Maladresse erronnée [défis rp]

Les petites gens se retournent et murmurent à ton passage. Ils n'ont pas l'habitude de croiser des hommes au sein de leur si chère Comté. Ils se méfient un peu de toi, sombre femme entièrement de noir vêtue et armée. Tu es, à leurs yeux, une source d'embrouille. Tu ne leur en veux guère de se méfier ainsi de toi, tu les comprends. Eux qui détestent toute forme d'anormalité dans leur vie tranquille et sans aventure, tu es une bizarrerie dont ils se passeraient bien. Mais tu as effectué un voyage trop long et fatigant pour songer à aller plus loin. Qu'ils se rassurent, tu rependras la route dès le lever de l'astre solaire. Pour l'heure, tu descends de ta jument, non sans pousser un soupir de soulagement. Un coup d’œil vers ta droite et tu reconnais l'arbre des fêtes, majestueux.

Encore quelques pas et vous vous approchez de la rivière que les hobbits nomment l'Eau. Pourquoi faire compliqué alors qu'on peut faire si simple. Ces semi-hommes sont les premiers à l'avoir compris. Tu relâches la bride de ta fidèle jument afin de lui permettre de se désaltérer tandis que tu portes à ta propre bouche ta gourde d'eau fraîche que tu te réserves et qu'il te faut à présent remplir. Les habitants de la Comté avancent et te regarder comme des ixodes avaient pris l'ignoble décision de souiller leur sol et attaquer leur précieux arbre centenaire. Qu'ils se rassurent, il n'en sera pas ainsi. T'approchant de ton destrier, tu t'empares de ce qui te sera nécessaire pour ton repas et le coucher. Ainsi l'équidé piaffe de satisfaction de se retrouver sans selle sur son dos tandis que tu établis un feu de camp.

C'est alors que tu entends des pas de courses s'approcher. Instinctivement, tu t'empares de la garde de ton poignard, prêt à occire le moindre mécréant qui osera s'en prendre à toi, mais il n'en est absolument rien. Ce n'est qu'une jeune hobbite, descendant le chemin, des sillons salés tracés sur ses joues. La jeune enfant pleure et t'ignore tandis que sa course la mène vers l'arbre majestueux. Au loin, tu peux entendre ses parents lui sommer de revenir. Mais tu ne t'occupes de tout cela, alors que ta poignes sur ton arme se desserre. Ce ne sont pas tes affaires.



Ton patriarche jubile à l'avance de la journée qui s'annonce tandis que ta mère te regarde avec un air désolé. Toi, tu n'as plus guère d'appétit. Du haut de tes treize ans, tu n'as pas encore le courage de tenir ouvertement tête à ton père qui semble avoir décidé quoi faire de ta vie. Pieds et poings liées, prisonnière d'un destin que tu n'as pas choisi, tu dois te lever de table pour te préparer avant l'arrivée d'invités de marque. Tu n'oses pousser un soupir d'agacement. La tête baissée, l'échine courbée, tu obéis alors que tu t'en vas d'un pas traînant. Tu ne laisses pas éclater ta rage une fois arrivée dans ta chambre, tu n'es pas seule. Les servantes s'activent déjà à rendre ta chambre présentable, à préparer le bain et choisir une panoplie de robes que tu choisiras de revêtir. Toutes montre la richesse de ta famille et désirent mettre ta poitrine naissante en évidence. Tu grimaces.

Ce n'est pas ce que tu veux.

- Ces robes sont trop vulgaire. Trouvez m'en une plus sobre.

Tu préfères celle qu'on te propose. Plus simple et plus à ton goût. D'un rouge cerise, à manches mitaines, l'habit épouse convenablement sur ton corps. Une ceinture dorée entoure ta taille, l'affinant délicatement. Nul bijoux si ce n'est celui que ta mère t'a offert pour ton dixième anniversaire. Bracelet d'une grande simplicité, mais que tu apprécies grandement. Les domestiques t'entraînent devant la coiffeuse afin de coiffer ta chevelure sombre, héritage de ta mère, en une coiffure savante seyant à ton visage et à ton appréciation. Une boule  dans ta gorge et une chape de plomb dans ton estomac, tu ne peux t'empêcher de tordre tes doigts d'une crainte que tu ne parviens à dissimuler qu'à grande peine. Que donnerais-tu pour être l'une de ces paysannes qui a le droit de choisir l'homme pour qui son cœur bat. Tu es persuadée que le mariage arrangé n'existe pas dans la pauvreté.

