaissé à ce point ; je n'avais que dédain pour de telles créatures, et pourtant, cette femme avait quelque chose de magique. Je voulais en savoir plus, l'observer sous toutes les coutures. L'idée de la baiser, comme elle l'avait si bien dit, n'était pas totalement en reste, mais ce n'était pas cela que je désirais en ce moment. Mon envie de puissance et de force était plus grande que mes besoins charnels. Je n'étais pas qu'une queue sur pattes, contrairement aux hommes qui traînaient ici ; j'avais de la jugeote, et un caractère porté sur la passion plutôt que le besoin. J'aimais que les femmes tombent dans mes bras, me désirent, non pas pour des piécettes mais pour mon charme et mon insolence. Je n'avais rien à redire là-dessus, je passais rarement une nuit seul quand j'en avais décidé autrement.

«  ▬ Quand tu auras fini de me raconter ton souvenir, tiens toi debout devant moi et ne bouge plus. »

J'avais fini de donner mes ordres, et lui fis un signe de tête montrant qu'elle pouvait commencer. Mon regard posé sur elle n'avait rien d'un regard langoureux ou plein de désir. Oh, elle était belle, c'était sûr. Elle était jeune, et ferme, et ses formes généreuses auraient eu de quoi attirer mon attention. Mais pas ce soir ; j'avais dans mes iris bleu de glace quelque chose d'implacablement logique, comme si je la détaillais non pour sa beauté mais ce qu'il y avait en-dessous, notant chaque imperfection, chaque cicatrice. Je m'étirais un instant, un sourire narquois aux lèvres, comme si je m'amusais d'avance de ce qui allait suivre.

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MessageSujet: Re: Le charme du passé, c'est qu'il est passé. [Ysée][Fb]   Le charme du passé, c'est qu'il est passé. [Ysée][Fb] EmptyMer 18 Juin 2014 - 1:12

Le capitaine de la Mandragore derrière elle, ils montèrent et passèrent devant plusieurs portes, les chambres de ses « amies ». Tout le long de couloirs, divers cris plus étranges et plus variés retentirent à leurs oreilles, exprimant tantôt un plaisir feint, tantôt de la douleur. Ysée perçut même des pleurs. Ses épaules se crispèrent, ses jambes se raidirent tandis qu’elle passait l’embrasure de sa porte. Elle détestait ce moment où elle pénétrait dans sa chambre, car, des fois, les hommes l’empoignaient aussitôt la porte refermée et la violaient presque, avides, impatients de répandre leur semence inutilement dans sa vulve – ou ailleurs.

Un lit dans un état minable, une commode et une table de chevet, ainsi qu’un vieux tapis bouffé de mites, constituaient le seul mobilier de la chambrée. Sur la commode qui tenait sur elle presque par miracle, Shadow déposa sa bourse de cuir, et Ysée put entendre cliqueter les pièces d’argent, peut-être même d’or, qui sait ? Elle aurait aimé s’en emparer, enfoncer un objet pointu quelconque dans le cœur de son client et s’enfuir en courant de cet endroit qu’elle haïssait tant. Elle inspira profondément, réfrénant ses pulsions, contrôlant l’ardeur de ses émotions. Quelques secondes d’une lente et profonde respiration lui permit de reprendre ses esprits ; le vertige précédent la laissait encore pantelante, elle avait toujours cette angoisse terrible qui lui bloquait la gorge et rendait tout son corps aussi lourd que du marbre, mais elle arrivait au moins à rester relativement calme. Ses yeux, le moins expressifs possible, ne quittaient pas l’homme. Elle craignait, à présent, qu’il s’en prenne à elle de façon très violente, soudainement, comme cela arrivait parfois. Par réflexe, elle gardait les poings fermés, prête à se défendre. Eviter l’impertinence inutile, peut-être, mais se laisser battre sans réagir, hors de question… D’ailleurs, sa peur se confirma, car même si sa voix était douce, elle n’était pas dénuée de la même menace ; il insista sur le fait qu’il pouvait disposer d’elle à sa guise, puisqu’il payait le temps passé en sa compagnie. Elle déglutit.

