Et l'hydromel coula à flot jusqu'à ce que l'aube ne résonne. [Ft Balin&Dwalin][Flashback]

♦Dans les couloirs, se répercutant sur les hautes colonnes soutenant les plafonds des Halls majestueux, résonnait l’écho de milles voix enjouées. Perdus dans les cris d’allégresses et les rires, les pas du conseiller royal étaient pressés. Engoncé dans des vêtements d’apparat le restreignant dans ses mouvements, le seigneur nain courait depuis la veille aux quatre coins des Montagnes bleues. Et si la fatigue de ces longues allées et venues commençait doucement à se faire sentir, il n’en restait pas moins que la simple pensée des réjouissances, et joyeux événements à venir lui redonnait tout l’énergie d’un jeune nain fringant.  Et alors il reprenait sa course un large sourire aux lèvres. Après tout on ne mariait pas son frère tout les jours…Mais bien avant que ne soit célébrée cette union sacrée, s’imposait au jeune marié, une cérémonie qui ne devrait pas le laisser indifférents. Balin, fils de Fundin, avait tout prévu. Tout avait été préparé pour que son jeune frère, prochainement marié, passe une soirée qu’il n’oublierait pas de sitôt.

Arrivé devant la porte d’une taverne bien connue de la montagne, Balin s’arrêta un moment afin de reprendre un souffle qui semblait lui manquer. Jetant un regard nostalgique au lieu, une vague de souvenir le submergea. Il se rappela la première fois que lui et Dwalin étaient venus ici, dans la taverne où servait la belle Fréris, celle qui bientôt épouserait son frère. Il se souvenait des regards en coin et des sourires séduisants que la demoiselle jetait à leur table espérant capter l’attention d’un nain parmi tous les autres. Dwalin cette tête brûlé, qui alors ne se doutait même pas qu’il venait de ravir le cœur de la belle. Il se rappelait aussi comment le jeune nain avait été complètement sourd et aveugle aux tentatives de séductions –de moins en  moins subtiles, mais en même temps son frère n’était pas du genre à saisir d’emblée toutes les  subtilités-  de la belle blonde. Comment il avait dût lui ouvrir les yeux, et fomenter nombre de plans et de combines avec la demoiselle pour que quelque chose des usages amoureux rentre dans le crâne épais de son jeune frère. Un petit rire le secoua en se remémorant le jour où la barmaid était venue rendre une petite visite à leur mère, dans le but de…comment dire…accélérer un tant soit peu les choses entre elle et le fier guerrier. Et comment par la suite Dwalin s’était fait admonester par la matriarche toujours aussi passionnée malgré ses 200 ans bien tassés. Il y aurait de quoi rire ce soir ! Tous les nains de la montagne connaissaient ou avaient entendus parler de l’histoire de Fréris et Dwalin. Et si la plupart d’entre eux étaient heureux pour le nouveau  couple, pas un seul n'aurait dit non à une telle proposition s'il avait été à la place du nain. Après tout Fréris était une femme tout à fait charmante…en mettant de côté son caractère bien trempée, et ses humeurs parfois massacrante…Mais nulle autre ne saurait mieux convenir à son jeune frère.

Un frère qui avait bien de la chance, se disait parfois Balin lorsque seul dans son cabinet, la solitude se faisait parfois pesante. Les naines étaient aux yeux des nains, des choses précieuses et rares qu’il fallait chérir et protéger. Elles valaient bien plus que tout l’or des montagnes réunit, et le simple fait qu’elle soit si peu nombreuses les rendaient parfois bien difficile, cela entraînant du coup une diminution des naissances sur le long terme…sans compter les guerres, et autre catastrophes pour ne pas en nommer une tout particulièrement.  Mais il n’y avait pas que le petit nombre de naine qui posait problème. Parfois les nains, préféraient rester seuls, épousant leur condition de forgeron, de mineur, ou de comptable, mettant leur métier au dessus d’une vie en couple. Certain dans le royaume nouvellement fondé, pensait que Balin était de ceux-là. Erreur. Il avait bien eut quelque émois pour une naine de sa connaissance, il pourrait même dire qu’il en est encore épris aujourd’hui …mais celle-ci n’a jamais répondu favorablement à ses sentiments. Ce sont des choses qui arrivent. Sauf que pour un nain, voir ainsi ses sentiments rejetés, avaient de quoi rendre son cœur malade et mourant. Et si jusqu’à aujourd’hui, Balin faisait abstraction de cet échec sentimental en s’investissant à plein temps dans le bien-être de son cadet, il y avait certains jours où sincèrement et sans mauvaises intentions, il enviait, le bonheur de Dwalin.

