Escapades [Solo Kielle]

Kiëlle adorait sa mère et lire, vraiment. Mais s'il a bien une chose qui la lassait profondément, c'était les livres de manières que sa mère voulait absolument qu'elle lise. L'elfing aurait cent fois préféré écouter son père lui raconter une de ses histoires, plutôt que de relire sans cesse la même phrase de ce livre...Elle n'arrivait pas à avancer. Ou plutôt, elle n'en avait pas envie. Elle, elle voulait courir, danser, bouger, et pas rester assise à une table, dans sa chambre, alors qu'il faisait si beau dehors...La fenêtre semblait presque la narguer, avec sa vue sur les arbres et la fontaine.

La petite elfe soupira, referma son livre et se leva. Cela suffisait, elle ne lirait pas un mot de plus. Tendant l'oreille, elle put constater que ses parents discutaient dans la pièce d'à côté. Il suffisait qu'elle se faufile par la fenêtre, un tout petit saut et elle serait libre. Elle l'avait déjà fait quelques fois. Elle avait toujours peur au moment de sauter, mais jusqu'ici, elle y était toujours arrivée. Cela ne pouvait changer aujourd'hui, tout de même ! Un petit rire lui échappa, et elle se hâta vers la fenêtre. Elle allait être dehors, sourit-elle avec toute la malice des enfants, du haut de ses treize ans.

Malgré sa petite taille, elle réussit à s'asseoir sur le rebord et l'ouvrit, et se pencha. Elle jeta un coup d'oeil au sol, qui l'attendait, un mètre plus bas. Un mètre, ce n'était rien, elle pouvait le faire, elle l'avait déjà fait. L'elfing se pencha un peu plus et appuyant ses mains sur le rebord, s'élança. Elle se courba de manière à bien atterrir sur ses pieds, savourant le bref instant d'euphorie, cet instant où elle flottait dans l'air, vivante et sauvage, où elle avait l'impression de s'envoler, avant que ses bottes ne rencontrent brusquement le sol. Elle réussit à rester debout, et fit quelques pas pour faire disparaître la vague douleur due au choc.

En moins de temps qu'il n'en faut pour le dire, elle était remise, et avec un rire, elle s'enfuit vers les bois. Elle se faufila entre les arbres, les esquivant habillement, riant quand elle manquait de trébucher, ses boucles rousses volant au rythme de ses foulées effrénées. C'était ça, juste ça, qu'elle voulait. Se dépenser. Voler. Etre libre. Bon sang, ce qu'elle avait l'impression d'étouffer parfois, dans sa chambre, dans sa maison, avec ses parents...Elle les aimait, elle n'était qu'une enfant, elle avait besoin d'eux, mais...Elle, elle voulait vivre. Vivre, comme les humains, les nains, les héros, dans les histoires de son père. Kiëlle n'était qu'une petite elfe, mais elle menait sa propre révolte. Elle était une elfe, oui, mais pourquoi ne pouvait-elle pas chanter à tue-tête ? Crier ? Danser et courir sans raison ? Pourquoi devait-elle apprendre l'histoire et les manières ?

Elle n'était qu'une enfant, et elle aurait voulu être un héros, avec une épée et un cheval, pour explorer le monde et défendre ses proches. Elle ne rêvait pas de batailles et de royaumes, elle rêvait de liberté et d'amitiés fortes et pures, elle rêvait d'aventures folles. Comme disait sa mère, elle était elle-même un peu folle. Mais ce qu'elle était heureuse comme ça !

L'elfing sourit aux anges,  un grand sourire et se laissa tomber dans l'herbe. Si elle continuait à courir, elle finirait pas atteindre les limites de la cité elfique. Et ça, ça mettrait ses parents très en colère. Ils toléraient ses escapades, parce qu'elle rentrait des brindilles pleins les cheveux, les vêtements tâches et plus heureuse que jamais, et même les punitions ne venaient pas à bout de la joie qui l'habitait, mais ça…

Dehors, elle n'avait pas le droit d'aller. Elle n'était qu'une enfant, pas un héros. Pas un guerrier. Pas comme son père. Pourtant, elle aurait voulu voir dehors. Comment étaient les autres cités ? Celles des hommes ? Et celles des nains ? A quoi ça ressemblait les enfants nains d'ailleurs ? Est-ce qu'ils naissaient vraiment comme ça, sans vrais parents ? Et les hommes ? Est-ce qu'ils lisaient eux-aussi ? Est-ce qu'ils devaient apprendre les bonnes manières et l'histoire, les enfants des hommes ?