Sachant bien qu’elle finirait tout de même par le faire à un moment donné, elle s’exécuta et se dévêtit. Elle passa les mains dans son dos et, avec adresse, elle se mit à délacer les interminables ficelles serrant le vieux corset défraîchi qui serrait sa taille et remontait ses petits seins. Le corset de vieux cuir retiré, elle fit glisser les courtes manches de sa blouse le long de ses bras, ses tétons pointant déjà à l’air, et elle baissa le vêtement sur ses hanches, qui continuait en longue jupe à froufrous ridicules, d’un bleu grisâtre, la couleur délavée par les nombreux lavages, et rapiécée à de nombreuses reprises. Le bas suivit le mouvement et finit par tomber en douceur au sol, glissant le long de ses jambes. Il ne lui restait que la culotte, tissu blanc sale allant de son nombril à mi-mollet, qu’elle retira également, tel un pantin de bois guidé par des ficelles. Ses gestes manquaient totalement de grâce, mais elle s’en fichait, elle n’avait jamais joué ce rôle d’aguicheuse et avait très bien compris que, dans le cas contraire, elle aurait fait tout cela pour rien. Aucun homme venant ici ne désirait de mise en scène, les catins n’étaient au final que des vide-burnes… Lorsqu’il lui demanda s’il était à son goût, elle resta muette. Certes, il était plutôt bel homme, mais son attitude le rendait aussi attirant qu’une grenouille venimeuse. Alors totalement nue, sa peau couvertes de cicatrices, de blessures diverses et d’ecchymoses, elle replanta ses yeux sombres dans ceux du pirate. D’un ton monotone, elle lui balança :

«
Mon pire souvenir ? Je n’en ai pas. Tous mes souvenirs sont pires que tout. Chaque jour, je vis le pire. Les souvenirs d’un objet sexuel, ni plus, ni moins. C’est cela que vous vouliez entendre, n’est-ce pas ? Que je suis une créature profondément malheureuse, qui ne connait même plus la saveur de l’espoir ? »

Ysée eut un rictus mauvais, une grimace de mépris, de dégoût, pour les hommes, pour lui, mais aussi pour elle-même. Ce qu’elle était misérable… Le penser était une chose, car elle pouvait bloquer ses pensées, mais se l’entendre dire avait un côté atroce. La vérité lui revenait en pleine face et elle sut à l’instant qu’elle aurait du mal à pardonner à ce type cette odieuse question. Elle n’était rien, il avait une totale emprise sur elle, mais si un jour, elle pouvait lui rendre la pareille, elle n’hésiterait pas… En soi, elle aurait aimé se venger de tous les mufles qui étaient passés sur elle. Shadow devait bien se douter de l’effet que cela ferait sur Ysée d’en parler ainsi ouvertement, vu son sourire narquois. N’ayant plus un centimètre de tissu sur elle, le pirate à présent assis sur la paillasse, il lui ordonna de rester devant lui. Elle obéit, se demandant bien ce qui se tramait derrière la tête de ce gars-là. Sûrement quelque chose de bien tordu…
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MessageSujet: Re: Le charme du passé, c'est qu'il est passé. [Ysée][Fb]   Le charme du passé, c'est qu'il est passé. [Ysée][Fb] EmptyMer 18 Juin 2014 - 21:35

Le charme du passé, c'est qu'il est passé.




La bourse de cuir avait tinté dans l'air silencieux de la pièce. L'endroit n'était guère surchargé, et même si c'était en totale contradiction avec mon mode de vie, je m'étais installé sur le lit, dont j'avais couvert la contrepointe de mon manteau. Hors de question que j'attrape la moindre puce dans ce boui-boui minable. Mon regard était posé sur Ysée de manière presque chirurgicale. Elle se déshabilla à la façon inhumaine des catins ; certaines tentaient tant bien que mal de paraître séduisante, mais il était facile de deviner dans ses gestes si une femme vous désirait ou non. Rien n'était plus pitoyable que les prostituées.

Ses paroles ne me firent aucun effet, bien qu'elles dégoulinaient de sentiments. Pour un peu et j'en aurais été touché ! Tss. Je me contentais de lui lancer un regard neutre, bien que dur comme du diamant, pâle et transparent. Non, je ne voulais entendre que sa douleur. Je voulais m'en nourrir, comme un vampire qui s'alimenterait des choses mauvaises autour de lui. J'étais un homme cruel et sans vergogne, qui aimait faire souffrir et voir souffrir. Je n'étais pas le beau et preux chevalier venant au secours des dames et des orphelins, non ; j'étais une facette du mal lui-même, sombre et imposant. Un monstre. Shadow.