Fouillant dans une des poches de sa tunique, le conseiller au bout de quelques tintements en sorti un trousseau de clé. Pénétrant dans la taverne dans un soupir las réajustant sa tunique rouge et sa ceinture de cuir gravée de runes et de motif nains, le vieux nain, s’assit un instant à une table tentant de reprendre un souffle qu’il menaçait de perdre dès lors qu’un nouveau rire le secouait, assaillit par un souvenir. Et dire que la soirée n’avait même pas encore commencée. De son regard aiguisé, Balin considéra  l’établissement vérifiant que tout était en ordre, prêt pour l’arrivé des quelques nains invités, et  du beau nain conquérant qui possédait désormais le cœur de la belle serveuse. Celle-ci d’ailleurs avait été priée par un Balin adroit dans son parlé, et aimable manipulateur, de se retrancher dans ses quartiers pour la soirée. Laissant l’auberge libre de son oeil vigilant, pour honorer son futur époux d’une coutume  joviale, qui au levé du jour, le lui rendrait surement assez pinté pour qu’elle n’ait pas à faire le petit déjeuné. Il avait pensé que célébrer l’enterrement de vie de jeune nain dans l’auberge ayant fait se rencontrer les deux amants, aurait été une bonne idée. Après tout il y avait de nombreuses histoires de bar à raconter, de nombreuses anecdotes à énoncer, et la taverne était un lieu qui lui avait parut tout indiqué.

Fredonnant dans sa barbe longue et blanche, sa plus grande fierté après Dwalin, quelques chansons paillardes en vue des beuveries du soir, Balin se demanda vaguement ce que pouvait bien faire à l’instant son cousin haut placé. Il avait à peine croisé Thorin dans les couloirs du palais, au matin, assistant à demi aux conseils des ministres, qui en l’absence de son père, géraient le bien nouvellement acquis des nains de Durin. Il avait rapidement discuté, projetant de toute façon de se revoir une fois la nuit tombée. A trois, les héritiers de Durin risquaient plus de de rire que de parler, mais qu’importe. Il y avait bien longtemps qu’ils n’avaient pas été réunis pour autre chose que pour pleurer une perte, ou enterrer le passer. Ce soir ils seraient trois nains heureux, réunis pour faire la fête…et accessoirement décoincer un peu Dwalin, et le rendre à Fréris dans un état d’esprit qui lui garantirait une possible consommation prématurée de son mariage.

Enfin. A la porte venait d’être frappés, trois coups.  Les premiers invités arrivaient.

♦ Se dandinant sur ses courtes jambes, criant à la cantonade  un « Oui, oui je suis là » le nain enjoué s’empressa d’aller ouvrir la porte aux premiers arrivés. Dans un lourd grincement, le vieux conseiller eut le grand plaisir de voir apparaitre devant lui les figures burinées, grimées de sourires francs, de deux grands nains bien bâtis. Grands…enfin, vous aurez compris. Plus grands que Balin. Le premier, barbe rousse broussailleuse se mêlant à sa chevelure de même nature en une crinière flamboyante, yeux verts pétillants de malice, une bedaine proéminente, était nul autre que le propriétaire de l’établissement. Surement venu veiller à ce que sa taverne ne finisse pas rasée par un troupeau de nain ivres, il lui donna une accolade virile avant de pénétrer les lieux. Le second, son fils, un jeune nain qui était entré récemment dans la garde de la cité, et faisait partie des nombreux camarades de beuveries que pouvaient se targuer d’avoir Dwalin.  Balin n’avait put manquer de les inviter.