Plongée dans ses pensées, allongée dans l'herbe, elle n'entendit que trop tard le bruit de pas, le bruit qui se rapprochait. Elle se retrouva soudainement soulevée dans les airs, les bras de son père posées sur ses côtes pour la porter, et il la secoua, doucement. Comme pour essayer de lui rentrer un peu de plomb dans la cervelle. Kiëlle se contenta de baiser sa tête, incapable de croiser le regard déçu de son paternel. Il avait un peu de mal à comprendre les envies d'évasion de sa fille, et l'avoir trouvé aussi proche de la frontière, toujours plus proche de la frontière, l'inquiétait. Sa petite finirait-elle par s'aventurer dehors, un jour ? Oserait-elle vraiment désobéir ?

« Kiëlle...soupira-t-il.
-Je...j'ai pas désobéi, atto... » murmura l'elfing en retour.

L'ellon ne répondit rien, mais il soupira, et serra l'enfant contre lui, pour la ramener à la maison. Elle aurait pu insister pour marcher, mais elle savait qu'elle avait fait quelque chose de mal, quelque chose qui ne plaisait pas à son père, et...Elle avait juste voulu profiter, courir, sans penser à rien. Elle aurait voulu aller dehors, mais elle ne l'avait pas fait. Elle avait été sage, alors pourquoi son père était-il déçu, comme ça ?

« Atto...Je suis pas sortie, je te promets.
-Je sais, Kiëlle.
-Alors pourquoi...J'ai rien fais de mal, c'est vrai, j'ai rien fait, continua l'enfant, commençant à pleurer, parce qu'elle ne comprenait pas, parce qu'elle n'arrivait pas à comprendre ce qui n'allait pas chez elle.
-Je sais, Kiëlle anel, ne pleure pas. Tu ne seras pas punie, tu n'as rien fait. Chut, mon ange, chut... »

Les bras réconfortants de son père, et ses mots apaisants, finirent par avoir raison de l'enfant, mais l'esprit de son paternel lui ne retrouva pas sa sérénité. Sa fille finirait par franchir la frontière, il le savait. Elle avait besoin de liberté, elle allait désobéir. Et que pourrait-il faire alors, pour la protéger ? Ce n'était qu'une enfant, un bébé...Une toute petite chose, sa fille, son enfant...Une enfant qui semblait décider à grandir trop vite, et dont les rêves ne s'arrêtaient pas aux règles données par les adultes.

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« Kiëlle ? Tu es là ? »

La voix tira l'elfe de ses pensées. Reconnaissant le timbre de sa mère, elle se dissimula derrière un arbre. Elle aurait du être avec Dame Aerin, pour se cultiver, encore et toujours plus, mais elle avait réussi à échapper à la surveillance de l'elfe aux yeux acérés. Et elle n'en était pas peu fière ! Sa mère ne pouvait décemment pas mettre sa fuite en déroute...Heureusement, cette dernière finit par s'éloigner, continuant d'appeler sa fille.

Sa fille, qui malgré ses vingt-six ans, gardait une âme d'enfant, couplée à un enthousiasme démentiel qui rendait ses professeurs et ses parents plus désespérés chaque jour. Même si dans le fond, ils appréciaient beaucoup l'elfing, son comportement n'en faisait pas une parfaite petite elfe. Son père peinait à la discipliner assez pour lui apprendre à monter à cheval et elle échappait régulièrement à l'attention de ses autres enseignants.

Elle savait bien qu'elle ne devait pas faire cela, et elle essayait de...Certes, elle continuait de s'enfuir, mais elle le faisait déjà moins que dans sa jeune enfance...Mais elle ne pouvait s'en empêcher. Plus le temps passait, plus elle voulait voir en dehors des frontières de Rivendell. Les cartes de la Terre-du-Milieu qu'on lui faisait étudier ne faisaient que contribuer à ses envies d'aventures, presque qu'autant que les récits de son père.