Igrot avait forgé une partie de cette âme inhumaine que je possédais. Mais l'autre moitié, je l'avais choisi moi-même en abandonnant l'enfant que j'avais été. Je m'étais alors refusé à plus jamais ressentir quoi que ce soit. Et même si j'avais failli, à certains moments, j'arrivais à n'avoir comme émotion que dédain, mépris et colère. Je restais silencieux, alors qu'elle se tenait devant moi, immobile dans sa nudité crue. Je me levais lentement, comme un félin en chasse, et tournais autour d'elle comme on pourrait observer une oeuvre d'art. Je ne la touchais pas, détaillant chaque grain de peau, chaque anomalie corporelle.

« ▬ L'espoir est une émotion surfaite. Tout le monde veut croire en l'espoir, mais il est inutile d'essayer. Une telle émotion n'existe que pour être brisée. »

Comme l'amour, l'amitié, ce genre de conneries. Igrot m'avait appris une chose : espérer était futile. Je n'avais trouvé ma renaissance, alors que je suais sang et eau contre la fièvre et mon poignet coupé net qu'en la rage de tuer cet être immonde. Nullement dans l'espoir d'un avenir meilleur. Même encore maintenant, je n'espérais pas, je désirais. La frontière était mince, mais elle était là. Mes besoins étaient bruts et violents ; je voulais réunir les pirates sous un même pavillon, le mien et je savais que si je ne faisais qu'espérer, cela serait aussi vain que d'espérer que ma main repousse.

« ▬ Tu as peur de moi. C'est une bonne chose. Tu es assez intelligente et intuitive pour voir ce que je suis : un monstre. Mais sache que je ne te mens pas. Tu n'es pas exactement humaine. As-tu déjà entendu parler de ces hommes, les Dunedain ? »

Je me rappelais enfin de ces feuillets lus à la va-vite, sur mon bureau. Ils devaient d'ailleurs encore trôner dans une étagère, dans ma chambre sur la Mandragore. Je me tenais derrière Ysée, et fit courir le repli de métal de mon crochet sur sa colonne vertébrale. Elle était maigrelette, cette femme. J'allais dire gamine, mais ce n'en était pas une - comme les apparences étaient trompeuses ... J'émis un soupir ; toute envie de lui faire du mal commençait doucement à redescendre, comme la fureur des batailles. Je retournais m'asseoir, sans pour autant l'inviter à faire de même ou à se rhabiller.

« ▬ Ce que j'en ai lu était ... plutôt superficiel ... Mais ces êtres vivent longtemps. Et vieillissent lentement ... Comme si ils avaient une décennie ou deux de retard ... »

Je formais mes mots avec une lenteur exagérée, comme si je m'adressais à une femme simple d'esprit. Certains idiots ne croyaient pas en la magie, alors que le monde était gouverné par elle ; trolls et orcs étaient de toute évidence des créatures magiques, maléfiques certes, mais animées par une force surnaturelle. Je tendis ma main et attrapais la sienne, et je plantais avec une douceur surprenante le bout de mon crochet dans la chair tendre de sa paume ; sans plus faire attention, je relâchais la chair et portais mon crochet à mes lèvres pour goûter ; saveur salée, presque marine. Quelque chose d'intrigant, comme un son mélodieux ou une trille d'oiseau là où cela ne devrait pas être.

« ▬ Je ne te baiserais pas. Peut-être que tu le voulais, peut-être pas, je n'en ai rien à faire. Je te payerais ; cela devrais te suffire. »

Je commençais à me lasser de tout cela. Avec un rien de brutalité, je me levais et me mis à faire les cent pas dans cette pièce. Et à présent ? Elle allait peut-être dénigrer mes théories, me rire au nez, me mépriser, mais je m'en fichais ; sincèrement, je l'aurais bien tuée pour examiner son corps, mais cela me semblait trop dangereux pour moi. Et puis, elle était la première Dunedain que je croisais ; il aurait été dommage que je ne l'abîme trop ...

« ▬ Et à présent, créature malheureuse ? Vas-tu répondre à mes questions, ou dois-je te blesser pour t'y forcer ? »

Elle devait savoir, à présent, que même si je ne lui montrerais pas un centimètre de la peau en-dessous de ma ceinture, cela ne m'empêchait pas de garder un sens de l'imagination assez vif. J'eus un sourire narquois, étirant mes traits sauvages et élégants. Je n'hésiterais pas à la blesser si elle m'y forçait - et il était si facile de m'y forcer ...