Les deux nains, une fois dans leur patrimoine, se mirent à inspecter scrupuleusement chaque coin, à vérifier l’état des chopes, à bouger les fûts de bière et d’hydromel sous le regard un peu perplexe du cousin royal. Que faisaient-ils donc ? Il les savait très attachés à leur taverne mais à ce point, c’en était presque drôle.  S’ils avaient l’intention de lui demander une caution, ils avaient intérêt à le faire maintenant, car une fois que la troupe d’invités aurait passé le pas de la porte, il n’y aurait plus de retour en arrière possible…et il ne prendrait en aucun cas la responsabilité de toutes les choses qui finiraient brisées après quelques barriques d’hydromels. Ce n’était pas écrit dans le contrat de location. De toute façon.

A la porte on toqua une nouvelle fois. En bon maitre de cérémonie, le vieux nain se dépêcha d’aller ouvrir. D’autres invités. Au nombre de cinq, ils parlaient si fort entre eux, que l’on aurait put les croire dix. Les connaissant, Balin savait à quoi s’en tenir avec ceux-là ! Tous de fiers guerrier,  généraux, nobles seigneurs et piliers de bar reconnus ! Barbes blondes, noires, blanches, et rousses offraient un beau spectacle ! Ils s’étaient fait beaux pour l’occasion lui semblaient-ils ! Etalant pour certains plus leur richesse que nécessaire. Après tout à quoi bon porter pourpoints rebrodés de fils d’or, ceinture d’argent, botte de cuir couteux, et autre atouts luxueux si c’était pour leur vomir dessus en fin de soirées ! Lui-même ne s’était pas changés pour l’occasion, non pas par mépris de l’évènement, mais bien parce qu’il n’en avait pas eu le temps…et n’en avait pas perçu l’utilité non plus. Surement que durant la soirée il se renverserait quelques pintes de bière dessus, inutile donc de revêtir une tenue d’apparat pour ensuite la souiller ! Il aurait tout le mariage pour ça ! Ah le mariage, il frétillait d’impatience rien que d’y penser !  

Bon hôte, il fit pénétrer diligemment les bourgeois après de longues et enthousiastes salutations, et leur demanda poliment de patienter, le temps que la salle se remplisse un peu plus, et que le principal intéressé fasse son entrée, qu’ils puissent enfin démarrer les festivités. Mais ceux-ci n’eurent même pas la décence de faire semblant d’écouter ses paroles, ils avaient déjà reprit leur joyeuse conversation, emplissant la salle d’échos de voix graves et de rires gras. Un peu soucieux, le vieux nain laissa son regard s’appesantir sur leurs faces mangé par des barbes opulentes et déjà rosies par on ne savait qu’elle boisson qu’ils avaient bien put ingurgiter avant leur arrivée. Il avait préparé une surprise à Dwalin et espérait que tous ces buveurs invétérés sauraient s’en rappeler après quelques pintes.  

Encore plus d’invités arrivèrent au fil de minutes. Il les accueillit avec des mots de circonstance et un sourire chaleureux plaqué sur ses lèvres. Il rit avec ceux qui voulaient leur faire rire, parla sérieusement avec ceux qui voulait s’entretenir avec lui de choses « importantes» si tant est que quelque chose lui importe plus à l’instant que le déroulement des festivités. Il fit parfois un véritable effort pour ne pas renvoyer chez eux quelques nez déjà bien éméchés venant se présenter à la porte. Il afficha toujours avec une grande diplomatie, un sourire accueillant. Pourtant, lorsque quelques-uns des nains commencèrent à lui demander quand arriverait le futur marié, qu’ils puissent enfin commencer à s’amuser, il laissa échapper de sa bouche quelques imprécations murmurés dans l’ombre. Il avait hâte que Dwalin et Thorin se ramènent qu’il puisse enfin se poser dans un coin de la pièce, et ne plus y bouger. Laissant ainsi les deux nains se débrouiller avec tous ces piliers de bar qui auraient tôt fait de leur mettre le grapins dessus pour les inviter à faire ce qu’ils aimaient le plus faire. La fête. Manger jusqu’à s’exploser la panse. Boire. Boire. Et re-boire. Rire aux éclats de blagues et de chanson paillarde, d’anecdote sur les récents événements survenus dans la vie du grand guerrier. Pendant que lui, irait chercher la surprise de Dwalin.

