Une rencontre ... intéressante [Elladan&Elwyn]

Mon frère et moi sommes rarement l'un sans l'autre, cependant, cela arrive. Rarement, mais cela arrive. Bien que nombre de ceux qui nous connaissent doutent qu'il puisse nous arriver de nous séparer, tant il est habituel que l'un suive l'autre dans à peu près toutes les situations. Donc, pour résumer, ce jour, je suis parti à la chasse à l'orc sans lui. Pourquoi? Parce qu'on a parlé d'une petite troupe à peu de distance d'Imladris, et je n'ai pas jugé utile de l'embêter pour si peu. Ensuite, il se trouve que j'étais parti abreuver ma monture dans l'Anduin quand j'ai croisé ce cavalier revenant à la cité, et ne comptait pas perdre le temps de le suivre pour attendre mon frère ou une troupe plus conséquente. Arrivé sur place, je songe cependant à apprendre le sens de "petite troupe" à l'éclaireur qui m'a donné l'information. Parce qu'une trentaine d'orcs accompagnés d'une demi douzaine de wargs, ce n'est pas ce que j'appelle "une petite troupe". C'est déjà un groupe raisonnable. Mais pas de quoi m'arrêter. De toute façon, en terrain si découvert, je n'ai pas franchement pu compter sur l'effet de surprise.
A défaut de l'effet de surprise, j'ai donc profité de la distance qui me restait encore pour cibler les wargs de mes flèches, ne tenant pas plus que cela à laisser mon cheval souffrir les crocs de ces créatures. Et je parviens à abattre le cinquième loup lorsque le sixième me prend de vitesse, percutant de plein fouet ma monture qui tombe à terre, me désarçonnant dans le même temps. Je me relève à temps pour attraper ma dague et la planter dans la gorge offerte de l'ignoble créature, ne retirant ma lame que lorsqu'elle s'effondre dans un dernier râle d'agonie. Mon arc retourne à mon épaule tandis que je dégaine mon épée pour tenir compagnie à ma dague, accueillant le flot des premiers orcs tandis que du coin de l’œil, j'observe mon cheval se relever péniblement et s'éloigner, quatre griffures zébrant sa robe immaculée.

Bref, il ne faut pas être stupide pour comprendre que je ne fais pas le poids, et après plusieurs blessures minimes et quelques orcs abattus, je remet mes lames au fourreau pour sauter en selle et lancer ma monture au galop, ayant bien observer que sans leurs propres montures, les orcs ne nous rattraperaient pas avant que nous soyons à l'abri de notre cité. L'imprévu aura été cet orc archer que j'aurai du éliminer avant de lui tourner le dos. Cela, je ne le comprend que lorsqu'une sourde douleur me prend à l'omoplate et que je m'effondre à demi sur l'encolure de mon cheval, trop balloté par son galop boiteux pour trouver la force de me relever sur ma selle. A vrai dire, c'est probablement ce qui me sauve de la seconde flèche, qui touche mon carquois plutôt que ma chair.

Je talonne davantage mon cheval, bien que ses blessures le rendent certainement inapte à telle galopade, à seule fin de prendre le maximum de distance avec l'ennemi tant qu'il en est encore capable. Ce que nous parvenons sans mal à faire, peut-être grâce à l'allure de mon cheval, sans doute grâce à quelque renfort ayant eu le temps d'arriver sur place et finir mon travail. J'en connais un qui va se faire tirer les oreilles, avec raison, mais pour l'heure, sa préoccupation première, c'est de rester accroché à sa selle et assez conscient pour ne pas tomber stupidement de sa monture. Monture qui traverse l'Anduin au pas avant de repartir au petit trot, boitant de cet antérieur à l'épaule déchirée sur laquelle s'appuie en plus un cavalier bien incapable de faire autrement.

*** *** ***

Je me réveille dans un environnement bien différent, me rappelant vaguement qu'on m'ait aidé à descendre de ma monture, et de la douleur éprouvée lorsque la flèche de l'orc quitta enfin ma chair. La lumière du soleil m'éblouit alors que j'ouvre les yeux trop vite, et je me protège d'une main devant mon regard le temps de m'habituer à la clarté de cette pièce que je ne connais que trop bien. Les salles de soin, bien sur, où d'autre aurais-je pu me trouver? Ma première pensée va à mon fidèle compagnon de chevauchée, dont j'ignore si l'état est récupérable ou non, avant de penser à la morale justifiée que je vais prendre de la part de Père sitôt qu'il me saura réveillé. Mais avant toute chose, je suis plus têtu qu'un âne, et je commencerais déjà par essayer de me sortir de ce lit. La suite peut attendre.