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MessageSujet: Re: Le charme du passé, c'est qu'il est passé. [Ysée][Fb]   Le charme du passé, c'est qu'il est passé. [Ysée][Fb] EmptyVen 20 Juin 2014 - 23:43

Ysée eut un sursaut de surprise lorsque la pointe acérée du crochet vint se planter dans sa paume. Il ne la blessa que superficiellement, mais c’était une zone plutôt fragile, qui supportait mal les agressions. Une perle carmine apparut, que le pirate récolta et suça du bout des lèvres, comme si c’était la chose la plus normale du monde. Ysée lui adressa un regard effaré. Elle recula par réflexe ; un monstre, un véritable fou se tenait dans sa chambre ! Elle était, qui plus est, à sa merci… Tout cela parce qu’elle n’avait pas de chance dans la vie, elle risquait tous les jours de crever comme une pauvre chienne. Être battue, être ramonée, maltraitée, trimballée de par et d’autres de la ville chez des clients assez riches pour quémander une putain à leur demeure, pire qu’un objet, un sac de farine qu’on peut percer et répandre la poussière blanche… Cet homme répandrait son sang comme il le souhaiterait, personne ici ne viendrait la secourir réellement. Oh, le Maître, peut-être, histoire d’éviter de perdre sa meilleure prostituée. Meilleure au niveau du physique, parce que pour le reste, soyons honnêtes, Ysée n’était pas très dégourdie.

Quoique nue, elle n’était pas très déstabilisée – ça ne changeait rien à son attitude. Le fait de ne pas porter de vêtements ne lui posait plus de problèmes depuis longtemps, puisqu’elle passait quasiment plus de temps dans le plus simple appareil que vêtue de frusques ou autres tissus qui grattaient la peau. Ce qui la perturbait à l’instant, c’était les paroles du pirate, qui se mit à évoquer les Dunedaìns. Ysée n’avait strictement aucune idée de ce que c’était cette race, et les maigres explications à ce sujet que le Capitaine de la Mandragore lui prodigua la laissèrent sur sa faim. Elle l’aurait imploré d’en dire davantage si elle n’avait pas eu affaire à un sale type qui lui aurait très certainement ri au nez. S’enfonçant dans le mutisme, elle lui tourna le dos et alla se mettre contre un mur, un genou replié, les bras croisés sur son ventre plat et lézardé de cicatrices. Ses yeux se remirent à fixer l’homme, à la fois intriguée et apeurée par ses actes et ses mots. Elle ne savait plus que penser de lui. Certes, il avait l’air d’un parfait sadique doublé d’un prétentieux qui semblait ne rien craindre, mais il ne faisait pas partie de ces salauds complètement stupides. Non, chez lui brillait une certaine intelligence. Ysée en eut un frisson. C’était certainement pire que tout, dans ce cas.

A nouveau, il revint, insistant, sur le fait qu’il ne la baiserait pas. Il lui demanda à nouveau de répondre à ses questions sans discuter ni chicaner, soulignant cela d’une lourde menace. Ysée aurait voulu trembler de froid plutôt que de terreur, mais ce serait se mentir. Elle avala difficilement sa salive. Elle baissa les yeux, regarda un moment le sol, pensive, réfléchissant à tout ce qu’il lui disait, puis, prenant ses dernières réserves de courage en main, elle soutint à nouveau le regard givré du pirate :

«
Je répondrais à toutes vos questions, si cela peut me permettre d’être payée tout en reposant ma chair intime… Cela dit, pourriez-vous répondre à une seule de mes questions, avant les vôtres ? »

Une boule se forma dans sa gorge, toutefois, elle ne se laissa pas démonter. Elle inspira profondément et acheva sa demande.

«
Je voudrais seulement savoir pourquoi. Pourquoi, si ce n’est pas pour niquer une femme, êtes-vous venu ici ? Vous êtes bel homme, vous avez une bonne bourse bien remplie, vous semblez avoir une certaine popularité pour vous faire aimer et, dans le cas contraire, vous n’hésitez pas à menacer. Je ne doute pas que vous menez sans conteste vos menaces à exécution si l’on ne vous obéi pas rapidement. C’est bien pour cela que je ne compte pas vous désobéir. Aussi atroce soit-elle, je tiens à ma vie. Daignez me répondre, et vous pourrez me poser toutes sortes de questions et bien plus encore… Je n’ai pas souvent la visite d’hommes voulant parler. Vous n’êtes pas venu pour me faire plaisir, je le sais bien… Mais, étrangement, même si vous me faites peur, je l’avoue, votre visite en deviendrait presque agréable. Si je devais comparer à celles que j’ai d’habitude… »

Elle se tue brutalement. Ses yeux sombres plantés dans les prunelles de glace du pirate, elle se sentit troublée. Cet homme était un monstre de la pire espèce, que lui prenait-il de bavarder à ce point avec lui ? Avait-elle perdu la tête ? Elle pinça ses lèvres, gênée, et son regard se fit larmoyant. Elle aurait donné n’importe quoi pour se cacher dans un trou de sourire ou dans une des fentes du plancher, parmi les cafards et autres cloportes.