Ah d’ailleurs en parlant du loup…la porte trembla une nouvelle fois alors qu’un poing massif y toquait. Balin délaissa un groupe de nains tentant de deviner à quoi pourrait bien ressembler le futur enfant des futurs mariés, chose qui faisait rire aux éclats l’assemblé et lui-même, il ne s’en cachait pas. Lui-même s’était d’ailleurs déjà posé la question…et non sans avoir faillit s’étouffer de rire, imaginant pour une fille, un caractère passionné, une véritable furie et pour un garçon, un enfant impétueux mêlant l’opiniâtreté de son père et de sa mère. Dans les deux cas, il était certain que les Montagne bleu n’en ressortirait pas indemne.

Arrivé devant la porte en bois massif de l’auberge, le vieux conseiller pria que derrière celle-ci  fusent son cousin et son très attendu frère ! Prenant une grande inspiration, prêt à accueillir dignement un énième invité, qu’elle ne fut pas son soulagement de voir apparaitre devant lui les figures nobles et familières et Thorin et Dwalin !

-Mahal tout puissant vous voici enfin ! Par ma barbe il était temps que vous arriviez, j’ai une bonne vingtaine de nains assoiffés dans cette salle, n’attendant que votre venue pour débuter un concours de beuverie ! Déjà vous me direz ! La plupart avait déjà commencé le concours sur le chemin ! S’exclama-t-il en étreignant chaleureusement ses proches. Et le coup de boule qu’il donna à Dwalin ! Dieu ça faisait longtemps qu’on n’en avait pas vu entre les deux frères, les occasions se présentant peu, ou alors le geste se faisant en privé.

Passant un bras dans le dos de chacun des deux nains, Balin les enjoignit gaiement à rejoindre l’assemblée, où déjà plusieurs serveuses s’affairaient à servir pintes d’hydromel et choppes de bières !

♦Balin observait le remue-ménage autour de lui, un fin sourire aux lèvres. Sous ses yeux pétillants, commençaient à s’agiter, les nains de tous bords, venus pour célébrer la fin d’une vie de célibataire et l’entrée dans le terrible monde des hommes mariés. C’était donc dans les cris, les rires, et le tintement des choppes que l’on acclamait Dwalin le chahutant gentiment, et l’entrainant –sans réel besoin, le nain buvant volontiers toutes les bières passant entre ses mains- dans des descentes de pinte à vive allure. Le conseiller lui-même s’était retrouvé une chopine en main sans même se rappeler quand celle-ci était arrivée là. Mais qu’importe, dans un geste devenu presque quotidien le vieux nain leva sa choppe et la porta à sa bouche, engloutissant son contenu en moins de deux.
A côté de lui, son royal cousin, un rictus en bouche, observait avec calme et retenue, les frasque de son peuple, et de Dwalin, qui devant leurs yeux vidait simultanément, deux pintes de la meilleur bière des Montagnes bleues.  Un petit rire secoua la carcasse du notaire, en voyant cela. Décidément, son frère aurait toujours de quoi le faire rire. Même si derrière ce rire, aurait pu se cacher une peine. La peine de ne pas pouvoir lui aussi connaitre la joie d’en finir avec le célibat, entre amis, en famille, l’hydromel coulant à flot. Mais sur l’heure, ce petit tracas ne vint pas le titiller, il était trop absorbé, par l’apparent bonheur du guerrier chauve. Ce n’était pas tous les jours qu’il pouvait le voir rire et festoyer ainsi, autant en profiter. Après tout, tel était son unique but sur l’heure. Rendre Dwalin le plus heureux possible, et faire en sorte que cette soirée soit inoubliable. Que tout se passe bien.  