Plus les ans passaient, plus elle voulait partir. Pourtant, elle restait une enfant. Elle se voyait mal être séparée de ses parents, elle était bien trop jeune, elle avait besoin d'eux. Et puis, elle avait encore tant à apprendre, même si elle n'aimait pas ça. Et puis, Kiëlle n'était pas pressée. Elle avait l'éternité devant elle, et une fois adulte, une fois majeur, elle pourrait voyager, réaliser ses rêves...Avec un sourire tout enfantin, elle se remit en marche, une fois certaine que sa mère n'était plus dans le coin.

Aujourd'hui, était un grand jour. Elle était censée passer l'après-midi avec Dame Aerin, son père ne la chercherait donc pas avant ce soir. Niniël, sa mère, sa milyë, n'allait jamais prévenir son père de ses absences, comme pour la laisser profiter en toute paix de ses escapades. En fait, sa mère, même si elle était très protectrice, lui laissait plus de liberté. Peut-être était-ce du à toutes ces années, où elle avait du la forcer à rester assise et à apprendre tout ce qu'elle devait connaître, peut-être que sa mère la comprenait, plus que son père en tout cas.

Enfin, cela lui serait bien utile, aujourd'hui. Elle avait tout l'après-midi pour elle, et elle comptait bien en profiter. Elle allait sortir de Rivendell.

Kiëlle n'avait bien sûr pas le droit de le faire, mais après des années à rêvasser sur les terres entourant la cité elfique, elle s'était décidée à faire fit de l'interdit. Elle voulait voir ce qui se passait dehors. Elle n'était plus vraiment une enfant, après tout...Bien sûr pour ses parents, et pour tous les elfes, elle en était une, presque un bébé, mais elle, elle se sentait assez grande pour désobéir.

Elle s'élança dans la forêt, comme elle l'avait tant de fois. Elle courut, encore et encore, à ne plus avoir à souffle, au point que l'air semblait lui brûler les poumons, et que sa respiration soit saccadée. Là, elle était bien. L'elfing ne s'arrêta qu'arrivée toute proche de la frontière. Son père était si souvent venue la chercher ici, alors qu'elle se reposait de ses courses folles.

Mais là, il ne viendrait pas. Elle continua d'avancer, en marchant, cette fois-ci, presque doucement. Son cœur battait à cent à l'heure, comme si...elle faisait quelque chose de vraiment important. Cela l'était pour elle, et elle avait presque envie de s'arrêter et de profiter de cette délicieuse sensation, de profiter du fait qu'elle allait savoir ce qui se cachait derrière la frontière. Presque.

Son entrain naturel reprit le dessus, et elle accéléra brusquement, bondissant vers l'inconnu. Avec ce sourire aux lèvres, qui lui mangeait le visage, qui lui mangeait sa raison, ce sourire d'elfe heureuse.

L'elfing s'arrêta finalement, le souffle coupé, mais cela n'était pas du à sa soudaine précipitation, elle était juste émerveillée. Autour de Rivendell, il y a avait des plaines, des forêts, à perte de vue. Ses yeux d'elfes ne pouvaient distinguer tous les détails du paysage.

« Incroyable... » souffla la jeune elfe, impressionnée.

Elle resta un long moment là, à contempler les alentours de la cité elfique, ses yeux ne cessant de se ravir de petits détails. Elle voulait graver cette vision dans sa mémoire. Elle ne pourrait sans doute pas revenir ici avant un moment, même si elle aurait voulu que cet instant ne s'arrête jamais.

Kiëlle fut bien obligée de revenir sur terre, à un moment. La nuit tomberait bientôt, et elle aurait déjà du être rentrée depuis longtemps. Elle profita un dernier instant de la sublime vue qui s'étendait devant elle, avant de se filer à toute vitesse. Son père devait être rentré, elle allait se faire punir...Tant pis, songea-t-elle. Elle ne serait pas plus punie que d'habitude, personne ne savait qu'elle avait désobéi.

En rentrant, elle savoura encore et encore les images du paysage qui envahissaient sa tête, et devant ses parents, elle resta étonnement silencieuse, se contentant d'acquiescer quand ils la punirent. La petite elfe alla se coucher sans tarder, et sa nuit fut peuplée de somptueux paysages. Elle ne regrettait pas d'avoir désobéi.

Peut-être que c'était une mauvaise chose, qu'elle n'aurait pas du le faire, mais elle était heureuse d'avoir enfin vu ce qui l'avait tant attiré pendant toutes ces années. Elle se sentait comme apaisée, reposée...Maintenant, elle savait. Un rêve d'accompli.

