[FB]Kill the witch

Kill the witch

Près de un mois s’était écoulé depuis la tragédie qui avait détruit la vie de Selphir. Un mois durant lequel l’ancien forgeron et soldat avait erré, sans jamais vraiment savoir où aller. Auparavant, il habitait à Minas Amor, capitale du Gondor qui l’avait vu naître mais qui avait aussi vu la mort de sa mère et de son père. Ville dans laquelle il avait tout connu, l’amour, mais aussi, un horrible drame. Aylanna. Il s’agissait de la femme dont il était tombé éperdument amoureux et qui lui avait permit de faire son deuil concernant le décès de sa mère. Une femme haute en couleurs qui avait apporté un peu de chaleur et de joie dans la vie d’un jeune homme plutôt réservé et ravagé par la douleur. Dès les premières secondes qui avaient découlé de leur rencontre, Selphir en était tombé fou amoureux et il ne s’était pas passé une seule seconde sans qu’il ne s’imagine mourir à ses côtés. Elle représentait tout à ses yeux, et on la lui avait enlevé de la manière la plus brutale qui soit. Duncan Thius, c’était le nom de l’homme qui avait commis le plus terrible des crimes et la plus terrible des erreurs. Sous prétexte qu’il voulait trahir son roi, il avait décidé de mettre fin aux jours de Aylanna parce qu’elle l’avait surpris en train de comploter. Selphir l’avait trouvé, chez lui, son arme plantée dans l’abdomen de sa bien-aimée.

Cet acte était absolument impardonnable et c’était pour cette raison que Selphir avait décidé de quitter sa ville natale. Il ne pouvait continuer de vivre tranquillement tout en sachant que l’assassin de sa femme courait toujours et menait très certainement une vie paisible, hors du poids de la culpabilité. Il devait être puni pour son crime et le désormais chasseur de primes allait s’en assurer personnellement. Selphir était persuadé que son ancien compagnon ne ressentait aucun regret quant à l’acte qu’il avait commis. Il l’avait vu dans son regard ce soir-là. Il avait pu y distinguer toutes les émotions sauf la culpabilité. La fierté, c’était tout ce qu’il avait pu y lire. Chaque fois qu’il repensait à cela, il ressentait une profonde rage contre cet homme, si forte qu’il avait parfois besoin de se déchaîner contre un arbre pour évacuer toute cette colère qui le submergeait quelques fois. S’il ne faisait pas cela, il explosait, c’était évident. Personne n’était capable de vivre tout en ressentant autant de rage dans le coeur. De temps en temps, Selphir ressentait le besoin d’extérioriser. Parfois, un pauvre arbre était victime de sa colère, mais d’autres fois, il se déchaînait en acceptant comme mission de tuer un homme. Certains auraient pu croire qu’il était devenu quelqu’un dénoué de tous les sentiments qui pouvaient le caractériser d’être humain, mais ce n’était pas le cas. Ses ressentis étaient simplement enfouis au plus profond de lui-même et il avait choisis de les ignorer tous. Tous sauf la colère et la tristesse. Ces deux-là étaient son moteur et il s’en servait pour avancer. Il refusait de se laisser aller au désespoir ou au manque cruel qu’il ressentait chaque secondes. S’il se laissait submerger par ces deux sentiments, il serait cloué sur place par les larmes et ne pourrait pas accomplir sa vengeance. Et cela, il en était absolument hors de question. Duncan devait mourir de sa lame. Et seulement une fois ceci accompli, il pourrait véritablement faire son deuil, ou alors, mourir. Parce que Selphir n’avait plus aucune raison de vivre. La seule chose qui l’empêchait encore de se laisser aller à la faucheuse, c’était bel et bien la vendetta dans laquelle il s’était lancé.