Tu es enfin prête et il te faut à présent rejoindre tes parents et ces invités qui n'attendent plus que toi. Tu marches dans le couloir et l'avancée est tellement longue que tu as l'impression que les murs s'étirent en un tube qui ne demande qu'à t'avaler. Que tu aimerais éfaufiler la broderie de ce destin tant exécrée pour en broder une autre plus à ta convenance. Un destin que tu auras toi-même choisi. Tu arrives près de la grande salle, là où tous les convives t'attendent. Tu peux déjà entendre leurs voix sans en comprendre, pour l'instant, leur sens. On ouvre les grandes portes, annonciatrices de ton arrivée et ton visage pâlit à la découverte que toutes les têtes sont maintenant tournées vers toi. Tu tentes de te souvenir de ce que ta mère t'a enseigné. Le menton levé et le dos droit. On ne doit lire ton angoisse. Tu dois être sûre de toi. Mais jamais ta génitrice aurait songé que toute à ta concentration, tu te prendrais les pieds dans les pans de ta robe, chutant au sol avec la grâce d'un warg.

Tu peux d'ors et déjà entendre les rires des convives emplir toute la salle, emplissant insidieusement tes tympans. Tu n'oses lever le regard tandis que ta vision se brouille. Tu sais tout de suite que ton père boit un verre pour dissimuler sa colère ainsi que sa déception. Ta mère doit sûrement se tenir fière et droite. Neutre en toute circonstance. On te couvre de moquerie alors que personne ne prend la peine de faire preuve de civisme pour t'aider à te relever. Non, le spectacle doit être trop hilarante -ou honteuse selon les points de vue- pour seulement y songer. S'en est trop pour toi. Ton visage fripée en une grimace trahissant ton humiliante, tu te remets sur tes pieds sans l'aide de qui que ce soit et court sans te retourner. Tant pis si une Dame n'en a pas le droit.

- Kiria, reviens céans ! Cri ton père alors que tu prends la porte, sourde à son ordre.

Tu ne cesses pas ta courses, sortant de la demeure seigneuriale tu empruntes une artère xiphoïde non pas pour rejoindre ton meilleur ami, mais pour monter sur le dos ta jument et galoper loin de citadelle. Là où tu pourras pleurer tout ton saoul à l'abri des regards. Tu le sais, mais tu t'en moques actuellement. L'ire de ton père ne sera pas oubliés lorsque tu rentreras. Tu espères juste que ta mère saura le raisonner avant qu'il n'est dans l'idée de crier dessus dès ton retour. Tu sais déjà ce qu'il dira : "Tu fais honte à la famille, Kiria !".


Tes yeux s'ouvrent, le visage sombre à ce souvenir. Paternel indigne. Tu aurais préféré ne pas rêver de lui. Tu grognes de mécontentement tandis que tu regardes ton sac de provision. Presque vide et rien pour te permettre un petit-déjeuner même frugal. Un coup d’œil autour de toi et tu peux distinguer une auberge ainsi qu'un marché qui se prépare. Tu n'as pas le choix.

L'aubergiste est plus que méfiant tandis qu'il te demande ce que tu viens faire dans la Comté et combien de temps tu escomptes rester. Tu ne peux manquer ses épaules retomber alors que tu lui assures que tu ne restes que pour le repas matinal et le marché qui servira à te procurer des provisions et que, par la suite, tu quitteras leur région sur le champ.

- Qu'est-ce que vous voulez manger ?
- J'aime avoir six œufs avec mon jambon quand je pars en voyage : sur le plat, pas pochés, et faites attention à ne pas crever les jaunes.

Goût de noble ? Peut-être, tu n'as pas totalement perdu tes anciennes habitudes, mais qu'importe. Une fois ton argent posée sur la table, le hobbit sait que tu le paieras comme il se doit. Tu esquisses un rictus. Bien évidemment que tu le feras. Tu es mercenaire, après tout.