Trucs de fille et jeux de garçon

Fière d'être une fille

Bregil était une fille. Une petite fille. Mais s'il y avait une chose qu'elle détestait plus que tout, c'était bien les filles. Mais pourquoi ? Après tout, elle en était une de fille. Bah c'est simple..
Une fille c'est fragile. Un rien ne la blesse et il suffit d'un petit rien pour que ça n'aille pas. Et puis il ne faudrait pas se faire mal pour abîmer ce joli minois à la noix. Tu lui donnes un coup, ça pleure. Elle tombe par terre, ça pleure. Tu lui dis un truc méchant mais vrai, ça pleure. Ça peut pas porter les trucs lourds. Ça doit rester à la maison. Ça doit pas jouer aux guerriers.. En vrai, c'est en sucre, ça peut rien faire et encore moins sortir les jours de pluie. C'est qu'il ne faudrait pas attraper un rhume.
Une fille c'est coquette. Toujours à faire attention à sa robe -parce que oui ça porte des robes et pas des pantalons-, à ses cheveux, ses mains.. D'ailleurs, c'est tout un travail d'être coquette. Il ne faut pas jouer dans la boue, ne pas grimper aux arbres -de toute façon c'est pas possible avec une robe- et puis faut pas dire de gros mots. Bregil n'est pas coquette mais elle ne dit pas de gros mots, du moins pas trop et encore moins devant ses parents. Son papa lui a bien répété que ce n'est pas joli et qu'il ne faut pas en dire à plus grand que soit. La petite fille s'en moquait de savoir que ce n'était pas joli mais elle écoutait quand même son papa parce qu'il faut écouter son papa.

La liste des choses que ça ne peut pas faire est longue mais celle des choses qu'elle doit faire mais qu'un garçon ne fera jamais, l'est tout autant. Parce que oui, les filles et les garçons ne font pas les même choses, aussi sûrement que les filles font les bébés et que les garçons sont de gros bébés. La petite fille qu'elle était l'avait bien compris mais ce n'était pas pour autant qu'elle l'acceptait. Pourquoi les filles devaient se cantonner aux choses de filles ? Elles pouvaient bien faire les même choses que les garçons mais quand elle questionnait sa maman à ce sujet, on lui répondait toujours que ce sera différent si elle trouve un mari qui est gentil. Bregil, elle, a décidé de ne jamais se marier. Ce sera plus vite fait que de trouver un mari qui l'accepte comme elle est, une fille qui aime les trucs de garçon.
Alors la petite Bregil soupire et râle beaucoup, surtout quand on la sermonne sur l'état de ses vêtements et aussi quand on lui demande d'aider aux tâches ménagères. Elle voudrait être un garçon pour pouvoir apprendre à couper le bois par exemple. Mais non, elle doit apprendre à coudre, faire à manger ou la vaisselle, nourrir les poules. Alors oui, elle aime bien aider à faire les tartes parce que comme ça, elle mange la moitié des pommes en même temps, mais ça ne va pas beaucoup plus loin.

Oui, Bregil voulait être un garçon plus que tout parce que les garçons, en dehors de porter des robes, ils peuvent faire tout ce qu'ils veulent. Mais en même temps, c'est bête les garçons. Sauf son papa, son papa était pas bête, quoi que ça dépendait des fois comme disait sa maman.
Les garçons c'est bête alors elle voulait pas tellement être un garçon non plus si c'était pour être un garçon bête comme ses pieds. Bien sûr, tous les garçons ne sont pas bêtes mais c'est pareil pour les filles, elles ne sont pas toutes coquettes parce qu'au final, elle restait une fille quand même, même si elle le voulait pas. Et puis des fois, ça lui servait bien parce que quand elle mettait une nouvelle robe pour aller au grand marché, si elle avait pas le droit d'aller jouer comme un cochon, elle avait pas non plus le droit de faire les tâches, alors c'était les garçons qui faisaient à sa place. Et puis aussi, quand c'était trop lourd ou trop dur ou quand elle avait pas envie de le faire, bah elle disait que c'était pas un truc à faire faire aux filles. Ça lui servait bien comme excuse, c'était pratique et elle aimait bien être une fille, parce que les filles ça commande les garçons et ça les fait tourner en bourrique. Sa maman le faisait avec son papa et c'était très amusant. Quand son papa voulait quelque chose, il faisait tout ce que sa maman voulait, il obéissait à tout. C'était un peu la fête des mamans quand c'était comme ça et bien sûr, la petite fille qu'elle était ferait pareil quand elle sera plus grande, juste pour le plaisir de voir le papa faire des trucs de fille et de l'entendre lui dire des mots gentils.
Sa maman était une fille pourtant -pour pas dire que c'était une maman avant tout-, et c'était bien la seule fille qu'elle aimait, quoi que y'avait la fille qui aidait au verger aussi ainsi qu'au marché, et aussi la grand-mère très vieille qui sentait pas très bon mais lui donnait des biscuits -d'une origine douteuse cela dit- bien que vu son grand âge, fille n'était plus trop le terme. Oui, la petite fille aimait beaucoup sa maman, elle était pas comme les autres filles que Bregil voyait quand ils se rendaient à Edoras et même qu'elle faisait des trucs de garçon mais des trucs d'adultes. Elle était fière de sa maman qui était douce comme la compote de pomme et forte comme un bœuf, y'en avait pas d'autres comme elle et c'était sa maman. Elle était fière d'être sa fille, elle était fière d'être une fille et quand elle serait grande, elle sera comme elle : une femme de caractère, comme disait son papa.