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MessageSujet: Re: Le charme du passé, c'est qu'il est passé. [Ysée][Fb]   Le charme du passé, c'est qu'il est passé. [Ysée][Fb] EmptySam 21 Juin 2014 - 0:05

Le charme du passé, c'est qu'il est passé.




La voir adossée au mur, tremblant de peur, ne me faisait ni chaud ni froid. A dire vrai, je la trouvais intelligente de me craindre. Certaines auraient tenté de me plaire ou de se rebeller. Je la toisais sans rien dire, attendant presque calmement qu'elle accepte ma proposition. Car, soyons franc, elle n'avait pas d'autres choix. Mis à part si elle désirait mourir - je ne donnais jamais de menaces que je n'accomplisse pas. Si j'étais du genre indulgent, je ne serais jamais devenu pirate. Igrot ne m'avait pas permis cette douceur - toute forme d'amour ou d'espoir était mort en même temps que tout mon être, ce jour où j'étais devenu sa chose. Au fond, durant la période où j'avais été son esclave, je n'avais été guère plus qu'une prostitué, si l'on peut dire. J'avais été même pire que cela, rabaissé à rien, puis remodelé pour être ce que j'étais.

Je repoussais ces pensées affreuses, qui faisaient naître dans mon ventre des émotions dangereusement coupantes, et haussais les sourcils aux paroles de la putain, l'autorisant de mon regard à continuer. La suite me laissa tout aussi surpris : voilà qu'elle s'intéressait à moi ? Hé bien, je n'avais pas totalement perdu ma soirée ! Voilà que j'aiguillais autre chose que la terreur chez elle. La pointe de curiosité qui était mienne avait pris racine dans son propre coeur. Je laissais le silence s'installer, avec l'air amusé ; j'avais l'ascendance ici. Je pouvais accepter ou refuser sa demande, sans devoir m'expliquer. J'aurais même pu la frapper, pour oser me parler ainsi, me questionner. Mais c'était exactement ce que j'étais venu chercher : de l'attention de sa part. Ne laissant rien paraître de la satisfaction qui montait en moi, je penchais la tête sur le côté, m'adossant moi aussi à un mur en face de Ysée.

« ▬ Tu es consciente que je pourrais réclamer mes réponses sans faire attention à ta demande ... Mais je suis d'humeur indulgente, ce soir, tu as de la chance. »

Tout cela n'était qu'un jeu. Un jeu malsain, instigué par moi, mais un jeu tout de même. Et je détestais perdre. J'installais de nouveau mon crochet à ma ceinture, l'air d'un chat au repos, mon regard toujours posé sur elle. Je ne détaillais plus son corps ; je voyais qu'elle était nue mais cela ne m'excitait toujours pas. J'étais venu trouver autre chose ici, ce soir. Mais il était hors de question que je le lui avoue ; je ne voulais pas dévoiler mon jeu. Au lieu de cela, j'allais faire de jolies pirouettes en paroles, j'étais doué pour ça ; de ma voix basse et mélodieuse, je me mis donc à parler pour lui répondre, mon accent prenant l'air aussi véritable que possible :

« ▬ Je suis venu trouver quelqu'un qui vaille la peine. Et tu étais là, nimbée de cette aura étrange et presque magique ... Je n'éprouve aucune excitation pour toi, ma belle. Oh, je ne dénigre pas le fait que tu sois physiquement superbe. Mais cela n'agite rien du tout en moi. Ce que je voulais, c'était en savoir plus sur toi, voilà tout. J'avais raison : tu n'es pas ordinaire. »

J'avais dis plus de vérité que ce que j'avais désiré, mais aucune parole dérangeante n'avait franchi mes lèvres. Nulle part, je n'avais étalé mon besoin de courtiser une demoiselle ; nulle part je n'avais montré que j'avais désiré séduire, charmer. Comme un serpent désirant hypnotiser une proie. J'aimais la chasse, j'aimais le risque ; prendre quelque chose qu'on sait déjà gagné n'évoque aucune excitation.

