Les renforts tant attendus | Dol Amroth | ft. Thengel

L’attaque semblait ne jamais avoir de fin. Mon épée était couverte de sang, et je ne comptais plus les heures depuis que la bataille avait commencé. Attention ! Ma voix me semble fatiguée et je tire en arrière un de mes soldats pour lui faire éviter les débris d’un auvent qui s’effondre. Les pirates sont partout et leurs sabres acérés n’ont d’égaux que leur cruauté à toute épreuve. Mon bras me brûle tellement il n’en peut plus de parer et de contrattaquer. Ma main gauche est serrée sur la garde de mon épée depuis si longtemps que je me demande si je vais réussir à la rouvrir un jour. Bouge de là ! J’attrape mon écuyer par le bras et le secoue. Autour de nous, les flèches pleuvent depuis le navire. Mais comment font-ils ? Comment font ils pour être aussi nombreux ? Pour avoir autant de munitions ? Pour attaquer sans relâche. Je t’avais dit de ne pas venir ! Il semble confus et baisse les yeux. Je le relâche et passe ma main sur mon visage couvert de sueur, de suie et de sang. Un incendie s’est déclaré au bout des docks, et nous n’avons pas réussi à le maitriser avant qu’il n’ait fait des dégats. Ils sont là messire, me répond-il en soutenant mon regard. Qui ça ? Le Seigneur Thengel et les renforts. Ils discutent avec votre Père. Un rire monte à ma poitrine. Ils discutent ? On se fait attaquer, la bataille est presque perdue, et ils discutent ?

Mais, un cri brutal d’attaque retentit dans mon dos au moment où je m’apprête à répondre vertement à l’écuyer. Mon regard sombre se tourne vers les attaquants, un sourire monte à mes lèvres On donne le dernier assaut ! Mes hommes sont dans le même état que moi, mais cette arrivée soudaine de renforts leur donne un regain d’énergie. Leurs armes se relèvent, leurs cris de rage viennent rejoindre ceux des nouveaux venus, et ensemble, nous remettons enfin les pirates à la mer. Cette dernière attaque n’aura duré que quelques minutes. Les pirates s’enfuient, qui en nageant, qui en ramant sur les barques qu’ils ont amenées avec eux, sans même attendre leurs compagnons. C’est terminé.

Tout en essuyant mon épée sur la chemise d’un mort, je laisse le commandement à mon second, et cherche dans la foule mon écuyer, qui n’a pas réellement bougé. Visiblement, son message n’était pas encore totalement délivré, sans quoi il serait déjà reparti à la demeure de Père. Quoi encore ? Je suis fatigué et pas vraiment aimable. Là, j’aurais besoin d’un bain, de dire un dernier mot de félicitations à mes hommes et de retourner dormir quelques heures. Jusqu’au dîner, au moins. L’attaque m’a tirée du lit au milieu de la nuit, après tout. Votre Père vous demande de le rejoindre dès que possible, pour vous présenter au prince Thengel et faire le débriefing de la bataille. Ben voyons. Et je dors quand, moi ? Acide, je ne réponds cependant rien. Mon père est le Prince de la cité, mon mentor et celui à qui j’aimerais ressembler un jour ou l’autre. Je n’ai donc d’autre choix que de répondre à sa requête. Je désigne les hauteurs de la cité, là où se trouve le manoir dans lequel j’ai grandis et je suis mon écuyer dans les ruelles jusqu’à arriver dans la salle où je sais que Père m’attendra. Je n’ai pas pris le temps de me changer, et je suis toujours vêtu de ma tunique noire en cuir, tâchée de sang. Mes cheveux noirs sont en bataille, et mon visage pas vraiment propre. Père. Seigneur Thengel. Je m’avance au travers de la salle jusqu’à la table et, après les salutations d’usage, me laisse tomber plus que je ne m’assois sur l’un des sièges. Vos troupes ont été d’une aide indispensable, Thengel. Merci d’avoir répondu à notre appel.

L’épuisement me gagne réellement à la seconde où mes fesses touchent le siège. Je ferme une seconde les yeux pendant que Thengel parle et un sourire amer monte à mes lèvres. Il est vrai que le temps que nos messagers passent les montagnes et arrivent jusque Minas Thirit, qui doit elle-même faire face aux orcs de manière plus ou moins régulière si j’en crois les rumeurs. Le délai pour voir arriver les renforts est normal, même si plusieurs batailles ont eu lieu depuis. Nous faisons tout pour que Dol Amroth tienne, mais nos hommes sont fatigués, épuisés. Ils n’en peuvent plus d’être tirés du lit au milieu de la nuit par les cloches de la ville pour combattre ces fantômes qui arrivent en nombre et qui, surtout, n’ont aucuns scrupules. Coups bas, dans le dos, ils se battent comme des chiens et n’hésitent en rien à frapper là où ça fait mal. Il n’empêche qu’il est agréable de se sentir soutenus… L’arrivée de vos troupes a permis de changer le cours de la bataille… Un rictus déforme mes traits et je hausse les épaules, lassé. J’ai bien cru que ma dernière heure allait venir dans cette bataille. Plusieurs fois, même. Et, je n’ai vu mon salut que grâce à mes hommes et à leur loyauté sans faille. L’un d’entre eux a pris un coup d’épée dans le bras à ma place. Un autre a paré un coup dans mon dos qui m’aurait certainement valu de passer quelques semaines dans un lit. Non, vraiment, mes hommes sont les meilleurs. Mes hommes ont su être là pour moi. Il est difficile de se faire une idée pour le moment… Le combat a été plus que rude. Il y aura beaucoup de blessures à soigner pour nos guérisseurs, mais pour les pertes… Je ne sais pas. Je n’ai pas eu le temps de m’en rendre compte. Je jette alors un regard à mon père qui n’a pas dit un seul mot. Il m’observe simplement et un sourire nait sur ses lèvres lorsqu’il me voit. J’ai l’impression de voir une lueur de fierté dans le regard de celui qui est mon modèle envers et contre tout.

Je relâche néanmoins le regard de Père pour me tourner à nouveau vers Thengel et tiens à l’avertir d’une chose : Vous devez cependant prendre en compte que les pirates sont très nombreux. Il arrive fréquemment qu’il y ait plusieurs attaques dans la journée. Je ne sais si vos hommes ont l’habitude de ce genre d’attaques éclairs, mais ils vont devoir apprendre à se reposer et à soigner leurs blessures comme ils le peuvent. Si vous restez quelques temps, néanmoins. Je prends une seconde pour reprendre ma respiration avant de continuer : Nous enverrons bien sûr des messagers régulièrement à l’intendant pour le tenir au courant de la situation… Cependant, nous espérons pouvoir détruire définitivement les navires à un moment ou à un autre. Sinon, d’autres cités de la baie subiront le même sort…