Ce fut pour cela que lorsque Thorin lui souffla à l’oreille, dans une discrétion presque inutile tant le vacarme ambiant pouvait couvrir n’importe quel secret, « La surprise est-elle prête ? » ses yeux s’éclairèrent de malice. A la seule évocation de cette surprise, le conseiller royal se remémora les jours passé à  la confectionné. Et sans qu’il ne puisse le retenir, un petit rire le secoua encore. Il n’avait qu’une seule envie, que ce cadeau plaise autant à Dwalin, qu’il ne le fasse rire. Ils s’étaient mis d’accord avec Thorin, que pour cette fois, il fallait quelque chose d’exceptionnel. Et ils avaient finit par trouver. Mais pour l’instant, silence. L’effet de surprise devait être total.

-« Elles » ne sont pas encore prête…on viendra nous avertir lorsque le spectacle pourra commencer.

Car oui, loin d’être simplement un bien matériel –ils avaient bien prévu quelque chose de palpable, et de significatif, mais en réalité ils avaient deux cadeaux pour le nain- quelque chose qui entre les mains de Dwalin finirait surement mis dans un coin à prendre la poussière –ou pas d’ailleurs mais sait-on jamais- ce que Thorin et Balin avaient préparé pour le grand nain, c’était une scène des plus burlesques. A se tordre…enfin, ils l’espéraient. Avec un sourire de connivence, le nain à la barbe blanche se tourna vers son cher cousin, et le prit par le bras pour l’emmener un peu plus au fond de la taverne, vers une porte dérobé menant à la cave. Là-bas se cachant, la surprise de Dwalin était en pleine effervescence. Ils ne passèrent qu’un bref moment dans le cellier, mais Balin de son côté, en ressortit rosi,  se mordant les lèvres pour s’empêcher de rire. Et malgré les regards de quelque nain, légèrement intrigués, se posant sur eux, ils ne diraient rien de rien, et tiendraient leur langue jusqu’à la dernière minute.

♦Revenu dans la grande salle, ayant réussit à ravaler tant bien que mal ses gloussements, Balin s’assura brièvement auprès d’une serveuse que les boissons ne viendraient pas à manquer. Car à ce qu’il pouvait constater, certaines pintes d’hydromel se vidaient à toute allure, leurs propriétaires ayant tous une excellente descente et un trou béan à la place du gosier. Sur le bout des lèvres également, il interrogea l’une d’entre elles sur le banquet qui devraient être servis peut-après la remise des cadeaux. Histoire qu’un peu d’ordre règne dans le déroulement –pouvant sans doute paraitre un peu anarchique- de l’évènement…même si, entre nous, quelle importance. Tous étaient là pour s’amuser, et faire passer une soirée inoubliable au « grand » guerrier nain. Dans quel ordre ils devaient lui faire plaisir cela, n’avait pas vraiment d’importance. Mais Balin pouvait se révéler tatillon dès lors qu’il s’agissait de son puiné. Aussi il tenait à ce que les choses s’enchainent sans heurt. Il avait tout calculé à l’avance, ce n’était pas pour que tout à coup, quelques chose coince, ou manque à l’appel.