Elle avait réussi à me flatter, d'une certaine manière. Elle avait accepté que je ne la toucherais pas, et si cela lui plaisait, tant mieux. Elle avait trouvé les bons mots pour m'amadouer, et mon envie de la faire souffrir avait disparue dans l'ordre de mes questions. Je fis cliqueter le métal de ma boucle de ceinture sur celui de mon crochet, et après avoir passé ma langue sur mes lèvres, je repris la parole :

« ▬ A mon tour de poser les questions à présent. D'où viens-tu, et qui sont tes parents ? Et pourquoi être devenue prostituée ? »

Comment pouvait-on se laisser tomber si bas ? Je m'étais toujours refusé à me laisser faire ; je n'acceptais aucun ordre. J'avais tué l'enflure qui avait osé me définir comme esclave. Jamais l'on ne me mettrait de collier ou de liens ; j'étais libre et puissant comme une tempête. Je voulais en savoir plus sur cette fille, car malgré son ignorance apparente, peut-être pourrait-elle m'en dire plus sur sa lignée. Je n'espérais que cela ; si elle n'en était pas capable, je la délaisserais. Elle n'avait rien d'autre qui m'intéressais.

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MessageSujet: Re: Le charme du passé, c'est qu'il est passé. [Ysée][Fb]   Le charme du passé, c'est qu'il est passé. [Ysée][Fb] EmptySam 21 Juin 2014 - 0:27

« Vous n’êtes vraiment pas comme les autres non plus. »

Le ton qu’Ysée avait pris pour lâcher subitement cette phrase n’était pas spécialement flatteur, pourtant, ça l’était. Vu à quoi elle pouvait comparer le Capitaine de la Mandragore, c’était un sacré compliment. Elle le distinguait des sac-à-vin habituels de ce bordel, ce qui était une flatterie, même si elle n’avait pas désiré le dire ainsi. Il daigna lui répondre, sans manquer pour autant de lui préciser qu’il aurait pu ne pas accepter ce petit marché ; elle eut un sourire satisfait en entendant sa réponse, qui l’intrigua de plus belle. Il cherchait quelqu’un sortant de l’ordinaire et il l’avait trouvée. Était-ce totalement vrai ? Dans le cas contraire, qu’est-ce que cela changerait-il, au fond ? Elle n’avait pas spécialement envie d’être particulière aux yeux de quelqu’un, ce n’était pas quelque chose à laquelle elle aspirait, quoique, inconsciemment, peut-être que si. Quand bien même l’intérêt qu’elle susciterait serait chez un félon tel que ce pirate. N’entendait-on pas le mot « pire » dans « pirate » ? Sous ces grands airs majestueux, sa magnanimité envers elle, petite merde à sa botte, ne cachait-il pas le pire à venir ? Ses craintes, enfouies en elle sous une fierté mal placée, tourbillonnaient, déchirant neurones et entrailles à chaque passage. Elle aurait pu manquer d’air, mais l’atmosphère se détendit légèrement. Elle massait sa petite blessure au creux de sa paume à l’aide du pouce de l’autre main, distraitement, sans prêter une réelle attention à ce geste automatique. Il s’était levé et mis dos contre le mur en face, s’éloignant encore plus d’elle. Elle haussa un sourcil.

Shadow débuta son interrogatoire, par deux questions qui étonnèrent Ysée. Et la mirent aussi mal à l’aise. Sans le quitter des yeux, face à face tels des chiens de faïence, elle susurra :

«
Je n’ai pas connu mes parents. On m’a recueillie dans la rue, ici, dans la Cité Blanche… Celle qui m’a adoptée alors qu’on m’avait certainement abandonnée était elle-même prostituée, au service de son propre mari, mais c’était des gens bons avec moi. Même s’ils ont du m’apprendre ce métier, chez eux, j’ai toujours été bien traitée, bien payée aussi. Je ne manquais de rien. Je ne leur en veux pas d’avoir fait de moi ce genre de femme, car ils m’ont tout d’abord sauvée de bien pire. De la mort peut-être. Je leur dois la vie. »

Une larme coula sur sa joue, petit cristal liquide trahissant la tristesse qui lui assaillait le cœur à propos de ce qui allait suivre.