Cela faisait donc près d’un mois que l’ancien forgeron avait quitté sa ville natale et qu’il parcourait le Gondor. Il ballottait de villages en villages, de cités en cités, accomplissant parfois une tâche pour le compte de quelqu’un, moyennant finances, cherchant souvent des informations à propos de Duncan sans rien trouver de concret. Parfois, il s’arrêtait dans une auberge et prenait une chambre. Il restait deux jours, puis repartait, et ainsi de suite. Il n’avait plus d’attaches, il n’était motivé que par la vengeance et n’avait aucune intention de baisser les bras. Et ce fut alors qu’un jour, il s’était arrêté dans un village, qu’il accepta une nouvelle mission. Il était arrivé plutôt tard dans la soirée et s’était rendu à l’auberge du coin. A l’intérieur, toute une foule était autour d’un homme plutôt bedonnant. Il avait des vêtements de bonne facture et semblait riche. Il avait de bonnes grosses joues rouges et les sourcils froncés. Il se trouvait debout devant sa table et haranguait la foule, une pinte de bière à la main.

« Je vous le dis ! Je ne peux laisser cette voleuse s’en tirer aussi facilement ! Cette sorcière a usé de ses charmes pour m’amadouer et pour tout me dérober ! » - cria-t-il, approuvé par la foule.

« Ouais, bien dit ça m’sieur Brolgar ! Ce genre de sorcières, faut les brûler ! »

« Parfaitement !! » - scanda la foule.

« C’est pour cette raison que je donneras une grosse somme d’argent à toute personne qui sera capable de me ramener sa tête ! »

Selphir arqua un sourcil et se fraya un chemin parmi la foule, n’hésitant pas à les bousculer et se fichant bien de leurs protestations.

« Comment pourrez-vous remettre une grosse somme d’argent à celui qui vous ramènera sa tête, si cette sorcière vous a tout dérobé ? » - demanda Selphir en levant le nez vers ce noble.

Ledit Brolgar arqua un sourcil et descendit de la table, non sans difficulté.

« Ca mon jeune ami, ce n’était qu’une façon de parler. Par chance, elle ne m’a pas tout volé. Mais elle m’a dérobé un coffre qui appartenait à ma pauvre mère décidée, et...Oh par les dieux, que j’y tenais à cet héritage... » - sanglota-t-il.

« Et vous ne pensez pas que vous ramener ce coffre sera plus judicieux que de la tuer ? A la limite, je peux vous ramener sa main. »

« Et comment pourrais-je être sûr que ce sera bien sa main ?! Non ! Cette sorcière mérite la mort ! Elle a charmé mes deux gardes avec de très puissants sorts avant de les tuer ! Ces gardes étaient comme de ma famille ! Je ne peux pas la laisser s’enfuir comme ça ! »- s’écria-t-il avant de regarder Selphir. - « Vous m’avez l’air d’être un bon gars vous, et vu tout votre attirail, de savoir vous battre ! Je vous donnerai 1000 pièces d’or si vous me rapportez sa tête !  Mon valet vous donnera son nom et sa description !»

1000 pièces d’or ? Cela faisait une bonne somme. Et s’il s’agissait véritablement d’une sorcière, peut-être que cette dernière pourrait user de ses sorts pour l’aider à retrouver Duncan ? En acceptant cette quête, il pourrait faire d’une pierre deux coups. Selphir accepta donc sans trop se poser de questions, grossière erreur, et il partit dès l’aube à la recherche de cette fameuse sorcière. D’après les indications qu’on lui avait remis, il su à peu près où elle avait pu s’enfuir. Il ne mit que quelques jours à retrouver sa trace et se lança à sa poursuite. Au bout de cinq autres jours, il arriva aux abords d’une forêt, attiré par une fumée qui s’échappait d’entre les arbres. D’après son pistage, habitué à pister les animaux, il semblait avoir trouvé cette sorcière. Sans attendre, il s’engouffra dans la forêt. Ce fut après trente minutes de marche qu’il s’arrêta net. Devant lui se trouvait deux jeunes hommes. Ils étaient bien armés et tentèrent de voler Selphir. De part son expérience du combat, il réussi à les mettre en déroute. Son cheval paniqua, hennissant et donnant des coups de sabot en l’air. Le vacarme que le combat faisait fit fuir les oiseaux et bientôt, les cris de douleur de Selphir se répercutèrent dans toute la forêt. En effet, en s’enfuyant, l’un des bandits lui décocha une flèche qui vint se planter dans son épaule. Le chasseur de primes s’écroula au sol, accablé par la douleur. Il commençait à voir trouble et soudainement, il distingua des pieds devant lui. Il leva les yeux en l’air et vit une femme aux longs cheveux bruns et à la peau halée : Sa cible. Toutefois, Selphir n’eut le temps de ne rien faire, car il sombra dans l’inconscience. Foutus bandits.