*** *** ***

Deux jours et une bonne morale plus tard...
Condamné à rester enfermé dans la cité jusqu'à ce que mon père me juge apte à remonter à cheval, et de toute manière, privé de monture tant que le pauvre animal n'a pas guéri de ses plaies, j'ai déjà commencé à tourner en rond comme une bête en cage, connaissant chaque couloir et chaque balcon comme le fond de ma poche. Et c'est sur l'un de ces balcons, le regard perdu dans l'immensité de la vallée en contrebas, qu'on saura me trouver, accoudé à la balustrade malgré la douleur encore présente qui me vrille l'épaule à appuyer mon bras de la sorte. J'ai toujours su composer avec la douleur physique, celle là même qui soulage la douleur psychologique qui me transperce le cœur à chaque fois que je reviens dans cette cité qui m'a vu naitre et grandir et a été témoin de tant de bons moments aujourd'hui révolus.Trois siècles que cette douleur lancinante ne me quitte pas, et à ceux qui pensent que je recherche volontiers cette douleur physique seule capable de la surpasser, je répond qu'à défaut de tenir assez peu à la vie pour la rechercher, je ne la fuis pas lorsque je la croise. Bbien que mon instinct de survie semble assez développé pour toujours m'envoyer à bon port avant qu'il ne soit trop tard.

Lassé de laisser mon regard veiller sur cette cité qu'une part de moi a en horreur, je soupire avant de m'écarter de la balustre du balcon pour repartir de plus belle dans les couloirs, descendant les niveaux de ma demeure puis de la cité sans réellement m'en rendre compte. Là où mes pas me guident, je m'en rend compte lorsque je dois m'écarter pour laisser passer un elfe tenant un jeune cheval fougueux dansant farouchement au bout de sa longe. Les écuries où j'ai laissé ma monture dans un état critique quelques jours auparavant. Affronter les conséquences de mes actions n'est pas mon fort, et je me garderai bien de constater l'état réel du pauvre animal. Cependant, il me faudra bien m'y résoudre un jour, et j'aspire donc une bouffée d'air avant de me présenter dans l'écurie, flattant le nez des chevaux qui passent leur tête par la porte de leur box à mon approche jusqu'à rejoindre la stalle de ma monture, dont j'observe d'abord l'état de loin. Point positif, il est debout. Point négatif, les quatre griffures indescriptibles qui barrent son encolure et son épaule, à peine dissimulées par la quantité d'onguents tartinés dessus. Une chose est sure, il n'est pas prêt de m'accompagner de nouveau à la bataille, même malgré le talent des elfes pour guérir des plaies qui feraient probablement abattre une bonne monture chez les hommes.
Une grimace plus tard, je me décide à me rapprocher du box, attirant légèrement l'attention de l'animal, pourtant occupé ailleurs, les oreilles pointées vers la source du chant elfique qui résonne joliment à mes oreilles . Pour tout dire, jusque là, je ne l'avais pas vu, ce gamin qui semble plus à sa place que moi au chevet de ma monture.

"Alrahir. C'est le nom que je lui donne."

J'entre dans le box, glissant ma main sur le museau mi rose mi gris qui se tend dans ma direction, avant de jeter un oeil de près au travail des guérisseurs de la cité. J'en connais plusieurs à qui je devrais une fière chandelle. Mon inspection faite, je m'intéresse au gamin à demi caché derrière le cheval, comprenant sans être empathe qu'il me faudra éviter de le brusquer. Je ne sais pas, un je ne sais quoi dans son comportement.

"Je suis Elladan. Tu as surement déjà croisé mon père, le seigneur Elrond. Peut-être même mon frère, Elrohir. Le même que moi en plus intelligent."