D’autant plus qu’il s’était bien arrangé pour que Dwalin ne soit au courant d’absolument rien concernant de près ou de loin l’évènement de ce soir. Il ignorait tout de ce que Thorin et lui avaient bien pu préparer. La seule chose qu’il devait savoir, étant que cette soirée lui appartenait, et qu’en priorité, il devait s’y amuser. Et cela semblait bien marcher jusqu’à maintenant. Le futur marié, tout à son honneur d’ailleurs, faisait le show au milieu de ses congénères, amis, et famille. Insouciant des manigances de ses ainés. Enfin tout cela, jusqu’à ce qu’il se mette à chercher ceux-ci du regard. Thorin et Balin qui une minute plus tôt souriait de connivence, prirent des airs faussement sérieux. Un peu plus tôt, ils s’en étaient allé vérifier que la grosse surprise de la soirée était bien en place, et s’activait dans le cellier, faisant semblant de rien une fois de retour auprès des invités. Balin, croisant brièvement le regard de son « petit » frère, se fit encore plus petit que lui, ou qu’il ne l’était déjà- si c’était possible- en rentrant sa tête dans ses épaules pour disparaitre. L’hilarité, et l’air coupable présents sur son visage ne s’étant pas encore complètement estompés, il craignait de mettre la puce à l’oreille du fiancé. Aussi, une pinte lui arrivant soudainement entre les mains, le conseiller n’en crut pas sa chance, et en profita pour cacher sa malice, faisant à l’hydromel qui y dansait, un sort très bref. En quelques secondes la chope se retrouve vide. Mais hop, presque aussitôt la voilà qui se remplissait de nouveau, comme par magie, un nain passant par là lui versant un peu de sa pinte, dans la sienne. Profitant de cette occasion, haussant les épaules, Balin entama sa deuxième descente, justifiant ainsi ses joues rosies.

Puis peut-être sous l’effet de l’alcool, le conseiller –un peu en retrait en début de soirée- entra alors le bourdonnement joyeux des conversations et les éclats que provoquaient les différents calembours auxquels s’adonnaient les nains. Il se laissa porter gaiement par cette ambiance de boute-en-train et de queues de pelles, oubliant presque l’espace d’un instant, ses petits plans bien préparé. Tellement, qu’il manqua de peu d’être entrainer dans un –probablement le septième- concours de boisson par quelques amis et connaissances, sans doute bien intentionnés. Cela, lui fut épargné par la régularité et la pondération de Thorin qui pour le coup, faisait bien mieux que lui. En même temps il avait l’excuse de marier son petit frère bientôt, cela ne se fêtait qu’une fois.

Néanmoins, revenant sur terre aussi lourdement que la main de son roi se posant sur son épaule, le vieux notaire, conseiller, joailler, banquier, trésorier du royaume, suivit son royal cousin jusqu’à une estrade aménagée pour l’occasion. Il manqua de lâcher un petit rire à l’idée de ce que celle-ci allait connaitre, mais se contint, ne voulant surtout pas gâcher, ni ce moment, ni le discours de Thorin qui débuta en ces mots solennels…

♦Avec un amusement certain, mêlé d’un plaisir presque sadique à voir son cadet empêtré dans sa gêne, le vieux Balin riait sous cape. La première partie de la surprise de Dwalin avait produit l’effet escompté.  Le discours de Thorin, n’avait laissé absolument rien présager de la suite, et tant mieux car Balin n’en avait pas finit avec son petit frère, les festivités ne faisant que commencer. En outre, la beauté de ces jeunes naines –et dont les visages hanteraient longtemps les rêves de nombreux convives- était tout simplement troublante, pour chaque nain présent –lui-même n’échappant pas à leurs charmes-…Mais pire, elles arrivaient à faire rougir un Dwalin, qui manifestement, ne s’y attendait pas.

Au moment où les muses avaient fait leur entrée, le rouge de ses joues avait sournoisement migré vers ses oreilles, et les deux désormais s’accordaient parfaitement. Et c’était avec un regard subtilement moqueur, empli d’un rire à peine retenu, que Balin regardait son frère faire face à ces déesses de beauté dont il avait découvert les images cachées chez celui- ci, un jour par hasard alors qu’il lui rendait visite. Il ne se serait jamais douté à l’époque que Dwalin aurait de tels intérêts pour la gente féminine, même si à ce moment la jeune et tempétueuse Fréris avait déjà fait irruption dans son quotidien.  Cet intérêt l’avait tout d’abord étonné car il se rappelait encore du temps où le jeune nain montrait un désintérêt profond  pour ce genre de vénusté. Mais après l’étonnement, sa malice vint mettre en place le petit évènement de ce soir. Il avait d’abord fait part à Thorin de ses découvertes et de son projet, quelques temps avant la fête, et tous deux étaient tombés d’accord. Et le résultat était là !