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Les gitans commencèrent à lever le camp pour se diriger plus au sud. L’avant-veille, Cármen avait eu quelques problèmes en ville, accusée à tort pour quelque chose qu’elle n’avait pas fait, ces tensions là menaçaient le groupe de gitans. Cela était très habituel, elle ne comptait plus nombre de fois où elle avait été sauvée in extremis de violences physiques, qu’elle avait été mise au pilori ou qu’elle avait failli être brûlée vive au bûcher. Cela résultait de sa différence de culture, les haradrims n’étaient pas bien vus par les gondoriens pour des causes se relatant aux faits des relations tendues entre les deux régions. Pourtant si Cármen n’était pas dans le harad c’était bien parce qu’il y avait une raison et les villageois ne préféraient pas le concevoir, les agresser pour les jeter hors de leurs terres était bien plus facile que de leur demander. Grand bien leur en fasse, même si cela attristait la jeune femme qui ne cherchait qu’à divertir et se faire un peu d’argent, elle s’était faite à l’idée que sa vie hors de ses terres natales ne serait jamais facile à moins de se sédentariser et de s’intégrer de manière plus officielle à village. Oh, ce n’était pas l’envie qui leur manquait si seulement ils n’étaient pas pestiférés. Rangeant ses quelques affaires, on entendit de l’agitation plus loin,  des brigands montaient la garde et semblaient avoir touché quelqu’un qui s’était rapproché. La gitane s’empressa alors d’aller voir de quoi il s’agissait et vit un homme seul, une flèche dans l’épaule. Pour elle il était clair qu’il ne représentait pas de réelle menace, ayant l’habitude de voir les chasseurs arriver en groupe.

Elle avait déjà soigné de nombreux étrangers, pourquoi ne ferait-elle pas la même chose avec lui ? Cármen approcha donc de l’homme sans hésiter plus longtemps, elle se pencha vers lui et découvrit sa blessure. Elle était affreuse et si elle n’agissait pas vite, il pouvait mourir. Dans ces moments là, la gitane en faisait une affaire personnelle. Levant les eux vers lui, une main rassurant sur le front de l’homme, elle le vit sombrer dans l’inconscience. Paniquée, la jeune femme demanda à son père qu’ils gardent le campement ici même afin qu’elle puisse s’occuper de lui. Il acquiesça, demanda aux autres gitans de ne pas remballer leurs affaires mais de rester sur leurs gardes. Il comprenait les motivations de sa fille quand lui-même lui avait enseigné de toujours aider lorsqu’elle le pouvait. Jusque là, cela n’avait pas empêché les gens du village de lui cracher dessus lorsqu’elle voulait se faire un peu d’argent en dansant dans la rue, mais la jeune femme ne perdait jamais espoir.

On lui apporta de l’eau, le nécessaire pour le soigner pendant qu’elle le recouvrait de couvertures et qu’elle glissait quelque chose sous sa tête pour lui donner plus de confort.

« Vous êtes complètement inconscients !! » Fit Cármen à l’attention des deux brigands que Taavi leur avait laissé pour leur protection.
« Il est peut être dangereux !! »
« Vous lui avez demandé ?!»
« Non… »

Exaspérée, la gitane leur demanda de partir, Taavi avait beau vouloir leur bien, il semblerait que ces deux là ne faisaient pas la différence entre la menace et le simple passage. Alors elle s’empressa de s’occuper de la blessure, commençant par retirer doucement la flèche pour venir compresser celle-ci, empêcher le sang de couler. Il avait eu de la chance, elle ne s’était pas trop enfoncée mais le choc avait provoqué son évanouissement. Elle avait l’espoir qu’il s’en sorte bien. La jeune femme continua de le soigner, passant de nombreuses minutes à ses côtés pour refermer sa blessure mais aussi lui faire un solide bandage après avoir appliqué plusieurs remèdes. Elle le fit déplacer afin qu’il se retrouve près du feu de camp et qu’il n’attrape pas froid. On lui avait là préparé une douillette couche et la gitane décida de rester à ses côtés pour guetter le moment où il se réveillerait. Puisque c’était eux qui lui avaient tiré dessus, le réveil menaçait d’être agité et alors, elle voulait être là pour le rassurer.