«
Celui qui fut comme un père pour moi fut assassiné… Les autres filles, qui étaient de véritables sœurs, et moi-même, on a du trouver un travail ailleurs. Certaines pouvaient espérer faire autre chose car elle avait appris certains métiers, comme le tissage de la laine ou la tannerie, que sais-je… Mais moi… Je n’ai jamais su faire autre chose. Je me suis retrouvée dans plusieurs bordels, qui ne tenaient pas le coup, on m’a chassée aussi. Jusqu’ici. Certainement le pire pour les catins, mais le meilleur pour les clients ; pour pas trop cher, vous avez tout ce que vous voulez… Alléchant, n’est-ce pas ? Et nous, en contrepartie, on subissait les plus horribles humiliations. »

Elle sécha ses larmes d’un revers de la main et renifla, l’air pitoyable. Aussi soudainement que sa peine, une certaine violence déforma ses traits.

«
Je ne comprends pas pourquoi vous désirez savoir ma vie. Vous supposez que je sois Dunedaíne, certes, ce serait bien possible. Mais je ne vois pas comment je pourrais retrouver de telles racines. Maintenant, vous savez pourquoi. »
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MessageSujet: Re: Le charme du passé, c'est qu'il est passé. [Ysée][Fb]   Le charme du passé, c'est qu'il est passé. [Ysée][Fb] EmptySam 5 Juil 2014 - 22:25

Le charme du passé, c'est qu'il est passé.




Voilà qu'elle se mettait à me complimenter ? Enfin, cela raisonnait à mes oreilles comme tel. Pas comme les autres voulait dire rare, singulier. Que ce soit en bien ou en mal, cela me plaisait, mais je ne le montrais pas. Je me contentais de l'observer crûment, sans bouger, les sourcils haussés. Je n'attendais qu'une chose : qu'elle fasse ce que j'avais commandé. C'était tout naturel pour moi, ça, commander. J'ordonnais et on m'obéissait - tout naturel, alors qu'autrefois, j'avais été à l'autre bout de la chaîne de commande. J'avais obéi, et j'avais détesté ça. Peut-être était-ce la raison pour laquelle j'adorais être le chef : parce que comme esclave, comme marin, j'avais été piètre. Piètre dans le sens où j'avais le commandement dans le sang.

Jambes croisées, toujours debout contre le mur, je passais ma langue sur mes lèvres comme pour ne pas perdre le goût de son sang si étrange. Mais ses paroles réveillèrent en moi une colère incertaine, bouillonnante : elle ne pouvait pas m'aider. Elle existait, et par ce simple fait, le destin me faisait un pied-de-nez grotesque. C'était ridicule : je tombais sur une créature extraordinaire, et voilà que je ne pouvais remonter à sa source ! Grotesque, oui. Mes traits restèrent neutres, cachant l'exaspération qui montait en moi. Cette fille était donc inutile. Pourquoi devrais-je rester ici à perdre mon temps ? Je ne faisais même pas attention à ce qu'elle faisait, au fait qu'elle pleure. Peu m'importait ses émotions ; elle avait beau être plus forte, plus précieuse que les autres, son sang ne pouvait rien m'apporter. Je soupirais fortement, comme si je m'ennuyais, et lui décochais un regard noir de sous mes cils sombres, mes iris bleus la transperçant comme de la glace. Sa question, plutôt logique, m'agaçait - ce n'était pas à elle de poser les questions. Ce n'était pas son rôle.

«  ▬ Pitoyable, pauvre petite Ysée, ce n'est pas ton rôle que de poser les questions » susurrais-je comme un serpent, un sourire mauvais aux lèvres.

J'aurais pu, en cet instant, bondir vers elle et la frapper. J'en eus la vision, une seconde : son sang dégoulinant sur le parquet. L'odeur métallique, âcre, envahissant mon nez et ma bouche. La jolie couleur carmin sur mon crochet. Mais cette vision passa bien vite, sans qu'elle m'amuse.

«  ▬ Tes origines sont floues, comme ta vie toute entière. Si tu ne peux apporter des réponses à mes interrogations, tu n'as aucune valeur à mes yeux. Ca ne doit pas changer grand chose de d'habitude » persiflais-je ; là où habituellement elle avait une valeur monétaire, objet vendu aux yeux des hommes, elle n'en avait même plus à cet instant.

«  ▬ Tu ne m'intéresses plus » fis-je, et je me redressais.