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Sous un énième soupir de son père, Kiëlle tendit une centième fois son arc, malgré les muscles de ses bras douloureux, et malgré son envie de tout laisser tomber. Il fallait qu'elle s'améliore. Voilà, ce que répétait son père. Parce qu'elle était une elfe, et que tout elfe digne de ce nom devait savoir manier ce maudit arc. Sauf que l'elfing n'y parvenait pas. Pour elle, l'arc restait un domaine la dépassant totalement. Enfin, elle arrivait à tirer plus ou moins convenablement maintenant. Mais atteindre une cible mouvante, par exemple, lui restait impossible.

« Kiëlle, concentre-toi.
-Je le suis, atto !
-C'est faux, ta posture est mauvaise, une brise te ferait tomber. Tu n'es pas attentive.
-Si ! » s'indigna la jeune elfe.

Elle tira une flèche, qui rata bien évidemment sa cible. Son père soupira une nouvelle fois. Une fois de trop. Kiëlle laissa tomber son arc, et son carquois, avant de faire volte-face. Elle en avait assez. Cela ne servait à rien, l'art de tirer à l'arc restait cryptique pour elle, quoi qu'elle fasse. Et elle en avait plus qu'assez d'essayer encore et toujours.

« Kiëlle, reste ici, l'entraînement n'est pas terminé.
-Pour moi, il l'est ! »

Et sans attendre son reste, l'elfing partit, courant à toute vitesse. Son père aurait beau essayé de le rattraper, il ne connaissait pas aussi bien la forêt et ses cachettes que son aventurière de fille, qui avait passé toutes ses années à explorer les lieux, et il ne pouvait donc qu'essayer de la prendre de vitesse...Sauf que la petite elfe n'avait pas attendu pour s'élancer, bondissante, le plus vite qu'elle pouvait dans les bois.

Autrement dit, Kiëlle allait pouvoir profiter du reste de l'après-midi, seule. Et sans arc ! Elle n'était pas une guerrière, mieux elle n'était pas faite pour se battre. Ou alors pas avec un arc. Mais son père insistait : elle devait apprendre à manier l'arc avant de s'essayer à l'épée ou aux dagues. Pourtant, elle avait été particulièrement sage ces dernières années. Après sa découverte du paysage entourant Rivendell, elle s'était assagie, et les diffamations qui courait sur elle, la traitant de rebelle, d'elfe indécente et surtout indigne, s'était peu à peu apaisées.

Mais elle restait...anormale. Pas forcément dans le mauvais sens, en tout cas Kiëlle ne pensait pas que ce soit le cas, mais juste différente. Elle aimait crier et courir, sans cesse, et ce malgré le fait qu'elle aurait bientôt cinquante-six ans. Elle n'aimait pas apprendre, même si elle s'était surprise elle-même en se plongeant dans des livres traitant de la géographie ou de l'histoire de la Terre-du-Milieu. Ce n'était pas tellement son genre, mais pourtant, elle avait appris à fractionner son temps. Elle s'était organisée. L'après-midi, elle suivait les leçons de son père ou d'un autre elfe, avec plus ou moins d'entrain, et le matin, elle galopait dans la nature. Le soir, seulement, elle se posait, et lisait jusqu'à plus soif, remplissant ses rêves de batailles et d'aventures.

Pourtant, elle ne souhaitait pas tellement se battre. Non, ce qu'elle voulait elle c'est voyager. Et ce qu'elle voulait pas, c'est apprendre à manier ce maudit arc. Elle n'était pas faite pour être une guerrière, peut-être devrait-elle plutôt essayer de s'intéresser à la cultivation...Elle s'en sortirait sans doute mieux qu'avec son arc. Au moins planter des choses ne demandait pas une précision et une attention surhumaine.

Kiëlle se laissa finalement tomber dans l'herbe, le souffle court. Elle adorait courir, mais parcourir la moitié de Rivendell la laissait tout même essoufflée. Elle était juste à côté de la fontaine, remarqua-t-elle, une fois qu'elle eut récupéré une respiration correcte. Un petit sourire aux lèvres, elle se releva, époussetant les bouloches de brins d'herbes et autres petits éléments naturels non identifiés, qui étaient venus se coller à ses vêtements et vient s'asseoir sur le rebord de la fontaine.