Oui, lui ne va pas offrir son cheval comme banquet pour les wargs. Alors pour une fois, je lui offre de bon cœur un compliment qu'il n'entendra pas. A mon habitude, quand je viens m'installer dans le box de ma monture, je trouve à m'asseoir au sol, adossé au mur, me moquant peu de garnir mon pantalon de paille. Prince ou pas prince, quand je dors à la belle étoile, c'est parfois la boue, et non la paille, qui me sert de matelas, alors je ne saurais me formaliser de si peu. Et puis, autre avantage de cette position, l'enfant se trouve plus haut que moi, et pour avoir été gosse un jour, je sais qu'il est plus agréable de parler à une personne se mettant à notre hauteur qu'à un adulte trouvant amusant de garder ses deux mètres de haut face à un gamin. L'inconvénient en revanche? Je ne trouve rien de mieux que d'appuyer sur ma plaie en m'installant, ce qui me tire un léger ouinement que je tente de dissimuler tant bien que mal.

"Et toi, tu t'appelles comment?"

Je lui souris légèrement, fermant les yeux alors que je repose ma tête contre le mur derrière moi, l'une de mes jambes venant se replier contre ma poitrine tandis que j'étale l'autre au ras des sabots de l'étalon blanc. Mon père avait raison quand il me disait de garder le lit davantage que je ne sais le faire, et il semblerait que malgré ses bons soins, plus qu'efficace, mon corps n'apprécie guère le contrecoup de sa rencontre avec les flèches empoisonnées des orcs. Je rouvre une paupière pour jeter un oeil au jeune elfe, lui offrant un sourire rassurant.

"T'en fais pas pour moi, je suis bien trop têtu pour que nos ancêtres veuillent que je les rejoigne. Je t'ai entendu chanter pour lui tout à l'heure. C'était beau tu sais. T'occupe pas de moi si tu veux continuer."

La réponse du jeune elfe me prend par surprise. Non pas sa réponse. Le moyen par lequel il me la communique. La télépathie n'est pas un art avec lequel j'ai pu m'exercer, contrairement à ce que pensent ceux qui sont certains que mon frère et moi l'utilisons entre nous. Non, entre Elrohir et moi, j'ignore de quoi est composé ce lien qui nous permet de ressentir certaines émotions telles que la peur ou la douleur, ou encore nous permet de nous comprendre sans qu'il nous soit nécessaire d'user du moindre mot. Mais ce n'a rien à voir avec le don présentement utilisé par Elwyn.

J'incline la tête en signe d'assentiment en réponse, espérant ainsi lui faire comprendre que j'ai bien reçu son message télépathique. A vrai dire, je ne trouve rien de plus à ajouter, hésitant même à parler à voix haute alors que la réponse risque fort bien d'arriver dans ma tête. Sensation étrange s'il en est. Alors je reste silencieux, laissant l'enfant s'asseoir à mes cotés en attendant sagement qu'il s'exprime s'il le veut. Sinon, rester là en silence me va aussi parfaitement. Et de nouveau, sa voix dans ma tête, une réponse qui me tire d'abord un sourire, que je perd lorsqu'il achève sa phrase. L'utilisation du passé concernant sa mère ne m'a pas échappé. Pas à moi, qui souffre encore de la disparition de la mienne, et ce depuis trois siècles, malgré les plus de 2500ans que j'ai passé sur cette terre. Alors je n'imagine pas ce que cela doit être pour un garçon d'une quinzaine d'années. J'hésite un instant avant de glisser doucement une main sur son épaule, tout en veillant à ne pas l'effrayer par un geste brusque.

"Ma mère chantait, elle aussi. J'aurai pu passer des heures assis par terre à l'écouter.. j'y ai sans doute passé des heures.

Je ne suis pas de ceux à prétendre que ça ira mieux demain, que l'être aimé restera vivant en notre cœur et tous ces baratins. Je suis de ceux qui restent hantés par les souvenirs, associant chaque vision, chaque bruit et chaque odeur à un instant partagé jadis, qu'il me fait mal de revivre chaque fois que mon esprit s'y égare. Voilà exactement pourquoi je fuis Imladris chaque fois que je le peux. Pas par désamour pour mon père, ou parce que je lui en voudrais d'une façon ou d'une autre de n'avoir su guérir ma mère du mal qui la rongeait. Absolument pas. Je dirai même que c'est l'affection que je porte à mon père qui me fait revenir en ces lieux dont je préfèrerai pourtant rester éloigné. Non, ce qui me fait fuir, c'est l'angoisse qui m'enserre le cœur à la pensée de marcher dans ces couloirs où j'ai marché à ses cotés, ou d'entendre le vide là où jadis s'élevait sa voix. Une angoisse telle que certains jours, je préfèrerai mille fois me jeter seul et sans armes dans la planque puante d'un contingent d'orcs que songer à rejoindre ma cité natale.