Cármen se sentait désolée, il allait sans doute avoir de la fièvre dans les heures à venir et déjà elle voyait sur son front perler des sueurs froides. C’était tout à fait normal, son corps se défendait. La gitane passa un linge humide et frais pour lui essuyer le front et aussi l’apaiser, une heure, peut être deux s’étaient écoulées et elle espérait qu’il ne tarde pas à se réveiller.

« Yasamina, peux tu me donner un bol de soupe et du pain pour lui ? Je pense qu’il va bientôt se réveiller. »

Sa consoeur acquiesça et s’exécuta. Un peu plus tard, lorsque l’homme montra des signes de réveil, Cármen se fit attentive et bienveillante afin de ne pas le brusquer au risque qu’il déchire les points qu’il lui avait fait.

« Tout va bien, vous êtes en sécurité et soigné. » Lui annonça t-elle doucement.

Kill the witch

Selphir n’eut le temps que d’entendre la sorcière se tourner vers les deux bandits et leur crier qu’ils étaient complètement inconscients, avant que sa tête ne commence à lui tourner et que sa vue ne se brouille. Puis, ce fut le trou noir. L’ancien soldat tomba dans les bribes de l’inconscience, accablé par la douleur cuisante qu’il ressentait à l’épaule. Bien sûr, il était habitué à se prendre des coups. Son corps était criblé de cicatrices, signe qu’il avait dû énormément guerroyer et subir de nombreuses attaques. Mais cela ne l’empêchait pas de ressentir de la douleur lorsqu’il se faisait toucher, ni son corps de subir des dégâts collatéraux. Personne ne pouvait résister à une flèche plantée dans le corps et ceux qui avaient l’arrogance de le dire, n’étaient que des menteurs qui devaient probablement fondre en larmes au moindre coup porté sur eux. Après tout, Selphir n’était qu’un homme, il était donc compréhensible qu’il ne puisse rester debout avec un projectile planté dans son épaule. Il n’avait plus qu’à espérer qu’il ne meurt pas, car cela, il ne se le pardonnerait jamais, par tous les dieux.

Le temps passa particulièrement vite. Quand Selphir ouvrit les yeux, il n’eut pas tout de suite conscience du temps qui avait passé. Il avait la sensation qu’il ne s’était déroulé que quelques secondes. En effet, il avait l’impression qu’à peine évanoui, il s’était éveillé. Mais à la vision du ciel qui était un peu plus sombre et de la teinte bleue, qu’il prenait souvent, qui commençait à disparaître derrière un voile orangé, Selphir compris sans mal qu’il devait être en fin d’après-midi. Il avait pisté cette sorcière durant plusieurs jours, cette dernière étant en déplacement, il était normal qu’il ne la trouve pas immédiatement. Et lorsqu’il était arrivé à l’orée de cette forêt, l’après-midi n’avait commencé que depuis une ou deux heures.  

Le voyageur cligna des yeux à plusieurs reprises, ayant besoin de quelques secondes pour que ses yeux s’accommodent. La première chose qu’il vit, fut le ciel, mais tout de suite après, il remarqua Càrmen, la jeune femme qu’il devait tuer. Elle était assise à ses côtés et passait un chiffon humide sur son front. Suite à la douleur qu’il ressentait, Selphir comprenait qu’il devait avoir de la fièvre. Réaction normale du corps qui cherche à se défendre lorsqu’il est attaqué de la sorte. Il ressentait une géhenne, mais elle semblait plus légère qu’avant son évanouissement. Cela signifiait alors que la sorcière l’avait probablement soigné. Il fronça les sourcils, ne comprenant pas ce qui avait poussé cette dernière à lui venir en aide, étant donné qu’elle était censée être une voleuse mais aussi, comme la pire des femmes sans cœur, d’après l’homme qui souhaitait la voir morte.

« Tout va bien, vous êtes en sécurité et soigné. » - lui dit-elle doucement.