« Par Mahal, si Frerìs apprend ça, je ne vais pas passer la nuit… Vous voulez ma mort ?! »

Éclatant de rire, Balin se tenait les cotes. Il ne savait que trop bien ce qui pourrait se passer si la rumeur d’un Dwalin rougissant sous les œillades de ces splendides créatures parvenait aux oreilles de la tempétueuse Fréris. Si celle-ci par un malheureux hasard,  pénétrait les lieux quel carnage ferait-elle. Oh par Mahal, à cet instant Dwalin ne serait pas seulement un homme mort ! Un homme mort, ressuscité milles fois, pour être renvoyé avec un coup de pieds au cul dans les halls des morts. Il l’imaginait, furieuse valkyrie, mettre en pièce un Dwalin tentant de se racheter par des moyens bien maladroits.

« Heureusement nous sommes trèèès douées pour garder les secrets !  »

Entendant cela parmi les éclats de rire,  son ouïe affuté percevant derrière le brouhaha cette petite voix aguicheuse, le frère ainé manqua d’air. Il riait tant et tant que le souffle lui manquait. Il ne se rappelait pas avoir autant rit dans sa courte existence. Il n’en avait guère eut l’occasion d’ailleurs, et pour cela, ce soir il en profiterait à tout prix. Et entre ses yeux plissés par cette franche rigolade, il dénota que désormais, même le crâne de son cadet était menacé par la rougeur de ses joues ! Et ce n’était pas à cause de l’alcool, qu’on se le dise. Ah quel dommage qu’il ne puisse à tout prix graver cette instant dans le marbre ! Il ne voulait surtout pas compromettre le mariage prochain, mais dieux que cette situation était tordante. Bah, ils se souviendraient de ce moment Thorin et lui, mais surtout ne manqueraient pas de le ramener quelque fois sur la table, lorsqu’entre cousins, ils iraient boire une pinte.

« Plutôt qu’une bière, je préférerais une danse, moi ! Monsieur Dwalin ? »

Alors qu’il pouffait dans sa barbe, réfrénant ses éclats pour reprendre un souffle qui semblait le fuir, Balin, s’éclipsa tout doucement, s’en retournant dans la celier, chercher le reste de la surprise, entendant au passage un « Hey si tu veux pas, y’a des volontaires ! » qui lui inspira sa future exclamation.

«Mon cher frère, si tu n’aimes pas celles-là, je t’en ai ramenées d’autres ! »

Et de la cave, s’extirpèrent, une autre petite dizaine de silhouettes. Toute vêtues à l’image des déesses qu’elles secondaient. Toutes parées des plus beaux bijoux, des plus beau tissus, parfumés, maquillés. Méconnaissables pour certains.  Dans la petite troupe de nains ayant fait leur apparition, l’un d’entre eux à la longue chevelure brune –teintée pour l’occasion-, prenant une voix de fausset, bouscula d’un coup de fesse la meneuse des Muses, et d’une œillade à peine exagérée se proposa à Dwalin pour une dance, sous le regard malicieux du vieux notaire.

« Vois comme tu es gâté mon vieux ! »

Il avait bien fait exprès de mettre en parrallèle les vrais déesses de la forge avec leurs contrepartie masculines…Pauvre Dwalin, à devoir choisir entre des naines entreprenantes  subjuguant son esprit, et des nains savamment déguisées en naine qui feraient tout pour le retenir. A choisir … entre danser avec des naines qui feraient exploser dans une grande colère sa belle fiancée, ou des nains maladroits qui en plus d’être déguisés en naines, lui marcheraient sur les pieds en rythme mais aurait le mérite de faire rire sa promise si jamais la rumeur s’ébruitait…Sincèrement même pour lui, le choix semblait cornélien.