Je voulais partir de là. La soirée était avancée, mais je pouvais toujours rejoindre mes hommes à la taverne et boire un peu de ce rhum qu'on m'avait conseillé. Nul plaisir de la chair ne m'attirait, ce soir, et j'avais des interrogations à faire mariner dans mon esprit. Mais, immobile dans la pièce, je restais là un moment, à observer Ysée. Créature pitoyable et futile, dont la vie étrange et sûrement différente des autres par son origine et sa vocation la menait à se perdre elle-même. Je n'avais pas pitié d'elle, et c'était peut-être ça le pire, pire que la pitié, pire que le chagrin ou la douceur, pire que la compassion : la neutralité, l'absence d'empathie, de désir à son égard.

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MessageSujet: Re: Le charme du passé, c'est qu'il est passé. [Ysée][Fb]   Le charme du passé, c'est qu'il est passé. [Ysée][Fb] EmptyMer 1 Oct 2014 - 18:26

Comme Ysée détestait sa façon de lui parler… Mais que pouvait-elle faire ? Elle acceptait, échine courbée, qu’on puisse s’adresser à elle pire qu’à un chien. Les longs mois passés dans cette masure puant la sueur de multiples hommes et le sang des utérus des femmes au supplice lui avait coupé toute envie de rébellion assez rapidement, même d’espoir. Quoique, sans le savoir, certainement, le Capitaine de la Mandragore venait de lui en offrir un, d’espoir ; certes, Ysée n’en avait pas encore totalement conscience elle-même, mais le soir même, dans son lit, prise d’insomnie comme chaque nuit, elle repenserait à ses paroles et les passerait en boucle dans sa mémoire. Tu n’es pas humaine… Tu as tout l’air d’avoir une descendance dunedaìne… Quel était ce peuple dont le pirate lui parlait ? Si elle avait nié vouloir être différente des autres, avoir une destinée particulière qui lui éviterait de moisir ici, il n’en était rien. Elle se mettrait à rêver de contrées éloignées, de vie extraordinaire, de grands faits qui lui donnerait, peut-être, une renommée. Elle se ferait héroïne des plus démunis, femme sage et belle à la fois puisque le temps n’avait pas d’emprise sur elle et dont la force n’égalerait que sa splendeur ! Elle n’était qu’à l’état larvaire de son existence, et si elle s’en donnait les moyens… Elle pourrait devenir quelqu’un…

A présent, elle n’y songeait pas encore. Mais elle rêverait, bientôt, et ce pour la première fois depuis des lustres. Alors elle s’échapperait, pour tenter d’attraper au vol son véritable destin avant que celui-ci ne s’en aille. A l’instant, elle avait encore à subir les paroles blessantes et humiliantes de son interlocuteur et « client ». Elle le laissa lui dire qu’elle ne l’intéressait plus. Elle sentit bien qu’il souhaitait s’en aller, sans même consommer ce que tout homme consommerait en ces lieux. Tant mieux. La tête plus salie que son corps, cette fois, elle sentait qu’elle n’arriverait pas à fermer son esprit à l’envahisseur de son intimité, puisque celui-ci lui avait tant parlé avant ; elle ne pourrait nier sa présence psychique, à ne pas penser à lui tandis qu’il la monterait. Heureusement, il ne semblait pas avoir ce désir et elle vit bien dans son regard qu’il était près de se retirer. Elle se revêtit avec rapidité et alla ouvrir la porte de sa chambrée :

«
Je ne m’excuserai pas de vous avoir déçu, Capitaine. Ni ne vous inviterai, dans ce cas, à revenir. N’oubliez pas de payer, tout de même. »

Sur ces mots, elle alla vers le lit qui, pour une fois, ne sentait pas trop l’homme. Alors que la porte claquait, faisant disparaître le pirate de sa vue, sans qu’elle sache si elle le reverrait un jour, elle se mit à pleurer doucement. Elle était habituée à l’indifférence la plus totale, du début à la fin des actes sexuels dont on l’assaillait quotidiennement, et jamais un homme n’avait ainsi voulu la connaître, pour ensuite lui retirer tout son intérêt. Elle regretta de s’être laissé à espérer un tant soit peu d’attention de quelqu’un. Elle se rassura en se disant qu’elle avait vu pire et qu’elle s’en remettrait, malgré son cœur pourri d’amertume. Shadow l’avait peut-être meurtrie un peu plus qu’auparavant, mais il lui avait également fait un inestimable cadeau : un espoir, encore à peine éclos, qui ne cesserait de croître.



FIN
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