Selphir tourna lentement la tête vers elle et l’observa. Elle avait un visage doux, et des yeux d’un bleu profond, presque hypnotisant. Elle avait l’allure d’une véritable gitane. Des vêtements colorés, des cheveux noirs, et une peau halée. Selphir la trouvait magnifique et il avait un peu de mal à croire qu’une femme à la voix aussi douce et au regard si avenant, pouvait être accusée d’avoir tué deux gardes et d’avoir volé un coffre. Toutefois, il restait sur ses gardes. Le valet de ce riche homme lui avait précisé qu’il s’agissait d’une sorcière et qu’elle pouvait user de ses charmes pour ensorceler les hommes et les mettre à sa botte. Bien que cela pouvait être une exagération, Selphir préférait rester vigilent. Depuis le drame qu’il avait vécu, il avait appris à ne pas accorder sa confiance à n’importe qui aussi facilement. Il avait déjà donné une première fois, il était hors de question qu’il ne se laisse avoir une seconde fois. Il avait beaucoup trop perdu la fois antérieure. Cette Càrmen pouvait très bien cacher son jeu et avoir compris que si Selphir était là, c’était bel et bien pour la tuer.

Probablement qu’elle l’aidait dans le but qu’il ait à lui devoir la vie et perde donc sa légitimité de rapporter sa tête à ce riche homme. Et en soit, si c’était le cas, alors Selphir accepterait. Il était un homme d’honneur, et si quelqu’un lui sauvait la vie, il ne pouvait plus le trahir et lui vaudrait une dette qu’il lui faudrait payer pour enfin ne plus avoir rien à lui devoir. C’était une chose très importante à ses yeux qui visiblement, était trop souvent oubliée par les différentes races qui peuplaient la Terre du Milieu. Selphir mettait l’honneur à une place extrêmement importante et si Duncan n’avait pas tué Aylanna, il ne savait pas s’il aurait tenté de l’arrêter en apprenant qu’il cherchait à trahir leur roi. Car oui, aux yeux de l’ancien soldat, quand quelqu’un vous sauvait la vie, tant que vous n’aviez pas payé cette dette, vous ne pouviez pas vous positionner contre lui.

Méfiant, Selphir ne répondit rien à Càrmen et chercha discrètement sa dague qui devait normalement être située à sa taille. Mais il ne trouva rien. Gardant son sang-froid, il chercha tout de même ses armes et son cheval, craignant qu’on ne l’ait désarmé pour le voler, lui aussi. Mais il trouva Aelius, son destrier, attaché à un arbre non loin de lui et toutes ses affaires accrochées à sa selle.

« Je vous remercie de m’avoir soigné. » - répondit finalement Selphir d’une voix monotone.

Il essaya de se redresser, mais il ressentit soudainement une vive douleur dans son épaule. Poussant un gémissement de douleur, il se rallongea aussitôt et porta sa main sur sa blessure, constatant par la même occasion qu’elle était bandée et qu’il était torse-nu. Il n’aimait pas ça, il avait la sensation d’être vulnérable et avec cette plaie qui le maintenait allongé, il ne pourrait pas bouger immédiatement, ce qui le ralentissait dans sa quête. S’il retrouvait ces foutus bandits, il leur ferait regretter cette attaque.

« Vous êtes Càrmen, n’est-ce pas ? » - demanda Selphir en tournant la tête vers la supposée sorcière. Quitte à devoir attendre que sa blessure aille un peu mieux, autant essayer d’en savoir plus à propos de cette soi-disant voleuse. – « Il paraît que vous avez dérobé un coffre rempli de richesse à un riche noble et tué ses deux gardes. Tout cela grâce à votre magie. Pourtant, vous ne me semblez pas ressembler à une sorcière. Ou alors, vous cachez bien votre jeu. »

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La gitane prit garde qu’il ne fasse pas de mouvement brusque à son réveil. Tout en essayant de le rassurer, elle lui offrit un fin sourire et finalement il retrouva ses esprits. Il semblait un peu perdu, le temps que tout se remette en place, il constaterait bien vite que l’on avait pris soin de lui et que son cheval avait même eu droit à de bons traitements. Il avait de l’eau, de la nourriture et des gitans s’étaient assurés qu’il ne soit pas en panique face à ces étrangers. Finalement, le calme régnait sur le campement. La jeune femme ajouta des plantes médicinales à sa soupe, veillant à ce que celle-ci ne soit pas trop amère en utilisant une cuillère en bois pour y gouter. La voix de l’homme l’interpella alors que celui-ci entreprit de la remercier.