Je m'inflige une gifle mentale en me rappelant la capacité à la télépathie de Elwyn, et mon incapacité à retenir le mien, d'esprit. Rien ne me dit qu'il n'est pas capable de s'y faufiler à sa guise, ce qui me donne un frisson parfaitement incontrôlé, qui fait sursauter mon cheval. A vrai dire, plus que de le savoir dans ma tête, ce qui me gênerait, c'est ce qu'il risque d'y trouver. Des blessures bien plus profondes que celle infligée par la flèche qui m'a transpercé l'épaule, ou la lame qui m'a taillé la joue, ou n'importe laquelle de ces blessures récentes auxquelles je n'accorde pas assez d'importance pour m'en soucier. La douleur psychologique, il n'y a rien de pire, et je ne souhaite pas même cela à mon pire ennemi. Alors à un gamin de son âge... et pourtant, si mon instinct ne me trompe, il est déjà passé par là, bien avant l'âge, même s'il n'y a aucun âge pour être préparé pour cela.

"Je comprend que tu ne veuilles pas en parler. Moi non plus, je n'aime pas qu'on m'y force."

Et quand j'ai besoin de hurler un bon coup, c'est de mes lames et de mes flèches que je le fais, déversant ma colère et ma souffrance sur quelque ennemi que je puisse trouver, ou sur quelque compagnon d'entrainement assez solide pour résister à mes charges, aussi furieuses que dénuées de logique. Frapper pour frapper, voilà ce dont j'ai parfois besoin.

Je ne peux nier regretter d'avoir évoqué ma mère face à ce jeune elfe déjà plus que surchargé de son propre deuil. Il n'a pas en plus à devoir supporter le mien, et c'est même cruel de ma part de lui en avoir fait part.Je ne sais quoi lui dire, mais, à la réflexion, je sais que je n'aurai pas aimé entendre quelqu'un d'autre pleurer sa propre mère lorsque j'ai perdu la mienne, comme si, quelque part, l'une des deux surpassait l'autre en importance. Bien sur que j'aime profondément ma mère et qu'il n'y a à mes yeux aucune mort que j'ai subi qui importe davantage que son départ, mais il en est de même pour ce garçon, et je n'ai pas le droit de lui enlever cela.
Je le regarde vaincre sa timidité pour venir s'installer à mes cotés, puis se serrer contre moi en quête d'un peu de réconfort que je ne suis pas sur de savoir lui apporter. L'instinct paternel n'est pas réellement inné chez moi, et si je sais amuser certains gosses comme le ferait un grand frère, mettant momentanément de coté mes problèmes personnels pour veiller sur eux, prendre soin d'un enfant ayant besoin de la présence d'un adulte, je ne suis pas certain de savoir. Alors je passe maladroitement un bras autour de ses épaules pour le serrer contre moi sans toutefois l'emprisonner, tentant par ce contact de lui faire passer mon soutien dans l'épreuve qu'il a à traverser contre son gré.
Je le regarde de nouveau, me demandant ce qui peut se passer dans sa tête alors qu'une autre question me vient à l'esprit sans risque que je la lui pose. Que s'est-il passé? Une question que j'oserais sans doute poser à mon père à seule fin d'éviter à Elwyn le destin qui est le mien. La traque que me fait suivre ma vengeance est une chose que mon âme d'elfe supporte de moins en moins jour après jour, mais sans laquelle je en sais pas vivre. J'en ai besoin comme d'une drogue. Réduire les rangs des orcs, voir leur sang noir souiller la plaine et me convaincre qu'ainsi, j'aide à leur extinction. Et peut-être qu'un jour, je saurais prendre la vie de celui qui m'a pris ma mère, allez savoir. Un rêve illusoire qui me maintient droit sur ma selle quand le désespoir m'assaille.

"Si tu as envie de pleurer, ne te retiens pas à cause de moi. Je ne me retiens pas davantage malgré l'âge. Demande donc à Alrahir."