Parfois, elle songeait qu'elle aurait pu vraiment être heureuse ici. Rivendell était un lieu de paix, où il faisait bon vivre. Une vie calme, sereine. Le genre de vie dont on était heureux, simplement parce qu'on ne demandait rien d'autre que ce qu'on avait déjà, et qu'il n'était pas question de troubles, de problèmes.

Kiëlle ne pouvait pas vivre comme ça. Elle aimait voir, découvrir, bouger...Elle aimait faire des farces aux autres elfes, même si elle se faisait punir. Elle se rappelait encore de la tête de Dame Aerin quand elle avait innocemment remplacé les voiles qui couvraient les fenêtres de sa maison par les culottes de la dite-dame. Et elle se rappelait aussi de sa punition...Mais qu'importe ! Elle détestait les manières, et devoir se courber sans cesse. Elle, elle voulait voir dehors, découvrir autre chose que Rivendell.

Lasse, elle plongea les mains dans l'eau claire de la fontaine, créant de petits remous à la surface. Un jour, quand elle serait majeur, quand elle serait assez forte, elle s'en irait. Elle le voulait. Elle était encore trop jeune, elle ne savait même pas se battre, mais elle le ferait, un jour.

Elle laissa l'eau cascader entre ses doigts, avant de se décider à rentrer. La nuit n'était pas tombée, mais elle n'avait pas envie de faire tourner son père en bourrique plus longtemps. Elle en avait marre, mais elle allait y arriver. Ce n'était pas quelques difficultés qui allaient l'en empêcher, quand même ! Elle maîtriserait ce maudit arc, pour devenir forte, et réaliser son rêve.

Plus joyeuse, elle quitta la fontaine, marchant tranquillement vers sa maison. Elle espérait juste que son père ne serait pas trop en colère. L'elfing arriva chez elle sans encombres, après avoir salué quelques elfes. Elle n'y trouva pas son père, et après avoir fait le tour de la maison, de long en large,  elle songea à se rendre là ou son père l'entraînait. Elle passa devant la fenêtre latérale à la porte, salua sa mère qui cuisinait, et repartit dans les bois.

L'aire d'entraînement n'était pas loin, heureusement, et elle y arriva rapidement. Effectivement, son père s'y trouvait toujours. Il semblait l'attendre. Kiëlle déglutit, et s'avança à petits pas. Une nouvelle fois, elle l'avait déçu. Elle était presque habituée à cela, maintenant. Pourtant, elle était toujours aussi honteuse face à ses yeux accusateurs.

« Kiëlle…
-Je vais recommencer, le coupa-t-elle, avec tout le courage dont elle était capable.
-Vraiment ? Dit-il, et il semblait plutôt sceptique.
-Oui. Je vais y arriver. »

Kiëlle récupéra son arc, toujours au sol, et ses flèches. Elle inspira un grand coup, en essayant de se souvenir de tout ce que son père avait essayé de lui expliquer, de lui apprendre. Elle se plaça, du mieux qu'elle put, son corps tendu par l'anxiété. Elle banda son arc, ne quittant pas sa cible des yeux.

Ses mains tremblèrent alors, et quand sa flèche partit, elle atterrit misérablement dans l'herbe, à peine à quelques mètres d'elle. L'elfing baissa la tête, sentant les larmes lui monter aux yeux. Elle devait être forte, bon sang. Recommencer, il fallait qu'elle recommence, même si elle n'en avait pas la moindre envie, même si elle avait l'impression de faire toujours plus d'erreurs. Elle lâcha prise sur l'arc.

Cependant son père réapposa immédiatement ses doigts sur le bois. Juste à côté d'elle, il l'aida à se placer comme il faut. Il s'écarta alors, et lui jeta un regard. Kiëlle n'était peut-être qu'une petite elfe, mais elle avait l'impression que son père essayait de lui donner du courage, et en même temps de lui dire que c'était sa dernière chance, qu'elle devait y arriver.

Un souffle franchit ses lèvres et elle tira. Il y eu un instant de silence, mais finalement le cri de joie de la jeune elfe éclata dans l'air, alors qu'elle constatait que sa flèche était arrivée à bon port.

Elle y arriverait. Et la lueur dans les yeux de son père lui promettait qu'il serait là pour l'y aider.

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