« C’est les dieux qu’il faut remercier, eux seuls ont le pouvoir de retirer la vie ou pas, je n’ai pas fait grand-chose de plus... » Fit-elle remarquer avec un joli sourire.

La gitane l’avait soigné, le reste n’était pas de son pouvoir. Dans tous les cas il se débrouillait bien et la fièvre d’ici deux jours serait partie si cela continuait en sa faveur. Il allait rester parmi eux le temps de récupérer, même si cela était dangereux pour eux de rester dans les parages, elle ne pouvait se résoudre de l’abandonner là. Si toutefois cela devenait trop risqué, ils l’emmèneraient avec eux afin que la jeune femme puisse veiller sur lui. Il ne semblait pas très à l’aise avec elle, pour des raisons qu’elle ignorait et dont elle ne préférait pas penser dans le cas où les brigands aient raison à son sujet et qu’il était potentiellement venu pour sa tête. Lorsqu’il tenta de se redresser, Cármen l’aida à la tâche afin qu’il ne se fasse pas trop mal et qu’il puisse quand même être en mesure de boire sa soupe quand elle aurait fini de la préparer. La jeune femme rajusta la couverture sur lui dans le but qu’il n’attrape pas froid.

Enfin l’homme haussa de nouveau la voix mais cette fois ci, il interpella la gitane qui cessa tout mouvement pour reporter son regard sur lui. IL lui demandait si elle était bien Cármen, alors la rumeur lui était parvenue aux oreilles. Cármen ne savait pas si elle devait répondre à cette question mais au vu de l’expression qu’elle tirait, il aurait vite fait de comprendre qu’il s’agissait bien d’elle. Avec ce qu’il s’était passé au village, la jeune femme redoutait qu’il soit un chasseur de primes venu pour la tuer et cet homme eu d’ailleurs vite fait de confirmer ses doutes lorsqu’il lui évoqua cette rumeur même dont elle était prise pour cible. La jeune femme gardait son sang froid, découvrant qu’il y avait un véritable complot autour d’elle et demanda à l’homme de ne pas parler trop fort sans quoi les brigands l’auraient tout de suite tué puisqu’il pouvait éventuellement présenter une menace pour elle.

Cármen ne pu s’empêcher de retenir un rire, ils ne savaient vraiment plus quoi inventer pour effrayer la populace et les monter contre les voyageurs dans leur genre. La gitane offrit au gondorien le bol de soupe assez pauvre en matières mais qui aurait de nombreux bienfaits pour son état.

« Si j’avais la capacité de faire de la magie pour soutirer de l’or, je vivrais dans une grande demeure, j’aurais des domestiques, de belles robes, je mangerais de la nourriture saine et je n’aurais jamais froid… » Commença t-elle tout en lissant les pans de sa jupe pour retirer les chutes d’herbe médicinale

Ca lui donnait bien envie ce genre de quotidien, hélas la vie n’était pas aussi généreuse avec elle, il n’avait qu’à observer les alentours pour le constater.

« Regardez donc à quoi ressemble mon royaume…» Fit-elle en lui désignant sa roulotte en bois du doigt.

Elle n’avait pas de terres, elle n’avait pas de confort, et ils étaient chassés la plupart du temps, ils n’avaient qu’un feu de camp pour tous se réchauffer et vivaient de ce que la terre voulait bien leur offrir quand ils n’avaient pas les moyens de commercer. Toutefois ils ne manquaient de rien, ils n’avaient besoin que de leur bonne entente, de leur solidarité.

« J’hésite à construire une fontaine juste là, avec cet or, qu’en pensez vous ? »  Ajouta t-elle avec un accent solaire toujours aussi approximatif dans son parler westron.

Au lieu de démentir catégoriquement, la gitane préférait le prendre sur le ton de l’humour et que ce chevalier comprenne que c’était parfaitement grotesque de l’accuser d’avoir usage de sorcellerie. Car si c’était vraiment le cas, elle en aurait déjà fait usage et ne vivrait pas dehors.