Sa question me fait hésiter un moment. Lorsqu'il me demande si les orcs ont fait cela. Je me demande s'il parle du décès de ma mère, ou des blessures que mon cheval et moi avons récolté après notre dernière chasse. A défaut de vouloir évoquer davantage le premier fait, je choisirai de répondre au second, qui, je l'espère, me permettra également de distraire le jeune elfe des pensées délétères qui l'habitent. Ce n'est guère en entendant quelqu'un d'autre évoquer son propre deuil qu'on peut se défaire du sien.

"Les orcs et leurs wargs oui. Ce n'est ni la première ni la dernière blessure que je reçois. Mon inquiétude allait davantage à ma monture, mais malgré les cicatrices, je suis ravi de le voir debout et l’œil si vif."

Mes doigts s'attardent sur la trace qui traverse ma joue, balafre qui n'aura surement plus place d'ici quelques temps, même si ma nature de sang mêlé rend ma cicatrisation moindre que celle des autres elfes. Une simple gène, dont je me remettrais rapidement. Le trou dans mon épaule, du à cette flèche certainement pas des plus saines qui m'a transpercé la chair, ça, ça risque d'être plus long à se remettre. De toute manière, il est évident que je suis coincé dans cette cité jusqu'à ce qu'Alrahir se remette totalement de ses blessures, alors, autant en profiter pour me remettre également des miennes.

"N'hésite pas, si tu as des questions à me poser. J'ignore si j'en aurai les réponses, mais je sais d'expérience que les garder pour soi est bien pire encore. Bien que la réponse ne nous plaise pas toujours."

Je jette un regard vers mon cheval, en plein effort physique, à savoir, se gratter l'oreille avec le sabot arrière, une épreuve d'équilibre et d'agilité pour un tel animal, qui me surprendra toujours. Et je finis par terre la main vers lui, attendant qu'il vienne à moi, pour lui gratter moi-même l'oreille en une rude caresse. C'est bien plus simple comme ça.

Mon cheval finit par secouer la tête, me signifiant par là qu'il n'a plus besoin de mes services de grattoir automatique, avant de se secouer intégralement, faisant tomber une quantité non négligeable de poil mort et de poussière sur la litière de son box. Bien, on voit parfaitement combien le prince prend soin de la propreté de sa monture, c'est gé-nial...
Délaissant ma monture, mon regard se porte vers le jeune elfe et ce regard plein d'espoir qu'il me lance, me faisant regarder vers le sol où une nouvelle question a fait son apparition. Je lui souris avant d'acquiescer, glissant la main dans ses cheveux noirs, presque plus sombres que les miens.

"Certes. A une condition cependant."

Je me relève comme je le peux, grimaçant d'infliger plus de mal à mon épaule lésée, surtout quand j'ai la brillante idée de m'appuyer sur cette main l'espace d'une seconde. Parlons en de la souplesse et de l'agilité des elfes. Ça a du me passer au dessus du nez à la naissance, croyez moi. Bref, une fois relevé, je passe à coté de mon cheval, qui s'en va faire les poches du gamin, pour ouvrir un coffre placé au fond du box, dans lequel je fouine quelques instants pour en tirer une épée courte, presque une dague, dont je ne me suis pas servi depuis des années mais dont le tranchant est toujours aussi net. Si je me moque pertinemment de l'état de mes habits, s'il y a une chose à laquelle je fais attention, c'est bien à l'efficacité de mes lames. Ce n'est pas avec une lame émoussée qu'on traverse la carapace d'un orc.
Je referme le coffre contenant certaines affaires qui n'ont rien à faire dans mes appartements et que je ne veux pas voir trainer librement à l'armurerie avant de revenir vers le jeune elfe, lui présentant la lame garde en avant.

"Si tu me prouve que tu sauras t'en servir, elle est à toi. Je ne voyage avec personne qui ne sache se défendre."

Enfin, je pense que Père m'enterrera vivant si je récolte une nouvelle blessure aujourd'hui, donc, si l'envie lui dit, nous trouverons deux bâtons avec lesquels s'exercer. Et oui jeune homme, si je ne testerai pas la fiabilité de mon épaule abimée, il me reste une main pour manier l'épée, et cela me suffit amplement... j'oublierai juste l'arc pour encore quelques jours, le temps de reprendre la route.